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Décisions

Cass. com., 12 avril 1988, n° 86-11.736

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Baudoin

Rapporteur :

M. Patin

Avocat général :

M. Cochard

Avocats :

Me Foussard, SCP Le Prado

Paris, du 10 janv. 1986

10 janvier 1986

Sur le moyen unique, pris en sa première branche :

Attendu que, selon l'arrêt attaqué (Paris, 10 janvier 1986), la société Sopalm a consenti, par acte sous seing privé, à la Société nancéenne de crédit industriel Varin et Bernier (la banque) pour garantir des avances en compte courant, un gage sur son stock de marchandises dont un tiers a été constitué détenteur ; que, mise en règlement judiciaire le 25 juin 1980, la société Sopalm a été autorisée à poursuivre son exploitation ; que, le 23 juin 1982, le syndic a obtenu du juge commissaire l'autorisation de retirer le stock donné en gage moyennant le paiement de la créance à la banque qui avait produit au passif à ce titre ; que le receveur principal des Impôts de Joigny (le receveur) a formé opposition qui a été déclarée bien fondée par le tribunal ;

Attendu que le receveur fait grief à la cour d'appel, qui a déclaré recevable l'appel de la banque, valable le retrait du gage et dit que le privilège de la banque, créancier gagiste, primait, sur les sommes résultant de la réalisation du gage qui a suivi son retrait, tout autre créancier même privilégié et en particulier l'administration fiscale et enfin d'avoir ordonné que ces sommes litigieuses seraient remises à la banque à due concurrence de sa créance, alors, selon le pourvoi, que l'article 83, 3e alinéa, de la loi du 13 juillet 1967 ne vise que les créanciers bénéficiaires d'un droit de rétention sur la somme gagée ; que le créancier gagiste titulaire du droit de rétention prévu par l'article 92 du Code de commerce, qui consent à la réalisation de son gage par le syndic de son débiteur, perd de ce fait son droit de rétention et ne peut plus, par suite, s'en prévaloir ; que la cour d'appel, qui a retenu qu'il n'était pas contesté que le créancier gagiste avait donné son accord à la vente du gage préalablement à l'ordonnance du juge commissaire l'autorisant, a néanmoins jugé que cet accord n'avait pu le priver de son droit de rétention, a violé les articles 92 du Code du commerce et 83, 3e alinéa, de la loi du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu à juste titre que la circonstance que la banque ait donné son accord préalablement à l'ordonnance du juge commissaire ne pouvait conférer à la vente par le syndic des biens gagés le caractère d'une vente de gré à gré faisant perdre au créancier gagiste son droit de rétention ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique, pris en sa deuxième branche :

Attendu qu'il est fait grief à la cour d'appel de s'être prononcée ainsi qu'elle l'a fait alors, selon le pourvoi, que, selon les articles 40 et 42 de la loi du 13 juillet 1967, tous les créanciers sans exception doivent produire au passif du règlement judiciaire ou de la liquidation des biens et se soumettre à la procédure de vérification et d'admission de leurs créances ; qu'il en résulte que tant que leurs créances n'ont pas été admises, les créanciers et notamment ceux qui bénéficient d'une sûreté spéciale, ne peuvent ni exercer leur droit de poursuite individuelle, ni recevoir un paiement des mains du syndic ; qu'en déclarant que l'autorisation sollicitée par le syndic n'avait pour objet que de faciliter la poursuite de l'exploitation dans l'intérêt de la masse et n'était donc pas subordonnée à l'admission définitive de la créance du gagiste, la cour d'appel a violé les articles 40 et 42 de la loi du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu que la cour d'appel a relevé à bon droit qu'il s'agissait d'une action exercée par le syndic dans l'intérêt de la masse et que l'autorisation de retrait du gage ne constituait pas un acte de poursuite de la part de la banque, laquelle avait produit à titre privilégié, et enfin que l'action n'était pas subordonnée à l'admission de la créance de la banque ; que le moyen ne peut être accueilli ;

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche :

Attendu qu'il est enfin fait reproche à la cour d'appel d'avoir statué ainsi qu'elle l'a fait alors, selon le pourvoi, que, si en matière de règlement judiciaire le syndic usant de la procédure de droit commun peut retirer le gage en remboursant la dette dans la mesure où la créance du gagiste est définitivement admise au passif avec sa sûreté spéciale, ce n'est que de l'article 83 de la loi du 13 juillet 1967, qui n'est applicable qu'en matière de liquidation des biens, qu'il reçoit pouvoir de procéder à la vente du bien gagé ; que la cour d'appel, qui a cru pouvoir déclarer valablement fondés sur l'article 83, 1er et 3e alinéas, le retrait du gage, la vente des biens gagés et le paiement préférentiel du créancier gagiste, opérés par le syndic du règlement judiciaire du débiteur, a violé par fausse application l'article 83 de la loi du 13 juillet 1967 dont elle a prétendu faire application ;

Mais attendu que la cour d'appel a retenu exactement que, bien que la disposition concernant le retrait du gage soit insérée parmi celles de la loi du 13 juillet 1967 relatives à la liquidation des biens, aucun texte n'interdisait au syndic, dans le cas d'un règlement judiciaire, d'user de la faculté qui s'y trouvait prévue, en faisant ressortir que le syndic s'était prévalu d'un droit ouvert à tout débiteur à l'égard de son créancier gagiste, ainsi qu'en dispose l'article 2082, alinéa 1er, du Code civil ; que le moyen n'est donc pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.