CA Poitiers, 2e ch. civ., 9 novembre 2021, n° 20/01366
POITIERS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Les Flaneries (SA)
Défendeur :
Micromania (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Franco
Conseillers :
M. Chiron, M. Vetu
EXPOSE DU LITIGE :
Par acte sous seing privé en date du 15 novembre 2002, la société anonyme Les Flaneries a donné à bail commercial à la société anonyme simplifiée Micromania,en vue de l'exploitation d'un commerce de vente et location de jeux vidéo, et de tout système de loisir interactif, un local n° 9B2 situé dans le centre commercial Les Flaneries à La Roche-sur-Yon, pour une durée de 12 années à compter du 15 novembre 2002, moyennant le paiement d'un loyer annuel de 36.588 euros hors taxes et hors charges, avec clause d'indexation annuelle en fonction de la variation de l'indice ISEE du coût de la construction, et d'un droit d'entrée de 22000 euros HT à titre de supplément de loyer.
Par acte d'huissier en date du 5 mai 2014, la société Les Flaneries a donné congé à la société Micromania pour le 14 novembre 2014, avec offre de renouvellement pour une durée de 12 ans, sous réserve que le loyer annuel soit porté à la somme de 59.200 euros.
La société Micromania a accepté le principe du renouvellement pour une durée de 9 ans, mais non celui d'une augmentation de loyer.
Les parties n'ont pu se concilier devant la commission des baux commerciaux de la Vendée, lors de sa réunion du 31 aout 2015, du fait de la carence de la société locataire.
Par acte d'huissier en date du 2 mai 2017, la société Les Flaneries a donc fait assigner la société Micromania devant le tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon, pour voir fixer le montant du loyer du bail à la valeur de 59.200 euros par an hors taxes et hors charges.
Par jugement réputé contradictoire et avant-dire droit en date du 5 juillet 2017, le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de la Roche-sur-Yon a ordonné une mesure d'expertise et a commis pour y procéder M. L., avec pour mission de déterminer la valeur locative de l'immeuble loué (le principe du déplafonnement étant acquis compte tenu de la durée du bail de 12 ans).
Dans son rapport déposé le 9 mai 2018, l'expert désigné a conclu à une valeur locative de 40.000 euros par an, pour une surface pondérée du local de 80 m².
La société Les Flaneries a maintenu sa demande initiale en fixation du loyer à la somme de 59'200 euros hors-taxes et hors charges avec réévaluation du dépôt de garantie en proposant subsidiairement de déduire de ce montant la taxe foncière de 1382,03 euros.
En réponse, la société Micromania, a sollicité devant le premier juge l'homologation du rapport d'expertise et la fixation du loyer à la somme de 40'000 euros hors-taxes et hors charges dont à déduire le montant de l'impôt foncier, ainsi que la condamnation du bailleur à lui rembourser les loyers trop perçus depuis le 14 novembre 2014 avec intérêts aux taux légal.
Par un jugement assorti de l' exécution provisoire en date du 24 juin 2020, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de La Roche-Sur-Yon a :
- fixé le loyer annuel du bail renouvelé au 14 novembre 2014 à la somme de 38.617,97 ' hors taxes et hors charges (déduction faite du montant de la taxe foncière)
- condamné la société Les Flaneries à rembourser à la société Micromania les loyers trop-perçus depuis le 14 novembre 2014 et à payer des intérêts légaux sur les loyers trop-perçus,
-ordonné la capitalisation des intérêts échus dans les conditions prévues par l'article 1154 du code civil,
- condamné la société Les Flaneries à payer à la société Micromania la somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procedure civile,
- condamné la société Les Flaneries aux dépens avec application des dispositions de l'article 699 du code de procedure civile.
Par déclaration en date du 17 juillet 2020, la société Les Flaneries a interjeté appel du jugement en ses chefs expressément critiqués.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 9 avril 2021, la société Les Flaneries demande à la cour :
Vu les articles L145-33 et suivants du code de commerce,
Vu l'article L145-34 du code de commerce,
Vu l'article L145-36 du code de commerce,
Vu les articles R145-1 et suivants du code de commerce,
Vu la durée de plus de plus de douze années du bail expiré,
Vu les loyers pratiqués pour les locaux situés dans le Centre commercial des Flaneries,
Vu la date de signification du congé antérieure à la publication de la Loi Pinel n°2014-626 du 18 juin 2014,
Vu les pièces susvisées,
Vu la jurisprudence citée,
- de la recevoir en son appel, le dire bien fondé et y faisant droit;
- de réformer en tous points le jugement,
Par l'effet dévolutif de l'appel, et statuant à nouveau,
-de juger que le plafonnement est acquis du fait de la durée de 12 années du bail expiré,
- de juger que les prix couramment pratiqués dans le voisinage doivent consister en des références homogènes,
-de juger que la valeur locative doit être fixée par comparaison uniquement avec des locaux situés dans la même partie du Centre commercial des Flaneries et ayant une activité comparable à celle de Micromania,
-de juger que les références pertinentes sont celles d'ADOPT et de BLD DONJON citées dans le rapport d'expertise,
- de juger en conséquence que le loyer sollicité dans le congé à effet du 14 novembre 2014 par la société Les Flaneries à la société Micromania est conforme à ces références,
À titre principal,
-de fixer la valeur locative, à compter du 14 novembre 2014, date d'effet du congé aux fins de renouvellement, à la somme annuelle de cinquante neuf mille deux cents euros (59 200 euros) hors taxes et hors charges et dépôt de garantie réévalué, les autres charges et conditions demeurant inchangées, soit la valeur locative de l'immeuble,
-de juger que la taxe foncière ne doit donner lieu ni à déduction ni à abattement,
A titre subsidiaire,
-de fixer la valeur locative, à compter du 14 novembre 2014, date d'effet du congé aux fins de renouvellement, à la somme annuelle de cinquante neuf mille deux cents euros (59 200 euros) Hors Taxes et Hors Charges et dépôt de garantie réévalué, les autres charges et conditions demeurant inchangées, soit la valeur locative de l'immeuble,
-de déduire le montant de la taxe foncière soit la somme de 1.382,03 euros de la valeur locative annuelle,
Plus subsidiairement,
Si la cour considérait qu'elle ne disposait pas de tous les éléments lui permettant de statuer sur la valeur locative,
-de désigner tel Expert qu'il lui plaira avec pour mission :
- Convoquer les parties et leurs conseils,
- Se rendre sur place dans les locaux donnés à bail par la société Les Flaneries à la société Micromania sis à La Roche-sur-Yon (85000) ' Centre commercial Les Flaneries ;
- Décrire les lieux, avec si besoin plan à l'appui ;
- Proposer un calcul de la surface pondérée ;
- Entendre contradictoirement les parties en leurs dires et explications; - Entendre tout sachant ;
- Se faire remettre tous documents et pièces utiles à l'accomplissement de sa mission ;
- Fournir tous éléments d'appréciation permettant à la cour de déterminer et chiffrer la valeur locative à la date de renouvellement du bail ;
- Dit que l'expert déposera préalablement à son rapport une note de synthèse ;
- Répondre aux dires des parties auxquelles un projet de rapport devra préalablement avoir été communiqué ;
- Partager les frais d'expertise par moitié entre chacune des parties,
En tout état de cause,
- de débouter la société Micromania de l'ensemble de ses demandes, fins, moyens et conclusions,
-de les dire autant irrecevables qu'infondées.
-de condamner la société Micromania à payer à la société Les Flaneries, en cause d'appel, la somme de 6.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
-de juger que dans l'hypothèse où à défaut de règlement spontané des condamnationsprononcées dans l'arrêt à intervenir, l' exécution forcée devra être réalisée par l'intermédiaire d'un huissier, le montant des sommes retenues par l'huissier en application du décret du 10 mai 2007 numéro 2007-774 portant modification du décret du 12 décembre 1996 numéro 96 1080 (tarif des huissiers) devra être supporté par le débiteur en sus de l'application de l'article 700 du code de procédure civile,
-de condamner la société Micromania aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, avec distraction au profit de l'avocat soussigné aux offres de droit.
Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 14 janvier 2021, la société Micromania demande à la cour:
Vu les articles L145-33 et L145-34 du code de commerce,
Vu les pièces versées aux débats,
Vu la jurisprudence citée,
-de déclarer la société Les Flaneries mal fondée en son appel,
- de la débouter de toutes ses demandes,
- de confirmer le jugement du juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de la Roche-sur-Yon rendu le 24 juin 2020 en toutes ses dispositions,
En tout état de cause :
-de débouter la société Les Flaneries de toutes demandes, fins et conclusions formées en cause d'appel,
-de condamner la société Les Flaneries à payer à la société Micromania une somme de 6000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d'appel,
- de condamner la société Les Flaneries aux entiers dépens de l'appel.
Conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précités pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
L'ordonnance de clôture a été prononcée le 30 août 2021.
MOTIFS DE LA DECISION:
1- Sur la recevabilité de l'appel:
Il n'existe aucune contestation sur la recevabilité de l'appel ni de cause d'irrecevabilité susceptible d'être relevée d'office par la cour.
L'appel sera donc déclaré recevable.
2- Sur la recevabilité des demandes de la société Micromania:
Au dispositif de ses conclusions, la société Les Flâneries demande à la cour de déclarer irrecevables les demandes et prétentions de la société Micromania.
Toutefois, l'appelante n'a fait valoir dans la partie Discussion de ses écritures aucune fin de non-recevoir, au sens de l'article 122 du code de procédure civile.
Il n'existe aucune fin de non-recevoir susceptible d'être relevée d'office par la cour.
Les demandes de la société Micromania doivent en conséquence être déclarées recevables.
3- Concernant le droit au déplafonnement:
Selon les dispositions de l'article L.145-34 du code de commerce, 'à moins d'une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l'article L. 145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d'effet du bail à renouveler, si sa durée n'est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéa de l'article L. 112-2 du code monétaire et financier, publiés par l'Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l'indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculée sur la période de neuf ans antérieure au dernier indice publié. Le déplafonnement du loyer est acquis compte tenu de la durée du bail à renouveler, supérieur à 9 ans.
Il en résulte que lorsque le bail initialement consenti est d'une durée de plus de 9 années (soit en l'espèce 12 ans), le loyer échappe de plein droit à la règle du plafonnement, ce que ne conteste pas la société Micromania.
Le loyer doit donc être fixé à la valeur locative, ainsi que le premier juge l'a rappelé à juste titre.
4- Concernant la fixation du loyer du bail renouvelé:
4.1- Sur la possibilité de fixer le loyer à une valeur inférieure au montant du loyer payé au jour de la demande de renouvellement:
La société appelante critique le jugement, en ce qu'il a validé le raisonnement de l'expert, et fixé le montant du loyer déplafonné à 38617,97 euros, soit une valeur moindre que le loyer indexé payé au jour de la demande de renouvellement (à savoir 51500,14 euros HT et hors charges au 1er janvier 2014).
Elle soutient que 'selon la logique des dispositions du code de commerce', et par analogie avec les dispositions en vigueur pour les baux d'une durée de 9 ans (article L.145-34) pour lesquels les conditions du déplafonnement ne sont pas réunies, le loyer applicable lors de la prise d'effet du bail renouvelé de 12 ans doit correspondre pour le moins au loyer résultant de l'indexation, selon la variation de l'indice trimestriel des loyers commerciaux depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré.
Mais ce premier argument est inopérant et doit être écarté, puisque dans le cadre d'un déplafonnement, le nouveau loyer doit être fixé à la valeur locative du bien, quelqu'en soit le montant, même inférieur au loyer en vigueur, et indépendamment du sens de la variation de l'indice.
4.2- Sur les contestations relatives à la fixation du loyer du bail renouvelé:
Selon les dispositions de l'article L145-33 du code de commerce:'Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
A défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1°- les caractéristiques du local considéré,
2°- la destination des lieux,
3°- les obligations respectives des parties,
4°- les facteurs locaux de commercialité,
5°- les prix couramment pratiqués dans le voisinage.
Un décret en Conseil d'Etat précise la consistance de ces éléments'.
Selon les dispositions de l'article R. 145-7 du code de commerce, les prix couramment pratiqués dans le voisinage par unité de surface concernent des locaux équivalents eu égard à l'ensemble des éléments mentionnés aux articles R. 145-3 à R.145-6.
Le premier juge a relevé, à bon droit, que le local en litige, d'une surface pondérée de 80 m², parfaitement entretenu et adapté au commerce exercé, bénéficie d'un emplacement très favorable, au sein du plus grand centre commercial de Vendée, avec une forte concentration de boutiques (51 enseignes), une excellente visibilité depuis la route de Nantes, un parking de 1200 places, en soulignant, toujours à juste titre, que la présence de marques de 'mass market' ne constituait en rien un facteur de dégradation de la commercialité (décrite comme excellente par l'expert judiciaire) puisqu'elle a bien au contraire pour conséquence d'attirer un grand nombre de consommateurs du fait de la présence d'enseignes jouissant d'une forte renommée telles que Celio, FNAC, H&M, Afflelou.
Il convient d'ajouter que la société Micromania ne verse au débat aucun élément objectif de nature à étayer ses dires, selon lesquels le centre commercial souffrirait de difficultés structurelles, d'un nombre insuffisant de toilettes publiques, d'un manque de propreté ou présenterait un accès piétons dangereux en direction du parking. L'expert judiciaire n'a rien remarqué de tel lors de sa visite des lieux, au contradictoire des parties. Aucune plainte n'a été communiquée.
En outre, dans son avis de valeur rédigé le 29 mars 2021 à la demande de la société Les Flaneries, régulièrement versé aux débats et soumis à la libre discussion des parties, M. P., expert honoraire, relève que la fréquentation du centre commercial a augmenté entre 2011 et 2014 (4 967 065 entrées en 2011 et 5 239 981 entrées en 2014) et que le chiffre d'affaires a également progressé, passant de 54 110 727 euros en 2014 à 61 921 137 euros en 2019.
De même, il n'est nullement justifié d'une difficulté liée à la destination spécialisée de son bail (exploitation d'un commerce de vente et location de jeux vidéos, et de tout système de loisir interactif), et l'appelante réplique à juste titre que la cession du fonds de commerce ne pourrait en toutes hypothèses intervenir qu'en faveur d'un commerçant exerçant la même activité, et que l'existence d'un bail tous commerces aurait constitué un facteur de majoration de la valeur locative.
Au titre des facteurs locaux de commercialité, c'est en vain que la société Micromania entend tirer argument de la fermeture du magasin Mr B., en juillet 2020, puisque cet évènement ne se situe pas dans la période de référence, qui a pris fin le 14 novembre 2014.
Par ailleurs, le centre commercial les Flâneries constitue une unité économique propre, et les comparaisons devaient être effectuées seulement avec les loyers des commerces implantés dans ce même centre.
Aucune des parties n'a par ailleurs contesté l'observation faite par l'expert judiciaire selon laquelle les petites surfaces commerciales sont toujours plus chères au mètre carré que les grandes surfaces, et M. L. a noté d'ailleurs dans son rapport (page 19) que le mandataire du bailleur faisait état d'une demande constante de petites surfaces à louer.
La cour observe toutefois que l'expert judiciaire n'a pas apporté une réponse suffisamment argumentée à la critique qui était faite à l'égard du pré-rapport, concernant un manque de cohérence dans les références retenues à titre de comparaison, dans lesquelles figurent des enseignes très dissemblables, tant par leur surface que leur activité (restauration, bijouterie, vente de meubles, coiffure).
En particulier, en réponse au dire concernant l'application d'un coefficient de 40% sur les loyers Celio et Papaya, M. L. a seulement indiqué qu'il n'existait aucune méthode de calcul, et qu'il retenait un tel pourcentage par habitude, en fonction des écarts de surface.
La société Les Flâneries est ainsi fondée à souligner qu'en raison de la différence de taux de marge entre commerces indépendants et enseignes nationales ou internationales, qui influe nécessairement sur la capacité du locataire à négocier la réduction des baux de surfaces importantes, l'expert judiciaire ne pouvait appliquer le même coefficient de correction (40%) au loyer Celio (vente de vêtements) et au magasin Papaya (vente de meubles de objets exotiques de décoration).
Il apparaît dès lors que l'approche faite par M. P. est plus conforme à la valeur du marché, en ce qu'elle privilégie, à juste titre, au titre des éléments de référence à l'intérieur du centre, des locaux de surface comparables (toutes inférieures à 200 m²), des locaux destinés à des activités de vente de produits non-essentiels, et des enseignes implantées à proximité du local loué à la société Micromania (Julien D., Adopt, Fan d'Or, Optique les Flâneries), près de la porte B, qui correspond à l'une des deux portes d'accès les plus fréquentées du centre.
Les références retenues par M. P., en pages 21 et 22 de son rapport, comportent à la fois des baux renouvelés (SFR, Philophine, Optique les Flâneries, Fan d'or) et des nouveaux baux (BAMG, bail du 26 février 2015, Adopt, bail du 1er septembre 2017).
Il en résulte un loyer moyen de 792.50 '/m² et par an sur ces six éléments de référence.
En application de l'article R.145-8 du code de commerce, il convient de tenir compte du fait que le bail renouvelé met à la charge du locataire toutes les réparations, sans distinction, y compris les grosses réparations prévues par l'article 606 du code civil (article 2.2-1), ce qui constitue un facteur de diminution de la valeur locative.
Il y a donc lieu d'infirmer le jugement, et de fixer le loyer du bail renouvelé sur une base de 700 euros par m² et par an, ainsi que suggéré par M. P..
En application de l'article R.145-8, il convient en outre de déduire le montant de l'impôt foncier dont le paiement incombe légalement au bailleur, et qui a été mis dans le bail à la charge de la société locataire (soit 1382.03 euros).
Le loyer du bail renouvelé sera donc fixé à (700 x 80) - 1382.03 = 54617.97 euros, hors taxe et hors charge.
Le montant du dépôt de garantie devra être révisé conformément à l'article 7 du bail.
La demande subsidiaire tendant à l'organisation d'une mesure d'expertise est sans objet.
Il convient de rejeter la demande de remboursement des loyers trop perçus depuis le 14 novembre 2014, compte tenu du montant du loyer du bail renouvelé, supérieur au montant du loyer résultant de l'indexation(50996,78 euros) hors taxes et hors charges.
Aucune des parties n'a formulé, dans le dispositif de ses dernières conclusions, de prétention relative à l'application ou à la non-application du dispositif de lissage prévu par l'article L. 145-34 dernier alinéa du code de commerce, dans sa rédaction issue de la loi n°2014-626 du 18 juin 2014.
En application de l'article 954 alinéa 3 du code de procédure civile, la cour n'est donc pas saisie de la contestation évoquée de ce chef dans le corps des conclusions des parties.
5- Sur les demandes accessoires :
Dès lors qu'elle échoue en ses prétentions au terme de l'instance, la société Micromania doit supporter les dépens de première instance et d'appel en ce compris les frais d'expertise judiciaire, ainsi que ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
Il est équitable d'allouer à la société les Flâneries indemnité de 6000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d'appel.
L'article L.111-8 du code des procédures civiles d' exécution , anciennement article 32 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 dispose qu'à l'exception des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement qui peuvent être mis partiellement à la charge des créanciers dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, les frais de l' exécution forcée sont à la charge du débiteur, sauf s'il est manifeste qu'ils n'étaient pas nécessaires au moment où ils ont été exposés; les contestations sont tranchées par le juge de l' exécution .
Selon l'article L.141-6 du code de la consommation, issu de la loi n°2010-1609 du 22 décembre 2010, devenu article R.631-4 du même code , lors du prononcé d'une condamnation, le juge peut, même d'office, pour des raisons tirées de l'équité ou de la situation économique du professionnel condamné, mettre à sa charge l'intégralité des droits proportionnels de recouvrement ou d'encaissement prévus à l'article L. 111-8 du code des procédures civiles d' exécution , anciennement article 32 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991 portant réforme des procédures civiles d' exécution .
En l'espèce, en l'absence d'application de l'article R.631-4 du code de la consommation, eu égard à la qualité des parties et à l'absence de succombance d'un professionnel dans un litige l'opposant au consommateur, le droit d'encaissement prévu par ces articles est à la charge du créancier, de sorte que rien ne justifie d'en faire supporter le coût par le débiteur en cas d' exécution forcée sur laquelle la cour n'a pas à se prononcer.
Il n'y a donc pas lieu de mettre cette somme à la charge de la société Micromania.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Déclare l'appel recevable,
Rejette la fin de non-recevoir soulevée par la société les Flâneries,
Statuant dans les limites de l'appel,
Infirme le jugement en toutes ses dispositions,
Fixe le loyer annuel du bail renouvelé au 14 novembre 2014, date d'effet du congé aux fins de renouvellement, à la valeur locative, soit 54617.97 euros (cinquante-quatre mille six cent dix-sept euros et quatre-vingt-dix-sept centimes), hors taxe et hors charges, après déduction du montant de la taxe foncière, les autres charges et conditions du bail demeurant inchangées,
Dit que le montant du dépôt de garantie sera révisé,
Y ajoutant,
Condamne la société Micromania à payer à la société les Flâneries la somme de 6000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les autres demandes,
Condamne la société Micromania aux dépens de première instance et d'appel, et autorise la Selarl Atlantic Juris, avocat, à faire application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.