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Décisions

Cass. crim., 17 mars 2015, n° 14-88.310

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Guérin

Rapporteur :

M. Buisson

Avocat général :

M. Boccon-Gibod

Avocat :

SCP Spinosi et Sureau

ch. instr. Versailles, du 5 déc. 2014

5 décembre 2014

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 111-4 du code pénal, préliminaire, 137, 142-11, 175, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

"en ce que l'arrêt attaqué a rejeté la demande d'annulation de l'ordonnance de mise en accusation tiré de la violation de l'article 175 du code de procédure pénale ;

"aux motifs que la procédure qui conduit à l'ordonnance de règlement du magistrat instructeur décrite par l'article 175 du code de procédure pénale impose des délais différents, le texte faisant une distinction entre le cas où la personne mise en examen est détenue et « les autres cas » ; qu'aux termes de l'article 142-1-1 du code de procédure pénale, l'assignation à résidence avec surveillance électronique est assimilée à une détention provisoire pour l'imputation intégrale de sa durée sur celle d'une peine privative de liberté ; que l'article 142-1-1 précité renvoie à l'article 716-4, lequel figure au chapitre II intitulé "de l'exécution des peines privatives de liberté" ; que l'article D. 32-14 dispose que la personne qui fait l'objet de la mesure d'assignation avec surveillance électronique est inscrite dans un registre nominatif spécial tenu par l'administration pénitentiaire et que la pose du dispositif de surveillance, son contrôle et son suivi sont du ressort du personnel de l'administration pénitentiaire ; qu'il ne peut, par ailleurs être affirmé, comme le fait le conseil de M. X..., que « le contentieux de la détention provisoire relève de la compétence unique en premier ressort du juge des libertés et de la détention » alors que le magistrat instructeur est le seul à pouvoir ordonner un maintien en détention à l'issue de son information ; qu'en conséquence, aucune irrégularité ne saurait être tirée de ce que le magistrat instructeur, se conformant aux prescriptions de l'article 175 du code de procédure pénale, a rendu son ordonnance moins d'un mois après la notification du réquisitoire définitif ;

"alors que les délais imposés par l'article 175 du code de procédure pénale, qui distinguent le cas où la personne mise en examen est « détenue » et « les autres cas », doivent être interprétés strictement ; qu'en considérant que « l'assignation à résidence avec surveillance électronique est assimilée à une détention provisoire pour l'imputation intégrale de sa durée sur celle d'une peine privative de liberté », les dispositions la régissant renvoyant « aux dispositions relatives à « l'exécution des peines privatives de liberté » et que « l'article D. 32-14 dispose que la personne qui fait l'objet de la mesure d'assignation avec surveillance électronique est inscrite dans un registre nominatif spécial tenu par l'administration pénitentiaire et que la pose du dispositif de surveillance, son contrôle et son suivi sont du ressort du personnel de l'administration pénitentiaire », quand la loi n'a jamais envisagé un tel rapprochement, la chambre de l'instruction a nécessairement ajouté au texte légal, portant une atteinte disproportionnée aux droits de la défense en interdisant au mis en examen de faire valoir ses observations avant l'ordonnance de clôture de l'instruction » ;

Vu l'article 175 du code de procédure pénale, ensemble l'article 142-12 du même code ;

Attendu qu'il résulte du premier de ces textes que, au terme du délai d'un mois ou de trois mois qui leur est ouvert pour déposer des réquisitions, observations, demandes ou requêtes, le procureur de la République et les parties disposent d'un délai de dix jours si la personne mise en examen est détenue et d'un mois dans les autres cas pour adresser au juge d'instruction des réquisitions ou observations complémentaires, ce délai commençant à courir, pour les parties, à compter de la notification des réquisitions ;

Attendu que, selon le second de ces textes, l'assignation à résidence avec surveillance électronique, qui peut être ordonnée par un juge d'instruction ou par un juge des libertés et de la détention, est une mesure alternative à la détention provisoire, à laquelle elle ne peut être assimilée au cours de l'information ;


Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a été mis en examen pour vol commis à l'aide ou sous la menace d'une arme, en bande organisée, et tentative, puis placé en détention provisoire le 31 août 2012 ; que le 28 mai 2014, il a été mis en liberté pour être assigné à résidence avec surveillance électronique ; que l'avis de fin d'information ayant été notifié aux parties le 17 octobre 2013, les conseils des trois mis en examen ont régulièrement déposé des requêtes en nullité, rejetées par arrêts en date du 14 mars 2014 ; que le procureur de la République, auquel le dossier a été communiqué aux fins de règlement le 30 mai 2014, a rendu, le 27 juin 2014, ses réquisitions définitives, lesquelles ont été notifiées aux parties le 17 juillet 2014, avant que, le 8 août 2014, ne soit rendue une ordonnance de mise en accusation ; que M. X... a interjeté appel de cette décision ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation du demandeur soutenant que ladite ordonnance, rendue avant l'expiration du délai d'un mois, devait être annulée, l'arrêt retient que l'assignation à résidence avec surveillance électronique étant assimilée à une détention provisoire, aucune irrégularité ne saurait être tirée de ce que le juge d'instruction ait rendu son ordonnance moins d'un mois après la notification du réquisitoire définitif ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors que, aucun des mis en examen n'étant détenu, il lui appartenait de constater que l'ordonnance entreprise devait être annulée, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et les principes ci-dessus rappelés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, en date du 5 décembre 2014, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;

RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil.