CJUE, 9e ch., 27 avril 2023, n° C-492/21 P
COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE
Arrêt
PARTIES
Demandeur :
Casa Regina Apostolorum della Pia Società delle Figlie di San Paolo
Défendeur :
Commission européenne, République de Finlande
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président de chambre :
Mme L. S. Rossi
Juges :
M. S. Rodin, Mme O. Spineanu-Matei
Avocat général :
M. P. Pikamäe
1 Par son pourvoi, Casa Regina Apostolorum della Pia Società delle Figlie di San Paolo demande l’annulation de l’arrêt du Tribunal de l’Union européenne du 2 juin 2021, Casa Regina Apostolorum della Pia Società delle Figlie di San Paolo/Commission (T‑223/18, non publié, ci‑après l’« arrêt attaqué », EU:T:2021:315), par lequel celui-ci a rejeté son recours tendant à l’annulation de la décision C(2017) 7973 final de la Commission, du 4 décembre 2017, concernant l’aide d’État SA.39913 (2017/NN) – Italie – Compensation alléguée des hôpitaux publics dans la région du Latium (ci-après la « décision litigieuse »).
Les antécédents du litige et la décision litigieuse
2 Les antécédents du litige et la décision litigieuse ont été exposés aux points 1 à 33 de l’arrêt attaqué et peuvent être résumés dans les termes suivants.
3 En Italie, le système des soins de santé est organisé dans le cadre du Servizio sanitario nazionale (Service sanitaire national, ci-après le « SSN »). Dans ce cadre, les soins de santé sont financés directement par les cotisations de sécurité sociale des affiliés et par des ressources d’État, de telle sorte que ces prestations de services sont fournies gratuitement ou quasi gratuitement à tous les patients affiliés au SSN, par des organismes publics ou par des organismes privés conventionnés. La gestion du SSN est essentiellement assurée par les régions.
4 La requérante est une entité privée établie dans la région du Latium (Italie) qui fournit des services de soins de santé dans le cadre du SSN ainsi que des services de soins privés.
5 Le 4 novembre 2014, la requérante a déposé une plainte auprès de la Commission européenne par laquelle elle a allégué l’existence d’aides d’État en faveur des hôpitaux publics dans la région du Latium (ci-après les « mesures en cause »).
6 Dans sa plainte, la requérante a soutenu que les réformes de santé introduites par le decreto legislativo n. 502 – Riordino della disciplina in materia sanitaria, a norma dell’articolo 1 della legge 23 ottobre 1992, n. 421 (décret-loi no 502, portant refonte du régime du système de santé, en application de l’article 1er de la loi no 421, du 23 octobre 1992), du 30 décembre 1992 (supplément ordinaire no 137 à la GURI no 305, du 30 décembre 1992) (ci-après la « réforme de 1992 »), puis par le decreto legislativo n. 229 – Norme per la razionalizzazione del Servizio sanitario nazionale, a norma dell’articolo 1 della legge 30 novembre 1998, n. 419 (décret-loi no 229, portant dispositions de rationalisation du Service sanitaire national, en application de l’article 1er de la loi no 419, du 30 novembre 1998), du 19 juin 1999 (supplément ordinaire no 132 à la GURI no 165, du 16 juillet 1999) (ci-après la « réforme de 1999 »), ont, d’une part, transformé les structures publiques de santé, dont les hôpitaux publics, en des entreprises soumises au principe de gestion et, d’autre part, mis en concurrence les structures publiques et les structures privées pour les soins relevant du SSN ou des soins procurés à la demande individuelle de patients, générant ainsi un marché composé d’opérateurs économiques en concurrence entre eux et fondé sur le principe de libre choix du patient, de telle sorte que ces réformes du SSN ont conféré une nature économique aux activités s’inscrivant dans son cadre.
7 La requérante a soutenu que les soins prodigués dans le cadre du SSN dans la région du Latium ne sont pas rémunérés de manière appropriée, de sorte que, d’une part, les hôpitaux publics de cette région bénéficient de financements publics pour combler leurs déficits ne résultant qu’en partie de la fourniture de soins et, d’autre part, les hôpitaux privés, tels que celui de la requérante, n’ont pas été rémunérés à la hauteur des coûts des soins fournis. Il en résulterait une violation du principe de libre choix du patient, en ce que les hôpitaux privés conventionnés ne sont pas en mesure de réaliser des investissements pour améliorer la qualité de leurs soins.
8 Les financements publics par lesquels la Regione Lazio (Région du Latium, Italie) aurait comblé les déficits des hôpitaux publics relèvent, selon la requérante, des règles sur les aides d’État et, en particulier, sur les services d’intérêt économique général (ci-après les « SIEG »). À cet égard, la requérante a demandé à la Commission de vérifier les compensations du service public et de contrôler si la compensation avait été établie dans le respect des principes posés dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark Trans et Regierungspräsidium Magdeburg (C‑280/00, ci‑après l’« arrêt Altmark », EU:C:2003:415), dont celui d’une rémunération appropriée d’une entreprise moyenne bien gérée.
9 Au cours de l’année 2015, après avoir obtenu des informations complémentaires de la part de la requérante, la Commission a invité les autorités italiennes à lui soumettre leurs observations à l’égard de la plainte, ce que celles-ci ont fait.
10 Par lettre du 19 juillet 2016, la Commission a communiqué à la requérante son appréciation préliminaire selon laquelle les mesures en cause ne constituaient pas une aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
11 En août et en septembre 2016, la requérante a contesté cette appréciation préliminaire et fourni des informations complémentaires à la Commission. En novembre 2016, cette institution a adressé aux autorités italiennes une demande d’informations complémentaires, à laquelle celles-ci ont répondu en février 2017.
12 Par lettre du 21 avril 2017, la Commission a transmis à la requérante les informations communiquées par les autorités italiennes en février 2017, tout en confirmant son appréciation préliminaire selon laquelle les mesures en cause ne constituaient pas des aides d’État.
13 En mai 2017, la requérante a fourni des informations complémentaires, en contestant de nouveau l’appréciation préliminaire de la Commission. En juillet 2017, après la transmission par la requérante d’informations complémentaires, la Commission a organisé une téléconférence pour discuter de son appréciation préliminaire avec la requérante.
14 Par la décision litigieuse, la Commission a rejeté la plainte de la requérante.
15 À cette fin, la Commission a examiné si les principes de solidarité et d’universalité de la couverture, posés par la legge n. 833 – Istituzione del servizio sanitario nazionale (loi no 833 – portant instauration du Service sanitaire national), du 23 décembre 1978 (supplément ordinaire à la GURI no 360, du 28 décembre 1978), et, partant, la nature non économique du SSN avaient été remis en cause par les réformes de 1992 et de 1999.
16 La Commission a, tout d’abord, estimé que, par la réforme de 1992, le passage à un modèle entrepreneurial (aziendalizzazione) et de conventionnement (accreditamento) n’avait pas compromis l’universalité de la couverture et la nature solidaire du SSN. Ensuite, elle a retenu que le principe de libre choix du patient, introduit par la réforme de 1999, ne compromettait pas non plus l’universalité de la couverture et la nature solidaire du SSN. Enfin, elle a estimé que les activités d’exercice libéral en milieu hospitalier (attività libero professionale intramuraria, ci-après les « ALPI ») des médecins des hôpitaux publics relevant du SSN, rendues possibles par la réforme de 1992, ne remettaient pas en cause la nature non économique du SSN.
17 La Commission a dès lors considéré que, d’une part, il n’avait pas été établi que les réformes de 1992 et de 1999 avaient modifié les principales caractéristiques du SSN en lui conférant une nature économique et, d’autre part, les activités du SSN ne pouvaient pas être considérées comme étant exercées par une entreprise, en ce qu’elles reposent sur le principe d’universalité et de solidarité et sont exercées pour tous les patients à titre gratuit ou contre le paiement d’un montant très réduit et destiné à couvrir uniquement en partie les coûts des soins. Selon la Commission, les mesures en cause ne constituaient donc pas une aide d’État, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE.
18 Partant, la Commission a rejeté, en ce qu’ils étaient dénués de pertinence afin d’apprécier l’existence d’une aide d’État, les arguments de la requérante concernant la rémunération des services fournis dans le cadre du SSN, tels que le recours à des financements publics pour combler les déficits des hôpitaux publics ou l’absence de mise à jour par la Région du Latium des tarifs rémunérant les hôpitaux privés conventionnés fournissant des services de soins dans le cadre du SSN pour tenir compte d’une augmentation des coûts de la main-d’œuvre. La Commission a également rejeté les arguments relatifs à l’application de la quatrième condition définie dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415), à la compensation versée aux hôpitaux qui fournissent des services dans le cadre du SSN. Elle a considéré que cette condition visant à vérifier l’existence d’un avantage ne s’avère pertinente qu’aux fins de la mise en œuvre de la notion d’« aide d’État » lorsque le service fourni est de nature économique, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
La procédure devant le Tribunal et l’arrêt attaqué
19 Par requête parvenue au greffe du Tribunal le 26 mars 2018, la requérante a introduit un recours tendant à l’annulation de la décision litigieuse.
20 À l’appui de son recours, la requérante a soulevé trois moyens. Par le premier moyen, elle contestait la décision litigieuse en ce que celle-ci était rédigée en langue anglaise. Lors de l’audience, elle a déclaré renoncer à ce premier moyen. Les deuxième et troisième moyens étaient pris, respectivement, d’une violation de l’obligation de motivation et d’une violation de l’article 107 TFUE.
21 S’agissant du deuxième moyen, aux points 124 à 142 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a rejeté les arguments par lesquels la requérante reprochait à la Commission d’avoir omis, d’une part, de prendre en considération et de répondre aux éléments qu’elle avait soumis démontrant l’absence d’universalité du SSN, l’ampleur des ALPI ainsi que la nature économique des activités des établissements de santé publics et privés ressortant du contentieux porté devant des juridictions italiennes et d’autre part, de vérifier le respect des conditions définies dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415). Il a considéré que la décision litigieuse exposait, de façon claire et non équivoque, le raisonnement qui avait conduit la Commission à conclure que la condition de l’exercice d’une activité économique n’était pas remplie et, partant, à décider qu’aucune aide d’État n’était constituée en l’espèce.
22 S’agissant du troisième moyen, aux points 145 à 191 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté l’argumentation de la requérante selon laquelle la Commission se serait fondée sur des appréciations erronées pour considérer que les services de soins de santé fournis dans le cadre du SSN par les hôpitaux publics dans la région du Latium ne sont pas de nature économique, de telle sorte que ces hôpitaux ne sont pas des entreprises, au sens de l’article 107, paragraphe 1, TFUE, et que, par conséquent, les mesures en cause ne sont pas constitutives d’une aide d’État.
23 Le Tribunal a relevé, au point 152 de l’arrêt attaqué, que la requérante ne contestait pas que les activités de soins exercées dans le cadre du SSN ne poursuivent pas un but lucratif et qu’elles sont contrôlées par l’État, même si elles sont financièrement gérées essentiellement par les régions. Au point 153 de cet arrêt, il a précisé que la requérante contestait la poursuite par le SSN d’un objectif social, à savoir la mise en œuvre des principes de solidarité et d’universalité.
24 Au point 154 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a indiqué qu’il ressortait d’une jurisprudence constante de la Cour, rappelée dans l’arrêt du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa (C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450, point 32), que les régimes de sécurité sociale, y compris une branche de soins de santé comme dans le cadre du SSN, qui mettent en œuvre le principe de solidarité sont caractérisés, notamment, par le caractère obligatoire de l’affiliation pour les assurés, par des cotisations fixées par la loi en proportion des revenus des assurés et par la règle en vertu de laquelle les prestations obligatoires fixées par la loi sont identiques pour tous les assurés, indépendamment du montant des cotisations versées par chacun d’eux.
25 Au point 155 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que, par son moyen, la requérante ne remettait pas en cause la gratuité ou la quasi‑gratuité de tous les soins de santé, quels que soient les revenus des affiliés, fournis dans le cadre du SSN par les hôpitaux publics pour tous les patients affiliés au SSN ni que celui-ci était principalement financé par les cotisations desdits affiliés calculées selon leurs revenus respectifs.
26 Au point 156 de l’arrêt attaqué, le Tribunal en a conclu que le SSN poursuit un objectif social et procède de la mise en œuvre du principe de solidarité et que, partant, la Commission n’avait pas entaché la décision attaquée d’une erreur d’appréciation à cet égard, sans que cette appréciation fût remise en cause par les arguments de la requérante.
27 En premier lieu, aux points 157 à 173 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a considéré que, malgré une certaine concurrence prévalant sur le marché en cause et sur des marchés adjacents, les principes de solidarité et d’universalité impliquent seulement que le service soit fourni, au moins potentiellement, à tous les patients qui en feraient la demande, sans que le SSN couvre nécessairement l’intégralité des besoins en soins des patients en Italie. Il a ajouté que le principe de libre choix du patient ne vise qu’à permettre à certains patients affiliés au SSN de ne pas avoir recours à celui-ci. Il a estimé que les décisions juridictionnelles et administratives invoquées par la requérante ne remettaient pas en cause ces considérations. Il a conclu que, en considérant que le SSN reposait toujours sur les principes d’universalité et de solidarité nonobstant l’application des principes de concurrence et de libre choix du patient, la Commission n’avait pas commis d’erreur d’appréciation.
28 En deuxième lieu, aux points 174 à 184 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a constaté que les ALPI ne relevaient pas du SSN. Selon le Tribunal, il ne saurait être exclu qu’un même établissement, comme des hôpitaux publics dans les circonstances de la présente affaire, puisse exercer plusieurs activités, à la fois économiques et non économiques, à la condition qu’il tienne une comptabilité séparée, cette condition étant remplie en l’espèce. Il en a déduit que, en considérant que le SSN reposait toujours sur les principes d’universalité et de solidarité nonobstant la pratique d’ALPI, la Commission n’avait pas commis une erreur d’appréciation.
29 En troisième lieu, aux points 185 à 190 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a écarté les arguments de la requérante par lesquels elle prétendait que la Commission était tenue d’appliquer l’article 106 TFUE, le régime des SIEG et les principes énoncés dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415). À cet égard, il a estimé que la Commission avait, à bon droit, considéré que les services de soins de santé fournis dans le cadre du SSN n’étaient pas de nature économique et déduit que, dans ce cadre, les hôpitaux publics n’étaient pas des entreprises et que les mesures en cause n’étaient donc pas constitutives d’une aide d’État au sens de l’article 107 TFUE. Il a précisé que, en l’absence d’activités de nature économique et, partant, d’entreprises, il ne pouvait pas être fait grief à la Commission de ne pas avoir fait en l’espèce application de l’article 106 TFUE, du régime des SIEG et des principes énoncés dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415).
La procédure devant la Cour et les conclusions des parties au pourvoi
30 Par son pourvoi, la requérante demande à la Cour :
– d’annuler l’arrêt attaqué et
– de condamner la Commission aux dépens exposés dans le cadre des procédures de première instance et de pourvoi.
31 La Commission demande à la Cour :
– de rejeter le pourvoi et
– de condamner la requérante aux dépens des deux instances.
32 Par acte déposé au greffe de la Cour le 28 décembre 2021, la République de Finlande a, sur le fondement de l’article 40, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 130 du règlement de procédure de la Cour, demandé à intervenir dans cette affaire au soutien des conclusions de la Commission. Par ordonnance du 27 janvier 2022, le président de la Cour a fait droit à cette demande. La République de Finlande n’a pas déposé de mémoire en intervention.
Sur le pourvoi
33 À l’appui de son pourvoi, la requérante soulève deux moyens. Le premier moyen est tiré d’une « violation de l’article 106, paragraphe 2, TFUE, d’un défaut de motivation, d’une classification du système national de santé dans les SIEG, d’une omission de statuer et d’une violation du principe ne ultra petita. Le second moyen est tiré d’une « violation tenant au défaut d’application et à l’application erronée des articles 106 et 107 TFUE, d’un défaut de motivation et, en tout état de cause, d’une motivation erronée, d’une absence d’instruction de l’affaire, d’une omission de statuer et d’une violation du principe ne ultra petita – autre aspect ».
34 Il doit être considéré que, eu égard à l’indication des points de l’arrêt attaqué visés par chacun des deux moyens soulevés à l’appui de son pourvoi, la requérante conteste, en substance, les motifs de l’arrêt attaqué relatifs à l’examen, respectivement, des deuxième et troisième moyens invoqués devant le Tribunal.
35 Par ailleurs, bien qu’il ressorte de l’énoncé des moyens du pourvoi que la requérante invoque la violation du principe ne ultra petita, elle n’avance aucune argumentation à cet égard. Il convient, dès lors, de rejeter comme étant irrecevables les moyens du pourvoi en ce qu’ils visent la violation de ce principe.
36 En effet, il est de jurisprudence constante que les éléments du pourvoi qui ne contiennent aucune argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué ne répondent pas à l’exigence de motivation découlant de l’article 256 TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure, et doivent dès lors être écartés comme étant irrecevables (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2023, Espagne e.a./Commission, C‑649/20 P, C‑658/20 P et C‑662/20 P, EU:C:2023:60, point 115 et jurisprudence citée).
Sur le premier moyen
Argumentation des parties
37 Par son premier moyen, la requérante invoque, en substance, cinq griefs.
38 Par le premier grief de son premier moyen, la requérante conteste les motifs exposés au point 122 de l’arrêt attaqué, par lesquels le Tribunal a estimé, en substance, que l’obligation de motivation n’impose pas à la Commission d’exposer d’autres éléments que les faits et les considérations juridiques qu’elle considère d’une importance essentielle dans l’économie de la décision. Elle soutient que, même si cette institution peut choisir de ne pas traiter une question particulière qui lui est soumise, elle doit toutefois l’évaluer et, si elle ne le fait pas, elle peut faire l’objet de critiques, comme tel aurait été le cas dans la présente affaire. Elle renvoie à cet égard aux arrêts du 11 juillet 2006, FENIN/Commission (C‑205/03 P, EU:C:2006:453), et du 4 mars 2003, FENIN/Commission (T‑319/99, EU:T:2003:50, point 42).
39 Par le deuxième grief de son premier moyen, la requérante soutient que le Tribunal, aux points 124 à 127 de l’arrêt attaqué, n’a ni pleinement évalué ses arguments ni analysé le système des soins de santé en Italie et la question de savoir s’il correspond au régime des SIEG visé à l’article 106 TFUE.
40 À cet égard, elle prétend, en premier lieu, que la motivation des points 124 et 125 de l’arrêt attaqué révèle le défaut de motivation de la décision litigieuse, la Commission n’ayant pas procédé à une reconstitution précise de la législation régissant le SSN, qu’elle aurait exposée par la production de documents et examinée en détail dans le cadre de la procédure en première instance. Elle affirme que, depuis 1994, le système de rémunération des services de santé en Italie est appliqué selon un modèle américain de regroupement homogène par type de prestations qui permet la classification des services de santé et la détermination d’une rémunération homogène correcte de ces services.
41 En second lieu, elle prétend avoir contesté l’argument avancé par la Commission, mentionné au point 126 de l’arrêt attaqué, concernant l’incidence du principe de libre choix du patient sur les principes d’universalité et de solidarité régissant le SSN ainsi que, plus largement, sur la nature des activités de soins exercées dans le cadre du SSN.
42 Par le troisième grief de son premier moyen, la requérante conteste les motifs exposés aux points 128 à 130 de l’arrêt attaqué. Elle aurait invoqué l’impossibilité d’une séparation comptable analytique telle qu’évoquée dans la décision litigieuse par la Commission, qui n’aurait jamais adressé la moindre demande d’éclaircissement aux autorités italiennes à cet égard. Elle prétend avoir soutenu que la Commission n’avait pas apporté la preuve d’une séparation comptable, qui, en tout état de cause, ne modifierait pas la nature économique de l’activité des établissements hospitaliers, compte tenu de l’unicité de leurs bilans. Elle fait valoir qu’aucun document n’a été présenté pour réfuter ses arguments et renvoie à un résumé qui aurait été produit durant la phase administrative ainsi qu’en première instance.
43 Par le quatrième grief de son premier moyen, la requérante conteste les motifs exposés au point 133 de l’arrêt attaqué, en faisant valoir que le Tribunal aurait dû reprocher à la Commission de ne pas avoir tenu compte, dans la décision litigieuse, du jugement no 1 de 2013 rendu par la sezione fallimentare du Tribunale civile di Roma (section des affaires de faillite du tribunal civil de Rome, Italie) et du contentieux administratif concernant sa rémunération pour l’année 2015. Ces éléments confirmeraient la qualification d’entreprises, par les autorités italiennes, aux structures à but non lucratif, telles que la requérante, au motif qu’elles fournissent des services de soins de santé. Ce contentieux administratif aurait permis de réfuter les arguments avancés par les autorités italiennes, qui auraient évoqué l’utilisation correcte des ressources par la Région du Latium, sans toutefois nier l’existence des déficits soulignés par la requérante.
44 Par le cinquième grief de son premier moyen, la requérante critique les motifs exposés aux points 136 à 139 de l’arrêt attaqué et conteste l’appréciation du Tribunal selon laquelle la décision litigieuse était suffisamment motivée, au motif que les régimes prévus aux articles 106 et 107 TFUE se recouperaient. En outre, s’agissant du contenu spécifique du régime des SIEG et de l’article 106 TFUE, elle renvoie aux arguments exposés dans le cadre du second moyen du pourvoi.
45 La Commission conteste l’argumentation de la requérante. D’une part, sous couvert d’une prétendue insuffisance de motivation de l’arrêt attaqué, la requérante tendrait à obtenir de la Cour une nouvelle appréciation des faits. D’autre part, le Tribunal aurait examiné en détail, aux points 124 à 141 de cet arrêt, les griefs avancés par la requérante concernant un prétendu défaut de motivation de la décision litigieuse et y aurait répondu en se référant expressément aux considérants pertinents de cette décision. La Commission conclut que le premier moyen est, en partie, irrecevable et, en tout état de cause, manifestement non fondé.
46 Dans son mémoire en réplique, la requérante conteste les arguments de la Commission par lesquels celle-ci a invoqué l’irrecevabilité de certains de ses griefs. En particulier, elle soutient avoir critiqué l’arrêt attaqué en se fondant sur des arguments précis et en se référant tant aux mémoires qu’aux documents produits au cours de la procédure administrative et en première instance.
47 En outre, s’agissant du deuxième grief de son premier moyen, la requérante, premièrement, soutient avoir, dans son pourvoi, invoqué le caractère contradictoire de l’arrêt attaqué, en soulignant que la question ne devait pas être envisagée au regard de la gratuité de la prestation, qui n’existerait d’ailleurs pas en Italie. L’appréciation devrait porter sur le modèle de fourniture de la prestation de soins et sur sa rémunération. Elle prétend avoir contesté l’appréciation du Tribunal, qui aurait affirmé, sans aucune forme de motivation, que, en Italie, les services de soins de santé sont fournis sur la base du principe de solidarité, alors qu’il aurait été ensuite contraint d’affirmer que le SSN présente des éléments de nature économique. En outre, elle aurait invoqué le défaut de motivation de l’arrêt attaqué en ce qui concerne l’appréciation au regard de l’article 106 TFUE.
48 Deuxièmement, elle nie viser à obtenir une nouvelle appréciation des faits et reproche au Tribunal l’absence de prise en considération des diverses dispositions issues de la réforme de 1999, qui aurait profondément modifié le système de santé italien. Elle précise avoir également invoqué le financement annuel octroyé par l’État italien à la Région du Latium, grâce auquel celle-ci achèterait des prestations de santé auprès d’établissements de santé tant publics que privés, en signant un contrat et en rémunérant les services sur la base d’une grille tarifaire. Les notions de « solidarité » et d’« universalité » n’apparaîtraient dès lors pas dans le SSN. De surcroît, le Tribunal aurait, sans effectuer aucune comparaison, assimilé le SSN au système slovaque et considéré qu’il pouvait appliquer les enseignements issus de l’arrêt du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa (C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450).
Appréciation de la Cour
49 Par le premier grief de son premier moyen, la requérante conteste les motifs exposés au point 122 de l’arrêt attaqué. Or, dans ce point, le Tribunal a, à juste titre, rappelé la jurisprudence constante de la Cour selon laquelle la Commission n’est pas tenue de prendre position sur tous les arguments invoqués dès lors qu’elle expose les faits et les considérations juridiques revêtant une importance essentielle dans l’économie de sa décision (voir, en ce sens, arrêt du 11 janvier 2007, Technische Glaswerke Ilmenau/Commission, C‑404/04 P, non publié, EU:C:2007:6, point 30). En effet, l’auteur d’un acte n’est pas tenu de prendre position sur des éléments clairement secondaires ou d’anticiper des objections potentielles (arrêt du 25 octobre 2005, Allemagne et Danemark/Commission, C‑465/02 et C‑466/02, EU:C:2005:636, point 106 ainsi que jurisprudence citée).
50 Par conséquent, le premier grief du premier moyen doit être écarté comme étant non fondé.
51 Par le deuxième grief de son premier moyen, la requérante critique les points 124 à 127 de l’arrêt attaqué, par lesquels le Tribunal a rejeté son argumentation selon laquelle la Commission aurait omis de prendre en considération et de répondre aux éléments soumis afin de démontrer l’absence d’universalité du SSN.
52 En premier lieu, la requérante reproche à la Commission de ne pas avoir procédé à une reconstitution précise de la législation régissant le SSN, qu’elle lui aurait présentée et se limite à renvoyer à ses écritures devant le Tribunal, sans autre précision.
53 Or, ne répond pas aux exigences découlant de l’article 256 TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure, le pourvoi qui, sans même comporter une argumentation visant spécifiquement à identifier l’erreur de droit dont serait entaché l’arrêt attaqué, se limite à reproduire les moyens et les arguments qui ont déjà été présentés devant le Tribunal. En effet, un tel pourvoi constitue en réalité une demande visant à obtenir un simple réexamen de la requête présentée devant le Tribunal, ce qui échappe à la compétence de la Cour (arrêt du 10 septembre 2020, Hamas/Conseil, C‑386/19 P, non publié, EU:C:2020:691, point 54 et jurisprudence citée).
54 En deuxième lieu, par son exposé de l’analyse du SSN, en particulier des conséquences issues de la réforme de 1999 et du système de rémunération des services de santé, la requérante conteste non pas la motivation de l’arrêt attaqué, mais l’appréciation de ce système effectuée par la Commission dans la décision litigieuse. Il en va de même concernant son argumentation relative à l’incidence du principe de libre choix du patient sur les principes d’universalité et de solidarité régissant le SSN et, plus largement, sur la nature des activités de soins exercées dans le cadre du SSN. Partant, la requérante n’invoquant pas une erreur de droit du Tribunal, cette argumentation est irrecevable pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent.
55 En troisième lieu, la requérante fait valoir que le Tribunal n’a pas pleinement évalué ses arguments ni analysé le système de fourniture des services de soins de santé en Italie et la question de savoir s’il correspond au régime des SIEG visé à l’article 106 TFUE. Ces arguments se confondant avec ceux soulevés au soutien du cinquième grief du premier moyen, ils seront examinés avec ceux-ci.
56 En quatrième lieu, s’agissant des arguments de la requérante soulevés dans son mémoire en réplique, premièrement, dans la mesure où elle soutient avoir invoqué le caractère contradictoire de l’arrêt attaqué, en soulignant que la question ne devait pas être envisagée au regard de la gratuité de la prestation, elle vise, en réalité, à contester non pas le contrôle du respect de l’obligation de la motivation par cette institution dans cette décision, qui a été effectué par le Tribunal dans l’arrêt attaqué, mais le bien-fondé de l’appréciation par la Commission dans la décision litigieuse. Cet argument doit dès lors être écarté comme étant irrecevable, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 53 du présent arrêt.
57 Deuxièmement, l’argumentation par laquelle la requérante reproche au Tribunal d’avoir affirmé, sans motivation, que, en Italie, les services de soins de santé sont fournis sur la base du principe de solidarité, avant d’affirmer que le SSN présente des éléments de nature économique, ne vise aucun point de l’arrêt attaqué. Cet argument est dès lors irrecevable en ce qu’il ne répond pas aux exigences découlant de l’article 256 TFUE et de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne ainsi que de l’article 168, paragraphe 1, sous d), et de l’article 169, paragraphe 2, du règlement de procédure (voir, en ce sens, arrêt du 2 février 2023, Espagne e.a./Commission, C‑649/20 P, C‑658/20 P et C‑662/20 P, EU:C:2023:60, point 115 et jurisprudence citée).
58 Il en va de même, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, s’agissant de l’argument de la requérante relatif à l’application, à la présente affaire, par le Tribunal, de l’arrêt du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa (C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450).
59 Partant, le deuxième grief du premier moyen doit être rejeté comme étant irrecevable.
60 Par le troisième grief de son premier moyen, la requérante conteste les motifs exposés aux points 128 à 130 de l’arrêt attaqué, par lesquels le Tribunal a rejeté son argumentation selon laquelle la Commission avait omis de prendre en considération et de répondre aux éléments qu’elle avait soumis démontrant l’ampleur des ALPI.
61 Or, la requérante procède à un renvoi global à ses écritures devant le Tribunal et ne reproche pas au Tribunal d’avoir omis de constater un vice de motivation de la décision litigieuse, mais conteste le bien-fondé de l’appréciation de la Commission quant à l’existence d’une séparation comptable. Cette argumentation de la requérante doit dès lors être écartée comme étant irrecevable, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 53 du présent arrêt.
62 Par conséquent, le troisième grief du premier moyen doit être écarté comme étant irrecevable.
63 Par le quatrième grief de son premier moyen, la requérante conteste le point 133 de l’arrêt attaqué, au motif que le Tribunal aurait dû reprocher à la Commission l’absence de prise en compte d’un jugement rendu par la sezione fallimentare du Tribunale civile di Roma (section des affaires de faillite du tribunal civil de Rome) et du contentieux administratif concernant la rémunération de la requérante pour l’année 2015.
64 Aux points 131 à 135 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné l’allégation selon laquelle la Commission n’aurait pas fait référence dans la décision litigieuse au contentieux porté devant des juridictions italiennes.
65 D’une part, s’agissant du jugement mentionné par la requérante, le Tribunal a exposé au point 131 de l’arrêt attaqué, et non pas au point 133 de cet arrêt, comme celle-ci l’indique, les raisons pour lesquelles il ne pouvait pas être fait grief à la Commission de ne pas avoir rejeté l’argument de la requérante sur ce point. Il a ainsi relevé que ce jugement concernait les activités de certains établissements de soins d’une autorité religieuse, et non pas d’hôpitaux publics. Or, conformément à la jurisprudence citée au point 49 du présent arrêt et comme le Tribunal l’a rappelé, au point 133 de l’arrêt attaqué, la Commission n’est pas tenue d’exposer d’autres éléments que les faits et les considérations juridiques qu’elle considère d’une importance essentielle dans l’économie de la décision litigieuse.
66 D’autre part, concernant le contentieux administratif mentionné par la requérante, le Tribunal a, aux points 132 à 134 de l’arrêt attaqué, rappelé les limites de l’obligation de motivation à laquelle était soumise la Commission et a estimé que la requérante n’avait pas démontré, devant le Tribunal, la pertinence de la documentation relative au contentieux devant le Tribunale amministrativo regionale del Lazio (tribunal administratif régional du Latium, Italie) à propos du décret du commissaire ad acta de la Région du Latium relatif à la rémunération des établissements de soins privés et publics pour l’année 2015, mais s’était contentée de prétendre que cette documentation confirmait les mérites de ses critiques et le défaut de fondement des arguments du gouvernement italien. Or, la requérante reprend en substance les arguments qu’elle a invoqués devant le Tribunal et ne démontre pas, eu égard aux considérations de celui-ci, en quoi ces éléments auraient été d’une importance essentielle dans l’économie de la décision litigieuse.
67 Dans ces circonstances, il ne peut être considéré que le Tribunal a commis une erreur de droit en concluant à une absence de violation de l’obligation de motivation de la part de la Commission sur ces deux points.
68 Partant, le quatrième grief du premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
69 Par le cinquième grief de son premier moyen, la requérante critique les motifs exposés aux points 136 à 139 de l’arrêt attaqué et conteste l’appréciation du Tribunal selon laquelle la décision litigieuse était suffisamment motivée, les régimes prévus aux articles 106 et 107 TFUE se recoupant.
70 Aux points 136 à 138 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné les arguments de la requérante relatifs à un prétendu vice de motivation de la décision litigieuse concernant la prise en compte des principes posés dans l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415). Après avoir constaté que la Commission n’avait pas vérifié que les conditions découlant de cet arrêt étaient réunies dans la présente affaire, ni analysé celle-ci au regard de l’article 106 TFUE, il a estimé que cette institution n’était pas tenue de procéder à un tel examen, dès lors qu’elle avait conclu à l’absence d’aide d’État, à défaut d’activité économique.
71 Partant, le Tribunal n’a pas commis d’erreur de droit en considérant que la décision litigieuse était suffisamment motivée sur ce point.
72 Par ailleurs, s’agissant de la question de savoir si le Tribunal aurait dû juger que la Commission a à tort omis d’examiner les mesures en cause au regard de l’article 106 TFUE, il convient de relever que les arguments de la requérante se confondent avec ceux exposés dans le cadre du second moyen s’agissant du contenu spécifique du régime des SIEG et de l’article 106 TFUE. Ces arguments seront dès lors examinés dans le cadre de ce second moyen.
73 Par conséquent, le cinquième grief du premier moyen doit être rejeté comme étant non fondé.
74 Au vu de l’ensemble des considérations qui précèdent, le premier moyen doit être rejeté.
Sur le second moyen
Argumentation des parties
75 Par son second moyen, la requérante invoque, en substance, huit griefs.
76 Par le premier grief de son second moyen, la requérante conteste les motifs exposés au point 152 de l’arrêt attaqué. Outre le fait que ce point 152 se réfère à un arrêt dont elle ne pouvait avoir connaissance puisqu’il a été prononcé postérieurement à l’introduction de son recours, elle soutient que les motifs exposés à ce point sont erronés et contredits par les preuves et les documents qu’elle a produits depuis le début de la procédure administrative. D’une part, elle aurait constamment affirmé que la réforme du SSN avait conféré le statut d’entreprise, au sens du code civil italien, à tous les opérateurs, publics comme privés, fournissant des services de soins de santé. D’autre part, elle aurait démontré que, en 2003, la Région du Latium a réglementé l’accès aux activités de fourniture de soins de santé par les entreprises publiques et privées.
77 Par le deuxième grief de son second moyen, la requérante critique les motifs exposés aux points 153 à 155 de l’arrêt attaqué.
78 En premier lieu, elle soutient qu’est incorrect l’exposé de son argumentation au point 155 de l’arrêt attaqué dans lequel le Tribunal a relevé qu’elle ne remettait pas en cause la gratuité ou la quasi-gratuité de tous les soins de santé ni que le SSN est principalement financé par les cotisations des affiliés calculées selon leurs revenus respectifs. En effet, elle se serait référé au contenu du décret-loi no 229, du 19 juin 1999, dans lequel la fourniture de services de soins de santé n’est pas qualifiée d’activité sociale.
79 En second lieu, elle fait valoir que le fait que le patient paie seulement une partie des services de soins de santé ne peut pas constituer un élément permettant de qualifier ces derniers de services relevant du principe de solidarité, et non pas de SIEG. Par ailleurs, le principe de gratuité serait utilisé à mauvais escient, dans la mesure où une entreprise de soins de santé conventionnée, qu’elle soit publique ou privée, serait rémunérée sur la base d’un tarif et où le régime des SIEG prévoirait que le service concerné est financé par l’État, ce qui constituerait une condition préalable à l’application de l’article 106 TFUE.
80 Par le troisième grief de son second moyen, la requérante, en premier lieu, en visant les points 163 et 164 de l’arrêt attaqué, conteste la pertinence, aux fins de la présente affaire, de l’arrêt du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa (C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450). En outre, elle reproche au Tribunal de ne pas avoir motivé son appréciation, car l’existence d’un certain degré de concurrence impliquerait un « certain degré » de marché et la présence d’entreprises, dont l’importance économique serait dès lors suffisante pour justifier l’application du régime des SIEG prévu à l’article 106 TFUE. En second lieu, elle soutient que les considérations exposées au point 165 de l’arrêt attaqué sont insuffisantes pour établir que le SSN ne relève pas des SIEG.
81 Par le quatrième grief de son second moyen, la requérante conteste les motifs exposés aux points 166 à 169 de l’arrêt attaqué.
82 En premier lieu, elle dénonce une erreur, au point 166 de l’arrêt attaqué, eu égard à la législation italienne pertinente et, plus particulièrement, au principe du libre choix du patient. Les motifs exposés dans ce point 166 mettraient en évidence la contradiction dans l’arrêt attaqué, en ce sens que le principe du libre choix du patient se traduirait par la possibilité pour ce dernier de déterminer le lieu de son traitement, à l’intérieur ou à l’extérieur du territoire régional, que ce soit pour demander un traitement à des établissements publics et privés conventionnés ou pour demander un traitement contre paiement auprès d’établissements publics et privés, sans aucune contrainte.
83 En deuxième lieu, elle critique le caractère confus des motifs exposés aux points 167 et 168 de l’arrêt attaqué, en ce qu’ils ne permettraient pas de considérer que le système des soins de santé en Italie ne puisse pas être qualifié d’économique. Par ailleurs l’interprétation des arrêts du Consiglio di Stato (Conseil d’État, Italie) retenue par le Tribunal serait dépourvue de fondement, étant donné que, lors de la procédure administrative, la Commission n’avait pas émis de contestation à cet égard.
84 En troisième lieu, elle critique le motif exposé au point 169 de l’arrêt attaqué, par lequel le Tribunal se serait rallié aux arguments de la Commission pour nier l’applicabilité de l’article 106 TFUE dans la présente affaire, sans prendre en compte la législation applicable au système des soins de santé en Italie.
85 Par le cinquième grief de son second moyen, après avoir cité les motifs exposés aux points 170 à 173 de l’arrêt attaqué, la requérante qualifie d’ambiguë l’appréciation du Tribunal, au point 173 de cet arrêt, selon laquelle le principe de solidarité applicable au SSN n’exclut pas un certain degré de concurrence.
86 Par le sixième grief de son second moyen, la requérante, en premier lieu, vise les motifs exposés aux points 174 à 176 de l’arrêt attaqué, en soulignant que le Tribunal a résumé sa position sans mentionner les données juridiques pertinentes. En second lieu, elle fait, tout d’abord, valoir que les points 178 à 181 de l’arrêt attaqué sont insuffisamment motivés. Ensuite, elle affirme avoir contesté le fait que les services de soins de santé fournis au titre des ALPI ne relèvent pas du SSN et renvoie à cet égard à l’ensemble des objections exprimées lors de la phase administrative de la procédure ainsi qu’en première instance. Enfin, en ce qui concerne la séparation comptable dans les états financiers des entreprises publiques, elle indique renvoyer à ce qu’elle a précédemment avancé et, en tout état de cause, invoquer l’absence de ventilation détaillée des coûts et des recettes.
87 Par le septième grief de son second moyen, la requérante conteste la pertinence du point 44 de l’arrêt du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania (C‑74/16, EU:C:2017:496), mentionné au point 182 de l’arrêt attaqué, au motif que, à la différence des circonstances à l’origine de l’affaire ayant donné lieu à cet arrêt, dans la présente affaire, les services en cause seraient identiques et fournis au sein de la même structure. Ensuite, elle qualifie de « hors contexte » les considérations énoncées au point 183 de l’arrêt attaqué. Enfin, elle estime que, au point 184 de cet arrêt, le Tribunal n’a pas indiqué les raisons pour lesquelles le système de soins de santé en Italie peut être considéré comme relevant du principe de solidarité et échapper ainsi au régime des SIEG et à l’application de l’article 106 TFUE.
88 Par le huitième grief de son second moyen, la requérante critique les points 185 à 189 de l’arrêt attaqué. En premier lieu, le Tribunal se serait contenté de constater, en substance, que la Commission n’avait pas commis d’erreur en considérant que l’article 106 TFUE ne s’appliquait pas à la fourniture de services de soins de santé en Italie, au motif que ces services ne sont pas de nature économique. En second lieu, la requérante soutient que, bien que son exposé de l’évolution de la législation italienne à la suite des réformes de 1992 et de 1999 n’ait pas été contesté par la Commission, le Tribunal n’en aurait pas fait mention dans l’arrêt attaqué. Elle réitère que, compte tenu de la législation relative au SSN et au principe du libre choix du patient, le SSN doit relever du régime des SIEG, régi par l’article 106 TFUE, tel qu’interprété par la Cour depuis l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415).
89 La Commission conteste l’argumentation de la requérante. Elle conclut que le second moyen est, en partie, irrecevable en ce que la requérante se limite à des références générales aux documents qu’elle a produits au cours de la procédure administrative et en première instance, en ce qu’elle conteste l’appréciation des faits par le Tribunal, sans invoquer de dénaturation, et en ce qu’elle invoque un argument nouveau. Ce second moyen serait, en tout état de cause, manifestement non fondé.
90 Dans son mémoire en réplique, la requérante conteste les arguments de la Commission par lesquels celle-ci a invoqué l’irrecevabilité de certains de ses griefs. En particulier, en premier lieu, elle soutient que le premier grief de son second moyen est recevable. Afin de respecter la limite de longueur de la requête en pourvoi, elle aurait été contrainte de renvoyer à la lecture de ses mémoires en première instance.
91 En deuxième lieu, s’agissant du deuxième grief de son second moyen, la requérante conteste avoir avancé un argument nouveau. Tant lors de la phase administrative qu’en première instance, elle aurait souligné que les services de soins de santé fournis par les établissements de santé publics ou privés en Italie sont rémunérés selon un barème spécifique, qui accorderait un bénéfice commercial à ces établissements.
92 En troisième lieu, s’agissant du huitième grief de son second moyen, la requérante soutient avoir constamment fait valoir que la nature économique du SSN aurait dû être appréciée à la lumière de l’article 106 TFUE et non pas à celle de l’article 107 TFUE, la notion de « caractère économique » ne devrait pas être appréciée de manière identique dans le cadre de l’application de chacune de ces dispositions.
Appréciation de la Cour
93 Par le premier grief de son second moyen, la requérante vise les motifs énoncés au point 152 de l’arrêt attaqué.
94 En premier lieu, il convient de relever que la Commission a indiqué, sans être contestée par la requérante, que, lors de l’audience devant le Tribunal, la requérante a été invitée à présenter ses observations sur l’arrêt du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa (C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450). L’argument de la requérante à cet égard doit, dès lors, être écarté comme étant inopérant.
95 En second lieu, s’agissant de l’argumentation par laquelle la requérante soutient avoir invoqué le statut d’entreprise conféré aux opérateurs fournissant des soins de santé ainsi que la réglementation, en 2003, par la Région du Latium, de l’accès aux activités de fourniture de soins de santé par les entreprises publiques et privées, il y a lieu de constater que la requérante se limite à reproduire les arguments présentés devant le Tribunal, sans démontrer en quoi ces arguments entacheraient d’erreur la constatation opérée par le Tribunal audit point 152 de l’arrêt attaqué. Cette argumentation doit dès lors être écartée comme étant irrecevable, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 53 du présent arrêt.
96 Partant, le premier grief du second moyen doit être rejeté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, inopérant.
97 Par le deuxième grief de son second moyen, la requérante critique les motifs exposés aux points 153 à 155 de l’arrêt attaqué.
98 En premier lieu, la requérante soutient que, contrairement à ce qui ressort du point 155 de l’arrêt attaqué, elle s’était référée au contenu du décret-loi no 229, du 19 juin 1999, dans lequel la fourniture de services de soins de santé n’est pas qualifiée d’activité sociale. Or, force est de constater que, dans ce point 155, le Tribunal a seulement relevé que la requérante ne remettait en cause ni la gratuité ou la quasi-gratuité des soins de santé ni que le SSN est principalement financé par les cotisations des affiliés calculées selon leurs revenus respectifs. Partant, l’argumentation de la requérante repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué et doit être écartée comme étant non fondée.
99 En second lieu, il doit être relevé que l’argumentation de la requérante relative à l’importance qu’il conviendrait d’accorder à la gratuité ou à la quasi-gratuité des soins afin de qualifier la fourniture de services de soins de santé de service de solidarité n’a pas été développée en première instance. En effet, l’argumentation développée par la requérante devant le Tribunal portait sur la rémunération des prestations en fonction d’un barème et, ainsi que le soutient la Commission, sur le fait que le SSN est financé par les autorités publiques, sur la base d’un système prévoyant des tarifs prédéfinis pour les différentes prestations de soins de santé fournies dans le cadre du SSN.
100 Or, selon une jurisprudence constante de la Cour, permettre à une partie de soulever pour la première fois devant la Cour un moyen qu’elle n’a pas soulevé devant le Tribunal reviendrait à lui permettre de saisir la Cour, dont la compétence en matière de pourvoi est limitée, d’un litige plus étendu que celui dont a eu à connaître le Tribunal. Dans le cadre d’un pourvoi, la compétence de la Cour est en effet limitée à l’appréciation de la solution légale qui a été donnée aux moyens débattus devant le Tribunal (arrêt du 4 mars 2020, Marine Harvest/Commission, C‑10/18 P, EU:C:2020:149, point 126 et jurisprudence citée).
101 L’argumentation de la requérante doit, dès lors, être rejetée comme étant irrecevable.
102 Par conséquent, le deuxième grief du second moyen doit être écarté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.
103 Par le troisième grief de son second moyen, dans la mesure où la requérante reproche au Tribunal de ne pas avoir motivé son appréciation, au point 164 de l’arrêt attaqué, il convient de relever que le Tribunal a exposé des éléments qui ressortent de l’arrêt de la Cour du 11 juin 2020, Commission et République slovaque/Dôvera zdravotná poist’ovňa (C‑262/18 P et C‑271/18 P, EU:C:2020:450), en particulier des points 32 et 34 de cet arrêt. Le Tribunal ayant ainsi motivé son appréciation à suffisance de droit, l’argument de la requérante est non fondé.
104 En outre, s’agissant de l’applicabilité, en l’espèce, des principes dudit arrêt, le Tribunal a relevé que la Cour a jugé que l’introduction, dans un régime qui met en œuvre le principe de solidarité, dont il a rappelé les caractéristiques au point 154 de l’arrêt attaqué, d’un élément concurrentiel destiné à inciter les opérateurs à exercer leur activité selon les principes d’une bonne gestion ne modifiait pas la nature de ce régime. Or, la requérante ne conteste pas que le SSN est un régime qui répond à ces caractéristiques du principe de solidarité, à savoir, notamment, le caractère obligatoire de l’affiliation pour les assurés, des cotisations fixées par la loi en proportion des revenus des assurés et la règle en vertu de laquelle les prestations obligatoires fixées par la loi sont identiques pour tous les assurés, indépendamment du montant des cotisations versées par chacun d’eux. L’argument de la requérante n’est, dès lors, pas fondé.
105 De plus, l’argument de la requérante tiré de ce que les motifs énoncés au point 165 de l’arrêt attaqué seraient insuffisants pour établir que le SSN ne relève pas des SIEG revient, en substance, à remettre en cause l’appréciation des faits par le Tribunal, sans invoquer une dénaturation.
106 Or, il ressort d’une jurisprudence constante que le Tribunal est seul compétent pour constater les faits, sauf dans le cas où l’inexactitude matérielle de ses constatations résulterait des pièces du dossier qui lui ont été soumises, et pour apprécier les éléments de preuve retenus. La constatation de ces faits et l’appréciation de ces éléments ne constituent donc pas, sous réserve du cas de leur dénaturation, une question de droit soumise, comme telle, au contrôle de la Cour (arrêt du 20 septembre 2018, Agria Polska e.a./Commission, C‑373/17 P, EU:C:2018:756, point 32 et jurisprudence citée).
107 En outre, lorsqu’un requérant allègue une dénaturation des faits ou des éléments de preuve par le Tribunal, il doit, en application de l’article 256 TFUE, de l’article 58, premier alinéa, du statut de la Cour de justice de l’Union européenne et de l’article 168, paragraphe 1, sous d), du règlement de procédure, indiquer de façon précise les éléments qui auraient été dénaturés par celui-ci et démontrer les erreurs d’analyse qui, dans son appréciation, auraient conduit le Tribunal à cette dénaturation. Par ailleurs, il est de jurisprudence constante qu’une dénaturation doit ressortir de façon manifeste des pièces du dossier, sans qu’il soit nécessaire de procéder à une nouvelle appréciation des faits et des preuves (arrêt du 28 avril 2022, Yieh United Steel/Commission, C‑79/20 P, EU:C:2022:305, point 53 et jurisprudence citée).
108 La requérante n’ayant pas allégué, ni a fortiori démontré, une dénaturation des faits par le Tribunal, son argumentation est irrecevable.
109 Par conséquent, le troisième grief du second moyen doit être rejeté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.
110 Par le quatrième grief de son second moyen, la requérante conteste, en premier lieu, les motifs exposés au point 166 de l’arrêt attaqué en ce qu’ils ne correspondraient pas aux dispositions de la législation italienne. Il doit être relevé que, par cette argumentation, dont par ailleurs il ne ressort pas de manière claire en quoi consisterait la contradiction alléguée, la requérante conteste l’appréciation des faits par le Tribunal, sans pour autant invoquer, ni a fortiori démontrer, une dénaturation. Cette argumentation est, dès lors, irrecevable, conformément à la jurisprudence rappelée au point 106 du présent arrêt.
111 En deuxième lieu, s’agissant de l’argumentation de la requérante relative aux arrêts du Consiglio di Stato (Conseil d’État), il convient de relever que, aux points 167 à 169 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a exposé les appréciations figurant dans la décision litigieuse concernant la jurisprudence nationale, en précisant que la Commission avait rejeté l’argumentation de la requérante à cet égard, et a considéré ces appréciations comme étant exemptes d’erreurs. Partant, l’argumentation de la requérante ne saurait prospérer.
112 En troisième lieu, quant aux autres arguments par lesquels la requérante conteste des appréciations factuelles opérées par la Commission, que le Tribunal a confirmées, aux points 167 à 169 de l’arrêt attaqué, il suffit de relever que la requérante n’invoque, ni a fortiori démontre, aucune dénaturation. Ces arguments sont dès lors irrecevables, conformément à la jurisprudence rappelée au point 106 du présent arrêt.
113 Par conséquent, le quatrième grief du second moyen doit être écarté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.
114 Par le cinquième grief de son second moyen, la requérante se borne à qualifier d’ambiguë l’appréciation du Tribunal au point 173 de l’arrêt attaqué, sans avancer aucune argumentation visant à identifier l’erreur de droit qui découlerait de cette prétendue ambiguïté. Ce grief est, dès lors, irrecevable, conformément à la jurisprudence rappelée au point 36 du présent arrêt.
115 Par le sixième grief de son second moyen, la requérante, en premier lieu, critique les motifs exposés aux points 174 et 176 de l’arrêt attaqué en raison de leur caractère imprécis, sans invoquer ni dénaturation ni erreur de droit. Dès lors, ce premier argument ne peut qu’être rejeté comme étant irrecevable, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 36 du présent arrêt.
116 En second lieu, concernant les points 178 à 181 de l’arrêt attaqué, tout d’abord, est inopérante l’argumentation par laquelle la requérante prétend que, contrairement à ce que le Tribunal a indiqué au point 178 de cet arrêt, elle a contesté le fait que les ALPI ne relevaient pas du SSN. En effet, au point 179 dudit arrêt, le Tribunal a précisé qu’il ressortait également du cadre juridique italien que les services de soins fournis au titre des ALPI ne relevaient pas du SSN.
117 Ensuite, s’agissant de la question de la séparation comptable, la requérante invoque non pas, ainsi qu’elle le soutient, un défaut de motivation, mais conteste l’appréciation des faits par le Tribunal, sans invoquer de dénaturation. Son argumentation est dès lors irrecevable, conformément à la jurisprudence rappelée au point 106 du présent arrêt. En outre, dans la mesure où la requérante affirme, dans son mémoire en réplique, en substance, que « la Commission n’a produit aucun document approprié », il y a lieu de relever que le Tribunal a, aux points 179 et 180 de l’arrêt attaqué, renvoyé aux considérants 46, 79 et 80 de la décision litigieuse, dans lesquels la Commission a fondé son appréciation sur les informations fournies par les autorités italiennes sur le cadre réglementaire applicable. Cette argumentation de la requérante doit, dès lors, être écartée comme étant non fondée.
118 Enfin, la requérante faisant valoir que les motifs exposés aux points 178 à 181 de l’arrêt attaqué sont insuffisamment motivés, il suffit de relever que le Tribunal a clairement exposé les raisons pour lesquels il a estimé que les services de soins de santé fournis au titre des ALPI ne relevaient pas du SSN. Cet argument doit, dès lors, être rejeté comme étant non fondé.
119 Par conséquent, le sixième grief du second moyen doit être écarté comme étant, en partie, irrecevable, en partie, inopérant et, en partie, non fondé.
120 Par le septième grief de son second moyen, la requérante vise les motifs exposés aux points 182 à 184 de l’arrêt attaqué.
121 En premier lieu, concernant le point 182 de l’arrêt attaqué, la requérante estime que la citation du point 44 de l’arrêt du 27 juin 2017, Congregación de Escuelas Pías Provincia Betania (C‑74/16, EU:C:2017:496), est inappropriée, sans pour autant indiquer l’erreur de droit que le Tribunal aurait commise en rappelant que, selon cette jurisprudence, il convient d’examiner chacune des activités aux fins de la qualification d’« activité économique ». De même, s’agissant du point 183 de l’arrêt attaqué, la requérante se contente de faire valoir que les considérations y figurant ne sont pas pertinentes, sans pour autant invoquer une erreur de droit que le Tribunal aurait commise. Ces arguments sont, dès lors, irrecevables pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 36 du présent arrêt.
122 En deuxième lieu, concernant le point 184 de l’arrêt attaqué, la requérante soutient que le Tribunal n’a pas indiqué sur quelle base le SSN peut être considéré comme relevant du principe de solidarité et échapper au régime des SIEG et à l’application de l’article 106 TFUE. Il suffit de constater que cet argument repose sur une lecture erronée de l’arrêt attaqué. En effet, le point 184 de l’arrêt attaqué est un point conclusif du raisonnement exposé aux points 152 à 183 de cet arrêt. De surcroît, il y a lieu de rappeler que, par le premier moyen de son pourvoi, la requérante n’a pas été en mesure de démontrer une violation de l’obligation de motivation par la Commission à cet égard que le Tribunal aurait omis de relever. Cet argument doit, dès lors, être écarté comme étant non fondé.
123 Par conséquent, le septième grief du second moyen doit être rejeté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.
124 Par le huitième grief de son second moyen, la requérante vise les points 185 à 189 de l’arrêt attaqué.
125 En premier lieu, elle reproche au Tribunal de s’être contenté, en substance, de constater que la Commission avait considéré à juste titre que l’article 106 TFUE ne s’appliquait pas à la fourniture de services de soins de santé en Italie, ces services n’étant pas de nature économique. Il doit cependant être relevé que, aux points 144 à 184 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a examiné la question de la nature économique de la fourniture des services de soins de santé dans le cadre du SSN. Il a considéré que cette fourniture ne revêtait pas une telle nature et que les hôpitaux publics n’étaient pas des entreprises. Aux points 188 et 189 dudit arrêt, il a tiré les conséquences de ces éléments au regard de l’article 107 TFUE ainsi que de l’article 106 TFUE. Dès lors, le Tribunal a suffisamment motivé son appréciation et cet argument doit être écarté comme étant non fondé.
126 En second lieu, dans la mesure où la requérante fait valoir que le Tribunal n’a pas fait mention de l’évolution de la législation italienne à la suite des réformes de 1992 et de 1999, qu’elle aurait exposée en première instance, il convient de relever que, aux points 12 à 23 de l’arrêt attaqué, le Tribunal a résumé la plainte de la requérante, en faisant notamment mention des dispositions législatives invoquées par cette dernière et examinées par la Commission, notamment en renvoyant aux points pertinents de la décision litigieuse. Partant, cet argument doit être écarté comme étant non fondé.
127 En outre, dans la mesure où la requérante invoque la législation italienne concernant le SSN et le principe du libre choix du patient, pour en déduire que le SSN devrait relever du régime des SIEG et être régi par l’article 106 TFUE, tel qu’interprété par la Cour depuis l’arrêt du 24 juillet 2003, Altmark (C‑280/00, EU:C:2003:415), elle réitère des arguments déjà exposés en première instance et conteste l’appréciation des faits par le Tribunal, sans invoquer de dénaturation. Cette argumentation est, dès lors, irrecevable, conformément à la jurisprudence rappelée aux points 53 et 106 du présent arrêt.
128 Par ailleurs, dans son mémoire en réplique, la requérante soutient avoir constamment fait valoir que la nature économique des services de soins de santé aurait dû être appréciée non pas à la lumière de l’article 107 TFUE, mais à la lumière de l’article 106 TFUE, la notion de « caractère économique » ne devrait pas être appréciée de manière identique dans le cadre de l’application de chacune de ces dispositions. Or, il doit être relevé que cette argumentation n’a pas été développée en première instance et qu’elle est, dès lors, irrecevable, conformément à la jurisprudence rappelée au point 100 du présent arrêt.
129 Par conséquent, le huitième grief du second moyen doit être écarté comme étant, en partie, irrecevable et, en partie, non fondé.
130 Il en résulte que le second moyen doit être rejeté.
131 Eu égard à l’ensemble des considérations qui précèdent, aucun des moyens du présent pourvoi n’ayant été accueilli, il y a lieu de rejeter celui-ci dans son intégralité.
Sur les dépens
132 En vertu de l’article 184, paragraphe 2, du règlement de procédure, lorsque le pourvoi n’est pas fondé, la Cour statue sur les dépens.
133 Aux termes de l’article 138, paragraphe 1, de ce règlement, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, dudit règlement, toute partie qui succombe est condamnée aux dépens, s’il est conclu en ce sens. La Commission ayant conclu à la condamnation de Casa Regina Apostolorum della Pia Società delle Figlie di San Paolo et cette dernière ayant succombé en ses moyens, il y a lieu de la condamner à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission.
134 Conformément à l’article 140, paragraphe 1, du règlement de procédure, applicable à la procédure de pourvoi en vertu de l’article 184, paragraphe 1, de ce règlement, les États membres qui sont intervenus au litige supportent leurs propres dépens. Par conséquent, la République de Finlande, partie intervenante dans le cadre du présent pourvoi, supportera ses propres dépens.
Par ces motifs, la Cour (neuvième chambre) déclare et arrête :
1) Le pourvoi est rejeté.
2) Casa Regina Apostolorum della Pia Società delle Figlie di San Paolo est condamnée à supporter, outre ses propres dépens, ceux exposés par la Commission européenne.
3) La République de Finlande supporte ses propres dépens.