CA Rennes, 2e ch., 9 octobre 2020, n° 19/04307
RENNES
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Défendeur :
Association pour le droit à l'initiative économique
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Christien
Conseillers :
M. Pothier, Mme Barthe-Nari
EXPOSE DU LITIGE :
En vertu d'une ordonnance d'injonction de payer en date du 22 juin 2017 revêtue de la formule exécutoire le 28 septembre 2017, l'Association pour le Droit à l'Initiative Economique (ci-après ADIE) a fait dresser, par huissier de justice, le 18 juin 2018, un procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation du véhicule Renault Clio immatriculé AG-321-LJ appartenant à M. X et fait procéder le 8 août 2018 à une saisie-attribution entre les mains du Crédit Industriel et Commercial de l'Ouest sur le compte de celui-ci. Les deux actes ont été valablement dénoncés à M. X qui a formé opposition devant le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper.
Par décision en date du 19 juin 2019, le juge de l'exécution a :
- ordonné la jonction des deux affaires,
- validé le procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation en date du 18 juin 2018 pour la somme de 1 922,56 euros en principal, 25,76 euros en intérêts et pour la somme de 582,40 euros TTC au titre des frais sous déduction d'un acompte de 150 euros,
- validé la saisie-attribution pratiquée le 9 août 2018 pour la somme de 1 922,56 euros en principal, 30,72 en intérêts et celle de 818,11 euros TTC au titre des frais, sous déduction d'un acompte de 150 euros,
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné M. X aux dépens,
- rappelé que la présente décision bénéficie de l'exécution provisoire de droit.
Par déclaration en date du 28 juin 2019, M. X a relevé appel de cette décision.
Aux termes de ses dernières conclusions, il demande à la cour de :
- d'infirmer le jugement du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper du 19 juin 2019 en ce qu'il a validé pour moitié de la créance du procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation de son véhicule et validé pour l'autre moitié le procès-verbal de saisie-attribution et l'a condamné aux dépens,
- décider que le montant due à l'ADIE est de 1 500 euros et non d'une quelconque autre somme en raison d'un acte de cautionnement pour un montant maximum de 1 500 euros,
- rectifier en conséquence le montant de la créance due à l'ADIE à la somme de 1 500 euros en tout et pour tout,
- déclarer nul le procès-verbal de saisie sur le certificat d'immatriculation comme étant désormais inutile en raison de la saisie-attribution ayant permis à l'ADIE d'être désintéressée,
- à tout le moins, déclarer nul le procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation de son véhicule en raison des sommes contradictoires portées sur le procès-verbal d'indisponibilité et sur la dénonciation à débiteur saisi,
- de même déclarer nul le procès-verbal d'indisponibilité du certificat d'immatriculation de son véhicule en ce qu'il ne correspond pas plus à la somme de 1 500 euros dont il s'est porté garant,
- en conséquence, condamner l'ADIE à rembourser intégralement la somme abusivement saisie sur son compte bancaire CIC Ouest par l'effet de la saisie-attribution c'est à dire selon les informations connues de son conseil, la somme de 2 651,07 euros,
- condamner l'ADIE à verser à M. X la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en raison des fautes de l'ADIE tenant au caractère fautif et abusif de ses procédures d'exécution,
- condamner l'ADIE à verser à M. X la somme de 3 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner à l'ADIE aux entiers dépens.
Par ordonnance en date du 10 décembre 2019 du conseiller de la mise en état, les conclusions remises au greffe par l'ADIE le 12 novembre 2019 ainsi que toutes conclusions postérieures ont été déclarées irrecevables en application de l'article 905-2 alinéa 2 du code de procédure civile.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions déposées par les parties, l'ordonnance de clôture ayant été rendue le 28 mai 2020.
EXPOSE DES MOTIFS :
Conformément aux dispositions de l'article 472 du code de procédure civile, la cour rappelle qu'en l'absence de conclusions de l'ADIE déclarées irrecevables, elle ne peut faire droit aux prétentions et moyens de l'appelant que dans la mesure où elle les estime réguliers, recevables et bien fondés au regard des motifs par lesquel le tribunal s'est déterminé que la partie intimée absente est réputée s'être appropriée en application du dernier alinéa de l'article 954 du code de procédure civile.
Considérant que les mesures d'exécution avaient été pratiquées en vertu d'une ordonnance d'injonction de payer rendue le 22 juin 2017, revêtue de la formule exécutoire, condamnant M. X au paiement de la somme de 1922,56 euros en principal avec intérêts au taux légal et qu'il ne lui appartenait pas, conformément aux dispositions de l'article R 121-1 du code des procédures civiles d' exécution , de modifier le dispositif d'une décision de justice, le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper, a validé les actes d' exécution litigieux pour cette somme au motif qu'ils avaient été pratiqués en conformité avec le titre exécutoire.
M. X reproche au premier juge d'une part, d'avoir validé les deux mesures d'exécution pour la somme de 1 922,56 euros alors que son engagement de caution n'était limité qu'à la somme de 1 500 euros et d'autre part, d'avoir maintenu l'immobilisation du véhicule alors que l'ADIE était totalement payée de sa dette par la saisie-attribution pratiquée sur son compte bancaire. Il fait valoir qu'il ne conteste pas le principe de la créance détenue à son égard par l'ADIE mais son exigibilité à hauteur de 1 922,56 euros et demande à la cour de limiter la mesure de saisie-attribution à hauteur de son engagement. Il apparaît effectivement qu'il s'est engagé, le 27 octobre 2015, comme caution solidaire et indivisible de M. Y auquel l'ADIE a prêté la somme de 3 000 euros, à hauteur de 1 500 euros couvrant le paiement du principal, des intérêts, des frais et le cas échéant des pénalités de retard pour une durée de 48 mois. Il soutient que si le juge de l'exécution ne peut modifier le dispositif de l'ordonnance d'injonction de payer qui, en l'absence de toute opposition a valeur de décision de justice, il est compétent pour connaître de toutes les difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée même si celles-ci portent sur le fond du droit.
Toutefois, il convient de rappeler que la faculté du juge de l'exécution de connaître du fond du droit est en fait limitée aux questions en rapport direct avec l'exécution du titre comme celles susceptibles d'affecter cette exécution telles une exception de prescription ou de compensation. Elle ne l'autorise pas à remettre en cause un titre exécutoire sur la validité des droits et obligations qu'il constate, étant observé que le débiteur dispose alors d'une action en répétition de l'indu devant le juge du fond compétent.
Le juge de l'exécution demeure cependant compétent pour déterminer le montant de la créance servant de cause à la saisie et il doit notamment prendre en compte les faits postérieurs au jugement et donc les conditions légales d'exécution de celui-ci. M. X fait valoir en appel, sur le fondement de l'article 2293 du code civil que l'ADIE ne l'a jamais informé annuellement de l'évolution du montant de sa créance alors que son cautionnement est indéfini puisqu'il couvre tous les accessoires de la dette. Toutefois, dans la mesure où le cautionnement concerne un prêt d'un montant déterminé de 3 000 euros, il n'est pas indéfini. L'appelant ne peut donc se prévaloir des dispositions de l'article 2293 du code civil.
M. X conteste les frais mentionnés par l'huissier dans les décomptes des créances au motif qu'ils ne sont dus par lui mais par le débiteur principal. Cependant, il convient de rappeler qu'aux termes de l'article L 111-8 du code des procédures, les frais de l'exécution forcée sont à la charge du débiteur de la somme réclamée. Les frais mentionnés par l'huissier de justice sur les deux décomptes figurant sur les procès-verbaux sont des frais relatif aux mesures d'exécution. Mais c'est par des motifs pertinentes que la cour adopte que le premier juge a cantonné les frais des mesures d'exécution aux sommes de 582,40 euros TTC pour le procès-verbal d'indisponibilité et à 818,11 euros TTC pour la saisie-attribution. Par ailleurs, les intérêts au taux légal calculés sur le principal conformément à l'ordonnance d'injonction de payer sont dus par M. X puisqu'ils s'appliquent à la condamnation prononcée à son encontre.
S'agissant de la nullité du procès-verbal d'indisponibilité soulevée par M. X pour d'une part, l'absence d'exigibilité de la somme de 1 922,56 euros et l'absence de certitude du montant de la créance sur la dénonciation du procès-verbal et d'autre part, l'absence de nécessité de la mesure d' exécution en l'état d'une saisie-attribution permettant au créancier d'être désintéressé, il convient de souligner que, poursuivant l' exécution d'un titre exécutoire, l'ADIE était en droit de faire une déclaration, par l'huissier chargé de cette exécution , d'indisponibilité du certificat d'immatriculation valant saisie. De surcroît, cette mesure d'exécution a été pratiquée près de deux mois avant la saisie-attribution. Il ne peut être considéré qu'elle n'était pas nécessaire alors que M. X ne justifie d'aucun paiement la date à laquelle elle a été pratiquée.
Par ailleurs, s'il s'avère en effet que le procès-verbal de dénonciation de la mesure d' exécution notifié le 20 juin 2018 soit dans le délai légal, mentionne un montant de créance différent de celui du procès-verbal d'indisponibilité, il convient de rappeler que seule entraîne la nullité de la déclaration à l'administration valant saisie, l'absence des mentions visées à l'article R 223-2 du code des procédures civiles d' exécution soit du nom et de l'adresse du débiteur, du numéro d'immatriculation et de la marque du véhicule saisi et du titre exécutoire dont se prévaut le créancier. Aux termes de l'article R 223-3 du même code, l'acte de signification doit à peine de caducité, reproduire les dispositions de l'article R223-2 et contenir un décompte distinct des sommes réclamées ainsi qu'indiquer en caractères très apparents que les contestations doivent être portées devant le juge de l'exécution du lieu où demeure le débiteur. Tant le procès-verbal d'indisponibilité que l'acte de dénonciation respectent ces conditions de forme. M. X ne peut donc qu'être débouté de ses demandes de nullité du procès-verbal d'indisponibilité.
En conséquence, c'est à juste titre que le juge de l'exécution a validé les deux mesures d'exécution diligentées pour la somme en principal de 1 922,56 euros et pour les intérêts légaux correspondant, outre les frais d'exécution qu'il a retenus.
L'appelant demande la somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du caractère abusif des procédures d'exécution qui se sont cumulées Il fait valoir que l'ADIE ne pouvait lui réclamer plus que la somme de 1 500 euros pour laquelle il s'était engagé et qu'elle a maintenu la procédure de saisie sur le véhicule alors qu'elle était totalement désintéressée à hauteur des sommes qu'elle réclamait par la saisie-attribution. M. X souligne que l'intimée n'a aucunement ordonné la mainlevée de cette mesure l'empêchant de pouvoir vendre son véhicule depuis le mois d'août 2018 et qu'elle a fait saisir et rendue indisponible sur son compte bancaire, une somme d'un montant supérieur à la créance réellement due alors qu'il dispose de ressources modestes en tant que plaquiste salarié. Il expose qu'il s'est retrouvé avec un solde disponible sur son compte bancaire au mois d'août 2018 de 550,93 euros en raison de la saisie de la somme de 2 651,07 euros, alors que le montant de son loyer s'élève à 530 euros par mois.
Cependant, dans le cas de l'abus de saisie, l'appréciation du comportement fautif du créancier doit s'analyser au moment où la mesure d'exécution est mise en oeuvre. En l'espèce, M. X ne conteste pas le principe de créance de l'ADIE à son égard ni ne démontre que la valeur vénale de son véhicule excédait les sommes recouvrées de sorte que la saisie-attribution pratiquée le 8 août 2018 était inutile. De surcroît, les mesures d'exécution étaient justifiées en leur montant. Il s'ensuit que l'abus de saisie au moment de la mise en oeuvre des mesures d'exécution n'est absolument pas établi. M. X ne peut qu'être débouté de sa demande en dommages-intérêts. Le jugement sera également confirmé sur ce point.
Sur les demandes accessoires :
Les dispositions du jugement sur les dépens et frais irrépétibles seront confirmés et M. X condamné aux dépens d'appel.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Confirme le jugement rendu le 19 juin 2019 par le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Quimper en toutes ses dispositions,
Condamne M. X aux dépens d'appel.