Cass. com., 5 mars 1985, n° 82-16.778
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Baudoin
Rapporteur :
M. Perdriau
Avocat général :
M. Cochard
Avocats :
Me Boullez, Me de Grandmaison
SUR LE PREMIER MOYEN DU PREMIER POURVOI : ATTENDU QUE LA SCI FAIT GRIEF A LA COUR D'APPEL DE S'ETRE PRONONCEE SANS AVOIR PROCEDE A LA COMMUNICATION DE L'AFFAIRE AU MINISTERE PUBLIC EN VIOLANT AINSI, SELON LE POURVOI, L'ARTICLE 425 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE ;
MAIS ATTENDU QUE LE LITIGE OPPOSANT LES PARTIES NE CONCERNAIT QUE LES CONSEQUENCES DE LA RESILIATION DU CONTRAT DE CONSTRUCTION AYANT UNI LA SCI A LA SOCIETE CIB ET LES PORTEES RESPECTIVES D'UN CAUTIONNEMENT ET D'UN NANTISSEMENT, ET NON D'UNE PROCEDURE VISEE A L'ARTICLE 425-2° DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN NE PEUT ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN DU PREMIER POURVOI, PRIS EN SES DEUX BRANCHES : ATTENDU QUE LA SCI REPROCHE EN OUTRE A L'ARRET D'AVOIR ADMIS LA COMPENSATION ENTRE SA CREANCE ENVERS LA BANQUE, CAUTION SOLIDAIRE DE LA SOCIETE CIB, ET LA CREANCE QUE LA SOCIETE CIB DETENAIT ENVERS ELLE-MEME ALORS, SELON LE POURVOI, D'UNE PART, QU'EN ADMETTANT AINSI LA COMPENSATION, L'ARRET A VIOLE L'ARTICLE 1294 ALINEA 3 DU CODE CIVIL AUX TERMES DUQUEL LE DEBITEUR SOLIDAIRE NE PEUT OPPOSER LA COMPENSATION DE CE QUE LE CREANCIER DOIT A SON CODEBITEUR, CE TEXTE ETANT APPLICABLE AUX CAUTIONS SOLIDAIRES EN VERTU DE L'ARTICLE 2021 DU CODE CIVIL, ET ALORS, D'AUTRE PART, QUE LA COMPENSATION NE PEUT INTERVENIR AU PREJUDICE DE LA MASSE QUE SI LES DEUX CREANCES RECIPROQUES SONT UNIES PAR UN LIEN DE CONNEXITE ET RESULTENT D'UN MEME CONTRAT ;
QUE TEL N'ETAIT PAS LE CAS EN L'ESPECE DES LORS QUE LA CREANCE DU MAITRE DE Y... AVAIT POUR OBJET LE REMBOURSEMENT D'UNE AVANCE ET TROUVAIT SA SOURCE DANS UN ACTE DE CAUTIONNEMENT, TANDIS QUE LA CREANCE DE L'ENTREPRISE, NEE DU CONTRAT D'ENTREPRISE, ETAIT RELATIVE AU PAIEMENT DE TRAVAUX ;
QU'EN ADMETTANT LE JEU DE LA COMPENSATION ENTRE CES DEUX CREANCES, LES JUGES DU FOND ONT VIOLE L'ARTICLE 13 DE LA LOI DU 13 JUILLET 1967 ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QU'IL NE RESULTE NI DES CONCLUSIONS, NI DE L'ARRET, QUE LA SCI AIT SOUTENU DEVANT LA COUR D'APPEL QUE LE CARACTERE SOLIDAIRE DU CAUTIONNEMENT ACCORDE PAR LA BANQUE S'OPPOSAIT A CE QUE CELLE-CI PROFITE DE LA COMPENSATION DONT ETAIT SUSCEPTIBLE DE BENEFICIER LE DEBITEUR PRINCIPAL ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE L'ARRET A FAIT JOUER LA COMPENSATION ENTRE LES CREANCES RECIPROQUES QUI DECOULAIENT POUR LE MAITRE DE Y... ET POUR L'ENTREPRENEUR DU MARCHE PASSE ENTRE EUX, ET NANTI PAR LA BANQUE, ET NON PAS ENTRE LA CREANCE DE LA SOCIETE CIB SUR LA SCI ET CELLE DE LA SCI SUR LA BANQUE ;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN EST, EN SA PREMIERE BRANCHE, IRRECEVABLE COMME NOUVEAU ET MELANGE DE FAIT ET DE DROIT, ET QU'IL MANQUE EN FAIT EN SA SECONDE BRANCHE ;
SUR LE TROISIEME MOYEN DU PREMIER POURVOI : ATTENDU QUE LA SCI FAIT AU SURPLUS GRIEF A L'ARRET D'AVOIR FIXE LA CREANCE DE LA SOCIETE CIB A SON EGARD APRES COMPENSATION ENTRE DIVERS POSTES DU COMPTE DE TRAVAUX, AU MOTIF QUE, DANS UN DIRE ADRESSE A UN EXPERT X..., LE MAITRE D'Z... REPRESENTANT LE MAITRE DE Y... AVAIT AFFIRME QUE SON MANDANT ACCEPTERAIT DE FAIRE SON AFFAIRE PERSONNELLE DE LA REFECTION D'UNE CERTAINE MALFACON, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE LA RENONCIATION A UN DROIT NE SE PRESUME PAS ;
QU'EN PARTICULIER ELLE NE SAURAIT RESULTER D'UNE LETTRE DANS LAQUELLE LE MAITRE DE Y... SE BORNAIT A INDIQUER QU'IL FERAIT SON AFFAIRE PERSONNELLE DE CERTAINES MALFACONS, EXPRESSION SIGNIFIANT QU'IL REMEDIERAIT A CES MALFACONS SANS IMPIQUER AUCUNE RENONCIATION A DES RECOURS JURIDIQUES CONTRE L'ENTREPRENEUR ;
QUE LA RENONCIATION NE POUVAIT PAS PLUS S'INDUIRE DE CE QU'ELLE AURAIT ETE UNE COMPENSATION A L'OCTROI DE PENALITES DE RETARD AU MAITRE DE Y..., PUISQUE CES PENALITES ETAIENT DUES EN VERTU DU CONTRAT ET NE POUVAIENT ETRE NEGOCIEES ;
QU'EN DEDUISANT UNE RENONCIATION DE CES CIRCONSTANCES, LES JUGES D'APPEL N'ONT PAS DONNE DE BASE LEGALE A L'ARRET ET ONT VIOLE L'ARTICLE 1134 DU CODE CIVIL ;
MAIS ATTENDU QUE L'ARRET AYANT RELEVE QUE L'ACCEPTATION DU MAITRE DE Y... DE FAIRE SON AFFAIRE PERSONNELLE D'UN PROBLEME TECHNIQUE POSE PAR DIVERS DESORDRES AVAIT ETE DONNEE DANS LE CADRE D'UN ACCORD GLOBAL, CE DONT IL RESSORTAIT QU'ELLE N'ETAIT PAS EQUIVOQUE, LA COUR D'APPEL A PU EN DEDUIRE QUE LA SCI AVAIT RENONCE A SE PREVALOIR DE SA CREANCE EVENTUELLE SUR LA SOCIETE CIB RELATIVEMENT A CES DESORDRES ;
QUE LE MOYEN N'EST DONC PAS FONDE ;
SUR LE QUATRIEME MOYEN DU PREMIER POURVOI : ATTENDU QUE LA SCI REPROCHE DU SURCROIT A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECIDE QUE, POUR LE MONTANT CORRESPONDANT A DES MALFACONS ET PENALITES DE RETARD N'AYANT DONNE LIEU A AUCUNE PRODUCTION DE SA PART, LA CREANCE AINSI DETERMINEE SERAIT ATTRIBUEE EN PAIEMENT A LA BANQUE AU MOTIF QU'IL ETAIT CERTAIN QUE LA SCI NE POURRAIT SE FAIRE RELEVER DE LA FORCLUSION PAR ELLE ENCOURUE, EN SORTE QUE LE SYNDIC SERAIT FONDE A RECOUVRER CONTRE ELLE LEDIT MONTANT, ALORS, SELON LE POURVOI, QUE LA COUR D'APPEL, QUI N'ETAIT SAISIE D'AUCUNE DEMANDE DE RELEVE DE FORCLUSION, ETRANGERE AU LITIGE, NE POUVAIT PREJUGER DE LA SOLUTION A INTERVENIR ;
QU'EN SE FONDANT POUR DETERMINER LE MONTANT DE LA CREANCE, OBJET DU GAGE, SUR L'ISSUE EVENTUELLE D'UNE DEMANDE DE RELEVE DE FORCLUSION, LA COUR D'APPEL A STATUE PAR UN MOTIF HYPOTHETIQUE ET VIOLE L'ARTICLE 455 DU NOUVEAU CODE DE PROCEDURE CIVILE ;
MAIS ATTENDU, QU'APRES AVOIR ENONCE QUE LE PRINCIPE DE LA COMPENSATION DONT LA SCI SE PREVALAIT ENTRE SA DETTE ENVERS LA SOCIETE CIB ET SA CREANCE CONSECUTIVE AUX MALFACONS ET AUX PENALITES DE RETARD SUPPOSAIT QUE, POUR CETTE CREANCE, LA SCI AIT PRODUIT AU PASSIF DE LA SOCIETE CIB, L'ARRET RELEVE QUE LE MAITRE DE Y... NE JUSTIFIAIT, NI AVOIR PRODUIT, NI AVOIR ETE RELEVE DE LA FORCLUSION ;
QUE PAR CETTE SEULE CONSTATATION, LA COUR D'APPEL A JUSTIFIE SA DECISION DU CHEF CRITIQUE, ABSTRACTION FAITE DU MOTIF, SURABONDANT, QUE DENONCE LE MOYEN ;
QUE CELUI-CI EST DONC INOPERANT ;
SUR LE MOYEN ADDITIONNEL DU PREMIER POURVOI ET SUR LE MOYEN UNIQUE PRIS EN SES DEUX BRANCHES, DU SECOND POURVOI : ATTENDU QU'IL EST ENFIN FAIT GRIEF A L'ARRET D'AVOIR ORDONNE L'ATTRIBUTION EN PAIEMENT A LA BANQUE DE LA CREANCE DE LA SOCIETE CIB SUR LA SCI ALORS, D'UNE PART, SELON LE POURVOI DU SYNDIC DE LA LIQUIDATION DES BIENS DE LA SOCIETE CIB, QUE LA COUR D'APPEL NE POUVAIT, SANS SE CONTREDIRE, POSER EN PRINCIPE QUE L'ATTRIBUTION JUDICIAIRE DU GAGE RECLAMEE EN VERTU DE L'ARTICLE 2078 DU CODE CIVIL N'EST PAS SUBORDONNEE A L'EXISTENCE D'UN DROIT DE RETENTION ET EST INDEPENDANTE DES REGLES CONCERNANT L'ORDRE DANS LEQUEL S'EXERCENT SUR LE PRIX LES DIVERS PRIVILEGES, ET ATTRIBUER A UN BANQUIER NANTI SUR UN MARCHE DE TRAVAUX PRIVES LA CREANCE NEE DE CE MARCHE, L'APPLICATION DE L'ARTICLE 2078, QUI N'EST EXCLUE QUE SUR LE FONDEMENT DE L'OPPOSITION INHERENTE AUX MARCHES PUBLICS, DEVANT ETRE ADMISE, A CONTRARIE, POUR LES MARCHES DE TRAVAUX PRIVES ;
QU'EN ATTRIBUANT A LA BANQUE LA CREANCE RESULTANT DU MARCHE EN CAUSE, LA COUR D'APPEL A VIOLE L'ARTICLE 2078 DU CODE CIVIL, ET ALORS, D'AUTRE PART, SELON LE POURVOI DU SYNDIC COMME SELON CELUI DE LA SCI, QU'EN L'ABSENCE DE DROIT DE RETENTION, LE CREANCIER BENEFICIANT D'UN DROIT DE NANTISSEMENT SUR UNE CREANCE NE PEUT SE FAIRE ATTRIBUER JUDICIAIREMENT LA CREANCE EN MECONNAISSANCE DES DROITS DES CREANCIERS PRIVILEGIES ;
QUE L'ARRET A AINSI VIOLE L'ARTICLE 2096 DU CODE CIVIL ;
MAIS ATTENDU, D'UNE PART, QUE LE GRIEF DE CONTRADICTION MIS EN Z... EST IRRECEVABLE COMME CONCERNANT, NON PAS LES FAITS RELEVES PAR LA COUR D'APPEL, MAIS LES CONSEQUENCES JURIDIQUES QUE CELLE-CI EN A TIREES ;
ATTENDU, D'AUTRE PART, QUE LE CREANCIER GAGISTE POUVANT, A DEFAUT DE PAIEMENT, FAIRE ORDONNER EN JUSTICE QUE LE BIEN GREVE LUI SOIT ATTRIBUE JUSQU'A DUE CONCURRENCE, C'EST A BON DROIT QUE LA COUR D'APPEL A DECIDE, QU'A DEFAUT DE DISPOSITION CONTRAIRE, L'ATTRIBUTION JUDICIAIRE ETAIT OFFERTE AU CREANCIER TITULAIRE D'UN NANTISSEMENT SUR MARCHE DE TRAVAUX PRIVES ;
D'OU IL SUIT QUE LES MOYENS NE SONT PAS FONDES ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE TANT LE POURVOI N° 82-16.778 QUE LE POURVOI N° 83-12.223.