Cass. com., 7 juillet 2004, n° 01-01.452
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tricot
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 2000), que dans le cadre de la liquidation judiciaire de la société Félix Potin, la cession d'un fonds de commerce exploité dans des locaux appartenant à la société Assurances mutuelles de France (société AMF) et donnés à bail à la société Félix Potin, a été ordonnée par le juge-commissaire ;
qu'avisée du projet de cession par le notaire instrumentaire, la société AMF a fait connaître son opposition à ce projet, au motif que le liquidateur était réputé avoir renoncé au bail commercial, faute d'avoir levé l'option sur la poursuite du bail qu'elle lui avait notifiée par lettre recommandée ; que le liquidateur, après avoir, en vain, fait sommation à la société AMF de produire l'accusé de réception de cette lettre, l'a mise en demeure d'assister à la signature des actes de cession ; que celle-ci est finalement intervenue par acte notarié, hors la présence de la société AMF et lui a été signifiée par acte d'huissier ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société AMF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en inopposabilité de la cession du fonds de commerce et du bail commercial, alors, selon le moyen, qu'elle soutenait dans ses conclusions d'appel que le fonds de commerce litigieux n'existait plus, faute d'avoir été exploité depuis juin 1994, et qu'il était dépourvu de toute clientèle, celle-ci ayant été invitée à s'approvisionner au magasin Félix Potin voisin, situé à 200 mètres de distance, et que, dans ces conditions, la cession intervenue ne pouvait être que contraire aux clauses du bail commercial, lequel ne permettait la cession du droit au bail qu'à l'acquéreur du fonds de commerce ; qu'en ne recherchant pas si, à l'époque de la vente, le fonds de commerce existait encore, la cour d'appel a violé l'article L. 622-13 du Code de commerce ;
Mais attendu que la vente de gré à gré d'un élément d'actif du débiteur en liquidation judiciaire, ordonnée par le juge-commissaire sur le fondement de l'article 156 de la loi du 25 janvier 1985, devenu l'article L. 622-18 du Code de commerce, est parfaite dès l'ordonnance, sous la condition suspensive que la décision acquière force de chose jugée, d'une part , et de l'accomplissement des actes matériels de cession du bien en cause, d'autre part ; qu'ayant relevé, d'un côté, que l'ordonnance du juge-commissaire ordonnant la cession avait acquis la force de chose jugée et, de l'autre, que la société AMF, qui ne justifie pas la réalité de la mise en demeure invoquée par elle, a été invitée à assister à la signature de l'acte de cession lequel a été reçu en la forme authentique, dénoncé avec remise d'une grosse à la société AMF par acte extrajudiciaire, puis a été enregistré et fait l'objet d'une publication, la cour d'appel, sans avoir à répondre au moyen invoqué par le grief, a exactement retenu que la cession du fonds de commerce ne saurait être remise en cause par cette dernière ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que la société AMF fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande en résiliation du bail, la liant à M. X..., alors, selon le moyen, que la compensation, effectuée entre les dettes de la société Félix Potin et la créance en restitution du dépôt de garantie était opposable au cessionnaire du bail qui était, dés lors, tenu de remettre un nouveau dépôt de garantie, pour se conformer aux clauses du bail ; qu'en refusant de faire droit à la demande de la société AMF, l'arrêt attaqué a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu que la compensation s'opère de plein droit lorsque deux personnes se trouvent débitrices, l'une envers l'autre, de sommes liquides, certaines et exigibles ; que la cour d'appel, après avoir relevé que la créance détenue par le preneur sur le bailleur au titre du dépôt de garantie ne deviendra exigible que dans les conditions prévues par le bail, soit en fin de jouissance, après déménagement et remise des clefs, a exactement retenu que la compensation dont se prévaut la société AMF n'est pas opposable au cessionnaire du bail ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.