CA Bourges, 1re ch., 20 avril 2023, n° 22/01049
BOURGES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Banque Populaire Bourgogne Franche Comte
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Clement
Conseillers :
M. Perinetti, Mme Ciabrini
Avocats :
Me Blanchecotte, Me Boyer
EXPOSÉ DU LITIGE
Par acte authentique de vente contenant prêt du 9 juin 2007, la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté a consenti à M. [Y] [F] et Mme [D] [J] épouse [E] un prêt d'un montant de 130 952 euros, remboursable en 300 mensualités au taux d'intérêt de 4,90 % l'an.
Par lettre recommandée avec accusé de réception, distribuée respectivement les 19 et 20 novembre 2020, la banque a notifié la déchéance du terme de ce prêt aux emprunteurs.
Suivants actes d'huissier en date du 2 novembre 2021 pour M. [F] et du 8 novembre 2021 pour Mme [J] épouse [E], la banque a fait délivrer un commandement de payer valant saisie immobilière portant sur un immeuble sis à [Adresse 13], figurant au cadastre de ladite commune, section B no [Cadastre 8], pour obtenir paiement de la somme de 131 238,67 euros, selon décompte arrêté au 31 août 2021.
Le 31 décembre 2021, le commandement de payer valant saisie a été publié au Service de la publicité foncière de [Localité 14], volume 2021 S nos 45 et 46.
Par actes d'huissier en date des 23 et 25 février 2022, la banque a assigné M. [F] et Mme [J] épouse [E] devant le tribunal judiciaire de Nevers aux fins de comparaître à l'audience d'orientation du 3 mai 2022.
Le cahier des conditions de vente a été déposé au greffe du tribunal judiciaire le 1er mars 2022.
Par jugement ordonnant la vente forcée du 4 octobre 2022, le juge de l' exécution chargé des saisies immobilières du tribunal judiciaire de Nevers a notamment :
- rejeté l'intégralité des contestations et demandes incidentes présentées par M. [F],
- dit n'y avoir lieu à prononcer la nullité de la procédure de saisie immobilière au motif de la prescription de l'action de la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté,
- ordonné la vente forcée des biens et droits immobiliers appartenant à M. [F] et Mme [J] épouse [E], situés sur la commune de [Localité 12] (58), lieudit [Localité 11], consistant en une parcelle de terrain sur laquelle est bâtie une maison d'habitation, cadastré section B no [Cadastre 8],
- mentionné la créance de la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté à la somme de 131 238,67 euros, selon décompte arrêté au 31 août 2021 et telle que mentionnée au cahier des conditions de vente,
- dit qu'il sera procédé à la vente à l'audience du juge de l' exécution du tribunal judiciaire de Nevers le 17 janvier 2023 à 10h30,
- rappelé que la mise à prix a été fixée par le créancier poursuivant à la somme de 28 000 euros,
- dit que les dépens seront employés en frais de saisie à la suite de leur taxation.
Par déclaration en date du 28 octobre 2022, M. [F] a interjeté appel de ce jugement en ce qu'il a rejeté sa demande tendant à être autorisé à vendre amiablement l'immeuble saisi et celle tendant à voir fixer la mise à prix de la vente forcée à la somme de 130 000 euros.
Autorisé par ordonnance du 2 novembre 2022, M. [F] a fait assigner à jour fixe la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté et Mme [E] par actes des 29 novembre et 7 décembre 2022 pour l'audience du 8 mars 2023.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 janvier 2023, M. [F] demande à la cour de :
- réformer le jugement entrepris,
- accorder à M. [F] et Mme [J] épouse [E], en application des dispositions de l'article R. 322-20 du code des procédures civiles d' exécution , les plus larges délais pour procéder à la vente amiable de leur immeuble au prix minimum de 130 000 euros,
- à titre subsidiaire, fixer en application des dispositions de l'article L. 322-6 du code des procédures civiles d' exécution , la mise à prix de l'immeuble à la somme de 130 000 euros,
- condamner la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté à lui payer la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté aux dépens.
Dans des dernières conclusions notifiées par voie électronique le 1er février 2023, la Banque Populaire Bourgogne Franche-Comté demande à la cour de :
- confirmer le jugement entrepris,
- débouter M. [F] et Mme [J] épouse [E] de l'ensemble de leurs demandes,
- les condamner à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens.
Bien que dûment citée, Mme [J] épouse [E] n'a pas constitué avocat.
SUR CE
Sur la demande d'autorisation de vente amiable :
En application de l'article R. 322-20 du code des procédures civiles d' exécution , la demande tendant à la vente amiable de l'immeuble peut être présentée et jugée avant la signification de l'assignation à comparaître à l'audience d'orientation sous réserve pour le débiteur de mettre en cause les créanciers inscrits sur le bien.
La décision qui fait droit à la demande suspend le cours de la procédure d' exécution à l'exception du délai imparti aux créanciers inscrits pour déclarer leur créance.
L'article R. 322-15 du même code précise qu'à l'audience d'orientation, le juge de l' exécution , après avoir entendu les parties présentes ou représentées, vérifie que les conditions des articles L. 311-2, L. 311-4 et L. 311-6 sont réunies, statue sur les éventuelles contestations et demandes incidentes et détermine les modalités de poursuite de la procédure, en autorisant la vente amiable à la demande du débiteur ou en ordonnant la vente forcée.
Lorsqu'il autorise la vente amiable, le juge s'assure qu'elle peut être conclue dans des conditions satisfaisantes compte tenu de la situation du bien, des conditions économiques du marché et des diligences éventuelles du débiteur.
En l'espèce, M. [F] fait grief au jugement attaqué de l'avoir débouté de sa demande tendant à lui octroyer la possibilité de vendre amiablement l'immeuble saisi.
Il fait valoir, en appel, que le bien litigieux a une valeur de 150 000 euros, qu'un mandat a été confié à une agence immobilière et que la vente amiable permettrait d'obtenir le meilleur prix de vente et de solder la créance de la banque.
Cependant, pas plus qu'en première instance, M. [F] ne produit d'estimation du bien immobilier, qui permettrait de vérifier, comme il le soutient, qu'eu égard particulièrement à son état et sa situation géographique, il pourrait être vendu amiablement à un prix permettant de solder la créance de la banque. Il ne justifie pas davantage des diligences entreprises pour vendre le bien durant la période de près de deux ans séparant la déchéance du terme et l'audience d'orientation, pas plus également pour celle séparant le prononcé du jugement attaqué de l'audience devant la cour, puisqu'il se limite à produire un mandat exclusif de vente d'une durée de trois mois non renouvelable, conclu avec la société Propriétés-privées le 7 janvier 2023, soit deux mois avant l'audience.
Comme l'a justement retenu le juge de l' exécution , il n'est donc pas établi que la vente amiable de l'immeuble pourrait intervenir dans des conditions satisfaisantes.
Il convient donc de débouter M. [F] de sa demande tendant à voir autoriser la vente amiable du bien saisi et de confirmer le jugement entrepris de ce chef.
Sur la fixation du montant de la mise à prix :
Selon l'article L. 322-6 du code des procédures civiles d' exécution , le montant de la mise à prix est fixé par le créancier poursuivant. À défaut d'enchère, celui-ci est déclaré adjudicataire d'office à ce montant.
Le débiteur peut, en cas d'insuffisance manifeste du montant de la mise à prix, saisir le juge afin de voir fixer une mise à prix en rapport avec la valeur vénale de l'immeuble et les conditions du marché. Toutefois, à défaut d'enchère, le poursuivant ne peut être déclaré adjudicataire que pour la mise à prix initiale.
En l'espèce, M. [F] estime que la mise à prix de 28 000 euros fixée par le juge de l' exécution est manifestement insuffisante. Il soutient que le bien saisi a une valeur vénale d'environ 150 000 euros et demande à ce que le montant de la mise à prix soit fixé à 130 000 euros.
Il ne justifie toutefois pas davantage qu'en première instance de la valeur vénale du bien, pour lequel il ne produit toujours aucune estimation, étant précisé que le prix de vente inscrit sur le mandat de vente du 7 janvier 2023 ne saurait en tenir lieu.
C'est donc de manière fondée que le juge de l' exécution a jugé que le montant de la mise à prix fixée par le créancier n'apparaît pas manifestement insuffisante, eu égard à la situation géographique du bien, à l'état du marché immobilier local et à l'état de l'immeuble tel qu'il ressort du procès-verbal d'huissier du 10 décembre 2021.
Il convient en conséquence de débouter M. [F] de sa demande tendant à voir fixer le montant de la mise à prix à la somme de 130 000 euros et de confirmer le jugement entrepris de ce chef.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Partie succombante, M. [F] sera condamné aux dépens d'appel.
Nonobstant l'issue de la procédure, les circonstances économiques et l'équité commandent de laisser à chacune des parties la charge de leurs propres frais irrépétibles exposés en cause d'appel et de les débouter en conséquence de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
- Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 4 octobre 2022 par le juge de l' exécution chargé des saisies immobilières du tribunal judiciaire de Nevers,
Y ajoutant,
- Déboute les parties de leurs demandes respectives au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- Condamne M. [Y] [F] aux dépens d'appel.