ADLC, 18 avril 2023, n° 23-D-05
AUTORITÉ DE LA CONCURRENCE
relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériels de boulangerie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Délibéré sur le rapport oral de Mme Frédérique Laporte et Mme Mélissa Nobileau, rapporteures et l’intervention de Mme Pascale Déchamps, rapporteure générale adjointe, par Mme Fabienne Siredey-Garnier, vice-présidente, présidente de séance, Mme Laurence Borrel-Prat, Mme Valérie Bros et M. Jean-Yves Mano, membres.
L’Autorité de la concurrence (section II),
Vu la décision n° 18-SO-15 du 20 septembre 2018 enregistrée sous le numéro 18/0147 F, par laquelle l’Autorité de la concurrence s’est saisie d’office de pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériels de boulangerie ;
Vu le Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne, et notamment son article 101 ; Vu le livre IV du code de commerce, et notamment son article L. 420-1 ;
Vu la décision du rapporteur général du 24 août 2022 disposant que l’affaire fera l’objet d’une décision de l’Autorité de la concurrence sans établissement préalable d’un rapport ;
Vu les procès-verbaux de transaction des 22 et 23 novembre 2022 signés par la rapporteure générale adjointe avec la société ALI Holding SRL, les sociétés Bongard, Ali SAS et AFE Bakery, l’Association des concessionnaires Bongard et la société Euromat, en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce ;
Vu les observations du commissaire du Gouvernement, de l’Association des concessionnaires Bongard et des sociétés Euromat, Bongard, AFE Bakery, Ali SAS et ALI Holding SRL ;
Vu la note en délibéré des sociétés Bongard, AFE Bakery et Ali SAS du 8 février 2023 ; Vu les autres pièces du dossier ;
Les rapporteures, la rapporteure générale adjointe, les représentants des sociétés ALI Holding SRL, Bongard, Ali SAS, AFE Bakery, Euromat et de l’Association des concessionnaires Bongard, ainsi que la commissaire du Gouvernement entendus lors de la séance de l’Autorité de la concurrence du 7 février 2023 ;
Adopte la décision suivante :
Résumé1
Aux termes de la présente décision, l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») sanctionne l’Association des concessionnaires Bongard (ci-après l’« ACB »), la société Bongard et ses sociétés mères, AFE Bakery, ALI Holding SRL et Ali SAS (« Bongard »), ainsi que la centrale d’achat Euromat pour avoir mis en œuvre des pratiques contraires aux articles 101 paragraphe 1 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (« TFUE ») et L. 420-1 du code de commerce.
Au titre du premier grief, l’Autorité sanctionne Bongard et l’ACB pour s’être entendues, au sein de l’ACB, aux fins de déterminer en commun le prix de la machine « Paneotrad », une machine brevetée par Bongard et commercialisée depuis 2006, combinant les fonctions de diviseuse, façonneuse et de repose-pâtons, distribuée à travers le réseau de distribution Bongard et par Bongard elle-même.
Au titre du second grief, l’Autorité sanctionne Bongard, l’ACB ainsi que la centrale d’achat Euromat pour avoir mis en place une interdiction de ventes passives. La pratique a consisté à interdire aux distributeurs adhérents de l’ACB et membres des réseaux de distribution exclusive de Bongard et d’Euromat, d’effectuer, en dehors de leurs zones d’exclusivité territoriale, des ventes passives de matériels de pâtisserie-boulangerie (à l’exclusion des produits d’occasion), de pièces détachées et de services après-vente, auprès de toute leur clientèle (artisans, grandes et moyennes surfaces, chaînes nationales et régionales de boulangerie-pâtisserie ainsi qu’installateurs de pièces détachées).
L’ACB, Bongard et Euromat ont sollicité de l’Autorité le bénéfice de la procédure de transaction, en application des dispositions du III de l’article L. 464-2 du code de commerce. La mise en œuvre de cette procédure a donné lieu à l’établissement d’un procès-verbal, pour chacune des mises en cause, signé par la rapporteure générale adjointe, fixant le montant maximal et minimal de la sanction pécuniaire qui pourrait être infligée par l’Autorité.
L’Autorité, après avoir examiné l’ensemble des faits, a estimé qu’il y avait lieu de prononcer une sanction à l’encontre de chacune des mises en cause d’un montant compris dans la fourchette figurant dans les procès-verbaux de transaction.
Au total, l’Autorité a infligé les sanctions pécuniaires suivantes :
à l’ACB, une sanction de 1 500 000 euros ;
à Bongard, solidairement avec ses sociétés mères, une sanction de 1 200 000 euros ;
à Euromat, une sanction de 250 000 euros.
I. Constatations
A. LA SAISINE
1. Par courrier du 18 juin 2018, la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (ci-après « DGCCRF ») a transmis à l’Autorité de la concurrence (ci-après « l’Autorité ») un rapport administratif d’enquête (ci-après « RAE ») relatif à la situation de concurrence dans le secteur de la distribution de matériels de boulangerie2, établi sur le fondement de l’article L. 450-3 du code de commerce par la Brigade interrégionale d’enquête de concurrence de Metz et concluant à l'existence de pratiques ayant pour objet et pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.
2. Par décision n° 18-SO-15 du 20 septembre 2018, enregistrée sous le numéro 18/0147 F, l’Autorité s’est saisie d’office des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériels de boulangerie.3
3. Le rapporteur général a décidé, en application de l’article L. 463-3 du code de commerce, que l’affaire serait examinée par l’Autorité sans établissement préalable d'un rapport, ce dont les parties intéressées et le commissaire du Gouvernement ont été informés par lettre du 24 août 20224.
4. Une notification des griefs datée du 9 septembre 2022 a été adressée à l’Association des concessionnaires Bongard (ci-après « l’ACB ») ainsi qu’aux sociétés Euromat, Bongard, AFE Bakery, Ali SAS et ALI Holding SRL5.
5. Par procès-verbaux distincts du 22 novembre 2022, les sociétés ALI Holding SRL d’une part, Bongard, Ali SAS et AFE Bakery d’autre part, se sont engagées à ne pas contester les griefs qui leur ont été notifiés. L’ACB et la société Euromat SRL en ont fait de même par procès-verbaux distincts signés le 23 novembre 20226.
6. Lors de la séance du 7 février 2023, l’ACB et les sociétés Euromat, Bongard, Ali SAS, AFE Bakery et ALI Holding SRL ont confirmé leur accord avec les termes de la transaction.
B. LE SECTEUR D’ACTIVITE ET SES ACTEURS
7. Seront successivement présentés le secteur de la distribution des matériels nécessaires à l’activité des boulangeries-pâtisseries, les différents types de clientèle, les fabricants et les distributeurs de ces matériels.
1. LES MATERIELS DE BOULANGERIE-PATISSERIE
8. Les matériels nécessaires à l’activité des boulangeries-pâtisseries consistent essentiellement en matériels de mélange visant à transformer les ingrédients en pâte, matériels « de froid » dédiés au levage et à la conservation de la pâte, machines (diviseuses, façonneuses, coupeuses, etc.), fours et terminaux de cuisson.
2. LA CLIENTELE DE MATERIELS DE BOULANGERIE-PATISSERIE
9. La demande actuelle de matériels de boulangerie-pâtisserie est constituée par :
les boulangeries-pâtisseries artisanales (ci-après les « artisans ») ;
les « Grands Comptes », qui se subdivisent eux-mêmes en deux catégories de clients :
les magasins de la grande distribution (ci-après « GMS » pour « grandes et moyennes surfaces »), tels Carrefour, Auchan, Super U, Cora ou encore Leclerc ;
les points de vente des chaînes nationales de boulangerie-pâtisserie, telles que La Mie Câline, Paul, Boulangerie Ange ou Marie Blachère (cette seule catégorie est parfois appelée « Grands Comptes », par opposition au caractère très spécifique des GMS) ;
les points de vente des chaînes régionales de boulangerie, regroupés sous la désignation de « Comptes développeurs ».
a) Les artisans
10. Ils constituent la principale catégorie de clients de matériels de boulangerie-pâtisserie. Selon le Président de l’ACB, leur nombre tendrait à diminuer en raison du développement des points de vente des chaînes nationales et régionales de boulangerie7, ce qui les inciterait à orienter leur activité vers la restauration rapide, ou « snacking », nécessitant des matériels moins onéreux8.
11. En 2017, les artisans représentaient, au sein du réseau Bongard, environ 30 000 prospects 9 sur un total de 40 00010 et constituaient la part la plus importante du chiffre d’affaires des distributeurs Bongard (entre 65 %11 et 90 %12) ainsi que des distributeurs de la société Fours Fringand, un des concurrents de Bongard13.
12. Selon le Président de l’ACB, « le réseau Bongard doit représenter près du tiers du marché des artisans »14.
b) Les « Grands Comptes »
GMS
13. Les GMS ont investi depuis une quinzaine d’années dans de véritables laboratoires de fabrication de boulangerie-pâtisserie, en remplacement de leurs terminaux de cuisson. Leur but est de développer une offre qualitative (pains spéciaux, bio), engendrant un chiffre d’affaires et une marge commerciale plus élevés que leur assortiment précédent, et de se démarquer des « points chauds », terminaux de cuisson permettant uniquement de cuire le pain, apparus dans les enseignes de hard-discount15.
14. En 2017, selon l’ACB, les GMS représentaient au sein du réseau Bongard environ 8 00016 prospects. Ce marché est stable depuis 15 ans17.
Les chaînes nationales de boulangerie
15. La plupart de ces chaînes sont exploitées sous contrat de franchise et se développent dans les zones commerciales périurbaines, notamment depuis 201518.
c) Les « Comptes développeurs » (chaînes régionales de boulangerie)
16. En 2016 et 2017, ces chaînes régionales représentaient, avec les chaînes nationales, entre 1 00019 et 1 20020 points de vente en France.
3. LES FABRICANTS DE MATERIELS DE BOULANGERIE-PATISSERIE
17. Il existe quatre principaux fabricants français de matériel de boulangerie-pâtisserie, dont deux appartiennent au même groupe21 :
la Société d’Équipement de Boulangerie Pâtisserie (SEBP), également connue sous la dénomination de Fours Pavailler ;
Bongard ;
Eurofours ;
Fours Fringand.
Les sociétés Bongard et SEBP font actuellement partie du groupe AFE Bakery SAS (ALI Group) et disposent de services support communs (ressources humaines, comptabilité, achats, directions générale et commerciale)22.
18. Aucune donnée complète relative au chiffre d’affaires réalisé en France par l’ensemble des fabricants français et étrangers de fours, équipements et matériels de boulangerie-pâtisserie et aux parts de marché respectives des différents fabricants n’a pu être obtenue lors de l’enquête et de l’instruction.
19. Bongard, société française créée en 1922 et présente dans plus de 90 pays, fabrique et commercialise sous sa marque une large gamme de matériels de boulangerie-pâtisserie, tels que des pétrins et machines de transformation de la pâte, des fours (à soles, rotatifs et ventilés) ou encore des chambres de fermentation, surgélation et conservation23. Bongard a déposé plusieurs brevets pour des équipements de boulangerie-pâtisserie, tels que les fours à soles de la gamme « Cervap »24 ou la machine « Paneotrad »25.
20. Selon les informations fournies par Bongard, cette dernière réalisait en 2016 un chiffre d’affaires total en France d’environ 31,2 millions d’euros, et d’environ 9,5 millions d’euros dans les autres pays de l’Union européenne26.
4. LES DISTRIBUTEURS DE MATERIELS DE BOULANGERIE-PATISSERIE
21. La distribution de matériels de boulangerie-pâtisserie peut être assurée par des agents commerciaux multimarques ou monomarques, plus occasionnellement par des artisans (techniciens SAV), des frigoristes, des installateurs de restauration collective ou par certains grossistes Bongard, qui développent une activité dans ces domaines. Il existe, par ailleurs, plusieurs réseaux de distributeurs, tels que Bongard (32 distributeurs), Euromat (une trentaine d’adhérents), C9 (19 adhérents), Eurolabo (11 distributeurs indépendants) et Pavailler (15 distributeurs).
22. Les matériels de boulangerie-pâtisserie peuvent également être vendus sur le marché de l’occasion, par exemple lors de la fermeture des points de vente27, notamment via des sites internet marchands tels que MatérieldeBoulangerie.fr28, RestoConcept29, GastroHero30 ou encore Ematika31.
a) Bongard
23. Seront successivement évoqués le réseau de distribution exclusive Bongard ainsi que la distribution de la machine « Paneotrad », en cause dans la présente affaire.
Le réseau de distribution exclusive Bongard
24. L'organisation du réseau Bongard repose sur un contrat de « distribution » ou « concession » exclusive conférant aux distributeurs (encore appelés concessionnaires) présents sur l’intégralité du territoire métropolitain et dans les départements et régions d’Outre-mer une exclusivité territoriale pour vendre les produits Bongard à la clientèle des seuls artisans boulangers, à l’exception de Panifour et Selec Pro, qui bénéficient d’une exclusivité pour tous types de clientèle.
25. Les distributeurs du réseau Bongard peuvent également vendre les produits Bongard, à titre non exclusif, à la clientèle autre que les artisans, qui recouvre en pratique les Grands Comptes et GMS.
26. Le contrat de distribution exclusive du réseau Bongard prévoit également une exclusivité d’approvisionnement, qui oblige ses distributeurs à ne pas fabriquer ou distribuer des produits concurrents des produits Bongard32, à l’exception de certains produits listés dans le contrat, notamment ceux de la centrale d’achat Euromat.
27. La distribution exclusive (comme non-exclusive) porte sur tous les matériels inscrits au catalogue Bongard33, à l’exception des pièces détachées34.
28. La clientèle artisanale constitue la part principale du chiffre d’affaires du réseau. Néanmoins, Bongard et son réseau effectuent également des ventes auprès des GMS et des Grands Comptes35, selon un mode opératoire différent de celui de la vente aux artisans, les matériels proposés à la vente faisant l’objet d’un référencement national et la vente étant assortie parfois d’un contrat de maintenance36.
Le Paneotrad et sa distribution par le réseau Bongard
29. Le Paneotrad, qui relève de la famille des machines (diviseuses, façonneuses, coupeuses, etc.), est un appareil dont la société Bongard détient le brevet européen exclusif depuis 200637 (jusqu’en 2026), qui combine les fonctions de façonneuse, repose pâtons et diviseuse. Selon le fabricant, son utilisation ne nécessite pas de personnel qualifié et permet d’éliminer 30 % d’opérations manuelles38 :
30. En revanche, la fabrication de la pâte en amont requiert un savoir-faire que seul un professionnel expérimenté peut mettre en œuvre. De ce fait, la vente d’un Paneotrad est accompagnée d’une formation spécifique organisée par un « accompagnateur Bongard » et/ou un meunier.
31. En 2016, une nouvelle version du produit a été lancée, le Paneotrad EVO, qui permet une plus grande variété de découpe.
32. Le Paneotrad peut être vendu, d’une part, aux artisans par les distributeurs du réseau Bongard, dans le cadre d’un contrat de distribution exclusive et, d’autre part, aux GMS et Grands Comptes par les distributeurs du réseau Bongard, dans le cadre d’un contrat de distribution non exclusive, ainsi que par le fabricant Bongard lui-même.
La vente du Paneotrad aux artisans
33. Les distributeurs Bongard bénéficient d’une exclusivité territoriale pour vendre le Paneotrad aux artisans. Ils peuvent également le vendre aux Comptes développeurs, considérés par l’ACB comme relevant de la clientèle des artisans. L’ACB a défini les règles de prospection de ces comptes de manière à « évite[r] qu’il y ait des offres contradictoires (surtout au niveau des prix !) de faites hors du bassin d’origine »39.
34. En 2016, le contrat de distribution exclusive a été modifié pour indiquer que les distributeurs pouvaient vendre les matériels Bongard auprès des « professionnels utilisant les Produits pour les besoins de leur profession, excepté (sic) certains Clients Grands Comptes pour lesquels seule BONGARD sera dûment affiliés (sic) à la centrale de référencement ou d'achat le cas échéant »40.
La vente du Paneotrad à une clientèle autre que les artisans
35. La vente du Paneotrad aux GMS et Grands Comptes peut être effectuée tant par les distributeurs Bongard que par Bongard, directement, sur l’ensemble du territoire.
36. Toutefois Bongard assure seule la distribution du Paneotrad auprès de Carrefour41 depuis mars 2008, ainsi que la négociation de son référencement depuis 2011, sans passer par l’ACB42.
37. Les distributeurs locaux sont chargés de l’installation et de la maintenance des matériels vendus directement par Bongard aux GMS ou aux Grands Comptes, contre rémunération versée sous forme de « rétrocessions »43. Ces tâches peuvent être confiées par les distributeurs Bongard à des « concessionnaires techniques », s'agissant de produits livrés en dehors de leur territoire exclusif44.
b) L’Association des Concessionnaires Bongard (ACB)
38. Les distributeurs du réseau Bongard sont réunis au sein de l’ACB, association régie par la loi de 1901 et créée en 198845. Depuis 2006, tous les distributeurs du réseau Bongard, à une seule exception, ont adhéré au moins une fois à l’ACB46.
39. L’ACB a été créée afin :
« - d'une part de susciter, entre ses membres, des actions d'entre aide (sic), d'assistance ou de solidarité. A ce titre, elle aide le réseau à se structurer et à se professionnaliser (sur des questions de gestion commerciale, technique, administrative, …)
- d'autre part de pouvoir assurer la liaison avec Bongard (sur des sujets de politique générale, commerciaux, techniques, etc.). L'ACB assure en effet, la régulation et le pilotage de l'alliance entre le collectif des concessionnaires et la société Bongard ainsi que la médiation des relations »47.
40. Selon le compte-rendu du Comité Stratégique ACB-Euromat-Bongard du 10 mars 2017,
« [l]'ACB a été constituée en 1988 à la demande de M. D. alors PDG de BONGARD qui voulait un réseau organisé, le respect des territoires et des échanges construits entre BONGARD et ses distributeurs/installateurs. L'ACB a toujours été un contre-pouvoir vis à vis de BONGARD, visant à établir un équilibre entre les deux parties »48.
41. L’ACB assure la liaison entre Bongard et son réseau de distribution et n’a pas, en principe, vocation à avoir une action directe sur les clients finaux ou sur la distribution des produits Bongard49. Selon le président de l’ACB, les échanges entre Bongard et ses distributeurs au sein de l’ACB permettent de « […] transmettre "les bonnes pratiques" aux nouveaux confrères car il est essentiel pour BONGARD de pouvoir s’appuyer sur des concessionnaires qui constituent un véritable réseau, en assurant la distribution et l’entretien des produits de la marque avec les mêmes professionnalisme, cohérence commerciale, compétence technique et qualité du service rendu, sur l’ensemble du territoire. C’est également à cette fin que tous les membres de l’ACB ont signé les documents intitulés "la déontologie" et "l’engagement national de service" […]) »50.
42. L’article 2 de son règlement intérieur dispose qu’elle « exerce un rôle de représentation et de défense des intérêts de l'ensemble de ses adhérents » et prévoit qu’elle « détermine en Assemblée Générale, dans le cadre de l'objet social défini dans ses statuts, ses objectifs et règles de fonctionnement ». Le règlement intérieur indique en outre que « Les entreprises adhérentes à l'ACB conservent leur pleine et entière indépendance tant sur le plan juridique que sur celui de leur activité, elles portent la pleine responsabilité de leurs actions » et prévoit, en son article 11, les règles de territorialité applicables au réseau de distribution (voir paragraphes 76 à 78 ci-dessous).
c) Le réseau de distribution Euromat
43. Euromat est une centrale d'achat créée en 1994 par les distributeurs Bongard. Elle regroupe une trentaine d’adhérents ou « actionnaires coopérateurs », couvrant tous les départements métropolitains, ainsi que les départements et régions d'outre-mer et la Suisse romande51.
44. Aux termes des statuts d’Euromat, ses sociétaires doivent cumuler la qualité de concessionnaire Bongard et d’adhérent à l’ACB52.
45. Par ailleurs, comme indiqué supra (voir paragraphe 26), une dérogation figurant dans le contrat de distribution exclusive de Bongard autorise la distribution de produits Euromat, en plus de ceux de Bongard53.
46. Le rôle d’Euromat est de « référencer des produits complémentaires au catalogue BONGARD », destinés à répondre à 100 % des besoins de la profession et ainsi couvrir tout l’univers de la boulangerie-pâtisserie, du traiteur et du snacking. La politique de référencement est la suivante : « si BONGARD n’a pas à son catalogue ou ne veut pas développer un produit dont le réseau a besoin, alors seulement EUROMAT peut se poser la question du référencement de ce produit »54.
47. En 2020, Euromat référençait 35 fournisseurs, représentant selon elle les marques leaders du marché. Son chiffre d’affaires atteignait 13,8 millions d’euros en France en 201655.
C. LES PRATIQUES CONSTATEES
48. Seront successivement présentées les pratiques relatives au prix de revente du Paneotrad (1) et aux règles territoriales applicables au sein des réseaux de distribution de Bongard et d’Euromat (2).
1. LE PRIX DE REVENTE DU PANEOTRAD
a) La détermination du prix de revente
49. Le 5 avril 2006, soit deux mois avant le lancement de la commercialisation du Paneotrad, les distributeurs sont convenus, via l’ACB56, de distribuer le Paneotrad sur la base d’un cahier des charges commun et d’un tarif unique57. Le Paneotrad avait alors vocation à être réservé à une « élite de la fabrication boulangère »58 et, partant, à être vendu selon une stratégie de « pénurie ».
50. Sa vente était ainsi réservée à l’artisanat « avec une exclusivité de 24 à 36 mois »59. Cette machine nécessitant, selon le président de l’ACB, « un travail préalable de démonstration et une formation des artisans aux spécificités du process de fabrication du pain […] avec l’appui des meuniers locaux (préconisation de l’appareil, vente des farines adaptées au process…) »60, une formation était obligatoirement proposée aux clients61.
51. Le 14 septembre 2007, dans le cadre de la commission commerciale de l’ACB, constat a été fait des résultats décevants de la vente du Paneotrad62. Par conséquent, dès octobre 2007, sa commercialisation a été élargie à l’ensemble des boulangeries-pâtisseries, à travers le réseau de distribution exclusive Bongard.
52. Le 15 janvier 200863, l’ACB a toutefois noté que « [le] positionnement prix [du Paneotrad] peut s’avérer difficile à tenir dans un marché qui a apporté sinon des réponses strictement concurrentes, au moins des solutions alternatives ».
53. Le 18 mars 2008, lors de l’assemblée générale de l’ACB, la commercialisation du Paneotrad a ainsi été étendue aux GMS, selon des conditions et un tarif fixe communs64.
54. Le 5 novembre 200865, la commission commerciale de l’ACB a, une nouvelle fois, relevé que le prix fixé apparaissait élevé : « Positionnement prix : Paneotrad avec ses trois outils coûte environ 27 000 euros66 . Cela est limitant dans les ventes au marché et constitue un véritable frein pour l’artisanat. Il serait important de se repositionner, car avoir le meilleur outil du marché et ne pas le vendre est un problème. (La perspective est de 10 ans). Du côté de Bongard, il n’est pas possible de vendre Paneotrad moins cher67 à moins d’en fabriquer en série plus importante »68.
55. Le prix de revente du Paneotrad a en conséquence été revu à la baisse, cette modification étant directement répercutée dans le catalogue Bongard en 2009, la commission commerciale de l’ACB décidant « de mettre au catalogue le package suivant : Pack Paneotrad + 3 outils à 24 900 euros (quels que soient les outils). Avec moins-values si un outil en moins » et envisage un système de location afin de permettre aux utilisateurs de tester les qualités du produit avant son achat69.
56. Le compte-rendu de l’Assemblée Générale de l’ACB des 10 et 11 octobre 201370 a précisé par ailleurs : « PAS DE REMISE sur ce produit et ses accessoires BONGARD. C'est une règle d'or que l'ACB s'est donnée dès sa commercialisation », sans restriction du type de clientèle concerné. Les déclarations du représentant de Bongard suggèrent également l’absence de régime différencié selon les clients71.
57. Lors du lancement de la quatrième version du Paneotrad en 2015, l’ACB, en assemblée générale, a rappelé que le réseau « avait demandé à ce qu’il n’y ait pas de hausse tarifaire sur cette nouvelle version »72.
58. Lors de son audition, le directeur commercial de Bongard a résumé en ces termes la stratégie commerciale de Bongard et de son réseau depuis 2006 : « Les ventes sont restées très en deçà de nos objectifs (300 ventes espérées la première année soit 1% des boulangeries environ), c’est pourquoi BONGARD SA a décidé en 2008 d’ouvrir le marché à la GMS, ce à quoi les concessionnaires ont consenti à condition que le tarif GMS reste similaire à celui des artisans (à savoir 24 900€ le pack comprenant la machine + 3 grilles + 3 bacs de découpe) car l’ACB souhaitait protéger son cœur de métier « artisans ». Ce tarif a été élaboré conjointement par BONGARD SAS et l’ACB lors du lancement commercial du produit. Il avait également été décidé de ne procéder à aucune remise sur les ventes »73. Il a également indiqué que « Compte tenu de la concurrence et de la difficulté à implanter le Paneotrad, il est clair que les concessionnaires conservent la valeur faciale du produit mais obtiennent l’achat grâce à des avantages en nature (accessoires ou formation gratuits) ou à la remise globale en pied de facture sur un équipement complet »74.
59. Ces propos ont été confirmés par le président de l’ACB et de la société JMG Equipement (distributeur Bongard), selon lequel « A partir de juin 2006, Paneotrad (breveté au niveau européen) est commercialisé en exclusivité par le réseau BONGARD aux artisans- boulangers, au prix fixe de 24 000 €, sans remise possible car il s’agit d’un produit qui est fabriqué en série limitée d’où un coût de production élevé et qui a un coût d’accompagnement des ventes. […] Comme pour les autres produits de la ligne « machines » de BONGARD quand ils sont vendus au prix public, le concessionnaire dégage une marge brute de 40 % sur les ventes de Paneotrad. Le prix de vente des 4 versions de Paneotrad est resté inchangé, tandis que le dernier modèle, Paneotrad EVO, est commercialisé à 27 700 € (avec 4 matrices incluses) […] »75.
60. L’instruction a permis de dénombrer 22 réunions tenues entre 2006 et 2019 (comité stratégique, commission Grands Comptes ou commerciale de l’ACB, assemblée générale) à l’occasion desquelles le prix du Paneotrad a été discuté et arrêté au sein de l’ACB, en présence de Bongard et ce, dès le lancement de la machine sur le marché76.
a) L’application du prix de revente
61. La politique de prix du Paneotrad a été mise en œuvre par les distributeurs, mais également directement par Bongard à l’occasion de ses ventes aux GMS.
L’application du prix de revente par les distributeurs
62. L’article 11 des statuts de l’ACB prévoit que « [t]ous les concessionnaires sont en permanence invités » aux commissions de l’ACB (même s’ils n’en sont pas membres)77 et que « [c]haque concessionnaire doit accuser réception des relevés des décisions et actions issus du compte-rendu de réunion. Le Président de la Commission est en charge de la vérification de l'application des dites actions et décisions. »78. L’article 7 du règlement intérieur de l’ACB prévoit par ailleurs une procédure d’exclusion de l’ACB pour « [t]out adhérent qui aurait commis une faute grave » telle que « le non-respect des décisions de l'Assemblée Générale »79.
63. Il ressort des pièces du dossier que la quasi-totalité des distributeurs Bongard a appliqué le tarif décidé en réunions de l’ACB80. En outre, tous les distributeurs ont indiqué ne pas pouvoir faire de remises, certains précisant trouver cette interdiction justifiée eu égard aux caractéristiques du Paneotrad, machine brevetée dont le « concept est révolutionnaire [et] pour lequel il n’existe aucun produit concurrent »81.
64. Toutefois, un certain nombre de distributeurs a indiqué pouvoir consentir des services gratuits ou faire don d’accessoires82, ce qu’a confirmé le président de l’ACB et de la société JMG Equipement83 : « Nous continuons à vendre les derniers anciens Paneotrad en stock au prix de 24 900 € car le réseau BONGARD ne souhaite pas dégrader la « valeur faciale » du prix. Toutefois il faut s’adapter à la concurrence des diviseuses-formeuses et lorsque l’argumentaire technico-commercial ne suffit pas à convaincre le client, la vente est emportée grâce à la fourniture de produits (accessoires de Paneotrad ou autres matériels de fournil) ou de services gratuits. Par exemple, JMG ÉQUIPEMENT offre la formation ou divers produits accessoires comme la servante. Par ailleurs, le réseau BONGARD rachète les anciens modèles de Paneotrad V3 ou V4, afin de pouvoir les proposer « à l’essai » aux professionnels hésitants, à un prix de l'ordre de 15 000€ complètement rénovés et garantis 6 mois, ce qui permet d’être placé par rapport au prix des diviseuses-formeuses. Le fait d’introduire Paneotrad dans un point de vente permet souvent de vendre progressivement d’autres produits et à terme, d’y implanter un four ».
65. Plusieurs distributeurs ont en outre confirmé que le tarif applicable aux GMS était identique à celui des artisans84.
L’application du prix de revente par Bongard auprès des GMS/Grands Comptes
66. À compter de mars 2008, Bongard distribuait directement le Paneotrad auprès des GMS85.
67. Dans ce cadre, elle a souhaité négocier directement son référencement chez l’un de ses clients majeurs, Carrefour, pour l'année 2011, sans passer par l’ACB86 et a conclu une vente de 100 machines à 18 500 euros, leur installation et maintenance étant assurées par un distributeur du réseau contre rétrocession de 2 000 euros87.
68. Cet accord a été contesté courant 2011 par l’ACB, qui a décidé de bloquer les livraisons des matériels Panetroad concernés par cette vente. Il ressort en effet du compte-rendu de la réunion de la commission commerciale de l’ACB du 8 septembre 2011 que « suite aux informations que le réseau a circularisées sur les commandes centralisées de Paneotrad, les livraisons ont été bloquées. En effet, d’une part l’accord Carrefour porte sur 100 machines, et ce chiffre n’est pas atteint en commande, et d’autre part le niveau du prix de vente est inacceptable »88. Bongard a dès lors été contrainte d’augmenter à 21 500 euros le prix proposé à Carrefour et la rétrocession des distributeurs à 5 408 euros89.
69. Le président de l’ACB a indiqué à propos de la vente remisée faite par Bongard auprès de Carrefour en 2011 que « [l]’ACB a dû accepter que BONGARD consente une remise quantitative à CARREFOUR pour une vente directe de 130 Paneotrad car ce point d’entrée permet au fabricant d'installer d’autres produits (notamment des petits fours ventilés) chez ce distributeur »90.
2. LES REGLES TERRITORIALES APPLICABLES AU SEIN DES RESEAUX BONGARD ET EUROMAT
70. Seront successivement détaillées les règles applicables au réseau de distribution exclusive Bongard (a) puis celles applicables au réseau de distribution d’Euromat (b).
a) Les règles territoriales applicables au réseau de distribution exclusive Bongard
Les règles territoriales applicables au réseau de distribution exclusive Bongard entre 2008 et 2016
71. Seront successivement évoquées ci-après la source des règles applicables, puis leur mise en œuvre.
La source des règles territoriales applicables au réseau Bongard
72. Ces règles figurent tant dans le règlement intérieur de l’ACB que dans les contrats de distribution exclusive.
Le règlement intérieur de l’ACB
73. Aucune précision sur la territorialité ne figurait dans le règlement intérieur de l’ACB avant 200891.
74. Un compte-rendu de la commission commerciale de l’ACB du 29 mai 200892 fait état d’échanges ayant eu lieu entre l’ACB et Bongard au sujet de la mise en place généralisée d’un « Droit d’Entrée en Zone » ou « DEZ ». Initialement institué pour les GMS, le DEZ consistait, pour un distributeur qui livrait un client hors de son territoire, à payer une somme de 5 % au distributeur du territoire concerné.
75. Redoutant que l’introduction de cette règle conduise à multiplier les ventes de distributeurs en dehors de leur territoire, la commission commerciale de l’ACB y a renoncé.
76. L’assemblée générale de l’ACB, réunie les 2 et 3 octobre 2008 et à laquelle étaient présents des représentants de la société Bongard ainsi que la majorité des distributeurs du réseau Bongard93, a entériné l’ajout d’un article supplémentaire au sein du règlement intérieur de l’ACB94, relatif aux règles de territorialité applicables entre ses membres et intitulé
« Article 11 – Territorialité »95, rédigé comme suit :
77. Les règles de territorialité ainsi stipulées ont été régulièrement rappelées par la suite au cours de réunions de commissions commerciales de l’ACB réunissant l’ACB et Bongard : « partant du postulat que le hors secteur n'entrait pas dans la notion de concessionnaire exclusif rattaché à un territoire, l'article Territorialité (...) définit clairement les règles » en interdisant « toute vente hors secteur »96.
78. Le président de l’ACB a indiqué à cet égard que : « l'article 11 du règlement intérieur a surtout été rédigé à l'attention des nouveaux concessionnaires, afin qu'ils comprennent clairement la philosophie générale du réseau BONGARD : on ne peut pas bénéficier d'une protection territoriale en produits BONGARD et venir perturber le marché d'un confrère avec les autres produits et services, il faut que le fonctionnement du réseau reste en cohérence. Cet article correspond à un engagement moral, puisque BONGARD ne peut juridiquement pas obliger un concessionnaire à reverser la marge bénéficiaire à son confrère territorialement compétent »97.
Les contrats de distribution exclusive Bongard
79. L’article III, 3) des contrats de distribution exclusive Bongard signés avant le 1er octobre 2016 stipulait que « [l]e Distributeur est tenu de Prospecter De La Manière La Plus Efficace dans la Zone Territoriale de Responsabilité Principale et d'y promouvoir au mieux la vente des Produits auprès de la Clientèle. Il s'interdit toute Prospection Systématique hors de la Zone Territoriale de Responsabilité Principale »98. Le non-respect de cette règle pouvait entraîner la résiliation de plein droit du contrat dans les conditions prévues par son article XIV99.
80. Cette interdiction concernait « les Produits » définis à l’article I, 1) du contrat de distribution exclusive comme étant, d’une part, les équipements de boulangerie et services proposés à la vente par Bongard et figurant dans la liste des prix en vigueur publiés périodiquement et, d’autre part, les produits spéciaux dont le prix est fixé sur devis100.
81. La notion de « Prospection Systématique » était définie par l’article I), 5) du contrat comme suit : « Chacune des situations comprises dans le fait de « Prospecter De La Manière La Plus Efficace » constitue à elle seule une Prospection Systématique »101.
82. La notion de « Prospecter De La Manière La Plus Efficace » était définie à l’article I), 4) comme étant la « Publicité pour les Produits, mise en place des moyens de vente nécessaires, établissement d'un dépôt, visite et suivi de la Clientèle, envoi de prospectus, cette énumération n'étant pas limitative »102.
83. L’article I) 6), consacré à la « Clientèle », prévoyait que « Les seuls clients auprès desquels le Distributeur est habilité à vendre et doit Prospecter De La Manière La Plus Efficace constituent ceux qu’on appelle les ARTISANS (...) »103.
84. Au cours de l’assemblée générale de l’ACB des 2 et 3 octobre 2008 ayant donné lieu à l’introduction dans le règlement intérieur de l’ACB de l’article 11 précité, a en outre été décidé l’ajout par Bongard d’un avenant au contrat de distribution « pour le respect des territoires (matériels et pièces détachées ) »104.
La mise en œuvre des règles territoriales par le réseau Bongard
85. Si certains distributeurs appliquaient strictement l’interdiction et n’effectuaient aucune vente en réponse à des demandes de clients situés en dehors de leur zone d’exclusivité105 ou renvoyaient ces clients vers le distributeur territorialement concerné106, d’autres pouvaient s’accorder, au moins ponctuellement, avec le distributeur territorialement concerné107, en général moyennant le versement à ce dernier d’une commission ou la rétrocession d’au moins une partie de la marge bénéficiaire réalisée, notamment pour éviter que Bongard perde un client ne souhaitant pas travailler avec le concessionnaire dont il dépend territorialement.
86. En pratique, les distributeurs mettaient en œuvre ces règles de territorialité pour les trois types de produits et services visés par l’article 11 du règlement intérieur de l’ACB, soit les ventes de matériels ou produits neufs figurant au catalogue Bongard, le service après-vente et les ventes de pièces détachées108.
87. Il ressort néanmoins du dossier que des dérogations à la mise en œuvre des règles territoriales étaient envisageables, notamment pour les zones situées aux frontières des territoires exclusifs alloués aux distributeurs, d’autant plus que, comme relevé lors d’une réunion de l’ACB, « le marché évolue, les profils des boulangers changent et leur mode de création d’entreprises aussi. Les installations « inter-secteurs » deviennent monnaie courante »109.
88. Le Président de l’ACB a précisé, à cet égard que « [l]a règle édictée dans l’article 11 du règlement intérieur et souvent rappelée en commission de travail ou en assemblée générale, s'applique avec souplesse sur les zones frontalières des concessions et a fortiori quand deux concessionnaires se partagent un département [...]. L’ACB encourage ses membres à s’informer mutuellement des débordements potentiels et à trouver un accord pour que la demande du client soit satisfaite et surtout pour qu’il reste dans le réseau BONGARD »110.
89. De telles dérogations aux règles territoriales sont toutefois demeurées exceptionnelles, leur respect restant la norme, ainsi qu’en attestent les déclarations du président de l’ACB et du directeur commercial de Bongard111 et, concernant plus particulièrement le réseau Euromat, ce que confirme le compte-rendu d’une réunion mixte des commissions commerciale et GMS - Grands Comptes de l’ACB du 10 septembre 2010112. Par ailleurs, l’ACB a engagé une réflexion en 2012 sur les sites internet du réseau de distribution Bongard. Le compte- rendu d’une réunion de la commission commerciale de l’ACB, à laquelle le fabricant Bongard était également présent113, indique à cet égard : « De manière générale la Commission s’accorde à dire que les sites internet des concessions n’ont pas vocation à être des sites marchands (on n'achète pas un four sur internet !). A ce titre, les sites internet des concessionnaires BONGARD ne devraient pas indiquer le prix des matériels neufs (BONGARD ne communique pas les prix de matériels sur son propre site). Par contre les prix du matériel d'occasion peuvent être affichés sur le site. Il est décidé de créer un groupe de travail sur le sujet d'une « charte des sites internet de l'ACB » (cohérence, interdits, recommandations, etc.) »114.
90. Le président de l’ACB explique cette position de principe au travers de sa propre expérience professionnelle en tant que gérant de la SARL JMG Equipement :
« JMG ÉQUIPEMENT dispose d’un site internet non marchand qui ne suscite quasiment aucun contact de clientèle. Je considère qu'il n’est pas pertinent de diffuser des prix de vente sur internet dans la mesure où il y a toujours (pour les fours) ou le plus souvent (pour les lignes Mélange et Machine) des frais d’installation et de transport à facturer.
De plus, la distribution du matériel d’équipement de boulangerie-pâtisserie nécessite, surtout dans l’artisanat, de connaître la configuration du fournil et les méthodes de travail du professionnel, afin de lui proposer une installation qui réponde à ses besoins réels et à ses habitudes. »115
91. Sur l’ensemble des distributeurs métropolitains, six d’entre eux ne disposaient d’aucun site internet.
92. Entre février et mai 2017, quinze concessionnaires métropolitains ont été entendus par la DGCCRF116. Douze d’entre eux disposaient d’un site internet, parmi lesquels trois ont déclaré qu’il s’agissait d’un simple site vitrine, non destiné à la vente117, à l’instar de Sodima Equipement, selon lequel : « SODIMA ÉQUIPEMENT dispose d’un site Internet qui n’est pas destiné à la vente de matériel puisqu’il n’y a aucun intérêt à attirer des professionnels situés hors de notre zone de concession. Il s’agit d’une carte de visite pour notre société et également pour le site marchand 1000mat »118.
93. Un distributeur a indiqué par ailleurs que l’absence de ventes sur son site internet était due à la complexité de vendre sur internet : « Nous ne vendons aucun matériel, ni pièces détachées sur internet, cela ne nous est pas interdit, nous n’avons juste pas de site marchand, ce serait trop compliqué pour nous »119. Un autre distributeur a expliqué son refus de recourir à un site internet par le souci de maintenir une qualité de service pour les clients :
« Concernant les ventes sur internet, nous refusons de commercialiser nos produits par ce biais, toujours soucieux de la qualité de service que nous mettons en avant auprès de nos clients »120.
Les règles territoriales applicables au réseau de distribution exclusive Bongard à compter de 2016
94. En 2016, Bongard a modifié son modèle de contrat de distribution exclusive (i), avant que l’ACB modifie à son tour, un an après, l’article 11 de son règlement intérieur (ii).
Les contrats de distribution exclusive Bongard
95. À l’occasion de la réforme du droit des contrats du 1er octobre 2016, Bongard a modifié son modèle de contrat de distribution exclusive121. Le nouveau modèle a été discuté au sein de l’ACB et s’est appliqué aux distributeurs intégrant le réseau à compter du 1er octobre 2016122.
96. L’article III, 4) du nouveau modèle de contrat de distribution prévoit que : « Le Distributeur est tenu de Promouvoir les Produits dans le Territoire auprès de la Clientèle. Il s'interdit de Promouvoir les Produits, effectuer des Ventes Actives de Produits hors du Territoire, sans préjudice de son droit d’effectuer des Ventes Passives hors du Territoire »123.
97. Les « Produits » Bongard sont définis par l’article I, 11) du nouveau modèle de contrat comme étant « Tout équipement que BONGARD distribue ou commercialise et permettant d'élaborer, conserver ou vendre du pain, des viennoiseries, des pâtisseries, ou plus généralement utilisé dans une boulangerie ou une pâtisserie »124, et pouvant être indifféremment un « équipement standard », tel que figurant au catalogue Bongard et dans la liste des prix publiés périodiquement, ou un « équipement spécifique » faisant l’objet d’un devis125.
98. L’action de « Promouvoir » est définie à l’article I, 12) du modèle de contrat comme le fait d’ « [e]ffectuer des actes de façon active de nature à promouvoir et favoriser la vente des Produits tels que des campagnes de publicité y compris par publipostage pour les produits, la mise en place des moyens ou points de vente nécessaires, l'établissement d'un dépôt, tout acte de prospection tel que la visite et le suivi régulier de la Clientèle, l'envoi de prospectus, cette énumération n'étant pas limitative »126.
99. L’article I, 3), consacré à la « Clientèle », prévoit que « Les seuls clients auprès desquels le Distributeur est habilité à vendre et auprès desquels il doit Promouvoir les Produits sont des professionnels, (...) exceptés certains Clients Grands Comptes pour lesquels seule BONGARD sera dûment affiliée à la centrale de référencement ou d’achat le cas échéant »127.
100. L’article I, 15) du modèle de contrat définit la vente active comme étant la « [v]ente de Produits résultant d'une action incluse dans la définition de « Promouvoir» ci-dessus, hors vente sur internet »128 et l’article I, 16) définit la vente passive comme étant la « [v]ente de Produits à la Clientèle par suite d'une sollicitation spontanée de cette Clientèle »129.
Le règlement intérieur de l’ACB
101. L’article 11 du règlement intérieur de l’ACB, modifié lors de l’assemblée générale de l’ACB d’octobre 2017130, dispose désormais :
« Il est expressément interdit à tout concessionnaire de pratiquer une vente active pour du matériel et des pièces détachées sur un secteur autre que le sien. Il s'interdit, en conséquence, toute prospection hors du secteur défini par le contrat de concession BONGARD, tant dans le domaine de l’artisanat que des grands comptes.
Principe :
A compter du 3 octobre 2008, toute commande conclue par un concessionnaire hors de son secteur l’oblige à reverser la marge, en cas de vente active, sur l'affaire litigieuse au concessionnaire du secteur où se situe le client […] ».
b) Les règles applicables au réseau de distribution Euromat
La source des règles territoriales applicables au réseau Euromat
102. Comme indiqué ci-avant au paragraphe 44, les adhérents d’Euromat sont, dans les faits, les distributeurs Bongard adhérents à l’ACB. Par conséquent, le réseau d’Euromat coïncide avec celui de la société Bongard131, sans qu’aucun contrat de distribution soit signé entre la société Euromat et les concessionnaires.
103. Euromat a exprimé dès 2006 au sein du Comité stratégique ACB-Bongard-Euromat son adhésion globale aux règles applicables au réseau de distribution Bongard : « Un Comité Stratégique pour quoi faire ? S’entendre sur le court terme pour bien s’organiser et préparer l’avenir sur des bases solides […] Mener des réflexions a 2/ 5 ans et se focaliser sur un certain nombre de sujets en amont pour préparer l’avenir : Accompagnement du réseau pour en assurer la pérennité […] Définir la concession idéale […] et la carte de France idéale »132.
104. Par ailleurs, l’article 11 du règlement intérieur de l’ACB adopté en octobre 2008 prévoit qu’Euromat se porte garante des nouvelles règles de territorialité : « Pour s’assurer que la règle de territorialité est bien respectée, l’ACB s’appuie sur BONGARD et EUROMAT, garants du respect de cette règle ».
La mise en œuvre des règles territoriales applicables au réseau Euromat
105. Le président de l’ACB a indiqué que les distributeurs de son réseau respectaient les limites territoriales y compris pour les produits « non Bongard », soit les produits Euromat : « Par conséquent, même pour les ventes de produits « non BONGARD » ou les prestations de maintenance et de SAV, les membres du réseau respectent les limites des concessions, que ce soit à l’égard de la clientèle artisanale ou de celles de la GMS et des grands comptes (où BONGARD n’est pas référencé). Ils ne font pas de prospection commerciale et ne répondent pas non plus aux demandes de clients situés dans la zone concédée à un confrère »133.
106. Le compte-rendu d’une réunion mixte de 2010 des commissions commerciale et GMS - Grands Comptes de l’ACB témoigne du respect des règles de territorialité pour la commercialisation des produits Euromat. Dans une section présentant les procédures applicables aux marchés dits « intermédiaires », il est ainsi précisé (« franchises, chaînes de boulangeries, magasins succursales, industries : « Produits concernés : BONGARD / EUROMAT et MONO France. Secteurs. Chacun opère sur les limites territoriales artisanales »134.
D. RAPPEL DES GRIEFS NOTIFIES
107. Le 9 septembre 2022, les services d’instruction ont notifié les deux griefs suivants :
1. GRIEF N° 1
108. Il est fait grief :
à l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB), en tant qu’auteure, pour sa participation du 5 avril 2006 au 12 décembre 2019,
à la société Bongard (RCS 582 950 309), en tant qu’auteure, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019,
à la société AFE Bakery (RCS 443 261 300), anciennement dénommée AFE Group France, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019,
à la société Ali SAS (RCS 424 123 081), en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019,
à la société ALI Holding SRL (IT 008 720 301 50), anciennement dénommée ALI Spa, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019,
d’avoir participé à une entente anticoncurrentielle dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie, en mettant en œuvre, dans le cadre des réunions de l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB), une pratique visant à restreindre le jeu de la concurrence entre les membres de l’ACB et entre ces mêmes membres et Bongard sur le prix de la machine diviseuse-formeuse dénommée « Paneotrad ».
2. GRIEF N° 2
109. Il est fait grief :
à l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB), en tant qu’auteure,
à la société Euromat (RCS 391 360 427), en tant qu’auteure,
à la société Bongard (RCS 582 950 309), en tant qu’auteure,
à la société AFE Bakery (RCS 443 261 300), anciennement dénommée AFE Group France, en tant que société mère de la société Bongard,
à la société Ali SAS (RCS 424 123 081), en tant que société mère de la société Bongard,
à la société ALI Holding SRL (IT 008 720 301 50), anciennement dénommée ALI Spa, en tant que société mère de la société Bongard,
d’avoir participé à une entente anticoncurrentielle dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie. Les participants à cette entente ont mis en œuvre des pratiques consistant à interdire aux distributeurs adhérents de l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB) et membres des réseaux de distribution exclusive de Bongard et d’Euromat, d’effectuer auprès de toute leur clientèle, en dehors de la zone territoriale allouée à un distributeur, des ventes passives de matériels, de pièces détachées et de services après-vente, à l’exclusion des produits d’occasion, entente mise en œuvre du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016.
II. Discussion
A. SUR LA PROCEDURE DE TRANSACTION
110. Le III de l’article L. 464-2 du code de commerce dispose : « Lorsqu'une association d'entreprises ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque l'entreprise ou l'association d'entreprises s'engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Si, dans un délai fixé par le rapporteur général, l'entreprise ou l'association d'entreprises donne son accord à la proposition de transaction, le rapporteur général propose à l'Autorité de la concurrence, qui entend l'entreprise ou l'association d'entreprises et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I dans les limites fixées par la transaction ».
111. Comme rappelé aux paragraphes 5 et 6, les parties mises en cause ont sollicité l’application de ces dispositions et renoncé à contester la réalité des griefs qui leur avaient été notifiés.
B. SUR L’APPLICATION DU DROIT DE L’UNION
112. Selon la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne et la communication de la Commission européenne portant lignes directrices relatives à la notion d’affectation du commerce figurant aux articles 101 et 102 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne (ci-après « TFUE ») 135, trois éléments doivent être réunis pour que des pratiques soient susceptibles d’affecter sensiblement le commerce entre États membres de l’Union : l’existence d’un courant d’échanges entre États membres portant sur les produits en cause, l’existence de pratiques susceptibles d’affecter ces échanges et le caractère sensible de cette affectation.
113. En l’espèce, s’agissant du premier élément, il convient de relever que Bongard est présente dans plusieurs États membres et commercialise ses produits dans plus de 90 pays, que ce soit par l’intermédiaire de son réseau de distribution exclusive en France ou par celui des réseaux de distribution situés hors de France136.
114. Pour sa part, la centrale d’achats et de référencement Euromat représente les 32 distributeurs du réseau exclusif Bongard, qui couvrent tous les départements métropolitains, les départements et régions d’outre-mer et la Suisse romande. Parmi les 35 fournisseurs qu’elle référence, figurent notamment le fabricant belge JAC, qui dispose de plusieurs sites de production de machines de boulangerie en France, en Belgique, en Russie et aux États-Unis, et dont les clients sont situés dans plus de 90 pays137, et le fabricant italien IFI, qui dispose d’une branche aux États-Unis, de deux usines en Chine et en Inde et qui est présent sur les marchés de 120 pays138.
115. S’agissant du deuxième élément, les pratiques examinées sont susceptibles d’affecter le commerce entre les États membres en ce que, d’une part, elles sont de nature à restreindre la capacité des distributeurs à répondre à la demande de consommateurs situés dans d’autres États membres et, d’autre part elles ont touché l’ensemble de la clientèle du secteur de la boulangerie-pâtisserie en France et cloisonné le marché français de la distribution de matériels d’équipements de ce secteur139.
116. S’agissant enfin, du caractère sensible de cette affectation, il ressort des informations fournies par Bongard et par Euromat que le cumul de leurs chiffres d’affaires européens pour l’année 2016 était supérieur au seuil de 40 millions d’euros visé dans les Lignes directrices de la Commission relatives à la notion d’affectation du commerce (point 52).
117. Il résulte de ce qui précède que les pratiques constatées sont susceptibles d’être examinées tant au regard du droit de l’Union, et notamment de l’article 101 du TFUE, que du droit national, et notamment de l’article L. 420-1 du code de commerce.
C. SUR LE MARCHE PERTINENT
1. PRINCIPES APPLICABLES
118. Il ressort de la jurisprudence que l’obligation d’opérer une délimitation du marché en cause dans une décision adoptée en application de l’article 101 du TFUE s’impose uniquement lorsque, sans une telle délimitation, il n’est pas possible de déterminer si l’accord, la décision d’association d’entreprises ou la pratique concertée en cause est susceptible d’affecter le commerce entre les États membres et a pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence à l’intérieur du marché commun140.
119. De même en droit interne, lorsque les pratiques en cause sont examinées au titre de la prohibition des ententes il n’est pas nécessaire de définir le marché avec précision dès lors que le secteur a été suffisamment identifié pour qualifier les pratiques observées et permettre de les imputer aux opérateurs qui les ont mises en œuvre141.
2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE
120. En l’espèce, les pratiques visées ont été mises en œuvre dans le secteur de la boulangerie-pâtisserie sur l’ensemble du territoire national.
121. Eu égard à la jurisprudence constante rappelée ci-avant aux paragraphes 118 et 119, une définition plus précise du marché pertinent n’est pas nécessaire.
D. SUR LES PRATIQUES CONSTATEES
1. L’ENTENTE SUR LES PRIX
a) Sur l’accord de volontés
Principes applicables
122. L’existence d’une pratique telle que définie par les articles 101 TFUE et L. 420-1 précités est établie entre des entreprises, dès lors que celles-ci ont manifesté leur volonté commune de se comporter d’une manière déterminée sur le marché142. Il résulte en outre d’une jurisprudence constante qu’une pratique mise en œuvre par un groupement, quelle que soit sa forme juridique, est présumée constituer un accord entre ses membres143.
123. Le droit des ententes peut être appliqué aux organismes professionnels lorsque deux conditions sont réunies.
124. Premièrement, l’organisme en cause doit être composé d’entreprises au sens du droit de la concurrence144, ou d’associations d’entreprises au sens des mêmes règles145.
125. Deuxièmement, pour qu’une entente soit caractérisée, les décisions prises par le groupement doivent exprimer la volonté commune de ses membres d’adopter un comportement déterminé sur le marché, c’est-à-dire, selon la pratique décisionnelle du Conseil de la concurrence (ci-après « le Conseil »), puis de l’Autorité, être « la manifestation de l’accord de volontés des membres de cette structure commune, […] entreprises juridiquement distinctes, poursuivant des objectifs économiques distincts et en situation de se faire concurrence »146.
126. La forme de la décision du groupement est indifférente. L’Autorité, approuvée par la cour d’appel de Paris, a considéré qu’une pratique anticoncurrentielle peut résulter de divers actes, pour autant qu’ils émanent des organes d’un groupement professionnel et ont pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, « tels qu’un règlement professionnel, un règlement intérieur, un barème ou une circulaire »147.
Application au cas d’espèce
127. À titre liminaire, l’Autorité relève que la société Bongard est une entreprise au sens du droit de la concurrence et que l’ACB constitue une association d’entreprises au sens de ces mêmes règles.
128. En effet, l’ACB regroupe 32 entreprises indépendantes, sans relations capitalistiques ou managériales entre elles, dont l’activité consiste à commercialiser, entre autres, du matériel Bongard, et qui ont également la qualité d’entreprises au sens du droit de la concurrence.
129. En outre, les décisions de l’ACB traduisent l’expression d’une volonté commune de ses adhérents de se comporter de manière déterminée sur le marché.
130. En effet, les discussions relatives au prix de vente du Paneotrad, qui se sont tenues au sein des différentes instances de l’ACB, notamment dans le cadre de son assemblée générale ou des réunions des commissions commerciales, techniques ou spécialisées148, et les tarifs adoptés sur cette base puis publiés au catalogue diffusé à l’ensemble des membres de l’ACB, sont l’expression d’un accord de volontés de l’ensemble des membres de l’ACB.
131. Ces décisions sont également l’expression d’un accord de volontés avec Bongard.
132. Il ressort en effet du dossier que Bongard a participé à la quasi-totalité des réunions de l’ACB : sauf exception portant sur trois réunions tenues en 2020 et 2021, Bongard a non seulement été présente à toutes les réunions de l'ACB mais a également défini, conjointement avec l’ACB, les ordres du jour de ces réunions et validé les comptes rendus de ces réunions avant qu’ils soient diffusés149.
133. En outre, les décisions prises par l’association engagent tant les membres de l’ACB que Bongard.
134. En effet, les statuts de l’ACB prévoient que toute décision prise par l’association engage l’ensemble de ses membres. L’article 11 dispose ainsi que « [t]ous les concessionnaires sont en permanence invités » aux commissions (même s’ils n’en sont pas membres)150. L’article 12 stipule par ailleurs que « le calendrier annuel et le programme de travail des commissions est établi en Assemblée Générale Ordinaire. Il est communiqué à l'ensemble des adhérents et à BONGARD », et que Bongard peut également être invitée à ces réunions : « Le Président de la commission peut inviter aux réunions, BONGARD, des intervenants extérieurs ou des salariés des concessions selon les thèmes traités ».
135. Ce même article prévoit également que « [l]e compte-rendu général et les relevés des décisions et actions à mettre en œuvre doivent être rédigés dans les 15 jours suivants la Commission pour relecture et validation par le Président de la commission (et BONGARD si applicable), et communiquées (sic) au réseau au plus tard un mois après la date de la séance de travail » (soulignement ajouté) et que « [c]haque concessionnaire doit accuser réception des relevés des décisions et actions issus du compte-rendu de réunion. Le Président de la Commission est en charge de la vérification de l'application des dites actions et décisions. (…) » (soulignement ajouté)151.
136. Par conséquent, les décisions de l’ACB, auxquelles ses membres et Bongard ont adhéré et se sont conformés, traduisent l’existence d’un accord de volontés.
b) Sur la restriction par objet
Principes applicables
137. L’article L. 420-1 du code de commerce prohibe les actions concertées, conventions, ententes expresses ou tacites entre les entreprises lorsqu’elles ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, notamment lorsqu’elles tendent à faire obstacle à la fixation des prix par le libre jeu du marché en favorisant artificiellement leur hausse ou leur baisse.
138. De même, l’article 101, paragraphe 1 du TFUE interdit tous accords entre entreprises, décisions d’associations d’entreprises et pratiques concertées ayant pour objet ou pour effet d’empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence, notamment ceux qui consistent à fixer de manière directe ou indirecte les prix d’achat ou de vente.
139. Il résulte de ces dispositions que l’objet et l’effet anticoncurrentiels d’une pratique sont des conditions alternatives.
140. Dans ce cadre, la Cour de justice a précisé qu’il convenait d’examiner, en premier lieu, l’objet même de l’accord, et qu’il n’y avait lieu, dans un second temps, d’en examiner les effets que si l’analyse de l’objet de l’accord ne révélait pas un degré de nocivité suffisant à l’égard de la concurrence pour caractériser une entente prohibée152.
141. À cet égard, elle a souligné que « certains types de coordination entre entreprises révèlent un degré suffisant de nocivité́ à l’égard de la concurrence pour qu’il puisse être considéré́ que l’examen de leurs effets n’est pas nécessaire »153. Il en est notamment ainsi des comportements qui conduisent à une fixation horizontale de prix154. La jurisprudence nationale va dans le même sens155.
142. De manière générale, l’appréciation de l’existence d’un degré suffisant de nocivité nécessite d’examiner concrètement et cumulativement la teneur et les objectifs de la disposition restrictive de concurrence, ainsi que le contexte économique et juridique dans lequel elle s’insère156.
143. S’agissant de pratiques consistant en l’élaboration et la diffusion de barèmes de prix par un organisme professionnel, l’Autorité́, comme le Conseil avant elle, considère qu’elles ont un objet anticoncurrentiel, nonobstant le caractère non impératif des consignes tarifaires données, dès lors qu’elles détournent les opérateurs d’une appréhension directe et personnelle de leurs coûts, limitant ainsi le libre jeu de la concurrence157.
144. Dans un arrêt du 29 janvier 2008, Union française des orthoprothésistes, la cour d’appel de Paris a confirmé la pratique décisionnelle de l’Autorité selon laquelle les informations ou indications diffusées par les organisations professionnelles ou syndicales et destinées à aider leurs membres dans l’exercice de leur activité ne doivent pas avoir pour objet ou pouvoir avoir pour effet de détourner les entreprises d’une appréhension directe de leurs propres coûts qui leur permette de déterminer individuellement leur prix de vente158. Dans le même sens, la Cour de cassation s’est prononcée sur l’objet anticoncurrentiel d’un document à « caractère indicatif » diffusé par un ordre professionnel comportant des indications de prix, par le biais de fourchettes d’honoraires ou de montants minima, par type de prestation, pour la plus grande partie de celles qui pouvaient être rendues par ses membres159.
Application au cas d’espèce
145. Il ressort des pièces du dossier et des constatations ci-dessus que l’ACB a pris des décisions portant sur les prix de revente du Paneotrad lors de réunions de son assemblée générale ou d’autres réunions de commissions en accord avec Bongard.
146. Les décisions adoptées et retranscrites dans les comptes rendus de ces réunions établissent ainsi une référence de prix fixe pour la vente du Paneotrad par l’ensemble des distributeurs Bongard membres de l’ACB, assortie parfois d’une interdiction de pratiquer des remises. Elles constituent donc des recommandations à l’attention de ses membres, distributeurs exclusifs du Paneotrad pour Bongard.
147. En outre, les décisions ainsi prises par Bongard et l’ACB, retranscrites au catalogue Bongard et diffusées à l’ensemble des membres de l’ACB, n’ont pas permis aux distributeurs ni à Bongard de fixer les prix du Paneotrad en fonction de leurs coûts ou d’autres critères propres à la gestion de leurs entreprises. Ces recommandations de fixation de prix, assorties parfois d’interdictions de remises, ont été en effet suivies par la quasi-totalité des distributeurs du réseau Bongard.
148. Par ailleurs, ces prix ainsi fixés s’appliquaient à l’ensemble des transactions passées par Bongard et ses distributeurs, quels que soient le territoire ou la clientèle auprès de laquelle le Paneotrad était vendu.
149. Il découle de ces éléments que les pratiques visées au titre du grief n° 1 constituent des restrictions anticoncurrentielles par objet au sens des articles 101 paragraphe 1 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.
c) Sur la durée et la continuité des pratiques
Principes applicables
150. Selon une pratique décisionnelle et une jurisprudence constantes, la durée d’un accord anticoncurrentiel est déterminée au regard de sa date de conclusion et de celle à laquelle il y a été mis fin.
151. En ce qui concerne l'administration de la preuve, il incombe à l'Autorité d'établir les éléments propres à démontrer, à suffisance de droit, la durée de l’infraction. En l'absence de preuves directes, l'Autorité doit se fonder sur « des éléments de preuve qui se rapportent à des faits suffisamment rapprochés dans le temps, de façon à ce qu'il puisse être raisonnablement admis que cette infraction s'est poursuivie de façon ininterrompue entre deux dates précises »160.
152. Le juge de l'Union a considéré qu'entre deux dates précises pour lesquelles l’infraction était établie, des déclarations d'entreprises sur sa continuité pouvaient constituer des éléments de preuve suffisants161.
Application au cas d’espèce
153. Il ressort des constatations que le prix du Paneotrad a été fixé lors des réunions de l’ACB, au moins une fois par an, d’avril 2006 à décembre 2019, à l’exception des années 2007, 2010 et 2014.
154. Le caractère continu de l’entente peut être prouvé sur la base du compte-rendu de l’assemblée générale de l’ACB des 10 et 11 octobre 2013 qui rappelle que l’ACB s’est fixée comme « règle d’or » de ne pas appliquer de remise sur le Paneotrad et ce, dès le début de sa commercialisation162.
155. Des déclarations du Président de l’ACB et du directeur commercial de Bongard confirment que le Paneotrad a été commercialisé en exclusivité par le réseau Bongard dès 2006 au prix fixe de 24 900 euros, sans possibilité de remise163.
156. Compte tenu de ces éléments, il convient de considérer que la pratique litigieuse retenue à l’encontre de l’ACB a débuté le 5 avril 2006, lors de la première réunion de l’ACB au cours de laquelle le prix du Paneotrad a été fixé. Elle a perduré de manière continue jusqu’au 12 décembre 2019, date de la dernière réunion de l’ACB évoquant des discussions sur le prix du Paneotrad.
157. L’infraction retenue contre Bongard n’a débuté que le 18 mars 2008, date de la réunion au cours de laquelle un représentant de Bongard était présent et où il a été décidé d’étendre la commercialisation du Paneotrad aux GMS, notamment par Bongard, dans les conditions de prix antérieurement convenues. La dernière réunion de l’ACB lors de laquelle le prix du Paneotrad a été discuté et à laquelle Bongard a participé est celle du 12 décembre 2019, qui marque donc la date de fin des pratiques à son encontre.
158. Par conséquent, l’infraction s’étend du 5 avril 2006 au 12 décembre 2019, s’agissant de l’ACB et du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019 s’agissant de Bongard.
2. LES RESTRICTIONS GEOGRAPHIQUES DES VENTES PASSIVES
a) Sur l’accord de volontés
Principes applicables
159. S’agissant des principes applicables aux décisions d’associations d’entreprises et à l’accord de volontés, il est renvoyé aux paragraphes 122 à 126.
160. S’agissant spécifiquement des accords verticaux, les lignes directrices de la Commission sur les restrictions verticales précisent, à cet égard, que « [l]a forme sous laquelle [l’intention commune des parties] est exprimée n'est pas importante, pour autant qu'elle constitue l'expression fidèle de celle-ci. En l'absence d'accord explicite exprimant la volonté concordante des parties, la Commission devra prouver que la stratégie unilatérale d'une partie reçoit l'acquiescement de l'autre »164. L’existence d’un acquiescement tacite peut alors être démontrée, en vertu de la jurisprudence du Tribunal165, dès lors « premièrement, qu’une partie exige, explicitement ou implicitement, la coopération de l’autre partie à la mise en œuvre de sa stratégie unilatérale et, deuxièmement, que l’autre partie se plie à cette exigence en mettant cette stratégie unilatérale en œuvre »166.
161. De manière analogue, l’Autorité a rappelé, s’agissant de l’application de clauses relatives à la restriction des ventes passives incluses dans les contrats conclus entre un fournisseur et ses grossistes, que la circonstance qu’une clause dont l’objet anticoncurrentiel a été établi n’ait pas reçu application « ne saurait (...) traduire l’absence de consentement des grossistes- vétérinaires à l’entente, le consentement des grossistes-vétérinaires à l’entente résultant de la signature même des contrats auxquels figure la clause »167.
162. S’agissant spécifiquement des interdictions de vente en ligne, la cour d’appel de Paris a jugé, dans un arrêt du 13 mars 2014, Bang & Olufsen que : « c’est sans méconnaître le standard de preuve défini par la jurisprudence [de l’Union européenne] que l’Autorité, afin de tenir pour établi que Bang & Olufsen France avait interdit de facto à ses distributeurs agréés de vendre ses produits par Internet, a dit que "cette interdiction ressortait en premier lieu, du contrat européen de distribution sélective (…)" ». La cour a précisé que ce n’est « qu’au surplus, et pour répondre à l’argumentation de Bang & Olufsen qu’il sera ajouté qu’à supposer qu’elle n’ait pas interdit "contractuellement" à ses distributeurs la vente par Internet, il suffit de constater que l’Autorité n’a pas seulement analysé le contrat et la circulaire mais qu’elle a pris en compte l’ensemble des éléments recueillis au cours de l’enquête et de l’instruction de la procédure » (soulignement ajouté)168.
163. Dans sa décision n° 21-D-20 du 22 juillet 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lunettes et montures de lunettes, l’Autorité a par ailleurs rappelé que les contrats incluant des stipulations relatives à l’interdiction de vente en ligne constituaient des « preuves directes » suffisant à établir la réalité d’une entente pour interdire aux détaillants la vente en ligne169.
Application au cas d’espèce
164. Il sera rappelé, comme développé aux paragraphes 127 à 129 et 132 à 136, que l’ACB constitue une association d’entreprises au sens de l’article 101 du TFUE et que ses décisions engagent l’ensemble de ses membres, lesquels ont accepté de se soumettre à ses statuts et à son règlement intérieur.
165. Bongard et Euromat sont également engagées par les décisions prises au sein de l’ACB en matière de ventes passives.
166. En effet, l’adoption de l’article 11 du règlement intérieur de l’ACB et d’un avenant au contrat de distribution conclu entre Bongard et ses distributeurs, adhérents de l’ACB et de la centrale d’achats Euromat, a eu lieu, à l’unanimité170, à l’occasion de l’assemblée générale de l’ACB des 2 et 3 octobre 2008, faisant suite à la commission commerciale de l’ACB du 29 mai 2008171.
167. Or, ces réunions ont été organisées en présence de Bongard, qui en était l’invitée permanente et qui s’est portée garante, tout comme Euromat, du respect des nouvelles règles de territorialité applicables172.
168. En outre, s’agissant d’Euromat, aux termes de ses statuts et de son règlement intérieur, ses sociétaires doivent cumuler la qualité de concessionnaire Bongard et d’adhérent à l’ACB, et Euromat a expressément adhéré aux règles applicables au réseau de distribution Bongard173.
169. Il résulte de ce qui précède qu’un accord de volontés a été conclu entre l’ACB, Bongard et Euromat portant, comme il sera décrit ci-dessous, sur une restriction de la liberté des distributeurs membres de l’ACB d’effectuer des ventes passives en dehors de leurs territoires exclusifs.
b) Sur la restriction de concurrence
Principes applicables
170. S’agissant des restrictions verticales de concurrence, aux termes des lignes directrices de la Commission sur les restrictions verticales, constituent un accord vertical les « accords qui concernent les conditions d’achat, de vente ou de revente des biens ou des services fournis par le fournisseur »174.
171. S’agissant plus particulièrement des restrictions de ventes passives, si les clauses visant à la concession, par un fournisseur, d’un territoire exclusif de vente à son distributeur ne sont pas anticoncurrentielles en elles-mêmes, en revanche celles visant à la restriction des ventes passives de ces mêmes distributeurs vers des territoires exclusifs peuvent revêtir le caractère de pratiques anticoncurrentielles par leur objet même.
172. Ainsi, constitue une restriction caractérisée contraire à l’article 4 (b) du règlement d’exemption par catégorie n° 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010175 les accords verticaux qui, directement ou indirectement, isolément ou cumulés avec d'autres facteurs sur lesquels les parties peuvent influer, ont pour objet « de restreindre le territoire sur lequel, ou la clientèle à laquelle, un acheteur partie à l'accord, peut vendre les biens ou services contractuels sans préjudice d’une restriction quant à son lieu d’établissement ». L’article 4 (b), i) exclut de cette interdiction les accords ayant pour objet de « restreindre ses ventes actives sur un territoire ou à une clientèle que le fournisseur s'est exclusivement réservés ou qu'il a alloués à un autre acheteur, lorsque cette restriction ne limite pas les ventes réalisées par les clients de l'acheteur ».
173. Il ressort de l’article 4 b) du règlement n° 330/2010 du 20 avril 2010 que des pratiques qui ont pour objet de restreindre le territoire sur lequel, ou la clientèle à laquelle, un acheteur partie à l’accord, peut vendre les biens ou services contractuels, ne peuvent, en principe, bénéficier de l’exemption prévue par l’article 2 du même texte.
174. Les lignes directrices de la Commission sur les restrictions verticales indiquent que « cette protection de territoires exclusifs ou de clientèles exclusives doit cependant permettre les ventes passives sur ces territoires ou à ces clientèles » et précisent que, pour l'application de l'article 4, point b), du règlement d'exemption par catégorie, « par « ventes passives », on entend le fait de satisfaire à des demandes non sollicitées, émanant de clients individuels, y compris la livraison de biens ou la prestation de services demandés par ces clients. Toute publicité ou action de promotion générale qui atteint des clients établis sur les territoires (exclusifs) d'autres distributeurs, ou faisant partie d'une clientèle allouée à d'autres distributeurs, mais qui est un moyen raisonnable d'atteindre des clients situés en dehors de ces territoires ou d'une telle clientèle, par exemple pour accéder à des clients situés sur son propre territoire, est considérée comme une vente passive. […] »176.
175. Ces mêmes lignes directrices indiquent que la restriction caractérisée liée au partage du marché en territoires ou en clientèle visée à l'article 4, point b), du règlement d'exemption par catégorie « peut découler d'obligations directes, comme l'obligation de ne pas vendre à certains clients ou à des clients situés sur certains territoires ou l'obligation de transmettre à d'autres distributeurs les commandes de ces clients. Elle peut aussi être le résultat de mesures indirectes destinées à dissuader le distributeur de vendre à ces clients, telles que […] la diminution des volumes de livraison ou la limitation du volume de livraison en fonction de la demande sur le territoire ou au sein de la clientèle alloués […], des obligations de transfert des bénéfices. […] Ces pratiques ont encore plus de chances d'être considérées comme une restriction pesant sur les ventes réalisées par l'acheteur lorsqu'elles sont associées à la mise en œuvre, par le fournisseur, d'un système de surveillance afin de vérifier la destination réelle des marchandises livrées, par exemple, en utilisant des étiquettes ou des numéros de série différenciés. […] »177.
176. Ainsi, « si les clauses visant à la concession, par un fournisseur, d’un territoire exclusif de vente à son distributeur ne sont pas anticoncurrentielles en elles-mêmes, les clauses visant à la restriction des ventes passives de ces mêmes distributeurs vers des territoires exclusifs peuvent revêtir le caractère de pratiques anticoncurrentielles par leur objet même »178. En ce qui concerne les restrictions à la vente sur Internet, les lignes directrices de la Commission sur les restrictions verticales précisent qu’« Internet est un instrument puissant qui permet d'atteindre un plus grand nombre et une plus grande variété́ de clients que par les seules méthodes de vente plus traditionnelles, ce qui explique pourquoi certaines restrictions à son utilisation sont considérées comme une restriction des (re)ventes. En principe, tout distributeur doit être autorisé à utiliser Internet pour vendre ses produits. En règle générale, l'utilisation par un distributeur d'un site Internet pour vendre des produits est considérée comme une forme de vente passive, car c'est un moyen raisonnable de permettre aux consommateurs d'atteindre le distributeur »179. Ainsi, constitue une restriction caractérisée contraire à l’article 4 (b) du règlement 330/2010180 tout accord consistant à « convenir que le distributeur limite la part de ses ventes réalisées par internet »181.
177. Dans sa décision n° 12-D-23 du 12 décembre 2012 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Bang & Olufsen dans le secteur de la distribution sélective de matériels hi-fi et home cinema précitée, l’Autorité, confirmée sur ce point par la cour d’appel182, a considéré qu’une interdiction de facto de la vente sur Internet par le fabricant était restrictive par son objet même, en l’absence de justifications objectives183.
178. De même, dans sa décision n° 19-D-14 du 1er juillet 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles haut de gamme184, l’Autorité a considéré qu’une interdiction de facto de la vente en ligne de ces produits, consistant en l’obligation de réceptionner en magasin les cycles commandés sur le site Internet du distributeur agréé concerné, allait au-delà de ce qui était nécessaire pour préserver la sécurité du consommateur et la haute technicité des cycles et constituait, partant, une restriction par objet185.
Application au cas d’espèce
179. Comme exposé aux paragraphes 79 à 84 ci-dessus, le contrat de distribution exclusive conclu entre Bongard et ses distributeurs jusqu’en 2008 prévoyait l’attribution à chaque distributeur d’une zone d’exclusivité, au sein de laquelle seul ledit distributeur (ou concessionnaire) pouvait démarcher la clientèle d’artisans-boulangers et effectuer les ventes en résultant.
180. Néanmoins, comme indiqué aux paragraphes 73 à 78 ci-dessus, à compter de 2008 et de l’introduction au sein du règlement intérieur de l’ACB d’un article 11 « Territorialité », auquel renvoyait l’avenant d’octobre 2008 au contrat de distribution exclusive précité, toute vente ou livraison de matériel et de pièces détachées, tant auprès des artisans-boulangers que des Grands Comptes, en dehors de la zone d’exclusivité concédée, a été expressément interdite. Le concessionnaire ayant effectué une vente prohibée s’engageait à reverser au concessionnaire « du secteur où se situe le client » 186 la marge réalisée. Aucune distinction n’était faite quant au fait générateur d’une telle vente ou livraison prohibée, que celles-ci fassent suite à une prospection active du distributeur ou ne constituent qu’une simple réponse à une sollicitation spontanée d’un client potentiel situé en dehors du territoire concédé.
181. L’article 11 précité instituait, en outre, une surveillance par les fournisseurs Bongard et Euromat, chargés de s’assurer de la destination réelle des marchandises livrées et de limiter, le cas échéant, les commandes en fonction de la demande sur le territoire alloué187.
182. Ce même article prévoyait encore la mise en œuvre d’un système de traçabilité des pièces détachées, afin que les distributeurs puissent vérifier le bon respect des règles territoriales à l’occasion de la commercialisation desdites pièces188.
183. En pratique, il ressort des constatations exposées aux paragraphes 85 à 93 que les distributeurs concessionnaires ont pu mettre en œuvre différemment l’interdiction de vente ainsi formalisée : certains l’ont appliquée strictement en refusant d’exécuter toute commande en provenance d’un client situé en dehors du territoire concédé, quand d’autres ont choisi d’honorer de telles commandes tout en s’accordant avec le distributeur territorialement concerné. Tous, en revanche, ont considéré que cette interdiction s’appliquait aussi bien au matériel neuf qu’aux services après-vente, pièces détachées Bongard et produits acquis auprès de la centrale Euromat.
184. Enfin, il n’est pas contesté que l’ACB a clairement promu la nécessité pour les distributeurs membres du réseau de s’abstenir de faire figurer ouvertement les tarifs applicables sur Internet, et a fortiori de disposer d’un site marchand, la commission commerciale de l’ACB ayant en particulier, lors de sa réunion du 8 juin 2012 à laquelle Bongard était présente189, expressément engagé une réflexion pour interdire la vente de matériel neuf sur Internet : « De manière générale la Commission s’accorde à dire que les sites internet des concessions n’ont pas vocation à être des sites marchands (on n'achète pas un four sur internet !). A ce titre, les sites internet des concessionnaires BONGARD ne devraient pas indiquer le prix des matériels neufs (BONGARD ne communique pas les prix de matériels sur son propre site). Par contre les prix du matériel d'occasion peuvent être affichés sur le site » (soulignement ajouté).
185. Il découle de ces éléments que les pratiques visées au titre du grief n° 2 constituent des restrictions anticoncurrentielles par objet au sens des articles 101, paragraphe 1 du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.
c) Sur la durée et la continuité des pratiques
Principes applicables
186. Les principes applicables sont présentés aux paragraphes 150 à 152 ci-dessus.
Application au cas d’espèce
187. L’adoption de l’article 11 du règlement intérieur de l’ACB et d’un avenant au contrat de distribution conclu entre Bongard et ses distributeurs, adhérents de l’ACB et de la centrale d’achats Euromat a eu lieu, à l’unanimité, à l’occasion de l’assemblée générale de l’ACB des 2 et 3 octobre 2008, faisant suite à la commission commerciale de l’ACB du 29 mai 2008.
188. Cet accord de volonté entre l’ACB, Bongard et Euromat a cessé d’exister à compter de la modification par Bongard du modèle de contrat de distribution exclusive, entré en vigueur le 1er octobre 2016190, dont l’article III, 4) stipule que le distributeur « s'interdit de Promouvoir les Produits, effectuer des Ventes Actives de Produits hors du Territoire, sans préjudice de son droit d’effectuer des Ventes Passives hors du Territoire » (soulignement ajouté) (voir paragraphes 95 et suivants).
189. Les pratiques anticoncurrentielles faisant l’objet du grief n° 2 se sont donc poursuivies durant six années, du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016.
E. SUR L’IMPUTABILITE DES PRATIQUES
1. RAPPEL DES PRINCIPES APPLICABLES
a) L’imputabilité au sein d’un groupe de sociétés
190. Il résulte d’une jurisprudence constante que les articles L. 420-1 et L. 420-2 du code de exerçant une activité économique, même si elles sont constituées de plusieurs personnes physiques ou morales191.
191. En droit interne comme en droit de l’Union, au sein d’un groupe de sociétés, le comportement d’une filiale peut être imputé à la société mère notamment lorsque, bien qu’ayant une personnalité juridique distincte, cette filiale ne détermine pas de façon autonome son comportement sur le marché, mais applique pour l’essentiel les instructions qui lui sont données par la société mère, eu égard en particulier aux liens économiques, organisationnels et juridiques qui unissent ces deux entités juridiques192. Ces solutions jurisprudentielles cohérentes sont fondées sur le fait qu’en l’absence d’autonomie de la société filiale par rapport à la société mère, ces deux sociétés font partie d’une même unité économique et, partant, forment une seule entreprise au sens du droit de la concurrence.
192. Dans le cas particulier où une société mère détient, directement ou indirectement, la totalité ou la quasi-totalité du capital de sa filiale auteur d’un comportement infractionnel, il existe une présomption réfragable selon laquelle cette société mère exerce effectivement une influence déterminante sur le comportement de sa filiale. Dans ce cas de figure, l’Autorité de concurrence est en mesure de considérer la société mère comme tenue solidairement au paiement de l’amende infligée à sa filiale, à moins que cette société mère, à laquelle il incombe de renverser cette présomption, n’apporte des éléments de preuve suffisants de nature à démontrer que sa filiale se comporte de façon autonome sur le marché193. Par ailleurs, et comme l’a indiqué la cour d’appel de Paris, « cette règle de fond s’impose aux juridictions et autorités de concurrence nationales, lorsqu’elles appliquent le droit européen de la concurrence, l’Autorité de la concurrence appliquant cette présomption, même lorsqu’elle applique exclusivement le droit national de la concurrence, pour des raisons de cohérence juridique, depuis ses décisions 11-D-02 et 11-D-13 »194.
193. Selon une jurisprudence constante, lorsque l’existence d’une infraction est établie, il faut déterminer la personne physique ou morale qui était responsable de l’exploitation de l’entreprise mise en cause au moment où l’infraction a été commise, afin qu’elle réponde de cette infraction195.
194. Tant que la personne morale responsable de l’exploitation de l’entreprise qui a mis en œuvre des pratiques enfreignant les règles de concurrence subsiste juridiquement, c’est elle qui doit être tenue pour responsable de ces pratiques. En particulier, elle continue de l’être même si les moyens matériels et humains ayant concouru à la commission de l’infraction ont été cédés à une tierce personne196. Si cette personne morale a changé de dénomination sociale ou de forme juridique, elle n’en continue pas moins à répondre de l’infraction commise197.
195. En revanche, lorsque la personne morale responsable de l’exploitation de l’entreprise qui a commis les pratiques a cessé d’exister juridiquement, ces pratiques doivent être imputées à la personne morale à laquelle l’entreprise a juridiquement été transmise, c’est-à-dire celle qui a reçu les droits et obligations de la personne auteur de l’infraction et, à défaut d’une telle transmission, à celle qui assure en fait sa continuité économique et fonctionnelle198. C’est en particulier le cas lorsqu’une personne morale est absorbée par une autre. Dans ce cas, les pratiques, dont la société absorbée est l’auteure, sont imputées à la personne morale qui a absorbé cette dernière199.
b) L’imputabilité des pratiques à un organisme collectif
196. Il ressort d’une jurisprudence constante que les griefs doivent être notifiés à une personne juridique pouvant être tenue responsable de l’infraction au droit de la concurrence200.
197. Lorsque les pratiques étudiées impliquent un organisme collectif, l’Autorité, selon les circonstances de l’espèce, retient soit la responsabilité de l’organisme seul, soit y adjoint celle de ses membres201. La première solution a été retenue dès lors que ce sont les organes dirigeants de l’organisme qui, soit directement, soit par délégation, apparaissent comme étant les auteurs des pratiques d’entente entre ses membres202.
2. APPLICATION AU CAS D’ESPECE
a) S’agissant de l’entente sur le prix de revente du Paneotrad (grief n° 1)
L’Association des concessionnaires Bongard (ACB)
198. Les pratiques litigieuses ont été mises en œuvre par une association d’entreprises, l’ACB, qui est une association loi 1901 régulièrement déclarée203, constituée de plusieurs personnes physiques ou morales et dont l’acte d’enregistrement a été publié au Journal Officiel204. L’ACB est donc dotée de la personnalité juridique.
199. Cette entité est une association qui regroupe des entreprises actives dans la distribution de matériels de boulangerie et qui est sortie de son rôle en participant à des pratiques anticoncurrentielles. Ce faisant, elle peut se voir imputer les pratiques, indépendamment de ses membres, en tant qu’auteure.
200. Ainsi, les pratiques visées au grief n° 1 sont imputables à l’ACB, en tant qu’auteure, pour la période du 5 avril 2006 au 12 décembre 2019.
Bongard
201. La société Bongard dispose de la personnalité juridique et peut être tenue responsable de l’infraction au droit de la concurrence. Ainsi, les pratiques visées au grief n° 1 lui sont imputables, en tant qu’auteure, pour la période du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019.
Sociétés exerçant une influence déterminante sur Bongard
202. De 2007 à 2009, la totalité ou la quasi-totalité du capital de la société Bongard était détenue directement ou indirectement par les sociétés :
Bongard Industries (détenant 100 % du capital de la société Bongard) ;
EEBP (détenant 100 % du capital de la société Bongard Industries) ;
AFE Bakery (détenant 100 % du capital de la société EEBP) ;
AFE Group France (détenant 100 % du capital de la société AFE Bakery) ;
Ali SAS (détenant directement 57,02 % du capital de la société AFE Group France et le capital restant indirectement à travers ses deux filiales à 100%, Rosinox et Friginox, détenant respectivement 24,06 % et 18,95 % du capital de la société AFE Group France) ;
ALI Spa (détenant 100 % du capital de la société ALI).
203. Néanmoins, la société Bongard Industries a été radiée du registre du commerce et des sociétés en 2009.
204. De 2009 à 2013, la totalité ou la quasi-totalité du capital de la société Bongard était détenue directement ou indirectement par les sociétés :
EEBP, ayant pris la dénomination de Bongard Industries (détenant 100 % du capital de la société Bongard) ;
AFE Bakery (détenant 100 % du capital de la société Bongard Industries) ;
AFE Group France (détenant 100 % du capital de la société AFE Bakery) ;
Ali SAS (détenant directement 57,02 % du capital de la société AFE Group France et le capital restant indirectement à travers ses deux filiales à 100%, Rosinox et Friginox, détenant respectivement 24,06 % et 18,95 % du capital de la société AFE Group France) ;
ALI Spa (détenant 100 % du capital de la société ALI).
205. Les sociétés EEBP (anciennement dénommée Bongard Industries) et AFE Bakery ont toutefois à leur tour été radiées du registre du commerce et des sociétés en 2013.
206. De 2013 à 2021, la totalité ou la quasi-totalité du capital de la société Bongard était détenue directement ou indirectement par les sociétés :
AFE Group France, ayant pris la dénomination d’AFE Bakery (détenant 100 % du capital de la société Bongard) ;
Ali SAS (détenant directement 57,02 % du capital de la société AFE Group France et le capital restant indirectement à travers ses deux filiales à 100%, Rosinox et Friginox, détenant respectivement 24,06 % et 18,95 % du capital de la société AFE Group France) ;
ALI Spa (détenant 100 % du capital de la société ALI), désormais dénommée ALI Holding SRL.
207. En application des principes rappelés ci-dessus, les sociétés AFE Bakery, Ali SAS et ALI Holding SRL, sociétés mères détenant directement ou indirectement la totalité ou la quasi-totalité du capital de la société Bongard, sont présumées exercer une influence déterminante sur la société Bongard. Les sociétés concernées, qui ont chacune signé un procès-verbal de transaction, n’ont pas contesté ce point.
Conclusion sur l’imputabilité du grief n° 1
208. Compte tenu des éléments qui précèdent, il convient d’imputer le grief n° 1 aux sociétés suivantes en leurs qualités respectives :
à l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB), en tant qu’auteure, pour sa participation du 5 avril 2006 au 12 décembre 2019 ;
à la société Bongard, en tant qu’auteure, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019 ;
à la société AFE Bakery, anciennement dénommée AFE Group France, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019 ;
à la société Ali SAS, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019 ;
à la société ALI Holding SRL, anciennement dénommée ALI Spa, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019.
b) S’agissant de la restriction géographique des ventes passives des produits Bongard et Euromat (grief n° 2)
L’Association des concessionnaires Bongard (ACB)
209. Comme exposé aux paragraphes 197 et 198 ci-dessus, l’ACB peut se voir imputer les pratiques, indépendamment de ses membres, en tant qu’auteure.
210. Ainsi, les pratiques visées au grief n° 2 sont imputables à l’ACB, pour la période du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016.
Bongard
211. La société Bongard disposant de la personnalité juridique, les pratiques visées au grief n° 2 lui sont imputables, en tant qu’auteure, pour la période du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016.
Sociétés exerçant une influence déterminante sur Bongard
212. En application des principes rappelés ci-dessus, les sociétés AFE Bakery, Ali SAS et ALI Holding SRL, sociétés mères détenant directement ou indirectement la totalité ou la quasi-totalité du capital de la société Bongard, sont présumées exercer une influence déterminante sur la société Bongard, présomption qu’elles n’ont pas remise en cause (voir ci-avant, paragraphe 206).
213. Pour les mêmes raisons qu’exposé aux paragraphes 201 à 205 ci-dessus, les pratiques relatives au grief n° 2 sont donc imputables à :
la société AFE Bakery, anciennement dénommée AFE Group France, en tant que société mère de Bongard, pour l’intégralité de la période d’infraction (du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016) ;
la société Ali SAS, en tant que société mère de Bongard, pour l’intégralité de la période d’infraction (du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016) ;
la société ALI Holding SRL, anciennement dénommée ALI Spa, en tant que société mère de Bongard, pour l’intégralité de la période d’infraction (du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016) ;
Euromat
214. La société Euromat disposant de la personnalité juridique, il convient de retenir sa responsabilité en tant qu’auteure des pratiques. Ainsi, les pratiques visées au grief n° 2 lui sont imputables, en tant qu’auteure, pour la période du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016.
Conclusion sur l’imputabilité du grief n° 2
215. Compte tenu des éléments qui précèdent, il convient d’imputer aux sociétés suivantes en leurs qualités respectives :
à l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB), en tant qu’auteure, pour sa participation du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 ;
à la société Euromat, en tant qu’auteure, pour sa participation du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 ;
à la société Bongard, en tant qu’auteure, pour sa participation du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 ;
à la société AFE Bakery, anciennement dénommée AFE Group France, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 ;
à la société Ali SAS, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 ;
à la société ALI Holding SRL, anciennement dénommée ALI Spa, en tant que société mère de la société Bongard, pour sa participation du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016.
F. SUR LA SANCTION
2. RAPPEL DES PRINCIPES APPLICABLES
216. Le I de l’article L. 464-2 du code de commerce habilite l’Autorité à infliger une sanction pécuniaire aux entreprises et aux associations d’entreprises qui se livrent à des pratiques anticoncurrentielles interdites par l’article L. 420-1 du code de commerce.
217. Par ailleurs, le troisième alinéa du I de cet article prévoit que « les sanctions pécuniaires sont appréciées au regard de la gravité et de la durée de l'infraction, de la situation de l'association d'entreprises ou de l'entreprise sanctionnée ou du groupe auquel l'entreprise appartient et de l'éventuelle réitération de pratiques prohibées par le présent titre. Elles sont déterminées individuellement pour chaque entreprise ou organisme sanctionné et de façon motivée pour chaque sanction ».
218. Le quatrième alinéa du I de l’article L. 464-2 du code de commerce précise que : « [l]e montant maximum de la sanction est, pour une entreprise, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre. Si les comptes de l'entreprise concernée ont été consolidés ou combinés en vertu des textes applicables à sa forme sociale, le chiffre d'affaires pris en compte est celui figurant dans les comptes consolidés ou combinés de l'entreprise consolidante ou combinante »205.
219. Aux termes du quatrième alinéa du I de l’article L. 464-2 du même code, dans sa version antérieure à l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021, « [s]i le contrevenant n’est pas une entreprise, le montant maximum de la sanction est de 3 millions d’euros »206.
220. Le III de l’article L. 464-2 du code de commerce dispose par ailleurs que : « Lorsqu'une association d'entreprises ou une entreprise ne conteste pas la réalité des griefs qui lui sont notifiés, le rapporteur général peut lui soumettre une proposition de transaction fixant le montant minimal et le montant maximal de la sanction pécuniaire envisagée. Lorsque l'entreprise ou l'association d'entreprises s'engage à modifier son comportement, le rapporteur général peut en tenir compte dans sa proposition de transaction. Si, dans un délai fixé par le rapporteur général, l'entreprise ou l'association d'entreprises donne son accord à la proposition de transaction, le rapporteur général propose à l'Autorité de la concurrence, qui entend l'entreprise ou l'association d'entreprises et le commissaire du Gouvernement sans établissement préalable d'un rapport, de prononcer la sanction pécuniaire prévue au I dans les limites fixées par la transaction ».
221. Enfin, conformément au paragraphe 37 du communiqué de procédure du 21 décembre 2018 relatif à la procédure de transaction, dont le principe a été repris au paragraphe 5 du communiqué de l’Autorité relatif à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires du 30 juillet 2021 (ci-après « le communiqué sanctions »), les circonstances particulières résultant de la mise en œuvre, en l’espèce, de la procédure de transaction justifient que les sanctions prononcées ne soient pas motivées par référence à la méthode de détermination des sanctions pécuniaires énoncée dans le communiqué sanctions.
3. APPLICATION AU CAS D’ESPECE
a) En ce qui concerne la gravité et la durée des pratiques reprochées
Sur la gravité
222. Au cas d’espèce, les pratiques ont consisté (i) d’une part, en une entente entre distributeurs concurrents, au sein d’une association d’entreprises, l’ACB, mais également entre les membres de l’ACB et la société Bongard, visant à restreindre le jeu de la concurrence en fixant le tarif communément appliqué pour la vente du Paneotrad (grief n° 1) ; (ii) d’autre part, en une entente verticale consistant à interdire aux distributeurs adhérents de l’ACB et membres des réseaux de distribution exclusive de Bongard et d’Euromat, d’effectuer auprès de l’ensemble de leur clientèle, en dehors de la zone territoriale allouée à un distributeur, des ventes passives de matériels, de pièces détachées et de services après-vente, à l’exclusion des produits d’occasion (grief n° 2).
223. Il ressort d’une jurisprudence et d’une pratique décisionnelle constantes que les ententes verticales impliquant des entreprises actives à des stades différents de la chaîne de production sont généralement considérées avec moins de sévérité que les ententes horizontales entre concurrents.
224. Concernant le grief n° 1, les pratiques en cause, portant sur le prix du Paneotrad et tendant ainsi à manipuler un paramètre essentiel de concurrence, constituent par leur nature même une des infractions les plus graves aux règles de la concurrence et revêtent un objet anticoncurrentiel au sens des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du code de commerce.
225. Les personnes susceptibles d’être affectées par les pratiques sont en premier lieu les artisans boulangers, clients exclusifs des distributeurs, ayant le statut de petites et moyennes entreprises, pour lesquels le Paneotrad pouvait présenter une opportunité de développement intéressante et qui ont soit acquis le Paneotrad à un niveau de prix artificiellement élevé en raison de l’entente, soit renoncé à se le procurer en raison de son niveau de prix.
226. En ce qui concerne le grief n° 2, l’infraction retenue a consisté, pour les sociétés Bongard et Euromat, avec l’ACB et à travers son règlement intérieur, en une restriction de la liberté des distributeurs appartenant à leurs réseaux de distribution exclusive d’effectuer des ventes passives en dehors de leurs territoires exclusifs respectifs, y compris sur Internet.
227. Ce constat n’exclut pas, toutefois, contrairement à ce que font valoir les entreprises mises en cause, que ce type de pratiques puisse être analysé comme présentant un certain degré de gravité. Dans sa décision n° 12-D-10, l’Autorité a ainsi retenu que les exclusivités d’approvisionnement, de clientèle, et les exclusivités territoriales mises en œuvre constituaient des pratiques ayant eu pour effet réel ou potentiel de cloisonner le marché de gros et d’affaiblir la concurrence, et revêtaient à ce titre un caractère certain de gravité207. Les restrictions aux ventes en ligne sont quant à elles considérées de façon constante comme présentant un degré certain de gravité208. Ainsi, dans sa décision n° 08-D-25 du 29 octobre 2008 relative à des pratiques d’interdiction de ventes sur Internet mises en œuvre dans le secteur de la distribution de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle vendus sur conseils pharmaceutiques, le Conseil a souligné que « les pratiques d’entente ayant pour objet et pour effet de faire obstacle à la concurrence et de limiter ou contrôler des débouchés font partie des pratiques que le Conseil juge préjudiciables au bon fonctionnement du marché »209. Plus précisément, il a relevé que « sans revêtir le degré de gravité d’une entente horizontale, elle est grave par nature car elle a pour conséquence de fermer une voie de commercialisation au détriment des consommateurs et des distributeurs » (soulignement ajouté)210.
228. De même, dans la décision n° 12-D-23 du 12 décembre 2012 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Bang & Olufsen dans le secteur de la distribution sélective de matériels hi-fi et home cinéma, l’Autorité a précisé que « de telles pratiques anticoncurrentielles sont considérées, de manière constante, en droit de l’Union comme en droit interne, comme revêtant un caractère certain de gravité, en ce qu’elles tendent non seulement à limiter la concurrence intra-marque sur le marché français mais aussi à cloisonner les marchés et à priver les consommateurs d’un canal de distribution » (soulignement ajouté).211.
229. En l’espèce, les pratiques apparaissent potentiellement d’une certaine ampleur, dans la mesure où elles couvrent tout le marché français de la distribution des matériels neufs de boulangerie-pâtisserie, y compris la distribution de pièces détachées et le service après-vente et incluent les ventes sur Internet.
230. Les personnes susceptibles d’être affectées par ces pratiques, au premier rang desquelles des petites et moyennes entreprises, et leurs clients finals, qu’il s’agisse d’artisans-boulangers, d’installateurs ou de réparateurs de pièces détachées, sont, par ailleurs, nombreuses.
231. Les pratiques en cause doivent donc être considérées comme présentant un degré certain de gravité.
232. Par ailleurs, contrairement à ce que soutiennent les entreprises mises en cause, l’absence de mécanisme de surveillance ou de représailles, d’une part, n’est pas avérée, dès lors qu’un tel mécanisme a bien été institué concernant le respect des règles territoriales (cf. paragraphe 167), et, d’autre part, ne constitue pas, en tout état de cause, un facteur d’atténuation de la gravité des pratiques212.
233. Il en est de même du fait que les pratiques n’ont revêtu aucun caractère secret.
Sur la durée
234. S’agissant du grief n° 1, les pratiques ont été mises en œuvre de façon continue du 5 avril 2006 au 12 décembre 2019 par l’ACB, et du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019 par Bongard, soit, respectivement, sur une période allant de 11 ans 8 mois et 24 jours à 13 ans 8 mois et 7 jours.
235. S’agissant du grief n° 2, l’entente a été mise en œuvre du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016, soit durant 7 ans 11 mois et 28 jours.
b) En ce qui concerne l’individualisation de la sanction
236. L’ensemble des entreprises ou organismes impliqués dans les pratiques sollicitent que, compte tenu de leur situation individuelle, la sanction soit fixée dans le bas de la fourchette retenue dans les procès-verbaux de transaction.
237. À cet effet, l’ACB fait valoir que ses membres n’ont jamais eu l’intention d’enfreindre les règles du droit de la concurrence et auraient plutôt agi par maladresse ou ignorance des règles applicables. Selon elle, il devrait ainsi être tenu compte, en tant que circonstances atténuantes, de l’absence de volonté de nuisance des opérateurs économiques concernés, mais également de la cessation des infractions dès le 12 décembre 2019 en ce qui concerne l’entente sur les prix, et même dès le 1er octobre 2016 pour les restrictions des ventes passives.
238. Elle ajoute que ses membres seront directement touchés par la sanction prononcée, alors même que leurs conditions d’activité seraient de plus en plus difficiles « en raison de la hausse significative des matières premières et du coût de l’énergie qui impactent fortement leurs prévisions d’activité sur les mois et années à venir, mais également en raison des difficultés notables rencontrées par l’ensemble du secteur de la boulangerie-pâtisserie ».
239. Euromat développe dans ses observations des arguments identiques, relatifs d’une part à l’absence, chez ses actionnaires, de volonté de nuisance et de conscience du caractère illicite des pratiques en cause, d’autre part à la crise qui toucherait actuellement le secteur de la boulangerie-pâtisserie.
240. Pour leur part, Bongard et ses sociétés mères font valoir le rôle central que l’ACB aurait joué dans les pratiques, au travers du véritable pouvoir qu’elle exercerait sur Bongard, celle-ci ayant été contrainte de participer aux pratiques.
241. Il sera en premier lieu relevé que, quand bien même, quod non, elle serait établie, l’absence d’intention de commettre une infraction au droit de la concurrence n’est pas de nature à exonérer ni même atténuer la responsabilité de l’auteur de pratiques anti-concurrentielles.
242. Par ailleurs, si l’ACB et Euromat évoquent toutes deux la perspective de possibles nombreuses défaillances d’entreprises dans le secteur concerné, ayant conduit selon elles « le Ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique à annoncer un plan de soutien significatif pour limiter les effets désastreux de la crise que traverse ce secteur » 213, elles ne versent toutefois aux débats aucun élément venant étayer cette assertion générale et ne démontrent pas davantage en quoi de telles défaillances affecteraient leur situation individuelle.
243. En revanche, il est exact qu’aucun élément du dossier ne permet de contredire la thèse des parties selon laquelle elles ont mis spontanément un terme aux restrictions des ventes passives dès la réforme du droit des obligations d’octobre 2016, bien avant d’avoir connaissance de l’enquête menée par la DGCCRF puis reprise par l’Autorité.
244. S’agissant enfin de Bongard, il n’est pas contesté que l’ACB a, lors de sa création, été pensée comme un « contre-pouvoir vis-à-vis de BONGARD, visant à établir un équilibre entre les deux parties » 214. Il ne peut, pour autant, être raisonnablement soutenu, comme Bongard le fait, qu’elle aurait été contrainte par l’ACB de participer aux pratiques s’agissant du grief n° 1, alors même qu’il apparaît que le prix du Paneotrad a, depuis son lancement sur le marché, été fixé au cours de réunions auxquelles Bongard était systématiquement présente215 et avec son assentiment216, et que le franc désaccord qu’elle soutient avoir exprimé à ce sujet ne ressort aucunement du dossier. Quant à la tentative de Bongard de s’écarter du tarif fixé avec l’ACB pour la vente de 130 Paneotrad à Carrefour, elle ne saurait, par définition même et eu égard à son caractère isolé, être assimilée à un refus clair de s’inscrire dans la politique globale de fixation d’un prix unique applicable à l’ensemble de la clientèle.
245. Le rôle central joué par l’ACB dans la pratique d’entente sur les prix a néanmoins été mis en évidence par les services d’instruction, comme il l’a été en outre pour le grief n° 2. Comme le relève la notification de griefs, l’adhésion de Bongard aux pratiques, bien que réelle, a été largement influencée par les positions de principe de l’ACB. Il est ainsi patent que l’ACB est à l’origine du mouvement de blocage des livraisons du Paneotrad engagé lorsque Bongard a passé un accord avec Carrefour à un prix de vente inférieur à celui décidé dans le cadre de l’entente.
246. Les sanctions prononcées tiendront ainsi compte de l’implication décisive de l’ACB dans les pratiques, de celle, moindre, de Bongard et de celle, encore moindre, d’Euromat, celle-ci n’étant, en outre, mise en cause que pour un seul grief.
247. Au vu de l’ensemble de ces éléments et dans le respect des termes de la transaction, il sera infligé :
à l’Association des Concessionnaires Bongard, une sanction de 1 500 000 euros ;
à Bongard, solidairement avec ses sociétés mères, une sanction de 1 200 000 euros ;
à Euromat, une sanction de 250 000 euros.
248. Ces montants sont inférieurs au plafond légal de sanction prévu par le I de l’article L. 464-2 du code de commerce.
DÉCISION
Article 1er : Il est établi que l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB) a enfreint les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce ainsi que celles de l’article 101 paragraphe 1 du TFUE du 5 avril 2006 au 12 décembre 2019 s’agissant du grief n° 1, et du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 s’agissant du grief n° 2.
Article 2 : Il est établi que la société Bongard, en tant qu’auteur, et les sociétés AFE Bakery Ali SAS et ALI Holding SRL, en leur qualité de sociétés mères, ont enfreint les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce ainsi que celles de l’article 101 paragraphe 1 du TFUE du 18 mars 2008 au 12 décembre 2019 s’agissant du grief n° 1 et du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 s’agissant du grief n° 2.
Article 3 : Il est établi qu’Euromat a enfreint les dispositions de l’article L. 420-1 du code de commerce ainsi que celles de l’article 101 paragraphe 1 du TFUE du 3 octobre 2008 au 1er octobre 2016 s’agissant du grief n° 2.
Article 4 : Sont infligées les sanctions pécuniaires suivantes : à l’Association des Concessionnaires Bongard (ACB), une sanction de 1 500 000 euros, au titre des pratiques visées à l’article 1er ; à Bongard, solidairement avec ses sociétés mères AFE Bakery Ali SAS et ALI Holding SRL, une sanction de 1 200 000 euros, au titre des pratiques visées à l’article 2 ; à Euromat, une sanction de 250 000 euros au titre des pratiques visées à l’article 3.
NOTES :
1 Ce résumé a un caractère strictement informatif. Seuls font foi les motifs de la décision numérotés ci-après.
2 Cotes 2 à 86.
3 Cote 1.
4 Cotes 17461 à 17484.
5 Cotes 18107 à 18153.
6 Cotes 18211 à 18220 et 18230 à 18238.
7 Procès-verbal de déclarations du 26 avril 2017 du Président de l'ACB, cote 266.
8 Cote 14.
9 Procès-verbal de déclarations du 26 avril 2017 du Président de l'ACB, cote 266 : « Le marché de « l’équipement des boulangeries-pâtisseries » est constitué par : - les quelques 30 000 artisans-boulangers, boulangers pâtissiers et points chauds actuellement recensés en France ».
10 Cote 266.
11 Cote 2928.
12 Cotes 7487 et 14.
13 Ibid., et procès-verbal de déclarations du 3 mars 2017, Président de la société Fours Fringand SA, cote 7800 : « Les clients de nos distributeurs sont essentiellement des artisans boulangers-pâtissiers ainsi que de petites franchises telles que FEUILLETTE dans l’ouest de la France et quelques fabricants semi-industriels. Nous ne sommes pas parvenus à nous imposer auprès de chaînes de boulangerie-pâtisserie […] Nous ne démarchons pas la grande distribution ».
14 Cote 267.
15 Cote 14.
16 Procès-verbal de déclarations du 26 avril 2017 du Président de l'ACB, cote 266 : « les magasins de la grande distribution (qui détiennent environ 20% de part de marché, stable depuis 15 ans) […] soit au total environ 40 000 prospects ».
17 Cote 266.
18 Cote 15 citant notamment un article du 14 octobre 2015 intitulé « Ange prévoit d'ouvrir entre 20 et 30 boulangeries en franchise par an », disponible sur le site https://www.observatoiredelafranchise.fr/interviews-ange/ange-prevoit-douvrir-entre-20-et-30-boulangeries- en-franchise-par-an-3178-1923.htm.
19 Cote 17088 (VNC) « Au total, cette nouvelle forme de distribution concerne un millier de points de vente en France ».
20 Cote 13.
21 Cotes 239 à 244.
22 Cote 8593 (VC) 17086 (VNC).
23 Voir le site Internet de Bongard : https://www.bongard.fr/en-savoir-plus-sur-notre-societe/.
24 Cote 15727.
25 Cotes 106 à 112.
26 Cotes 8641 et 8833. Le compte de résultat de Bongard indique que son chiffre d’affaires total en France en 2016 était de 37,2 millions d’euros. S'agissant de l'écart avec le chiffre d’affaires, voir les précisions apportées cote 8855 : « Après discussion avec la direction financière, il s'avère que la différence provient de 3 sources : Prestations entre sociétés françaises du groupe. Facturation des services associés à la vente d’équipements : emballage, transport. Facturation en France d'équipement destinés à l'export ».
27 Cote 13.
28 https://www.materieldeboulangerie.fr/materiel-de-boulangerie-occasion/c15.aspx.
29 https://www.restoconcept.com/boulangerie-patisserie/c467.aspx.
30 https://www.gastro-hero.fr/Cuisson/fours-professionnels/fours-patisserie-et-boulangerie.
31 https://www.ematika.fr/equipements-chauds-pour-professionnels/four/four-boulanger-four-patisserie/four- electrique-boulangerie-et-patisserie/.
32 Cote 8595 (VC) 17088 (VNC) : « L’exclusivité d’achat et de revente porte actuellement sur l'intégralité du catalogue BONGARD (alors que l'exclusivité dans certains anciens contrats ne portait que sur les fours BONGARD) ». Voir également les clauses de 10 contrats de concession / distribution exclusive BONGARD, cotes 146-147.
33 Cote 15905 (VNC).
34 Ibid, cote 15708 (VC) 15905 (VNC).
35 Cote 12676.
36 Cotes 14 et 15.
37 Cotes 30 et 107.
38 Cotes 106 à 112.
39 Cote 16, voir les comptes rendus de la commission commerciale du 30/11/2016, cote 1259, et de celle du 29/04/2014, cote 1134 (problème de la différence de tarifs entre les concessions LITTORAL ÉQUIPEMENT et DIMA).
40 Cotes 8857 à 8882 (VC) et 17350 à 17375 (VNC).
41 Cote 8597 (VC) 17432 (VNC) : « En 2006, BONGARD a déposé un brevet pour le Paneotrad […] BONGARD SA a décidé en 2008 d’ouvrir le marché à la GMS, ce à quoi les concessionnaires ont consenti à condition que le tarif GMS reste similaire à celui des artisans […] Ce tarif a été élaboré conjointement par BONGARD SAS et l’ACB lors du lancement commercial du produit. Il avait également été décidé de ne procéder à aucune remise sur les ventes ».
42 Cotes 33, 51 et 3500.
43 Voir par exemple la discussion sur les rétrocessions à propos de l’installation et de la maintenance des Paneotrad dans les magasins Carrefour (cote 1375).
44 Voir par exemple cotes 12674 et 12675.
45 Article 1 des statuts de l’ACB, cote 1643.
46 Cote 11802. Le distributeur Massias était adhérent de l’ACB uniquement de septembre 2000 à septembre 2005.
47 Cote 11801.
48 Cote 1758.
49 Cote 11801.
50 Cote 265.
51 Cotes 9008 à 9012.
52 Article 8.1.1 des statuts d’Euromat, cote 8897.
53 Voir notamment contrat d’Austruy (AEB) du 29/08/1997 (cotes 1942-1972), contrat de Bongard 67 du 21/01/2013 (cotes 8756-8827 VC / 17207 à 17320 VNC), contrat de Bourmaud du 21/10/2014 (cotes 2981-3017), contrat d’EM Equipement du 16/01/2006 (cotes 3502-3524), contrat de Le Fournil Lorrain du 09/12/1997 (cotes 4577-4608), contrat de Maine Fournil daté de « 2012 » (cotes 4966-5008), contrat de Massias du 02/01/1995 (cotes 8496-8530), contrat de Robin Chilard du 25/10/2007 (cotes 7436-7445). Le contrat de DIMA du 11/03/1987 (cotes 3260-3266) stipule quant à lui à l’article III, 1) que « En contrepartie de l'exclusivité qui lui est concédée, le concessionnaire d'une part s'approvisionne exclusivement auprès de BONGARD, d'autre part s'engage à réaliser des objectifs/ 1- En première contrepartie de l'exclusivité qui lui est concédée, le concessionnaire s'engage à ne représenter distribuer ou commercialiser, aucun produit concurrent de ceux objet du présent contrat, et plus généralement s’interdit de s'intéresser directement ou indirectement, même hors de son secteur, à toute affaire faisant concurrence aux produits et marques objet du présent contrat […] ». Voir également nouveau modèle de contrat de distribution exclusive du réseau Bongard, cote 8861 (VC) 17354 (VNC).
54 Cotes 1048 et 1758. Exception faite des pétrins de la société VMI qui sont « sont parmi les plus utilisés dans les fournils et laboratoires de boulangerie français » (cf. https://www.vmimixing.com/food- boulangerie/applications-boulangerie-patisserie-metiers-de-bouche/).
55 Cotes 8960-8961, 8976-8977, 8992-8993 et cotes 8965, 8981, 8996 et 9010.
56 Étaient présents à cette AG des représentants de distributeurs Bongard ainsi qu’un représentant du fournisseur Bongard (cote 1629).
57 Compte-rendu du Comité Stratégique ACB Bongard Euromat du 5 avril 2006 Évry, cote 1633 : « Distribution : exclusivement par le réseau BONGARD […] Prix fixe : pas de remise accordée au client ».
58 Cotes 30 et 18049.
59 Cote 1355, compte-rendu de l’Assemblée générale de l’ACB du 30/09 et 01/10/2010.
60 Cote 271.
61 Lors d’une réunion de la commission commerciale de l’ACB du 3 mars 2020, il est rappelé qu’« au début de la commercialisation de Paneotrad®, une formation/prise en main était obligatoirement proposée au clients. Cette formation était valorisée. Le concessionnaire pouvait l'offrir s'il le souhaitait. (Info post-réunion : ATTENTION, une idée reçue consiste à dire que cette formation/démonstration obligatoire est incluse dans le prix du Paneotrad®, après enquête, cela n’est pas le cas) » (cote 12594). Le 18 juin 2020, il est rappelé, en commission commerciale de l’ACB que « La règle est la suivante : pas de vente Paneotrad sans aide à la prise en main par un démonstrateur agréé » (cote 12612).
62 Cote 836.
63 Cote 845, Commission commerciale Bongard/ACB.
64 Cotes 1672 et 1673 : « Paneotrad® et la GMS […] Après discussion la Commission décide d'ouvrir les ventes aux autres segments de marché que l'artisanat sous les conditions suivantes : Le Paneotrad® est vendu AU TARIF […] Facture Paneotrad à part, SANS REMISE ». Étaient présents à cette AG, à la fois des représentants des distributeurs du réseau Bongard et des représentants du fournisseur Bongard (cote 1664).
65 Cote 870.
66 Le prix de vente exact de l’ensemble est de 26 770 euros.
67 Voir CR de la commission commerciale du 24 septembre 2009, cotes 916 et 917 : prix de revient de Paneotrad pour le fabricant (pour un prix final de 26 770 euros) : « mise en place d’un matériel de démo Bongard auprès de chaque concession. Un Paneotrad + 3 matrices + 1 servante et farineuse avec dessus inox à prix coûtant (11 000 euros) ».
68 Le prix de vente exact était en réalité de 26 770 euros.
69 CR commissions commerciales ACB du 6 mai 2009 (cote 904) et du 24 septembre 2009 (cotes 916 et 917).
70 Cote 1423.
71 Cote 8597 (VC) 17432 (VNC).
72 Cote 35.
73 Cote 8597 (VC) 17432 (VNC).
74 Cote 8598.
75 Cote 271.
76 Cotes 827 et 835, 865 et 870, 895 et 904, 907 et 916-917, 1005 et 1014, 1036 et 1041, 1127 et 1134, 1175 et 1178, 1230 et 1232, 1360 et 1375, 1419 et 1423, 1484 et 1510, 1629 et 1633, 1664 et 1672, 1718 et 1723-
1724, 1729 et 1732, 1744 et 1751, 12440 et 12444, 12447 et 12449, 12520 et 12522, 12550 et 12557, 12580 et 12589.
77 Statuts de l’ACB, octobre 2008, article 11, cote 1647.
78 Ibid., Article 12, cotes 1648-1649.
79 Cote 1657.
80 Voir le tableau récapitulatif des déclarations des distributeurs concernant le prix de vente de Paneotrad annexé au rapport d’enquête de la DGCCRF, cotes 114 à 122. Voir également cotes 36 et 37.
81 Cotes 8236 et 8237.
82 Cotes 114 à 122.
83 Cote 271.
84 Voir tableau récapitulatif des déclarations des distributeurs concernant le prix de vente de Paneotrad annexé au rapport d’enquête de la DGCCRF, cotes 114 à 122.
85 Procès-verbal de déclarations du 26 juin 2017 du directeur commercial de Bongard, cote 8597 VC / 17432 VNC : « En 2006, BONGARD a déposé un brevet pour le Paneotrad […] BONGARD SA a décidé en 2008 d’ouvrir le marché à la GMS, ce à quoi les concessionnaires ont consenti à condition que le tarif GMS reste similaire à celui des artisans […] Ce tarif a été élaboré conjointement par BONGARD SAS et l’ACB lors du lancement commercial du produit. Il avait également été décidé de ne procéder à aucune remise sur les ventes ».
86 Rapport d’enquête de la DGCCRF, cotes 33 et 51 et procès-verbal de déclarations du 3 avril 2017 à la DGCCRF de la société EM Equipement, cote 3500.
87 Cote 1375.
88 Cote 1014.
89 Cote 1134.
90 Cote 273.
91 Cote 11801.
92 Compte-rendu de la commission commerciale de l’ACB du 29 mai 2008, cotes 857-858.
93 Voir liste des personnes présentes figurant sur le compte-rendu de l'Assemblée Générale de l'ACB des 2-3 octobre 2008, cote 1296.
94 Compte-rendu de l'Assemblée Générale de l'ACB des 2-3 octobre 2008, cote 1324.
95 Règlement intérieur de l’ACB, version d’octobre 2008, cote 1659.
96 Citations extraites des comptes rendus des commissions commerciales de l’ACB du 29 avril 2014, cote 1140 et du 1er juin 2015, cote 1189.
97 Cote 271.
107 Technifour, Poly-Tech, DIMA, JMG Equipement (voir synthèse de la DGCCRF cotes 151, 153, 154).
108 Cotes 906, 1017, 1033, 2931, 5039 et 6785.
109 Compte-rendu de la réunion de la commission commerciale ACB/Bongard du 29/04/2014, cote 1140.
110 Cote 270. Il est indiqué dans le compte-rendu de la commission commerciale du 8 juin 2012, cote 104, que « Le travail sur l000mat a montré combien il est difficile à l'heure actuelle de gérer l’affectation des prospects qui se partagent un territoire (département). À l'heure actuelle, les limites sont plus souvent géographiques (la rivière, la colline, l'autoroute...) qu'administratives (code postal) ».
111 Cotes 270 et 8598.
112 Cote 965.
113 Compte-rendu de la réunion de la commission commerciale du 08/06/2012, liste des personnes présentes, cote 1036.
114 Compte-rendu de la réunion de la commission commerciale du 08/06/2012, cote 1039.
115 Cote 268 et http://www.jmg-eguipement.com.
116 Cotes 215 à 218.
117 Equipement Moderne, Robien-Chilard, Sodima Equipement.
118 Cotes 215 à 218.
119 Ibid.
120 Ibid.
121 Voir nouveau modèle de contrat de distribution exclusive, version au 27 juin 2016, qui « devrait être utilisé à compter du 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats », cotes 8857 à 8882 (VC) et 17351 à 17375 (VNC).
122 Compte-rendu de la commission commerciale ACB - Bongard du 30 novembre 2016, cote 1268. Bongard et des distributeurs adhérents de l’ACB étaient présents à cette réunion. Voir également le compte-rendu du comité stratégique de l’ACB du 10 mars 2017, cote 1761. Le bureau de l’ACB, ainsi que des représentants de Bongard et d’Euromat étaient présents à cette réunion (cote 1757).
123 Cote 8862 (VC) 17355 (VNC).
124 Cote 8860 (VC) 17353 (VNC).
125 Cote 8860 (VC) 17353 (VNC).
126 Cote 8860 (VC) 17353 (VNC).
127 Cote 8859 (VC) 17352 (VNC).
128 Cote 8860 (VC) 17353 (VNC).
129 Cote 8861 (VC) 17354 (VNC).
130 Réponse du 9 décembre 2021 de l’ACB au questionnaire des rapporteures, cotes 11801-11802.
131 À l’exception du distributeur Massias, qui n’a pas adhéré à l’ACB (cote 1889).
132 Compte-rendu du Comité stratégique ACB-Bongard-Euromat du 01/02/2006 à Evry, cote 1623.
133 Procès-verbal de déclarations du Président de l'ACB, 26/04/2017, cote 270.
134 Compte-rendu de la réunion mixte des commissions commerciale et GMS - Grands Comptes du 10/09/2010 cote 965.
135 Lignes directrices relatives à la notion d'affectation du commerce figurant aux articles 81 et 82 du traité, Journal officiel n° C 101 du 27/04/2004 p. 0081 – 0096.
136 Voir le site internet de Bongard : https://www.bongard.fr/en-savoir-plus-sur-notre-societe/.
137 Voir les explications sur le site internet de JAC : https://www.jac-machines.com/fr/qui-sommes-nous.
138 Voir la plaquette de présentation proposée sur le site internet d’IFI, p. 3 : https://www.ifi.it/media/editor_files/company/gruppo_ifi_company_presentation_2020-09_en_.pdf
139 Cote 46 et arrêt Kontiki de la Cour de cassation du 7 octobre 2014, n° 13- 19.476.
140 Arrêt du Tribunal de l’Union du 12 septembre 2007, William Prym/Commission, aff. T-30/05, Rec. p. II107, point 86.
141 Décision n° 05-D-27 du 15 juin 2005 relative à des pratiques relevées dans le secteur du thon blanc, paragraphe 28 et décision n° 13-D-12 du 28 mai 2013 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la commercialisation de commodités chimiques paragraphe 575 ; voir également arrêt de la cour d’appel de Paris du 26 septembre 2013, société Roland Vlaemynck, RG n° 2012/08948, page 6.
142 Voir notamment l’arrêt de la Cour de justice du 8 juillet 1999, Anic Partecipazioni SpA, C-49/92, point 40.
143 Voir l’arrêt de la Cour de cassation du 16 mai 2000, n° 98-12612, Ordre national des pharmaciens et, plus récemment, la décision de l’Autorité de la concurrence n° 19-D-12 du 24 juin 2019 relative à des pratiques mises en œuvre par des notaires dans le secteur de la négociation immobilière, paragraphe 83.
144 CJUE, arrêt du 12 septembre 2000, Pavel Pavlov, C-180/98 à C-184/98, ECLI:EU:C:2000:428, paragraphes 73 et suivants.
145 Voir par exemple, TUE, arrêt du 13 décembre 2006, Fédération nationale de la coopération bétail et viande (FNCBV), aff. T-217/03, et Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) et autres, aff. T-245/03, ECLI:EU:T:2006:391, paragraphe 49.
146 Voir notamment la décision du Conseil de la concurrence n° 94-D-51 du 4 octobre 1994 relative à la situation de la concurrence dans le secteur du déménagement et la décision de l’Autorité de la concurrence n° 10-D-15 du 11 mai 2010 relative à des pratiques mises en œuvre par le GIE « groupement des Taxis amiénois et de la métropole », paragraphe 200.
147 Voir la décision de l’Autorité de la concurrence n° 12-D-02 du 12 janvier 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’ingénierie des loisirs, de la culture et du tourisme, paragraphe 71, et l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 6 juin 2013, Géfil n° 2012/02945, page 8.
148 Articles 11 et 20 des statuts de l’ACB, cote 1647.
149 Cote 11805.
150 Article 11 des statuts de l’ACB, cote 1647.
151 Article 12, cotes 1648-1649.
152 Voir arrêt de la Cour de justice du 30 juin 1966, affaire 56-65, Société́ technique minière, L.T.M. e.a, page 359 et arrêt de la Cour de justice du 14 mars 2013, affaire C-32/11, Allianz Hungaria Biztosito e.a. c./Commission, point 33.
153 Voir notamment, arrêt de la Cour de justice du 11 septembre 2014, affaire C-67/13, Groupement des cartes bancaires (CB) c/ Commission, points 49 et 50.
154 Voir au niveau européen, arrêt de la Cour de justice du 11 septembre 2014, précité, point 51.
155 Arrêts de la cour d’appel de Paris du 26 janvier 2010, Adecco France, n° 2009/03532, p. 13 et du 31 janvier 2013, Pierre Fabre Dermo-Cosmétique, n° 2008/23812, p. 16.
156 Voir notamment, arrêt de la Cour de justice du 14 mars 2013, précité, point 36.
157 Voir notamment les décisions n° 20-D-12 du 17 septembre 2020 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des vins d’Alsace ; n° 19-D-19 du 30 septembre 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des prestations d’architecte ; n° 12-D-02 du 12 janvier 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’ingénierie des loisirs, de la culture et du tourisme.
158 Voir l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 29 janvier 2008, Union française des orthoprothésistes, n° 07/04524.
159 Voir l’arrêt de la Cour de cassation du 13 février 2001, Ordre des avocats au barreau de Marseille, n° 98-22698.
160 Arrêt du Tribunal de l’Union du 7 juillet 1994, Dunlop Slazenger/Commission, T-43/92, point 79 et arrêt du Tribunal de l’Union du 16 novembre 2006, Peróxidos Orgánicos/Commission, T-120/04, point 51.
161 Arrêt du Tribunal de l’Union du 5 avril 2006, Degussa/Commission, précité, point 153.
162 Cote 1423. « Rappel règle Engagement national de services de l’ACB Les référencements nationaux BONGARD agrées par l'ACB sont strictement appliqués è Paneotrad, PAS DE REMISE sur ce produit et ses accessoires BONGARD. è C'est une règle d'or que l'ACB s'est donnée dès sa commercialisation » (soulignements ajoutés).
163 Cotes 271 et 8597.
164 Commission européenne, Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130 du 19 mai 2010 page 7, point 25, sous a.
165 Arrêt du Tribunal de l’Union du 26 octobre 2000, Bayer / Commission, T-41/96, EU:T:2000:242.
166 Commission européenne, Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130 du 19 mai 2010 page 7, point 25, sous a.
167 Décision n° 12-D-10 du 20 mars 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’alimentation pour chiens et chats, paragraphe 204.
168 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 13 mars 2014, Bang & Olufsen, 13/00714, page 6.
169 Décision n° 21-D-20 du 22 juillet 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lunettes et montures de lunettes, paragraphe 844 (recours pendant)
170 Compte-rendu de la commission commerciale de l’ACB du 29 mai 2008, cotes 857-858.
171 Cf. compte-rendu de l’assemblée générale de l’ACB des 2-3 octobre 2008 : « [i]l est décidé à l'unanimité qu'un avenant au contrat de concessionnaire sera établi par BONGARD pour le respect des territoires (matériels et pièces détachées). / Un concessionnaire de l'ACB ne vend pas des pièces détachées hors secteur », cote 1324.
172 Cf. compte-rendu de l’assemblée générale de l’ACB des 2-3 octobre 2008 : « Pour s’assurer que la règle de territorialité est bien respectée, l’ACB s’appuie sur BONGARD et EUROMAT, garants du respect de cette règle ».
173 Compte-rendu du Comité stratégique ACB-Bongard-Euromat du 1er février 2006 à Evry : « Un Comité Stratégique pour quoi faire ? S’entendre sur le court terme pour bien s’organiser et préparer l’avenir sur des bases solides […] Mener des réflexions a 2/ 5 ans et se focaliser sur un certain nombre de sujets en amont pour préparer l’avenir : Accompagnement du réseau pour en assurer la pérennité […] Définir la concession idéale […] et la carte de France idéale », cote 1623.
174 Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, page 8, point 25(d).
175 Règlement (UE) n° 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010 concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, JO L 102 du 23 avril 2010, p. 5. Voir également article 4 (b) du règlement (CE) n° 2790/1999 de la Commission du 22 décembre 1999 concernant l'application de l'article 81, paragraphe 3, du traité à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, JOCE L 336 du 29 décembre 1999, p. 21.
176 Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 291 du 13 octobre 2000, page 12, point 50.
177 Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, page 12-13, point 50. Voir, par exemple, décision de la Commission du 5 juill. 2000, COMP. F.1.36.516, Nathan-Bricolux, point 73. Voir aussi, décision de la Commission du 21 févr. 2020, AT.40528, Melia (Holiday Pricing).
178 Décision n° 12-D-10 du 20 mars 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’alimentation pour chiens et chats, paragraphe 160.
179 Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, page 13, point 52.
180 Règlement (UE) n° 330/2010 de la Commission du 20 avril 2010 concernant l'application de l'article 101, paragraphe 3, du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne à des catégories d'accords verticaux et de pratiques concertées, JO L 102 du 23 avril 2010, page 5.
181 Lignes directrices sur les restrictions verticales, JO C 130 du 19 mai 2010, page 14, point 52, sous c.
182 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 13 mars 2014, Bang & Olufsen, 13/0074, page 9.
183 Décision n° 12-D-23 du 12 décembre 2012 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Bang & Olufsen dans le secteur de la distribution sélective de matériels hi-fi et home cinéma, point 73.
184 Décision n° 19-D-14 du 1er juillet 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles haut de gamme, paragraphes 121 à 131.
185 Voir aussi décision n° 18-D-23 du 24 octobre 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériel de motoculture, paragraphes 221 et 244 : l’interdiction de facto de la vente en ligne de produits dits dangereux, comme les tronçonneuses, consistant en l’obligation de réceptionner les produits commandés sur le site Internet du distributeur agréé concerné en magasin ou via une livraison à domicile pouvant uniquement être effectuée par le distributeur agréé lui-même ou l’un de ses employés, « n’apparaît ni appropriée, ni proportionnée pour atteindre les objectifs de préservation de la qualité des produits et de sécurisation de leur bon usage » et « constitue partant, de par sa nocivité, une restriction de concurrence par objet au sens des articles 101, paragraphe 1, du TFUE et L. 420-1 du code de commerce » ; décision confirmée par un arrêt de la cour d’appel de Paris du 17 octobre 2019, Stihl, 18/24456 et par la Cour de cassation, 26 janvier 2022, n° 19-24.464.
186 Cote 1659.
187 Cote 1659.
188 Cote 1659.
189 Cotes 1036 et 1039.
190 Cf. nouveau modèle de contrat de distribution exclusive, version au 27 juin 2016, qui « devrait être utilisé à compter du 1er octobre 2016, date d'entrée en vigueur de la réforme du droit des contrats », cotes 8857 à 8882.
191 Voir notamment les arrêts de la Cour de justice du 14 décembre 2006, Confederacion Espanola de Empresarios de Estaciones de Servicio, C-217/05, EU:C:2006:784, point 40 et de la cour d’appel de Paris du 29 mars 2012, Lacroix Signalisation e.a., n° 2011/01228, point 18.
192 Voir notamment les arrêts de la Cour de justice du 20 janvier 2011, General Quimica SA e.a. c./Commission, C-90/09 P, EU:C:2011:21, point 37 et de de la cour d’appel de Paris du 29 mars 2012, Lacroix Signalisation e.a., n° 2011/01228, p. 18 et 19.
193 Voir notamment l’arrêt de la Cour de justice du 10 septembre 2009, Akzo Nobel NV e.a/Commission, C-97/08 P, EU:C:2009:536, points 60 et 61.
194 Arrêt de la cour d’appel de Paris du 19 mai 2016, société Mobilitas, n° 2014/25803, p. 6, confirmé par l’arrêt de la Cour de cassation du 18 octobre 2017, société Mobilitas, n° 16-19120.
195 Voir, notamment, l’arrêt du Tribunal de l’Union du 17 décembre 1991, Enichem Anic/Commission, T-6/89, EU:T:1991:74, point 236. Voir, en ce sens, arrêt de la Cour de cassation du 23 juin 2004, BNP-Paribas e.a., n° 01-17896 et 02-10066. L’infraction doit par ailleurs être imputée sans équivoque à une personne juridique qui sera susceptible de se voir infliger la sanction (arrêt de la Cour de justice du 10 septembre 2009, Akzo Nobel NV/Commission, C-97/08 P, EU:C:2009:536, point 57).
196 Arrêt de la Cour de cassation du 20 novembre 2001, SACER e.a., n° 99-16776 et n° 99-18253. Voir également la décision n° 08-D-09 du 6 mai 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des pompes funèbres à Lyon et dans son agglomération, paragraphe 211, confirmée par l’arrêt de la cour d’appel de Paris du 31 mars 2009, Agence funéraire lyonnaise pompes funèbres Viollet, n° 2008/11353, p. 24.
197 Arrêt de la Cour de justice du 7 janvier 2004, Aalborg Portland e.a./Commission, C-204/00 P, C-205/00 P, C-211/00 P, C-213/00 P, C-217/00 P et C-219/00 P, EU:C:2004:6, point 59.
198 Voir, en ce sens, les arrêts de la Cour de cassation du 23 juin 2004, BNP-Paribas e.a., précité, et de la cour d’appel de Paris du 14 janvier 2009, Eurelec Midi Pyrénées e.a., n° 2008/01095, p. 5.
199 Arrêt du Tribunal de l’Union du 14 décembre 2006, Raiffeisen Zentralbank Österreich/Commission, T-259/02 à T-264/02 et T-271/02, EU:T:2006:396, point 326.
200 Arrêts de la Cour de cassation du 22 novembre 2016, Euro cargo rail, n° 14-28224 et de la cour d’appel de Paris du 26 octobre 2017, Caisse des dépôts et consignations, n° 17/01658, p. 9 et 10.
201 Décision n° 94-D-51 du 4 octobre 1994 relative à la situation de la concurrence dans le secteur du déménagement, décision n° 01-D-41 du 11 juillet 2001 relative à des pratiques mises en œuvre sur les marchés des titres restaurant et des titres emploi service, décision n° 04-D-07 du 11 mars 2004 relative à des pratiques relevées dans le secteur de la boulangerie dans le département de la Marne et décision n° 12-D-06 du 26 janvier 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des agrégats et des marchés avals à Saint-Pierre-et-Miquelon.
202 Décision n° 94-D-51 précitée.
203 Cote 1643.
204 Publication au Journal Officiel du 7 août 1991 : https://www.journal-officiel.gouv.fr/document/verification/associations_b_archive/199100321567.
205 L’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021 n’a pas modifié cette disposition.
206 Au cas d’espèce, les pratiques en cause s’étant terminées avant l’entrée en vigueur de l’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021, la rédaction du cinquième alinéa de l’article L. 464-2 du code de commerce issue de cette ordonnance n’est pas applicable. Elle prévoit que « Le montant maximum de la sanction est, pour une association d'entreprises, de 10 % du montant du chiffre d'affaires mondial hors taxes le plus élevé réalisé au cours d'un des exercices clos depuis l'exercice précédant celui au cours duquel les pratiques ont été mises en œuvre».
Par ailleurs, aux termes du sixième alinéa du I de l’article L. 464-2 du même code, dans sa rédaction issue de l’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021, « [l]orsque l'infraction d'une association d'entreprises a trait aux activités de ses membres, le montant maximal de la sanction pécuniaire est égal à 10 % de la somme du chiffre d'affaires mondial total réalisé par chaque membre actif sur le marché affecté par l'infraction de l'association ». Cet alinéa a été ajouté par le 4° du XVIII de l’article 2 de l’ordonnance n° 2021-649 du 26 mai 2021. Cette modification ne serait toutefois applicable en l’espèce que si son application aurait pour effet de réduire le montant maximal de la sanction encourue par l’association d’entreprises concernée. En effet, le premier alinéa de l’article 6 de l’ordonnance a précisé que ces modifications « ne sont pas applicables aux pratiques anticoncurrentielles ayant pris fin avant l'entrée en vigueur de la présente ordonnance. Toutefois, dans les cas où leur application a pour effet de réduire le montant maximal de la sanction encourue par l'association d'entreprises concernée, elles s'appliquent immédiatement aux procédures de sanction en cours ».
207 Décision n° 12-D-10 du 20 mars 2012 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de l’alimentation pour chiens et chats, paragraphe 250.
208 Voir notamment les décisions n° 08-D-25 du 29 octobre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle vendus sur conseils pharmaceutiques ; n° 12-D-23 du 12 décembre 2012 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Bang & Olufsen dans le secteur de la distribution sélective de matériels hi-fi et home cinéma ; n° 18-D-23 du 24 octobre 2018 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de matériel de motoculture ; n° 19-D-14 du 1er juillet 2019 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution des cycles haut de gamme et n° 21-D-20 du 22 juillet 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des lunettes et montures de lunettes.
209 Décision n° 08-D-25 du 29 octobre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle vendus sur conseils pharmaceutiques, paragraphe 88.
210 Décision n° 08-D-25 du 29 octobre 2008 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution de produits cosmétiques et d’hygiène corporelle vendus sur conseils pharmaceutiques, paragraphe 89.
211 Décision n° 12-D-23 du 12 décembre 2012 relative à des pratiques mises en œuvre par la société Bang & Olufsen dans le secteur de la distribution sélective de matériels hi-fi et home cinéma, paragraphe 122 et jurisprudence citée.
212 Voir notamment décision n° 21-D-09 du 24 mars 2021 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la fabrication et de la commercialisation de sandwichs sous marque de distributeur, paragraphe 242 ; Cour d’appel de Paris, 23 mai 2017, RG n° 15/08224, points 220-221.
213 Observations ACB du 9 janvier 2023, page 5.
214 Compte-rendu de la réunion du Comité Stratégique du 10 mars 2017, cote 1758.
215 Voir tableau 1 page 43 de la notification de griefs.
216 Procès-verbal de déclarations à la DGCCRF du 26 juin 2017 d’Eric Soquet, directeur commercial de Bongard, cote 8597 VC / 17432 VNC : « ce tarif a été élaboré conjointement par BONGARD SAS et l’ACB lors du lancement commercial du produit. Il avait également été décidé de ne procéder à aucune remise sur les ventes ».