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Décisions

CA Paris, 3e ch. C, 27 juin 2003, n° 2002/18120

PARIS

Arrêt

Autre

PARTIES

Demandeur :

M. d'Herbais

Défendeur :

Me Lessertois (ès qual.)

T. com. Paris, du 21 janv. 2002

21 janvier 2002

Vu l'appel-nullité interjeté par M. Pierre-Guillaume d'Herbais du jugement, rendu le 21 janvier 2002 par le tribunal de commerce de Paris, qui, sur recours de M. d'Herbais, déclare nulle l'ordonnance du juge-commissaire en date du 19 décembre 2000 et, statuant à nouveau, ordonne la vente du bien immobilier sis à Boulogne (92), 1 avenue Jean-Baptiste Clément, 2 rue Gambetta, suivant la forme prescrite en matière de saisie immobilière, fixe la mise à prix à 1.030.000 euros net vendeur et autorise Me Lessertois, ès qualités, à faire procéder à des publicités dans les grands quotidiens nationaux et journaux spécialisés pour un budget compris entre 12.000 et 15.000 euros, dit que la société Baticréances devra justifier de sa qualité de créancier venant aux droits de l'UIC/Sofal, dit les parties mal fondées pour le surplus en leurs demandes et les en déboute ;

Vu l'arrêt avant dire droit en date du 21 mars 2003 par lequel la cour a ordonné la réouverture des débats pour recueillir les observations des parties sur la recevabilité de l'appel-nullité formé par M. d'Herbais au regard des dispositions des articles 463 et 464 du nouveau code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 24 avril 2003 pour l'appelant qui prie la cour de déclarer son appel-nullité recevable, constater la nullité du jugement en ce qu'il ordonne la vente par adjudication du bien immobilier de M. d'Herbais et fixe les conditions de cette vente et, en conséquence, d'infirmer le jugement du tribunal de commerce de Paris de ce chef, de débouter les défendeurs Me Lessertois et le scp Pavec-Courtoux, agissant ès qualités, de l'ensemble de leurs demandes, de confirmer le jugement entrepris en toutes ses autres dispositions et de condamner Me Lessertois, ès qualités, au paiement de la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 18 avril 2003 pour Me Lessertois et la scp Pavec-Courtoux, respectivement commissaire à l'exécution du plan et représentant des créanciers de la société SEGRS, de la sci de saint Nicolas et de M. d'Herbais, qui demandent à la cour de juger M. d'Herbais irrecevable et mal fondé en son appel-nullité et de l'en débouter, en tout état de cause, “d'évoquer“ le dossier au fond et d'autoriser Me Laurence Lessertois, ès qualités, à céder suivant la forme prescrite en matière de saisie immobilière et aux conclusions qu'elle précise les biens énumérés dans le dispositif de ses écritures, avec notamment une mise à prix de 1.030.000 euros, de l'autoriser à faire procéder à des publicités dans les grands quotidiens nationaux et journaux spécialisés, pour un coût total n'excédant pas 15.000 euros, de dire que la vente des biens sera poursuivie devant le tribunal de grande instance de Paris sous la constitution de Me Stéphane Dumaine-Martin, avocat, et de condamner M. d'Herbais au paiement de la somme de 5.000 euros sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile ;

Vu les dernières conclusions déposées au greffe le 24 février 2003 pour la société Suez, assignée en intervention forcée en sa qualité de contrôleur au redressement judiciaire, qui prie la cour de lui donner acte de ce qu'elle s'associe, sur le principe, à la demande de Me Lessertois de faire procéder à la vente, suivant la forme prescrite en matière de saisie immobilière, de l'immeuble sis à Boulogne-Billancourt appartenant à M. d'Herbais devant le tribunal de grande instance de Paris, sous réserve de la fixation d'une mise à prix à dire d'expert et de la réalisation de publicités dans des revues spécialisées pouvant toucher une clientèle internationale, de réformer dès lors, parte in qua, le jugement déféré, de confirmer ce même jugement en ce qu'il a dit que la société Baticréances devra justifier de sa qualité de créancier venant aux droits de l'UIC/Sofal ;

SUR CE, LA COUR

Considérant que suivant jugement du 22 avril 1992, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession des portefeuilles de courtage d'assurance de la société SEGRS et de M. d'Herbais et désigné Me Laurence Lessertois en qualité de commissaire à l'exécution du plan avec mission de vendre les actifs immobiliers non compris dans le plan ;

Considérant que, par ordonnance sur requête en date du 19 décembre 2000, le juge-commissaire a autorisé Me Lessertois à vendre à l'amiable l'immeuble de Boulogne-Billancourt, appartenant à M. d'Herbais, moyennant le prix de 6.760.000 francs ; que sur opposition de celui-ci, le tribunal a rendu la décision frappée d'appel ;

Considérant que la disposition du jugement déclarant nulle l'ordonnance n'est l'objet d'aucune critique des parties ;

Considérant que M. d'Herbais a formé un appel-nullité du jugement seulement en celle de ses dispositions qui ordonne la vente par adjudication du bien en cause en invoquant l'existence de vices graves relevés d'une part de ce que le tribunal a statué “extra petita“ et dans un domaine où il n'avait aucune compétence juridictionnelle, ce qui, selon lui, constitue un excès de pouvoir, d'autre part de la violation de principes essentiels de procédure (privation de recours pour le débiteur, absence d'audition du débiteur et du contrôleur sur la mise à prix et les modalités de la vente) ;

Considérant d'abord que M. d'Herbais soutient à bon droit que le fait reproché au tribunal d'avoir statué sur chose non demandée n'étant pas le seul grief allégué, l'irrégularité de la décision attaquée ne peut être réparée par la procédure prévue par les articles 463 et 464 du nouveau code de procédure civile ; que l'appel-nullité est donc recevable ;

Considérant ensuite que le juge-commissaire a été saisi d'une requête de Me Lessertois, commissaire à l'exécution du plan, sollicitant l'autorisation de procéder à la vente amiable de l'immeuble dépendant de l'actif de la procédure moyennant le prix de 6.760.000 francs, requête à laquelle il a été fait droit par l'ordonnance sus-rappelée du 19 décembre 2000 ; que le recours engagé par M. d'Herbais visait à l'annulation de cette décision, demande à laquelle Me Lessertois s'est bornée à opposer qu'elle était recevable et mal fondée ; qu'en ordonnant, après avoir annulé la décision du juge-commissaire, la vente du bien suivant la forme prescrite en matière de saisie immobilière avec fixation du prix et des conditions essentielles de la vente et ce, sans avoir, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 622-16 du code de commerce, entendu le débiteur, le tribunal a d'une part excédé les limites de sa saisine, d'autre part violé le principe essentiel de procédure de la contradiction ; que l'appel-nullité est en conséquence justifié ;

Considérant que faute de saisine régulière du tribunal et dès lors que M. d'Herbais n'a conclu au fond qu'à titre subsidiaire, l'effet dévolutif de l'appel ne peut jouer et qu'il y a lieu de renvoyer Me Lessertois, ès qualités, à mieux se pourvoir ;

Considérant que l'équité commande de n'allouer aux parties aucune indemnité de procédure ;

Considérant que les dépens d'appel seront, comme ceux de première instance, pris en frais privilégiés de redressement judiciaire ;

Par ces motifs

Annule le jugement déféré en celle de ses dispositions qui ordonne la vente du bien immobilier sis à Boulogne (92), 1 avenue Jean-Baptiste Clément, 2 rue Gambetta, suivant la forme prescrite en matière de saisie immobilière,

Déboute les parties de leurs demandes d'indemnité de procédure,

Dit que les dépens d'appel seront pris en frais privilégiés de redressement judiciaire et admet, dans la limite de leurs droits, les avoués de la cause au bénéfice des dispositions de l'article 699 du nouveau code de procédure civile.