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Décisions

CA Paris, Pôle 1 ch. 10, 13 octobre 2022, n° 21/18043

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Défendeur :

Altran Technologies (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Pruvost

Conseillers :

Mme Lefort, M. Trarieux

Avocats :

Me N'tsikabaka, Me Pelletier

JEX Bobigny, du 29 sept. 2021, n° 20/077…

29 septembre 2021

Déclarant agir en vertu d'un arrêt rendu par la Cour d'appel de Paris le 4 décembre 2019, la société Altran Technologies a, le 6 juillet 2020, dressé un procès-verbal de saisie-attribution entre les mains de la banque Bourse direct et à l'encontre de M. [Y], pour avoir paiement de la somme de 39 873,54 euros ; cette mesure d' exécution sera dénoncée au débiteur le 8 juillet 2020.

L'intéressé l'ayant contestée devant le juge de l' exécution de Bobigny, et réclamé en outre l'institution d'une astreinte du chef de l'obligation, dont la société Altran Technologies était débitrice, concernant la remise des bulletins de paie, ce dernier a suivant jugement daté du 29 septembre 2021 :

- déclaré recevable la contestation présentée par M. [Y] de la saisie-attribution du 6 juillet 2020 pratiquée sur ses comptes bancaires ;

- rejeté l'ensemble des demandes de M. [Y] ;

- condamné M. [Y] à payer la somme de 1 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile à la société Altran Technologies ;

- condamné M. [Y] aux dépens.

Selon déclaration en date du 15 octobre 2021, M. [Y] a relevé appel de ce jugement.

En ses conclusions notifiées le 22 août 2022, M. [Y] a exposé :

- que la Cour d'appel de Paris avait condamné la société Altran Technologies au paiement des sommes de 20 901,06 euros et de 5 971,88 euros, lui-même étant condamné au paiement de celle de 53 848,42 euros ;

- qu'un arrêt rectificatif de cette décision avait été rendu le 23 juin 2021 ;

- que par arrêt du 29 septembre 2021, la Cour de cassation avait partiellement cassé l'arrêt du 4 décembre 2019 et renvoyé l'affaire devant la Cour d'appel de Paris autrement composée ;

- que devant ladite Cour, la société Altran Technologies réclamait un certain nombre de sommes ;

- qu'il y avait lieu de prononcer un sursis à statuer dans l'attente du prononcé de l'arrêt de la cour de renvoi, et de la décision à intervenir à la suite de la requête en interprétation et en retranchement qui avait été déposée devant la Cour d'appel de Paris ;

- que l'exception de sursis à statuer par lui soulevée était recevable car la saisine de la cour de renvoi en constituait le fait générateur ;

- que la saisie-attribution litigieuse ne procédait pas d'une simple erreur sur les sommes dues ni d'un défaut de décompte, mais portait sur des sommes différentes de celles prévues au titre exécutoire, avec des sommes en brut et non pas en net, alors qu'il était nécessaire de disposer d'un bulletin de paie ;

- qu'il n'était pas possible d'opérer des compensations entre des sommes brutes et nettes ;

- que l'acte de saisie-attribution ne tenait pas compte des intérêts dont la société Altran Technologies était redevable (à compter de l'arrêt, sur la somme de 20 901,06 euros) ;

- que le bulletin de paie du mois de mai 2021 reprenant les sommes visées dans l'acte de saisie n'était pas conforme à la législation sociale ;

- que les sommes qu'il devait payer ne portaient pas intérêts au taux légal à compter de la saisine du Conseil de prud'hommes, contrairement à ce que prétendait la société Altran Technologies ;

- que la saisie-attribution était irrégulière car portant sur son PEA, alors qu'elle ne pouvait porter que sur des sommes liquides, la fraction en espèces du PEA en faisant partie intégrante ;

- que la Cour d'appel de Paris avait ordonné la restitution des sommes versées par la société Altran Technologies à M. [Y] en exécution du plan (soit 53 848,42 euros brut), déduction faite de la créance à titre d'indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse (20 901,06 euros brut), alors qu'en réalité, il n'avait perçu, lors de son départ, que la somme de 20 870 euros ;

- que la société Altran Technologies était redevable également des indemnités de licenciement, de préavis et de congés payés, dues en vertu de la loi ;

- que la prescription était acquise du chef de la somme de 5 971,88 euros au titre de la répétition de l'indu, car la société Altran Technologies ne l'avait réclamée que dans des conclusions du 16 novembre 2016 ;

- qu'il n'avait jamais été condamné à restituer des indemnités perçues ;

- qu'il pouvait prétendre à des indemnités même si la convention de rupture était nulle, ce qu'avait indiqué la Cour d'appel de Paris en son arrêt de réouverture des débats du 22 février 2017, l'employeur devant verser les salaires jusqu'au départ effectif du salarié ;

- que le juge de l' exécution avait refusé à tort d'accueillir sa demande de cantonnement de la saisie-attribution ;

- qu'il existait une contradiction entre les deux arrêts de la Cour d'appel de Paris rendus les 22 février 2017 et 4 décembre 2019 ;

- que la décision de la Cour de cassation du 4 février 2015 ainsi que les autres décisions qui avaient été rendues dans le cadre des litiges concernant la société Altran Technologies, primaient sur l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 ;

- que la société Altran Technologies était de mauvaise foi.

M. [Y] a en conséquence demandé à la Cour de :

- prononcer un sursis à statuer dans l'attente de la décision de la Cour de cassation et de l'issue de la requête en interprétation et retranchement susvisée ;

- infirmer le jugement ;

- prononcer la nullité de la saisie-attribution ;

- en ordonner la mainlevée ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de 59 964,30 euros à titre de dommages et intérêts pour abus de saisie ;

- subsidiairement, accueillir sa demande en répétition de l'indu ;

- concernant la somme reçue au titre du plan personnel de départ volontaire annulé : cantonner les causes de la saisie à la somme de 20 870 euros brute, correspondant à la prime dite "booster" et à l'indemnité dite "complémentaire", lesquelles seules rentrent dans le périmètre dudit plan annulé, la somme susvisée devant être cantonnée à son montant net ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de 57 778, 45 euros à titre de dommages-intérêts correspondant au préjudice financier subi ;

- concernant la répétition de l'indu pour des prétendus jours non travaillés et payés : dire et juger que la créance réclamée de 5 971,88 euros, est prescrite ;

- subsidiairement, dire et juger qu'il n' y a lieu à répétition des prétendus jours non travaillés et payés à défaut de justification du quantum par la société Altran Technologies compte tenu de l'impossibilité de vérification préjudiciable à M. [Y] ;

- encore plus subsidiairement, cantonner la créance de 5 971,88 euros brute à son montant net, après justification de ce montant net par la société Altran Technologies ;

- condamner celle-ci au paiement de la somme de 5 971,88 euros, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la violation manifeste des règles sur la durée légale de travail, le tout avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 ;

- dire et juger que les intérêts légaux n'ont pu courir à défaut d' exécution par la société Altran Technologies de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 ;

- ordonner l'imputation des versements sur le capital ;

- laisser à la charge de la société Altran Technologies les frais d' exécution ;

- lui accorder des délais de grâce les plus larges, soit sur deux ans ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de 59 964, 30 euros, à titre de dommages-intérêts pour saisie abusive ou inutile ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de 10 000 euros en vertu de l'article 700 du code de procédure civile au titre de la première instance ;

- assortir la condamnation de la société Altran Technologies à lui remettre le bulletin de salaire conforme à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 d'une astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter du mois suivant le prononcé de la décision, soit du 4 janvier 2020 ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement des sommes suivantes :

* 10 000 euros pour défaut de remise du bulletin de paie conforme à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019, avec intérêts au taux légal à compter de cet arrêt,

* 20 700 euros, soit 6 mois de salaire, pour remise de documents sociaux de rupture portant des mentions erronées (bulletin de solde de tout compte, reçu de solde de tout compte, attestation pôle emploi), avec intérêt au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure,

- ordonner à la société Altran Technologies de remettre à M. [Y] les documents suivants:

* l'attestation pôle emploi rectificative,

* le reçu pour solde de tout compte rectificatif,

* le bulletin de solde de tout compte rectificatif,

le tout sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et par document à compter de l'assignation valant mise en demeure ;

- ordonner à la société Altran Technologies de lui remettre les documents suivants:

* les fiches de pointage de M. [Y] sur la période relative aux prétendus jours non travaillés et payés,

* les justificatifs des heures facturées par la société Altran Technologies aux clients auprès desquels il a été mis à disposition sur la période relative aux prétendues heures non travaillées et payées,

* le contrat ou tout autre document liant la société Altran Technologies avec la société Schlumberger et Airbus concernant le contrat de mise à disposition de M. [Y] au sein de l'établissement sur la période de référence,

* le décompte correspondant aux jours non travaillés qui auraient été payés indûment (avec détail des dates et heures concernées),

* les bulletins de paie rectificatifs,

le tout sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et par document à compter de la date de l'assignation valant mise en demeure,

- condamner la société Altran Technologies à lui payer la somme de 5 971,88 euros avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019, pour émission de bulletins de paie portant des mentions erronées ;

- la condamner au paiement des indemnités légales de licenciement à savoir :

* indemnité de préavis : 10 254, 54 euros brut, outre les congés payés afférents,

* indemnité légale de licenciement :12 331, 22 euros brut,

* indemnité de congés payés : 6 860, 32 euros brut,

le tout avec intérêts à compter 29 décembre 2010, date de la saisine du Conseil de Prud'hommes valant mise en demeure ;

- condamner l'employeur à la remise dans le mois de la décision à intervenir des documents sociaux légaux de rupture conformes, et ce sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et par document ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de la somme de 10 414, 40 euros brut, correspondant aux 3 mois de salaires dues jusqu'à la date effective de départ de l'entreprise le 20 mars 2010, outre les congés payés afférents ;

le tout avec intérêts à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes valant mise en demeure ;

- condamner l'employeur à la remise dans le mois de la décision à intervenir des bulletins de paie conformes, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et par bulletin ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de 57 778, 45 euros, à titre de dommages-intérêts, correspondant au préjudice financier subi, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 ;

- ordonner la compensation ;

- condamner la société Altran Technologies au paiement de la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, outre les frais de saisie, et en ce compris les dépens dont ceux de première instance, dont distraction au profit de Maître Inès N'Tsikabaka, avocat au barreau de Seine-Saint-Denis, en application de l'article 699 du code de procédure civile ;

- rejeter les prétentions de la société Altran Technologies.

Dans ses conclusions notifiées le 22 juillet 2022, la société Altran Technologies a exposé :

- qu'après compensation entre les diverses créances, en vertu de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris susvisé, M. [Y] lui restait redevable de la somme de 38 919,24 euros brute, soit 36 284,63 euros nette ;

- que la Cour de cassation avait cassé cet arrêt uniquement en ce qu'il avait rejeté les prétentions de M. [Y] au titre des heures supplémentaires ;

- que M. [Y] avait refusé les propositions amiables qui lui avaient été adressées ;

- que la demande de sursis à statuer était irrecevable car elle avait été présentée dans des écritures datées du 22 juin 2022, alors que l'appelant avait conclu au fond les 29 novembre 2021 et 29 janvier 2022, et que le fait générateur de cette demande était le prononcé de l'arrêt de la Cour de cassation du 29 septembre 2021 ;

- que de plus, la demande de sursis à statuer aurait dû être présentée devant le conseiller de la mise en état ;

- que ladite demande était infondée dans la mesure où la décision de la Cour de renvoi ne porterait que sur une créance purement éventuelle à ce jour ;

- que s'agissant du procès-verbal de saisie-attribution, seule une absence de décompte pouvait avoir pour conséquence son annulation ;

- que l'acte litigieux comportait un décompte détaillé de la créance ;

- que le compte était exact, prenant en compte les cotisations qui avaient été déduites ;

- que l'appelant avait été destinataire d'un bulletin de paie conforme, après compensation qui devait nécessairement s'appliquer dans la mesure où les créances respectives des parties avaient été fixées dans la même décision de justice ;

- que le point de départ des intérêts au taux légal se situait à la date de saisine du Conseil de prud'hommes pour les rappels de salaires et indemnité de licenciement, et à compter de la décision du chef des sommes allouées à titre de dommages et intérêts ;

- que les sommes dues par M. [Y] (53 848,42 euros reçue en application du plan personnel de départ volontaire) portaient intérêt au taux légal à compter du 29 décembre 2019, qui était la date de saisine du Conseil de prud'hommes ;

- que la somme due de ce chef avait été calculée en retranchant celle de 10 467,20 euros (indemnité de préavis) de celle de 64 315,22 euros (somme reçue par M. [Y] en application du plan personnel de départ volontaire) ;

- que ce dernier ne pouvait réclamer le règlement de l'indemnité de préavis ;

- que le bulletin de paie à lui remis était conforme, alors qu'en tout état de cause son éventuel défaut de remise n'avait aucune incidence sur le cours des intérêts ;

- que concernant le PEA du débiteur, seule la fraction libellée en titres échappait à l'assiette de la saisie-attribution ;

- que devant la Cour, M. [Y] formait des demandes qui n'avaient jamais été articulées devant les juridictions du travail, qui excédaient la compétence du juge de l' exécution , et qui en outre se heurtaient à l'autorité de chose jugée attachée à la décision de la Cour d'appel de Paris fondant les poursuites ;

- que les demandes de M. [Y] à fin de remise de documents sociaux étaient totalement infondées ;

- qu'il y avait lieu de rejeter la demande de délais de paiement formée par l'appelant.

La société Altran Technologies a en conséquence demandé à la Cour de déclarer la demande de sursis à statuer irrecevable, de confirmer le jugement, de rejeter les prétentions de M. [Y], et de le condamner au paiement de la somme de 10 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile.

MOTIFS

Comme il est dit à l'article 74 alinéa 1er du code de procédure civile, les exceptions de procédure doivent, à peine d'irrecevabilité, être soulevées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.

Au cas d'espèce, l'appelant a conclu sur le fond le 29 novembre 2021 puis le 29 janvier 2022, et n'a sollicité le sursis à statuer dans l'attente de la décision de la cour de renvoi que dans des conclusions postérieures, le 22 juin 2022. L'événement sur lequel se fonde ladite demande n'est pas constitué par l'arrêt de la Cour de cassation (rendu le 29 septembre 2021) mais par la saisine de ladite cour de renvoi. Il incombe à M. [Y] de démontrer à quelle date il a saisi celle-ci mais l'intéressé ne produit aucune pièce à ce sujet, se bornant à indiquer, dans ses conclusions, que cette saisine a eu lieu au mois de juin 2022. Dans ces conditions, il met la présente juridiction dans l'impossibilité de vérifier si la cour de renvoi a été saisie antérieurement ou non au 29 novembre 2021. La demande de sursis à statuer pour ce motif sera déclarée irrecevable.

S'agissant de la demande de sursis à statuer en ce qu'elle est fondée sur une requête en interprétation et retranchement que M. [Y] a déposée le 22 juin 2022 à l'encontre de l'arrêt fondant les poursuites, elle est recevable car l'appelant a présenté cette demande dans des écritures datées du même jour que ladite requête. Il n'a pas encore été statué sur les mérites de celle-ci, mais la demande de sursis à statuer y relative revêt un caractère dilatoire ; elle sera donc rejetée.

La Cour adopte les motifs du premier juge qui a relevé à juste titre que si l'article R 211-1 du code des procédures civiles d' exécution prévoit que l'acte de saisie-attribution doit comporter, à peine de nullité, un certain nombre de mentions obligatoires notamment le montant de la créance, seule une absence de décompte peut avoir pour conséquence l'annulation de cette saisie-attribution, et que dès lors que le procès-verbal querellé mentionnait un décompte de créance, fût-il contesté par le débiteur, il n'y avait pas lieu d'accueillir sa demande en nullité.

Selon l'article R 121-1 alinéa 2 du Code des procédures civiles d' exécution , le Juge de l' exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites ni en suspendre l' exécution . C'est donc en vain que M. [Y] critique la décision de la Cour d'appel de Paris fondant les poursuites pour toutes sortes de motifs, en soutenant notamment qu'elle serait contraire à deux autres arrêts, à savoir celui de la présente cour en date du 22 février 2017 et la décision de la Cour de cassation du 4 février 2015.

La décision fondant les poursuites a :

- débouté M. [Y] de sa demande en paiement d'heures supplémentaires ;

- condamné la société Altran Technologies à payer à M. [Y] la somme de 20 901,06 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse avec intérêts au taux légal à compter du prononcé de l'arrêt ;

- condamné M. [Y] à restituer à la société Altran Technologies la somme de 53 848,42 euros reçue en exécution du plan de départ volontaire ;

- déclaré M. [Y] recevable à agir en nullité de la convention de forfait ;

- déclaré nulle et de nul effet la convention de forfait ;

- condamné M. [Y] à restituer à la société Altran Technologies la somme de 5 971,88 euros en répétition de l'indu pour les jours non travaillés et payés ;

- prononcé la compensation des créances de l'une et l'autre parties ;

- ordonné à la société Altran Technologies de rembourser à Pôle Emploi les indemnités de chômage versées du jour du licenciement au jour de l'arrêt, dans la limite de 6 mois d'indemnités.

Cette décision a été signifiée à M. [Y] le 31 décembre 2019.

Par arrêt en date du 29 septembre 2021, la Cour de cassation a cassé cet arrêt, mais uniquement en ce qu'il avait rejeté la demande de M. [Y] tendant au paiement d'heures supplémentaires. Cette décision n'a donc, en cet état de la procédure, aucune incidence sur le compte à faire entre les parties.

Il en résulte que la société Altran Technologies est créancière des sommes de 53 848,42 euros et 5 971,88 euros, tandis que M. [Y] est lui-même créancier de celle de 20 901,06 euros avec intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 2019.

Pour le même motif qu'indiqué supra, l'intéressé ne peut, devant le juge de l' exécution , discuter du montant des sommes qui ont été mises à sa charge au titre de l'indemnité reçue en exécution du plan de départ volontaire. De même, c'est à tort que M. [Y] demande à la Cour de dire et juger que les intérêts légaux n'ont pu courir à défaut d' exécution par la société Altran Technologies de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019, ou encore que certaines des créances de la partie adverse seraient prescrites antérieurement au prononcé de cet arrêt.

Dès lors qu'il est acquis que par voie de compensation, M. [Y] reste redevable de la somme de 38 919,24 euros, et que s'agissant des intérêts, l'intéressé ne peut les réclamer qu'à dater de l'arrêt tandis que la société Altran Technologies, pour sa part, ne réclame que des intérêts à compter de la même date, c'est à juste titre que l'huissier de justice instrumentaire a porté, dans l'acte de saisie-attribution, mention d'une somme en principal de 38 919,24 euros et d'intérêts au taux légal à compter du 4 décembre 2019. Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de cantonnement de la saisie-attribution présentée par M. [Y].

S'agissant de la prétendue irrégularité de ladite saisie-attribution en ce qu'elle porterait sur un PEA, la Cour adopte les motifs du juge de l' exécution qui a rappelé à bon droit que si une telle mesure d' exécution ne peut porter que sur des sommes d'argent, et non pas des titres, la fraction d'un PEA libellée en espèces peut bien être saisie-attribuée.

Le rejet de l'ensemble des contestations de l'appelant relativement à cette saisie-attribution implique la confirmation du jugement en ce qu'il a débouté l'intéressé de sa demande de dommages et intérêts pour abus de saisie.

Enfin la demande de mise à la charge de la société Altran Technologies des frais d' exécution ne peut qu'être rejetée, l'article L 111-8 du code des procédures civiles d' exécution prévoyant expressément que ces frais doivent être supportés par le débiteur.

M. [Y] a sollicité des délais de paiement avec imputation des versements sur le capital.

L'article 1343-5 du Code civil, en ce qu'il est conçu en des termes généraux, permet l'octroi de délais de paiement y compris après la mise en oeuvre d'une mesure d' exécution  ; il prévoit seulement que la décision du juge suspend les procédures d' exécution qui auraient été engagées. Cette suspension, qui ne saurait être assimilée à une mainlevée, s'opère nécessairement dans l'état où se trouve la mesure d' exécution au jour de l'octroi de délais. Ainsi en matière de saisie-attribution la suspension ne peut avoir pour effet que de faire obstacle à l'attribution matérielle des fonds au créancier dans le mois suivant la mise en place de cette voie d' exécution , puisqu'en application de l'article L 211-2 du code des procédures civiles d' exécution , l'acte de saisie a déjà emporté attribution juridique des fonds au saisissant.

En conséquence l'octroi de délais, qui ne permettrait pas de débloquer le compte de M. [Y], lequel présentait au jour de la saisie un solde créditeur de 3 561 euros, n'aurait aucun intérêt. Pour le surplus, il sera relevé que ce dernier a d'ores et déjà bénéficié de délais de fait d'une durée supérieure à celle prévue à l'article 1343-5 alinéa 1er du code civil (deux ans) car l'arrêt fondant les poursuites a été rendu le 4 décembre 2019. Le jugement est confirmé en ce qu'il a rejeté la demande de délais de paiement présentée par M. [Y] ainsi que sa demande d'imputation des versements sur le capital.

Le juge de l' exécution ne peut délivrer de titres exécutoires hors les cas prévus par la loi. Les prétentions de M. [Y] qui vont suivre sont donc irrecevables :

- demande de condamnation de la société Altran Technologies au paiement de la somme de 57 778, 45 euros à titre de dommages-intérêts correspondant au préjudice financier subi ;

- demande de condamnation de la société Altran Technologies au paiement de la somme de 5 971,88 euros, à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi du fait de la violation manifeste des règles sur la durée légale de travail, le tout avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 ;

- demande de condamnation de la société Altran Technologies au paiement des sommes suivantes:

* 10 000 euros pour défaut de remise du bulletin de paie conforme à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019, avec intérêts au taux légal à compter de cet arrêt,

* 20 700 euros, soit 6 mois de salaire, pour remise de documents sociaux de rupture portant des mentions erronées ( bulletin de solde de tout compte, reçu de solde de tout compte, attestation pôle emploi), avec intérêt au taux légal à compter de l'assignation valant mise en demeure,

- demande de condamnation de la société Altran Technologies à remettre à M. [Y] les documents suivants:

* l'attestation pôle emploi rectificative,

* le reçu pour solde de tout compte rectificatif,

* le bulletin de solde de tout compte rectificatif,

* les fiches de pointage de M. [Y] sur la période relative aux prétendus jours non travaillés et payés,

* les justificatifs des heures facturées par la société Altran Technologies aux clients auprès desquels M. [Y] a été mis à disposition sur la période relative aux prétendues heures non travaillées et payées,

* le contrat ou tout autre document liant la société Altran Technologies avec la société Schlumberger et Airbus concernant le contrat de mise à disposition de M. [Y] au sein de l'établissement sur la période de référence,

* le décompte correspondant aux jours non travaillés qui auraient été payés indûment (avec détail des dates et heures concernées),

* les bulletins de paie rectificatifs,

- demande de condamnation de la société Altran Technologies à payer à M. [Y] la somme de 5 971,88 euros avec intérêt au taux légal à compter de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019, pour émission de bulletins de paie portant des mentions erronées ;

- demande de condamnation de la société Altran Technologies au paiement des indemnités légales de licenciement à savoir :

* indemnité de préavis : 10 254, 54 euros brut, outre les congés payés afférents,

* indemnité légale de licenciement :12 331, 22 euros brut,

* indemnité de congés payés : 6 860, 32 euros brut,

- demande de condamnation de l'employeur à la remise, dans le mois de la décision à intervenir des documents sociaux légaux de rupture conformes, et ce sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et par document ;

- demande de condamnation de la société Altran Technologies au paiement de la somme de la somme de 10 414, 40 euros brut, correspondant aux 3 mois de salaires dues jusqu'à la date effective de départ de l'entreprise le 20 mars 2010, outre les congés payés afférents, avec intérêts à compter de la saisine du Conseil de Prud'hommes valant mise en demeure ;

- demande de condamnation de l'employeur à la remise, dans le mois de la décision à intervenir, des bulletins de paie conformes, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard et par bulletin ;

- demande de condamnation de la société Altran Technologies au paiement de la somme de 57 778, 45 euros, à titre de dommages-intérêts, correspondant au préjudice financier subi, avec intérêts au taux légal à compter de l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019.

Le jugement doit être confirmé en ce qu'il a refusé de faire droit à ces demandes.

Par arrêt rectificatif en date du 23 juin 2021, la Cour d'appel de Paris a condamné la société Altran Technologies à remettre au salarié, dans le mois suivant le prononcé de la décision, un bulletin de paie récapitulatif conforme à l'arrêt.

M. [Y] demande à la Cour d'assortir cette condamnation d'une astreinte de 1 500 euros par jour de retard à compter du mois suivant le prononcé de la décision, soit du 4 janvier 2020. Conformément à l'article L 131-1 alinéa 2 du code des procédures civiles d' exécution , le juge de l' exécution peut assortir d'une astreinte une décision rendue par un autre juge si les circonstances en font apparaître la nécessité.

Est versé aux débats un bulletin de paie du mois d'avril 2021 portant la mention de trois sommes dues à M. [Y] à titre de dommages et intérêts (20 901, 06 euros, 53 848,42 euros et 38 863,29 euros). Ce bulletin de paie est totalement conforme à l'arrêt de la Cour d'appel de Paris du 4 décembre 2019 dont il sera rappelé qu'il n'avait prononcé qu'une seule condamnation à paiement en faveur de l'appelant : celle portant sur la somme de 20 901,06 euros au titre de l'indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Il comporte la mention de la somme versée au salarié conformément à l'article R 3243-1 10°) du code du travail. L'arrêt a été pleinement exécuté de ce chef, si bien que le jugement sera confirmé en ce qu'il n'a pas fait droit à la demande d'institution d'une astreinte.

M. [Y], qui succombe, sera condamnée au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

- DÉCLARE irrecevable la demande de sursis à statuer dans l'attente du prononcé de la décision de la cour de renvoi ;

- REJETTE la demande de sursis à statuer dans l'attente de la décision statuant sur la requête en interprétation et retranchement formée contre l'arrêt du 4 décembre 2019 ;

- CONFIRME le jugement en date du 29 septembre 2021 en l'ensemble de ses dispositions ;

y ajoutant :

- DÉBOUTE M. [J] [Y] de sa demande de mise à la charge de la société Altran Technologies des frais d' exécution ;

- CONDAMNE M. [J] [Y] à payer à la société Altran Technologies la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile ;

- CONDAMNE M. [J] [Y] aux dépens d'appel.