CA Metz, 6e ch., 6 avril 2023, n° 21/00868
METZ
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Flores
Conseillers :
Mme Devignot, Mme Dussaud
Avocats :
Me Vanmansart, Me bettenfeld
FAITS ET PROCÉDURE
La SA [J] est une entreprise spécialisée en vente et location de blindage de tranchées et matériel topographique. Plusieurs de ses actionnaires ont décidé de céder leurs parts dans la société.
M. [X] [P], dirigeant d'une société France express topo (FET) travaillant dans le même domaine, a fait une proposition d'acquisition de ces parts, en partenariat avec M. [E] [I], salarié de la SA [J] depuis 1999 qui en détenait 80.
Les associés de la SA [J], excepté M. [I], ont en définitive, cédé leur participation à M. [D] [W].
Suite à cette cession une rupture conventionnelle du contrat de travail de M. [I] a été signée le 21 avril 2015, et d'autres salariés exerçant dans l'agence de [Localité 5] de la SA [J] ont démissionné.
Parallèlement la SAS Blindage topographie solutions, nouvellement dénommée SAS FBT EST RA, a été immatriculée au RCS en juillet 2015.
Par acte d'huissier du 21 septembre 2018, la SA [J] a assigné la SAS Blindage topographie solutions devant la chambre commerciale du tribunal de grande instance de Metz, au visa des articles 1382 et suivants anciens du code civil, aux fins de :
- dire la SA [J] recevable et bien fondée en ses demandes,
- dire et juger que la SAS Blindage topographie solutions a commis des faits de concurrence déloyale à l'encontre de la SA [J],
- condamner la SAS Blindage topographie solutions à payer à la SA [J] une somme de 648 000 euros en réparation du préjudice subi,
- condamner la SAS Blindage topographie solutions à payer à la SA [J] une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens de l'instance,
- ordonner l'exécution provisoire de la décision à intervenir, par application de l'article 515 du code de procédure civile.
Par jugement du 26 janvier 2021, la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Metz a :
- écarté des débats la pièce n°22 de la SA [J],
- débouté la SA [J] de l'intégralité de ses demandes et de sa demande de dommages intérêts au titre de l'indemnisation du préjudice lié à des actes de concurrence déloyale,
- débouté la SAS Blindage topographie solutions de sa demande reconventionnelle de dommages intérêts pour procédure abusive,
- condamné la SA [J] à payer à la SAS Blindage topographie solutions la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SA [J] aux dépens.
Pour se déterminer ainsi les premiers juges ont rappelé que, si la preuve est libre en matière commerciale, il est de jurisprudence constante que la preuve rapportée lors d'une enquête privée doit avoir été recueillie en respectant la vie privée et en employant des moyens proportionnés au but poursuivi. Ils ont estimé que le rapport d'enquête privée produit en première instance par la SA [J] portait une atteinte à la vie privée de M. [I] qui était disproportionnée aux buts poursuivis.
La chambre commerciale du tribunal judiciaire a également considéré qu'il n'était pas démontré par la SA [J] que les départs des effectifs ont été initiés par la SAS Blindage topographie solutions. Les premiers juges ont souligné que M. [I], M. [Y] et M. [C] sont uniquement actionnaires minoritaires de la SAS Blindage topographie solutions. Ils ont observé que la SA [J] n'apportait aucun élément quant aux conséquences concrètes de ces départs.
Ils ont ajouté que la SA [J] n'apportait aucun élément venant démontrer ni la réalité de la captation de sa clientèle par la SAS Blindage topographie solutions, ni de l'utilisation de moyens déloyaux pour ce faire et rappelé que le principe de la libre concurrence autorise une entreprise concurrente à s'installer librement où elle le souhaite.
Les premiers juges ont conclu qu'aucune faute imputable à la SAS Blindage topographie solutions n'était démontrée au titre de la concurrence déloyale.
Par déclaration au greffe de la cour d'appel de Metz du 8 avril 2021, la SA [J] a interjeté appel aux fins d'annulation, subsidiairement infirmation du jugement rendu le 26 janvier 2021 en ce qu'il a :
- débouté la SA [J] de l'intégralité de ses demandes et de sa demande de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation du préjudice lié à des actes de concurrence déloyale,
- débouté la SA [J] de sa demande fondée sur les dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la SA [J] aux entiers dépens de la procédure ainsi qu'à payer à la SAS Blindage topographie solutions la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions déposées le 12 janvier 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la SA [J] demande à la cour de':
- dire et juger l'appel principal recevable et bien fondé,
- dire et juger l'appel incident non fondé,
- infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté la SA [J] de sa demande fondée sur la concurrence déloyale et en ce qu'il l'a condamné aux dépens ainsi qu'à payer un article 700 à la SAS Blindage topographie solutions,
Statuant à nouveau,
- dire et juger que la société FBT EST RA anciennement dénommée la SAS Blindage topographie solutions a commis des faits de concurrence déloyale à l'encontre de la SA [J],
En conséquence,
- condamner la SAS FBT EST RA anciennement dénommée la SAS Blindage topographie solutions à payer à la SA [J] une somme de 648 000 euros en réparation du préjudice subi,
- condamner la SAS FBT EST RA anciennement dénommée la SAS Blindage topographie solutions à payer à la SA [J] une somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens d'appel et de première instance,
À titre subsidiaire,
Si par impossible la cour s'estimait insuffisamment informée sur le montant du préjudice, il est sollicité une expertise comptable,
Dans ces conditions,
- nommer tel expert-comptable judiciaire qu'il plaira à la cour avec pour mission de chiffrer les conséquences de la concurrence déloyale pour les années 2015, 2016 et 2017,
Concernant l'appel incident,
- dire l'appel incident non fondé,
- débouter la SAS FBT EST RA de sa demande de dommages et intérêts.
La SA [J] fait valoir que les deux sociétés exercent la même activité et ce dans le même secteur, la nouvelle société ayant son siège social à trois kilomètres de la SA [J]. Elle estime que les agissements déloyaux ont entraîné un détournement de clientèle et ont profité à la SAS FBT EST RA.
Elle ajoute qu'elle a été victime d'une désorganisation totale de son agence de [Localité 5] puisqu'elle a dû faire face au départ de six salariés sur sept entre le 2 juin et le 14 juillet 2015, dont trois sont devenus actionnaires de la SAS FBT EST RA dès le 26 juin 2015. Elle considère que ce fait constitue une concurrence déloyale puisque ces anciens salariés ont créé leur projet d'entreprise concurrente alors qu'ils étaient encore sous contrat avec celle-ci.
L'appelante fait valoir que le départ de l'intégralité de l'équipe de M. [I] a eu pour conséquence cette désorganisation complète. Elle soutient que ces anciens employés ont démarché la clientèle de la SA [J] et qu'ils usé de façon déloyale des contacts établis lors de leur travail au sein de la SA [J] pour amener ces clients à contracter dorénavant avec la SAS FBT EST RA.
La SA [J] invoque à cet égard des mails qui lui avaient été adressés par des entreprises tierces, Thiriet et Vinci, et qui ont été transférés à la SAS BTS. Elle indique également qu'il ressort de la situation de synthèse de la SA [J] au 30 avril 2016 que son chiffre d'affaires global a baissé de près de 50% durant l'année 2015-2016 comparativement à la moyenne du chiffre d'affaires annuel enregistré entre mai 2011 et avril 2015.
L'appelante fait valoir qu'elle a subi un préjudice puisque son chiffre d'affaires s'est effondré à compter du mois d'avril 2015 de près de 50'%. Elle estime son préjudice à 648 000 euros.
Par conclusions déposées le 6 avril 2022, auxquelles il sera expressément référé pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens, la SAS FBT EST RA demande à la cour, au visa de l'article 1240 du code civil, de :
- dire et juger la SA [J] mal fondée en son appel,
Le rejeter,
- dire et juger que le jugement du tribunal judiciaire de Metz est définitif en ce qu'il a écarté des débats la pièce n°22 produite par l'appelante,
- dire et juger que la cour n'est pas saisie de ce chef de jugement,
- écarter des débats la pièce n°22 communiquée par la SA [J],
- confirmer le jugement rendu par la chambre commerciale du tribunal judiciaire de Metz en date du 26 janvier 2021, en ce qu'il a :
- écarté des débats la pièce n°22 de la demanderesse (rapport Alpha investigations SAS),
- débouté la SA [J] de l'intégralité de ses demandes, sa demande de dommages et intérêts au titre de l'indemnisation du préjudice lié à des actes de concurrence déloyale,
- condamné la SA [J] à payer à la SAS Blindage topographique solutions, désormais dénommée FBT EST RA, la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,
- infirmer le jugement en date du 26 janvier 2021 en ce qu'il a débouté la SAS FBT EST RA de sa demande reconventionnelle de dommages et intérêts pour procédure abusive,
- débouter la SA [J] de l'intégralité de ses demandes,
Statuant à nouveau,
- condamner la SA [J] à payer à la SAS FBT EST RA la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée,
- condamner la SA [J] à payer à la SAS FBT EST RA la somme de 15 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamner la SA [J] aux entiers dépens d'appel.
L'intimée affirme que la décision de céder les titres de la SA [J] a été prise par M. [Z] [J] de son vivant et que des discussions ont été engagées dès le mois de juin 2014, M. [I] faisant partie de ce projet. Elle soutient également qu'après le décès de M. [J] des mesures vexatoires ont été entreprises par Mme [V] [J] à l'encontre de M. [I], M. [Y] et de M. [C], en éludant notamment leur prime annuelle ou en la réduisant drastiquement.
Elle affirme que les contrats de travail des salariés ne comportaient aucun engagement de non-concurrence, que la SA [J] a volontairement provoqué la rupture des contrats de travail, que M. [I] déployait essentiellement son activité sur la région de [Localité 4] et [Localité 6] pour redresser la filiale de la SA [J] à la demande du gérant, que le remplaçant de M. [Y] a été trouvé avant l'expiration du préavis de ce dernier, que M. [C] a également été remplacé avant son départ et que le départ et la rupture du contrat de travail de M. [I] résultait d'une volonté de se séparer de ce directeur commercial.
La SAS FBT EST RA souligne qu'elle a débuté son activité bien après la fin du préavis de M. [Y] et de M. [C] et que les participations de ces derniers ainsi que de M. [I] au sein de la SAS FBT EST RA sont minoritaires.
S'agissant du rapport réalisé par un détective privé, la SAS FBT EST RA fait valoir que la filature organisée par l'employeur pour surveiller l'activité d'un salarié ou d'un ex salarié constitue un moyen de preuve illicite et que cette enquête portait atteinte à la vie privée de M. [I] et était disproportionnée au but poursuivi.
Sur la licéité de la situation concurrentielle, la SAS FBT EST RA rappelle qu'une entreprise commerciale ne peut se prévaloir d'aucun droit privatif sur ses clients lesquels peuvent être démarchés par ses concurrents sous réserve de respecter les usages loyaux du commerce et que le démarchage par un ancien salarié ne constitue pas en lui-même un acte de concurrence déloyale s'il n'est pas réalisé par des moyens tels que le dénigrement ou l'emploi d'informations inexactes ou mensongères.
Elle expose que les salariés étaient libres de s'engager pour le compte de la SAS FBT EST RA ou de créer une société concurrente de leur ancien employeur et qu'ils ont respecté leurs obligations vis-vis de leur ancien employeur au moment de leur départ de la SA [J].
La SAS FBT EST RA rappelle que le débauchage de salariés n'est susceptible de constituer un acte de concurrence déloyale que lorsqu'il résulte de manœuvres frauduleuses et qu'il est démontré qu'il a eu pour effet de désorganiser l'entreprise dont le personnel débauché est issu.
Elle indique qu'il incombe à la SA [J] de prouver l'existence de manœuvres frauduleuses qui auraient conduit à un débauchage et que cette dernière affirme l'existence d'une désorganisation mais n'en apporte pas la démonstration.
L'intimée estime que la SA [J] a tout mis en œuvre pour que les salariés quittent l'entreprise et a anticipé leur départ forcé en procédant à des recrutements pour les remplacer avant le terme de leur préavis.
S'agissant du détournement de clientèle, la SAS FBT EST RA fait valoir que la SA [J] n'allègue aucun fait ni aucun acte susceptible de caractériser un agissement déloyal de sa part, et qu'aucun commencement de preuve, ni élément objectif tel qu'attestations de clients se plaignant d'actes critiquables ou du fait de n'avoir pas été libre du choix de son prestataire n'est avancé.
Elle estime que le procès-verbal de constat versé aux débats par la SA [J] est démuni de toute force probante et que les courriels produits ne sauraient apporter la preuve d'un détournement de clientèle.
Elle conclut qu'aucun agissement de concurrence déloyale ou faute ne peut être reproché à la SAS FBE EST RA et qu'aucun fichier clients de la SA [J] n'a été détourné.
Sur le préjudice allégué par la SA [J], l'intimée fait valoir que la note établie par l'expert-comptable en avril 2016 est dénuée de toute force probante.
Enfin la SAS FBT EST RA considère que la poursuite de l'instance en dépit du jugement rendu et nullement critiqué caractérise l'existence d'une procédure abusive et injustifiée.
MOTIFS DE LA DECISION
Observations sur la décision écartant la pièce n° 22 produite en première instance :
Il n'a pas été interjeté appel de la décision écartant des débats la pièce n° 22 qui avait été produite en première instance par la SA [J], à savoir un rapport de la société Alpha Investigations SAS.
Il n'y a dès lors pas lieu de statuer à cet égard, la cour d'appel n'en étant pas saisie.
Il est observé par ailleurs que devant la cour d'appel la SA [J] ne produit pas la pièce qui avait ainsi été écartée des débats par le tribunal, et que la pièce n° 22 de son bordereau n° 2 est intitulée : « fiche societe.com de la société BTS ».
Sur la demande principale en dommages-intérêts pour concurrence déloyale :
La concurrence déloyale consiste à faire un usage excessif de la liberté du commerce et de la liberté d'entreprendre, en recourant à des procédés contraires à la réglementation ou à des manœuvres déloyales, et en occasionnant un préjudice.
L'action en concurrence déloyale est fondée sur l'ancien article 1382 du code civil devenu l'article 1240 du code civil, selon lequel tout fait quelconque de l'homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.
Il incombe ainsi à la SA [J] qui invoque des actes de concurrence déloyale de rapporter la preuve d'une faute commise par la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions, d'un préjudice certain pour la SA [J], et d'un lien de causalité entre la faute et le préjudice.
- concernant la désorganisation'alléguée':
En application de l'article 9 du code de procédure civile il incombe à la SA [J] de démontrer l'existence de manœuvres déloyales de débauchage de ses salariés par la SAS FBT Est RA anciennement BTS, ayant entraîné une désorganisation concrète de l'entreprise.
La simple embauche, dans des conditions régulières, d'anciens salariés d'une entreprise concurrente, n'est pas en elle-même fautive.
Il ressort des conclusions et pièces de la SA [J] qu'elle a son siège à [Localité 3], et dispose notamment d'un établissement secondaire à [Localité 5], au sein duquel étaient employés 7 salariés au 30 avril 2015.
Il est établi que sur les sept salariés en poste dans l'établissement de [Localité 5], six ont rompu leur contrat de travail entre avril et mai 2015, avec effet entre juin et juillet 2015, dont l'un par une rupture conventionnelle signée avec la SA [J] le 21 avril 2015, et les cinq autres par des lettres de démission de fin avril 2015 à début juin 2015.
La SA [J] démontre que trois des six salariés ayant rompu leur contrat de travail, M. [I], M. [Y], et M. [C], se sont associés avec M. [P] pour constituer la SAS Blindage Topographie Solutions, dont ils ont signé les statuts le 26 juin 2015, et qui a été immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS.) de Metz le 13 juillet 2015 (pièce 23).
Cependant la constitution d'une société concurrente par trois salariés de la SA [J] est le fait de ceux-ci. Il ne s'agit pas en soit d'un acte imputable à la SAS Blindage Topographie Solutions, dont la personnalité morale, distincte de celle de ses associés et de ses dirigeants, n'existe que depuis le 13 juillet 2015. Aucune faute n'est imputable à la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions s'agissant de sa constitution.
Par ailleurs les actes de rupture des contrats de travail des six salariés ayant quitté l'établissement de [Localité 5] de la SA [J], par convention ou lettres de démission qui datent d'avril à juin 2015, sont tous antérieurs à la constitution de la société SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions qui n'a été immatriculée au RCS. qu'en date du 13 juillet 2015.
En conséquence la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions n'a pas personnellement commis de manœuvres déloyales de débauchage de ces salariés.
Les conditions de la responsabilité de la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions ne sont pas réunies s'agissant de la désorganisation alléguée.
- concernant le détournement de clientèle allégué':
En application de l'article 9 du code de procédure civile il incombe à la SA [J] de démontrer l'existence de manœuvres déloyales de détournement de ses clients par la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions (BTS).
La SA [J] se réfère à sa pièce n° 25 en faisant valoir qu'un mail adressé par M. [Y] à l'entreprise Thiriet aurait été transmis à la SAS B.T.S. Cependant, outre le fait que la date et l'auteur de ce transfert de mail ne sont ni précisés dans les conclusions, ni justifiés par la pièce n° 25 qui comporte seulement les 2 dernières pages d'un document de 3 pages, le simple transfert d'un mail par un salarié de la SA [J] à la SAS BTS. ne constitue pas une manœuvre de la part de celle-ci. Il n'est par ailleurs pas prouvé par la SA [J] que la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions aurait, après sa constitution, fait usage du mail transféré pour détourner le client Thiriet.
La SA [J] produit également un constat d'huissier démontrant que M. [I] a, le 20 avril 2015, transmis à M. [P] un mail de demande de prix qui avait été adressé le 15 avril 2015 à la SA [J] par la société Vinci construction, avec le message «'à mettre sous le coude'». Cependant ce transfert de mail en date du 20 avril 2015 à l'initiative de M. [I] n'est pas imputable à la SAS B.T.S. qui n'existe que depuis le 13 juillet 2015 et dont la personnalité morale est distincte de celle de ses dirigeants et associés.
Enfin la SA [J] ne produit pas d'éléments de preuve objectifs établissant que la SAS B.T.S. aurait, après sa constitution, commis des manœuvres déloyales aux fins de détournement de clientèle. S'il est établi une chute du chiffre d'affaires du portefeuille qui était suivi par M. [I], et une chute du chiffre d'affaires et du résultat net d'exploitation de la SA [J] pour les années 2015 et 2016 par rapport aux années antérieures, en revanche il n'est pas démontré que cette situation résulterait de manœuvres déloyales de la part de la SAS BTS.
Les conditions de la responsabilité de la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions ne sont pas réunies s'agissant du détournement de clientèle allégué.
- sur la demande d'expertise :
En l'absence de preuve d'une faute imputable à l'intimée il n'y a pas lieu d'ordonner une expertise relative à l'éventuel préjudice de la SA [J].
Sur la demande en indemnité pour procédure abusive':
Il n'est pas établi que la SA [J] a abusé de son droit d'agir en justice, ni de son droit d'interjeter appel contre le jugement. La demande en indemnité pour procédure abusive est rejetée.
Sur les dépens et l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile':
Les dispositions du jugement statuant sur les dépens et indemnité sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure de première instance sont confirmées.
Succombant en ses prétentions la SA [J] est condamné aux dépens d'appel et à payer à la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Les demandes de la SA [J] au titre des dépens et indemnités prévues par l'article 700 du code de procédure civile sont rejetées.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions ;
Y ajoutant
Rejette la demande d'expertise ;
Rejette la demande d'indemnité pour procédure abusive ;
Condamne la SA [J] aux dépens de la procédure d'appel ;
Condamne la SA [J] à payer à la SAS FBT Est RA anciennement dénommée Blindage Topographie Solutions la somme de 3'000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboute la SA [J] de ses demandes au titre des dépens et de l'indemnité prévue par l'article 700 du code de procédure civile pour la procédure d'appel.