Cass. com., 18 mars 2008, n° 06-16.905
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Favre
Avocats :
Me Hémery, SCP Vier, Barthélemy et Matuchansky
Attendu, selon l'arrêt confirmatif attaqué, que le Crédit lyonnais (la banque) a escompté le 25 juillet 2001 une lettre de change d'un montant de 262 000 francs à échéance du 15 septembre suivant, tirée par son client, la société Ravet, sur M. X..., qui l'a acceptée ; que celui-ci a assigné la banque pour voir constater la nullité du titre litigieux en contestant avoir été l'auteur de l'acceptation ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à verser à la banque la somme de 27 545,05 euros, outre intérêts et 600 euros à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen :
1°/ que lorsqu'une partie dénie sa signature sur un acte sous seing privé, la vérification en est ordonnée en justice et le juge ne peut, sauf à inverser la charge de la preuve, statuer au fond qu'après avoir constaté que la signature émane bien de la partie qui la désavoue ; qu'en se contentant, en l'espèce, pour retenir que la traite avait été acceptée, par M. X..., de relever que la dissemblance existant entre la page complète de signature produite par ce dernier et les signatures figurant sur diverses pièces faisaient douter de sa bonne foi, sans constater -après avoir procédé à sa vérification en justice- que la signature apposée pour acceptation sur la lettre de change émanait bien de M. X..., la cour d'appel a violé les articles 2323 et 1324 du code civil, ensemble les articles 1315 du même code et les articles 387 et 288 du code de procédure civile ;
2°/ que lorsqu'un demandeur a établi les faits concluants à l'appui de sa prétention, le défendeur subit alors la charge de la contestation ; qu'ayant retenu, en l'espèce, selon la thèse de M. X... qu'il y avait bien eu trois présentations de traite d'un même montant, la cour d'appel ne pouvait retenir la bonne foi de la banque qu'à charge pour cette dernière d'établir qu'il ne s'agissait pas de la même traite ; qu'en se contentant pourtant de retenir, pour faire droit à sa demande, que rien ne démontrait qu'il s'agissait de la même traite, la cour d'appel a fait peser sur M. X... le risque de la preuve incombant normalement à la banque, violant ainsi les articles 6 et 9 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que les juges ne sont pas tenus de recourir à la procédure de vérification d'écriture s'ils trouvent dans la cause des éléments de conviction suffisants ; que la cour d'appel, après avoir relevé les dissemblances entre une page entière de signatures et celles, identiques entre elles, figurant sur des courriers, leurs accusés de réception, et le titre litigieux, en a déduit, par une appréciation souveraine des éléments qui lui étaient soumis, que la lettre de change était complète et régulière, mettant ainsi en évidence que la signature y figurant émanait de M. X... ;
Attendu, d'autre part, que c'est après avoir rappelé que M. X... partait du postulat de l'existence d'une seule lettre de change présentée trois fois au paiement et de l'absence de mention de dates de création et d'échéance supposant une complicité du porteur et, sur le même titre, des modifications successives des mentions des dates, que l'arrêt constate que la lettre de change litigieuse ne porte pas de trace de rature, ou de surcharge des dates ou des mentions de sorte qu'elle ne peut pas être celle créée le 1er mai à l'échéance du 20 juillet ni celle créée le 1er juillet et présentée le 1er septembre ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, c'est sans inverser la charge de la preuve que la cour d'appel a statué comme elle a fait ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen :
Vu l'article 1382 du code civil ;
Attendu que l'arrêt, par confirmation du jugement, condamne M. X... à payer la somme de 600 euros à titre de dommages-intérêts à la banque ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans caractériser en quoi M. X... aurait commis une faute dans ses rapports avec la banque, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, confirmant le jugement, il a condamné M. X... à payer la somme de 600 euros au Crédit lyonnais, à titre de dommages-intérêts avec intérêts judiciaires à compter du jugement, l'arrêt rendu le 13 avril 2004, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai, autrement composée ;
Condamne le Crédit lyonnais aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit mars deux mille huit.