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Décisions

Cass. 1re civ., 31 janvier 2018, n° 16-21.955

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Paris, du 07 juin 2016

7 juin 2016

Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant souscrit deux contrats d'assurance sur la vie auprès de la société Ecureuil vie, aux droits de laquelle se trouve la société CNP assurances (l'assureur), André E... a modifié la clause bénéficiaire de ces contrats, par avenants en date du 11 mai 2006 et du 19 mai 2006 ; qu'il est décédé le [...]         ; que, contestant la régularité du second avenant, M. Y..., l'un des bénéficiaires, a assigné l'assureur en paiement des capitaux-décès conformément au premier avenant ; que celui-ci a assigné en intervention forcée les autres bénéficiaires, M. André X... et Mme Suzanne X... (les consorts X...) ainsi que Ginette Z... ; que, cette dernière étant décédée en cours de procédure, Mme Corinne Z... et Colette Z... ont repris l'instance ; qu'à la suite du décès de cette dernière en cours de procédure, Mme Audrey A... et M. Alain A... (les consorts A...) ont repris l'instance ;

Sur le premier moyen, pris en sa première branche :

Attendu que les consorts X... font grief à l'arrêt de condamner l'assureur à leur payer ainsi qu'aux consorts A..., à M. Y..., Mme Corinne Z..., en application des avenants du 11 mai 2006, les capitaux-décès des deux contrats numérotés [...] et [...], alors, selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction et qu'il ne peut retenir, dans sa décision, les documents invoqués ou produits par les parties que si celles-ci ont été à même d'en débattre contradictoirement ; qu'en se fondant sur une analyse graphologique établie le 6 juin 2014 pour comparer les signatures respectivement apposées sur les avenants du 11 mai 2006 et sur ceux du 19 mai 2006, cependant qu'il ne résulte ni des énonciations de l'arrêt attaqué, ni des conclusions de chacune des parties visées par l'arrêt, ni des bordereaux de communication de pièces qui y sont respectivement attachés, que cet acte ait été versé contradictoirement aux débats, la cour d'appel a violé les articles 15, 16 et 132 du code de procédure civile ;

Mais attendu que, contrairement à ce qui est soutenu, la pièce litigieuse a été versée aux débats par sa communication le 1er avril 2015 ; que le moyen manque en fait ;

Mais sur la troisième branche du même moyen :

Vu l'article 1324 du code civil, dans sa version antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, ensemble les articles 287 et 288 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour statuer comme il a été dit, l'arrêt retient qu'à défaut pour les consorts X... de produire des éléments originaux de comparaison de l'écriture d'André E... pour une période de temps avoisinante à celle de la signature des deux avenants, il n'y a pas lieu d'ordonner une procédure de vérification d'écriture ; qu'il ajoute que le doute ne pouvant être levé sur l'auteur des signatures et mentions des avenants du 19 mai, les consorts X... ne rapportent pas la preuve de ce que ces derniers étaient de la main d'André E... ;

Qu'en statuant ainsi, alors que lorsque l'écriture et la signature d'un acte sous seing privé sont déniées ou méconnues, il appartient au juge de vérifier l'acte contesté en enjoignant aux parties de produire tous documents utiles à comparer à l'écrit contesté et, au besoin, en ordonnant une expertise, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et sur le second moyen :

Vu les articles 4 et 5 du code de procédure civile ;

Attendu que, pour condamner les consorts X... sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt retient que l'équité commande de les condamner in solidum à payer la somme de 1 500 euros à l'assureur ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'assureur ne formulait aucune demande de ce chef, la cour d'appel, qui a modifié l'objet du litige, a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les deuxième et quatrième branches du premier moyen :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 juin 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne M. Y... et Mme Corinne Z..., M. Alain A..., Mme Audrey A..., ès qualités, aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne in solidum à payer à M. André X... et Mme Suzanne X... la somme globale de 3 000 euros et rejette la demande de M. Y... ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente et un janvier deux mille dix-huit.