CA Paris, Pôle 5 ch. 4, 12 avril 2023, n° 21/03687
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Gilclaude (SAS)
Défendeur :
Achats Marchandises Casino (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Dallery
Conseillers :
Mme Depelley, M. Richaud
Avocats :
Me Ngo Begue, Me Lafran, Me Boccon Gibod, Me Reymond
EXPOSE DU LITIGE
La SAS Gilclaude exerce une activité principale de commerce de gros d'habillement et de chaussures.
La SAS Achats Marchandises Casino (ci-après, "la SAS AMC") était, entre 2003 et 2017, la centrale de référencement des fournisseurs de produits textiles du groupe Casino, son activité de mandataire consistant à rechercher et référencer ces derniers, à effectuer les contrôles de qualité et à négocier les conditions commerciales annuelles, au nom et pour le compte des sociétés Distribution Casino France, Monoprix et Franprix - Leader Price.
La SAS Gilclaude et la SAS AMC entretiennent des relations commerciales depuis plus de trente ans.
Dénonçant une baisse importante des commandes à compter de l'année 2017 dans un contexte de réorganisation interne du groupe Casino ainsi que l'absence de réponse à ses interrogations sur les suites de la relation commerciale autre que l'annonce le 20 janvier 2017 de divers déférencements et d'une baisse du volume d'affaires sur le rayon "nuit femme", la SAS Gilclaude a, par courrier de son conseil du 13 juin 2017, mis en demeure la SAS AMC de l'indemniser du préjudice causé par la rupture brutale des relations commerciales. En réponse, la SAS AMC contestait, par lettre du 10 juillet 2017, toute rupture et toute modification brutale de la relation d'affaires.
Après échec d'une tentative de médiation menée par le médiateur des relations industrielles et agricoles du groupe Casino, la SAS Gilclaude a, par acte d'huissier signifié le 17 août 2018, assigné la SAS AMC devant le tribunal de commerce de Paris en indemnisation de ses préjudices.
Par jugement du 17 février 2021, le tribunal de commerce de Paris a :
- rejeté la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt à agir de la SAS Gilclaude opposée par la SAS AMC ;
- débouté la SAS Gilclaude de sa demande au titre de la rupture brutale des relations commerciales ;
- condamné la SAS Gilclaude à verser à la SAS AMC la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
- débouté les parties de leurs autres demandes ;
- condamné la SAS Gilclaude aux dépens dont ceux à recouvrer par le greffe liquidé à la somme de 74,50 euros dont 12,20 euros de TVA.
Par déclaration reçue au greffe le 23 février 2021, la SAS Gilclaude a interjeté appel de ce jugement.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 14 juillet 2022, la SAS Gilclaude, demande à la cour, au visa des articles L. 442-6 du code de commerce, 1240 du code civil et 515 et 700 du code de procédure civile :
- d'accueillir les demandes formulées par la SAS Gilclaude, les disant recevables et bien fondées ;
- en conséquence, de confirmer le jugement rendu le 17 février 2021 par le tribunal de commerce de Paris en ce qu'il a déclaré recevable l'appelante à agir contre la SAS AMC, mais de le réformer en toutes ses autres dispositions ;
-statuant à nouveau, à titre principal, de :
*dire et juger que la rupture fautive a entraîné un préjudice pour la requérante d'un montant de 1 080 000 euros ;
*condamner en conséquence la SAS AMC à régler à la SAS Gilclaude la somme de 1 080 000 euros en réparation de son préjudice ;
- à titre subsidiaire, de :
*dire et juger que la rupture fautive a entrainé un préjudice pour la SAS Gilclaude d'un montant de 465 000 euros ;
*condamner en conséquence la SAS AMC à régler à la SAS Gilclaude sa la somme de 774 000 euros en réparation de son préjudice ;
- en tout état de cause, de :
*rejeter toute demande formulée par la SAS AMC à l'encontre de la SAS Gilclaude ;
*condamner la société achats marchandises casino à régler à la SAS Gilclaude la somme de 7 500 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.
En réponse, dans ses dernières conclusions notifiées par la voie électronique le 1er septembre 2021, la SAS AMC demande à la cour, au visa des articles L. 442-6, I, 5° du code de commerce et L. 442-1 du code de commerce, de :
- constater l'absence de relations commerciales établies entre la SAS Gilclaude et la SAS AMC au sens de l'ancien article L. 442-6 I 5° du code de commerce, compte tenu de l'existence d'appels d'offres réguliers caractérisant une précarité de la relation ;
- constater l'absence de rupture brutale des relations commerciales, la relation entre la SAS Gilclaude et la SAS AMC étant caractérisée par un courant d'affaires erratique, comme l'illustre l'évolution des chiffres d'affaires lors des dix dernières années, qui s'explique par la nature même et les spécificités du secteur du textile (collections saisonnières) ;
- constater l'absence de déréférencement de la SAS Gilclaude, celle-ci ayant continué à signer des accords-cadres annuels postérieurement à la rupture alléguée et à être invitée à participer aux appels d'offres ;
- dire et juger que la SAS Gilclaude ne peut prétendre à une indemnité au titre de la prétendue brutalité de la rupture ;
- dire et juger que la SAS Gilclaude n'a communiqué aucune pièce comptable, ni attestation d'un commissaire aux comptes, ni plus généralement aucun justificatif de nature à étayer ses demandes financières qui ne peuvent donc être accueillies, et que les chiffres allégués dans les écritures de la SAS Gilclaude sont contredits par les pièces communiquées ;
- en conséquence, confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a :
*débouté la SAS Gilclaude de sa demande au titre d'une rupture brutale des relations commerciales et de sa demande d'indemnisation de son préjudice ;
*condamné la SAS Gilclaude à verser à la SAS AMC la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
*débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires, mais seulement en ce qu'il a débouté la SAS Gilclaude de ses demandes ;
*ordonné l'exécution provisoire ;
*condamné la SAS Gilclaude aux dépens,
- débouter la SAS Gilclaude de toutes ses demandes ;
- y ajoutant :
*condamner la SAS Gilclaude à payer à la SAS AMC la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
*condamner la SAS Gilclaude aux entiers dépens.
Conformément à l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie à la décision entreprise et aux conclusions visées pour un exposé détaillé du litige et des moyens des parties.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 7 février 2023. Les parties ayant régulièrement constitué avocat, l'arrêt sera contradictoire en application de l'article 467 du code de procédure civile.
MOTIVATION
A titre liminaire, la Cour constate que la SAS AMC ne conteste plus l'intérêt à agir de la SAS Gilclaude et sa propre qualité à défendre. Ces moyens de défense ne sont ainsi pas en débat.
1°) Sur la rupture brutale des relations commerciales établies.
Moyens des parties.
Au soutien de son appel, la SAS Gilclaude expose que le processus habituel de commandes était exclusif de toute mise en concurrence, le recours à l'appel d'offres étant marginal et n'ayant été généralisé, la concernant, qu'à compter de l'année 2017. Elle en déduit l'existence d'une relation commerciale établie, l'absence de garantie contractuelle sur un volume d'achats étant indifférente et les particularités du secteur textile n'ayant pas fait obstacle à la stabilité de cette dernière à raison de ses capacités d'adaptation et des rendez-vous réguliers avec la SAS AMC. Elle ajoute que la poursuite des relations commerciales n'est pas exclusive d'une rupture partielle qui est caractérisée par une baisse du chiffre d'affaires réalisé en 2017 de 80 % par rapport aux années précédentes, baisse non compensée par l'exécution des contrats cadres postérieurs. Elle précise que cette modification soudaine et substantielle était imprévisible et n'était pas dictée par les spécificités du marché du textile ou par une conjoncture défavorable mais par la seule volonté de la SAS AMC de l'évincer. Elle estime que le préavis éludé était de trois ans, l'accord professionnel du 6 mars 2013 étant inapplicable, et que son préjudice doit être calculé sur la base du chiffre d'affaires qu'elle a déterminé et non sur celui proposé par la SAS AMC.
En réponse, cette dernière expose que la mise en concurrence systématique par appels d'offres, après envoi à tous les fournisseurs d'un bref marketing, préavise la relation commerciale qui n'est ainsi pas établie, ce que confirment l'absence de toute garantie contractuelle, telle un chiffre d'affaires minimal, et d'exclusivité, et induisent les spécificités du secteur textile qui est en crise et commande des renouvellements annuels des collections exclusifs de toute garantie de la permanence des référencements. Elle précise que la baisse des commandes pour 2016 et 2017, qui ne caractérise pas en soi une rupture des relations commerciales, même partielle, est causée par la sous-performance des produits de la SAS Gilclaude qui a quoi qu'il en soit continué à répondre à des appels d'offres et à signer des contrats cadres et généré entre 2018 et 2020 un chiffre d'affaires conforme à celui dégagé les années précédentes, hors pic exceptionnel de 2014 à 2016. Subsidiairement, elle conteste toute brutalité dans la rupture qui était prévisible à raison de l'annonce des sous-performances et de l'absence de tout minimum garanti. Plus subsidiairement, elle explique que le chiffre d'affaires de la SAS Gilclaude n'a pas baissé, les données qu'elle avance n'étant à ce titre ni cohérentes ni certifiées et intégrant les résultats d'une entité "Get" qui est étrangère au litige. Elle ajoute que le préavis à respecter aurait été de 12 mois, que l'indemnité doit être calculée sans tenir compte des années 2014 à 2016 qui étaient exceptionnelles et que le taux de marge brute n'est pas justifié.
Réponse de la Cour,
En application de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce dans sa version applicable au litige, engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure.
Au sens de ce texte, la relation, notion propre du droit des pratiques restrictives de concurrence qui n'implique aucun contrat (en ce sens, Com., 9 mars 2010, n° 09-10.216) et n'est soumise à aucun formalisme quoiqu'une convention ou une succession d'accords poursuivant un objectif commun puisse la caractériser, peut se satisfaire d'un simple courant d'affaires, sa nature commerciale étant entendue plus largement que la commercialité des articles L. 110-1 et suivants du code de commerce comme la fourniture d'un produit ou d'une prestation de service (en ce sens, Com., 23 avril 2003, n° 01-11.664). Elle est établie dès lors qu'elle présente un caractère suivi, stable et habituel laissant entendre à la victime de la rupture qu'elle pouvait raisonnablement anticiper, pour l'avenir, une certaine continuité du flux d'affaires avec son partenaire commercial (en ce sens, Com., 15 septembre 2009, n° 08-19.200 qui évoque " la régularité, le caractère significatif et la stabilité de la relation commerciale "). La poursuite de la relation par une personne distincte de celle qui l'a nouée initialement ne fait pas obstacle à sa stabilité en présence d'une transmission universelle de patrimoine et, à défaut, si des éléments démontrent que la commune intention des parties était de continuer la même relation (en ce sens, Com., 10 février 2021, n° 19-15.369).
Par ailleurs, L. 442-6 I 5° du code de commerce sanctionne non la rupture, qui doit néanmoins être imputable à l'agent économique à qui elle est reprochée, mais sa brutalité qui résulte de l'absence de préavis écrit ou d'un préavis suffisant. Le délai de préavis suffisant, qui s'apprécie au moment de la notification de la rupture, doit s'entendre du temps nécessaire à l'entreprise délaissée pour se réorganiser, soit pour préparer le redéploiement de son activité, trouver un autre partenaire ou une solution de remplacement. Les critères pertinents sont l'ancienneté des relations et les usages commerciaux, le degré de dépendance économique, le volume d'affaires réalisé, la progression du chiffre d'affaires, les investissements effectués, l'éventuelle exclusivité des relations et la spécificité du marché et des produits et services en cause ainsi que tout obstacle économique ou juridique à la reconversion. La rupture peut être totale ou partielle, la relation commerciale devant dans ce dernier cas être modifiée substantiellement (en ce sens, Com. 31 mars 2016, n° 14-11.329 ; Com 20 novembre 2019, n° 18-11.966, qui précise qu'une modification contractuelle négociable et non imposée n'est pas la marque d'une rupture partielle brutale).
Quoiqu'elle prête désormais un rôle marginal aux appels d'offres préalables, la SAS Gilclaude ne conteste pas avoir écrit dans son assignation, qui n'est pas produite mais que citent le tribunal de commerce dans son jugement (page 6) et la SAS AMC dans ses écritures (page 12), que le processus de commandes débutait "généralement" (soit littéralement, le plus souvent, dans la grande majorité des cas) par un appel d'offres. Par nature, celui-ci implique une mise en concurrence annuelle interdisant toute anticipation raisonnable sur la continuité de la relation commerciale et précarisant en soi celle-ci, peu important sa durée (en ce sens, Com. 18 octobre 2017, n° 16-15.138). Or, une telle affirmation, exprimée de manière univoque dans l'acte introductif d'instance, est, au sens de l'article 1383-2 du code civil, un aveu judiciaire qui est irrévocable en l'absence d'erreur de fait invoquée par la SAS Gilclaude. Son revirement est ainsi sans effet et le recours à l'appel d'offres, dont la preuve aurait sinon incombé à la SAS AMC, est caractérisé.
Par ailleurs, alors qu'elle ne bénéficiait ni d'une exclusivité, ni de volumes garantis, indices non suffisants mais pertinents d'une relation manquant économiquement de stabilité, celle-ci, qui ne justifie pas des modalités concrètes de sa relation avec la SAS AMC, ne produit aucun élément apte à en réduire la portée. Les conditions d'élaboration de sa pièce 24 intitulée" Synthèse années 2014, 2015, 2016", qui mentionne une part résiduelle de chiffre d'affaires généré par les appels d'offres (entre 0,36 % et 4,79 %), sont indéterminables, même par confrontation avec ses relevés de comptes individuels (pièce 3 à 3.9) et ses factures (pièces 20-1 à 20-47) ainsi que l'illustre exactement la SAS AMC (pièce 6 de l'intimée) : non certifiée par un expert-comptable et pour partie inexacte, cette pièce, qu'elle a constituée pour elle-même pour les besoins de la procédure, n'est pas probante. Cette carence n'est pas comblée par la correspondance électronique de mai 2016 qui, au contraire, ne se réfère qu'à une "Réponse à un appel d'offre" (pièce 17 de l'appelante). En outre, le seul élément éclairant la Cour sur l'usage des briefs marketing, exclus des appels d'offres dans les synthèses produites en pièce 24, sont des courriels de 2019 et 2020 communiqués par la SAS AMC (pièce 10) qui démontrent que ces derniers sont le support, au moins à compter de l'année 2019, d'une mise en concurrence préalable. Si leur pertinence est faible en ce qu'ils sont postérieurs à l'année concernée par la rupture partielle alléguée, ils ne sont pas utilement combattus par la SAS Gilclaude. Enfin, contrairement à ce que soutient cette dernière, la SAS AMC n'a pas reconnu dans son courriel du 20 janvier 2017 (pièce 8 de l'appelante) la stabilité de la relation mais uniquement l'impossibilité de " s'engager sur le long terme comme cela a pu être le cas certaines années ", soit de manière ponctuelle.
En conséquence, en dépit de son importante durée, la relation commerciale, intrinsèquement précaire, non à raison des spécificités du secteur d'activité concerné qui ne saurait être a priori et in abstracto exclu du champ de ces dispositions mais en considération du mode de sélection annuel de la SAS Gilclaude, n'est pas établie au sens de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce.
Surabondamment, en supposant cette condition légale remplie au regard de la relation trentenaire reconnue par la SAS AMC et du flux d'affaires consistant, continu et durable entre les parties, la SAS Gilclaude, qui ne conteste pas la poursuite de la relation jusqu'en 2022, échoue à établir la réalité de la rupture qu'elle impute à la SAS AMC.
En effet, elle n'allègue qu'une rupture brutale partielle caractérisée par une chute du chiffre d'affaires de près de 80 % sur l'année 2017. Cette baisse est effectivement significative, y compris par référence aux chiffres retenus par la SAS AMC sur la base de son logiciel de distribution, les insuffisances déjà relevées affectant les calculs faits par la SAS Gilclaude à ce titre au regard des pièces qu'elle produit ne permettant pas de les exploiter et le chiffre d'affaires de sa filiale GET qui est tierce au litige et a une personnalité morale distincte ne pouvant être intégré dans les données pertinentes (chiffres distingués en pièce 3-10 de l'appelante). Elle avoisine après cette réduction 75 % par rapport à la moyenne des années 2014 à 2016.
Cependant, au regard de la durée des relations, l'appréciation de l'existence d'une rupture partielle ne peut être opérée sur les trois dernières années et doit intégrer une période plus étendue pour être représentative, et ce d'autant plus que le secteur pertinent est structurellement sujet à des variations saisonnières importantes et est frappé par une crise dont l'existence n'est pas contestée. Le tableau dressé par la SAS AMC (page 7 de ses écritures et pièce 2) des chiffres d'affaires dégagés sur les années plus pertinentes 2009 à 2016, qui révèlent des fluctuations annuelles parfois importantes, à la baisse (40 % en 2010) ou à la hausse (près de 50 % en 2014), traduit ainsi leur inconstance tout en confirmant le caractère exceptionnel des années 2014 à 2016. De fait, le chiffre d'affaires retenu par la SAS Gilclaude pour l'année 2017 est supérieur à celui dégagé en 2010. En outre, cette baisse, dont ces variations tempèrent significativement la portée, repose sur des éléments objectifs, que la SAS Gilclaude n'a pas contestés, tenant certes à une réorganisation interne du groupe Casino annoncée dès 2013 et affectant à compter de 2017 les références de cette dernière (pièce 8 de l'appelante), mais également à la sous-performance concrète de plusieurs de ses références, mauvais résultats évoqués le 20 janvier 2017 (pièce 8 de l'appelante qui renvoie à des réunions antérieures) qui contraignent la décision de la SAS AMC.
Enfin, la SAS Gilclaude, qui ne jouissait d'aucun droit acquis à la reconduction de ses références d'une année sur l'autre au regard de l'organisation concrète des relations commerciales qu'elle décrit (4 de ses écritures) et des spécificités du secteur en cause, a pu maintenir son chiffre d'affaires en 2017 (pièce 9 de l'intimée), signe que la diminution des commandes n'a pas affecté péjorativement son activité économique globale. Surtout, elle occulte les résultats dégagés entre 2018 et 2020 qui atteignent, en dépit d'une conjoncture défavorable (pièce 14 de l'intimée), des montants voisins de ceux réalisés en 2013, avant les années 2014 à 2016 non représentatives. Exceptionnellement basse, l'année 2017 n'en reste pas moins, à l'échelle de la relation et sur son dernier tiers, une modification réelle mais ponctuelle du flux d'affaires qui ne caractérise pas à elle seule une rupture partielle des relations commerciales et qu'autorisent la liberté du commerce et l'absence de minimum garanti stipulé ou promis, dont la SAS Gilclaude paraît rechercher le bénéfice par une voie détournée.
En conséquence, le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a rejeté les demandes de la SAS Gilclaude au titre de la rupture brutale des relations commerciales établies avec la SAS AMC.
2°) Sur les frais irrépétibles et les dépens
Le jugement entrepris sera confirmé en ses dispositions sur les frais irrépétibles et les dépens.
Succombant en son appel, la SAS Gilclaude, dont la demande au titre des frais irrépétibles sera rejetée, sera condamnée à supporter les entiers dépens de l'instance ainsi qu'à payer à la SAS AMC la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
Confirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions soumises à la Cour ;
Y ajoutant,
Rejette la demande de la SAS Gilclaude au titre des frais irrépétibles ;
Condamne la SAS Gilclaude à payer à la SAS Achats Marchandises Casino la somme de 5 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SAS Gilclaude à supporter les entiers dépens d'appel.