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Décisions

CA Douai, 8e ch. sect. 2, 2 février 2023, n° 21/03094

DOUAI

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Défendeur :

Edf Service Client (SA), Sip

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Dellelis

Conseillers :

Mme Convain, Mme Thébaud

JCP Béthune, du 10 mai 2021, n° 11-20-78…

10 mai 2021

Vu le jugement réputé contradictoire prononcé par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Béthune, statuant en matière de surendettement des particuliers, le 10 mai 2021 ;

Vu l'appel interjeté le 26 mai 2021 ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 28 septembre 2022 ;

Vu la mention au dossier en date du 17 novembre 2022 ;

Vu le procès-verbal de l'audience du 14 décembre 2022 ;

***

Suivant déclaration déposée le 19 novembre 2019, Mme [U] [X] veuve [Y] a saisi la commission de surendettement du Nord d'une demande de bénéfice des mesures de traitement des situations de surendettement des particuliers, ne parvenant pas à s'acquitter de ses dettes en raison de l'absence de ressources mensuelles suffisantes et des dépenses nécessaires pour satisfaire aux besoins de la vie courante

Le 8 janvier 2020, la commission de surendettement des particuliers du Nord, après avoir constaté la situation de surendettement de Mme [X], a déclaré sa demande recevable.

Le 11 juin 2020, après examen de la situation de Mme [X] dont les dettes ont été évaluées à 29 277,27 euros, les ressources mensuelles à 1859 euros et les charges mensuelles à 1373 euros, la commission qui a déterminé un minimum légal à laisser à la disposition de la débitrice de 1355,86 euros, une capacité de remboursement de 486 euros et un maximum légal de remboursement de 503,14 euros, a retenu une mensualité de remboursement de 486 euros et a imposé le rééchelonnement de tout ou partie des créances sur une durée maximum de 63 mois, au taux de 0 %.

Ces mesures imposées ont été contestées par Mme [X], considérant que les mensualités retenues par la commission étaient trop élevées. Elle a expliqué avoir déménagé et faire face à des charges plus importantes que celles retenues par la commission.

À l'audience du 11 janvier 2021, Mme [X] qui a comparu en personne, a réitéré les termes de sa contestation. Elle a contesté le montant des ressources retenues par la commission à hauteur de 1859 euros et a soutenu percevoir 966,05 euros de pension de réversion et 580 euros de pension de retraite. Elle a indiqué exposer un loyer de 420 euros, 83 euros de frais de mutuelle et 88 euros d'assurance habitation. Enfin, elle a contesté le montant de la créance de M. [R] [L].

M. [R] [L], dûment représenté par son épouse Mme [I] [L] munie d'un pouvoir spécial, a confirmé le montant de sa créance à la somme de 3704,10 euros.

Mme [V] [S] qui a comparu en personne, a confirmé le montant de sa créance à 650 euros.

Par décision du 16 février 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Béthune a ordonné la réouverture des débats à l'audience du 15 mars 2021 afin de permettre à M. [R] [L] de justifier du montant de sa créance.

À l'audience du 15 mars 2021, M. [R] [L], créancier, dûment représenté par son épouse, Mme [I] [L], a confirmé le montant de sa créance.

Mme [V] [S], créancière, qui a comparu en personne, a confirmé le montant de sa créance.

Par jugement en date du 10 mai 2021, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Béthune, statuant en matière de surendettement des particuliers, a notamment dit Mme [X] recevable et mal fondée en son recours à l'encontre des mesures imposées par la commission de traitement des situations de surendettement du Nord dans sa séance du 11 juin 2020, a adopté les mesures élaborées par la commission de surendettement des particuliers du Nord dans sa séance du 11 juin 2020 tendant à l'apurement du passif de Mme [X] dans un délai de 63 mois au moyen de mensualités de 486 euros, et au taux maximum de 0 %, a dit que lesdites mesures seront annexées au jugement, a dit en conséquence que les dettes seront apurées selon le plan annexé au jugement et a laissé les dépens à la charge du Trésor public.

Mme [X] a relevé appel le 26 mai 2021 de ce jugement qui lui a été notifié le 11 mai 2021.

À l'audience de la cour du 28 septembre 2022, Mme [X] qui a formé appel pour contester la créance de M. [L] et le montant de la mensualité de remboursement, a été autorisée à comparaître par écrit.

M. [R] [L] qui a été autorisé à comparaître par écrit, a adressé ses pièces à la cour.

Les autres intimés, régulièrement convoqués par le greffe par lettre recommandée avec avis de réception, n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.

Par mention au dossier en date du 17 novembre 2022, la réouverture des débats a été ordonnée à l'audience du 14 décembre 2022 afin que Mme [U] [X] justifie de ses ressources et charges actuelles et produisent les trois derniers relevés de tous ses comptes bancaires et tous justificatifs permettant d'établir le montant de la part des dépenses de santé non remboursées par la Sécurité sociale et restant à sa charge.

À l'audience du 14 décembre 2022, Mme [X], autorisée à comparaître par écrit, n'a pas transmis de pièce à la cour.

Les intimés n'ont pas comparu ni personne pour les représenter.

Sur ce,

Attendu qu'aux termes de l'article L 733-10 du code de la consommation, « une partie peut contester devant le juge des contentieux de la protection, dans un délai fixé par décret, les mesures imposées par la commission en application des articles L 733-1, L 733-4 ou L 733-7. » ;

Qu'aux termes de l'article L 733-13 du code de la consommation, "le juge saisi de la contestation prévue à l'article L 733-10 prend tout ou partie des mesures définies aux articles L 733-1, L 733-4 et L 733-7. Dans tous les cas, la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage est déterminée dans les conditions prévues à l'article L 731-2. Elle est mentionnée dans la décision. Lorsqu'il statue en application de l'article L 733-10, le juge peut en outre prononcer un redressement personnel sans liquidation judiciaire." ;

Attendu qu'aux termes de l'article L 731-1 du code de la consommation, 'le montant des remboursements est fixé, dans des conditions précisées par décret en conseil d'État, par référence à la quotité saisissable du salaire telle qu'elle résulte des articles L 3252-2 et L 3252-3 du code du travail, de manière à ce que la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage lui soit réservée par priorité.' ;

Qu'aux termes de l'article L 731-2 du code de la consommation, 'la part des ressources nécessaires aux dépenses courantes du ménage ne peut être inférieure, pour le ménage en cause, au montant forfaitaire mentionné à l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles. Elle intègre le montant des dépenses de logement, d'électricité, de gaz, de chauffage, d'eau, de nourriture et de scolarité, de garde et de déplacements professionnels ainsi que les frais de santé.' ;

Que selon l'article R 731-1 du code de la consommation, 'pour l'application des dispositions des articles L 732-1, L 733-1 et L 733-4, la part des ressources mensuelles du débiteur à affecter à l'apurement de ses dettes est calculée, dans les conditions prévues aux articles L 731-1, L 731-2 et L 731-3, par référence au barème prévu à l'article R 3252-2 du code du travail. Toutefois, cette somme ne peut excéder la différence entre le montant des ressources mensuelles réelles de l'intéressé et le montant forfaitaire du revenu de solidarité active mentionné au 2° de l'article L 262-2 du code de l'action sociale et des familles applicable au foyer du débiteur.' ;

Qu'aux termes de l'article R 731-2 du code de la consommation, « la part de ressources réservée par priorité au débiteur est déterminée au regard de l'ensemble des dépenses courantes du ménage, qui intègre les dépenses mentionnées à l'article L 731-2 » ;

Que le montant des remboursements stipulés dans le plan ne doit pas excéder la part des ressources du débiteur indispensable aux dépenses courantes du ménage ; que le juge apprécie la situation du débiteur au regard des éléments dont il dispose au jour où il statue ;

Attendu qu'en l'espèce, le premier juge a évalué les ressources mensuelles de Mme [X] à la somme de 1872 euros au titre de ses pensions de retraite ; que ce montant sera retenu, Mme [X] ne produisant aucune pièce relative à ses ressources actuelles ;

Que les revenus mensuels de la débitrice s'élevant en moyenne à 1872 euros, la part saisissable déterminée par les articles L. 3252-2 et L. 3252-3 du code du travail s'établit à 487,80 euros par mois ;

Que le montant du revenu de solidarité active pour une personne s'élève à la somme mensuelle de 598,54 euros ;

Que le montant des dépenses courantes de la débitrice doit être évalué, au vu des éléments du dossier, à la somme mensuelle moyenne de 1469,54 euros ;

Que compte tenu de ces éléments, il convient de fixer à la somme mensuelle de 402,46 euros la capacité de remboursement de Mme [X], le montant de cette contribution mensuelle à l'apurement de son passif laissant à sa disposition une somme de 1469,54 euros qui est supérieure au revenu de solidarité active dont elle pourrait disposer (598,54 euros), n'excédant pas la différence entre ses ressources mensuelles et ce revenu de solidarité active, soit 1273,46 euros (1872 € - 598,54 € = 1273,46 €) ni le montant de la quotité saisissable de ses ressources (487,80 euros), et lui permettant de faire face aux dépenses de la vie courante (1469,54 euros) ;

***

Attendu que selon l'article L 733-12 du code de la consommation, le juge saisi de la contestation des mesures imposées par la commission peut vérifier, même d'office, la validité des créances et des titres qui les constatent ainsi que le montant des sommes réclamées ;

Que par ailleurs, aux termes de l'article 1353 du Code civil, « celui qui réclame l' exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré, doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation » ;

Attendu qu'en l'espèce, Mme [X] ne produit aucune pièce permettant de remettre en cause le montant de la créance de M. [R] [L] fixé par le premier juge à la somme de 3704,10 euros au vu notamment de l'historique de compte arrêté au 20 septembre 2019 et des actes d'huissier de justice nécessaires à la procédure de constat d'abandon des lieux loués et de reprise des lieux, frais d'actes qui en application de l'article L 111-8 du code des procédures civiles d' exécution , sont à la charge du débiteur ; que M. [R] [L] justifiant de la validité et du montant de sa créance, c'est à juste titre que le premier juge a retenu la créance de M. [R] [L] pour un montant de 3704,10 euros ;

Que dès lors, compte tenu du montant non contesté des autres créances retenues par le premier juge, le passif de Mme [X] s'établit à la somme de 29 277,27 euros retenue par le premier juge, étant précisé qu'en tout état de cause, les paiements effectués par Mme [X] en cours de procédure qui n'auraient pas été pris en compte, s'imputeront sur les montants des créances concernées ;

*

Attendu qu'en vertu des articles L 732-3 et L 733-3 du code de la consommation, la durée totale du plan, y compris lorsqu'il fait l'objet d'une révision ou d'un renouvellement et/ou lorsqu'il met en oeuvre les mesures mentionnées à l'article L.733-1 du code de la consommation, ne peut excéder sept années ;

Attendu que la capacité mensuelle de remboursement de Mme [X] (402,46 euros) lui permet d'apurer son passif (29 277,27 euros) sur une durée de 73 mois ;

Attendu qu'en vertu de l'article L 711-6 du code de la consommation, dans le cadre du traitement des situations de surendettement des particuliers, les créances des bailleurs sont réglées prioritairement aux créances des établissements de crédit et des sociétés de financement et aux crédits à la consommation ; que cet article ne fait pas obstacle à l'application de cette priorité de paiement de la créance du bailleur au détriment d'autres créanciers ;

Attendu que dès lors, en considération de l'ensemble de ces éléments, le paiement des dettes de la débitrice sera rééchelonné en 73 mensualités, selon l'échéancier figurant dans le dispositif du présent arrêt (étant précisé que les paiements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s'imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces paiements) ;

Attendu qu'afin de favoriser le redressement de sa situation financière de la débitrice, le taux des intérêts des créances sera réduit à 0 % pendant la durée du plan d'apurement du passif ;

Attendu que le jugement entrepris sera donc infirmé du chef des modalités de remboursement des dettes ;

Par ces motifs,

La cour statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement entrepris sauf sur la recevabilité et du chef des dépens ;

Statuant à nouveau,

Dit que Mme [U] [X] veuve [Y] devra rembourser ses dettes selon les modalités fixées dans l'échéancier suivant :

Créanciers

Solde des créances

Du 1er au 10ème mois inclus : 10 mensualités

Du 11ème au 20ème mois inclus : 10 mensualités

Du 21ème au 73ème mois inclus : 53 mensualités

[L] [R]

ancien lgt : loyers + frais d'huissier

3 704,10 €

370,41 €

0,00 €

0,00 €

SIP [Localité 18]

IR17 + TH18 + TH18

1 416,66 €

0,00 €

141,67 €

0,00 €

[11]

client 55900709

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

EDF service client

9960165058

1 686,79 €

32,05 €

136,63 €

0,00 €

[21]

sociétaire 005589275 abandon créance

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

[22]

ADV05182240628/V013619956

0,00 €

0,00 €

0,00 €

0,00 €

Trésorerie [Localité 12] Amendes

amende nouvelle dette

35,00 €

(dette exclue de la procédure)

[13]

81610984169

4 019,55 €

0,00 €

0,00 €

75,84 €

[13]

[13]

81610984157

8 780,18 €

0,00 €

59,16 €

154,50 €

[15]

28951000238525

2 478,33 €

0,00 €

0,00 €

46,76 €

[15]

753960687311

5 364,47 €

0,00 €

0,00 €

101,22 €

[23] ([23])

53004499050

1 142,19 €

0,00 €

0,00 €

21,55 €

Mme [S]

prêt amical

650,00 €

0,00 €

65,00 €

0,00 €

Totaux

29 277,27 €

402,46 €

402,46 €

399,87 €

Dit que les paiements effectués au profit de l'un ou l'autre des créanciers depuis la fixation de l'état des créances par la commission de surendettement et/ou le prononcé du jugement entrepris s'imputeront sur les dernières échéances dues aux créanciers bénéficiaires de ces paiements

Réduit à 0 % le taux des intérêts dus sur les créances figurant dans cet échéancier pendant la durée du plan ;

Dit que sauf meilleur accord des parties, les paiements devront être effectués le 15 de chaque mois et pour la première fois le 15 du mois suivant la notification du présent arrêt ;

Dit qu'à défaut de paiement d'une seule des mensualités du plan à son terme, l'ensemble du plan est de plein droit caduc quinze jours après une mise en demeure adressée à Mme [U] [X] veuve [Y] par lettre recommandée avec avis de réception d'avoir à exécuter ses obligations, et restée infructueuse ;

Rappelle qu'aucune voie d'exécution ne pourra être poursuivie par l'un quelconque des créanciers figurant dans le plan, pendant toute la durée d'exécution des mesures sauf à constater la caducité de ces dernières ;

Dit qu'il appartiendra à Mme [U] [X] veuve [Y], en cas de changement significatif de ses conditions de ressources ou de ses charges, à la hausse comme à la baisse, de ressaisir la commission de surendettement d'une nouvelle demande de traitement de sa situation de surendettement ;

Rejette toute autre demande ;

Laisse les dépens d'appel à la charge du trésor public.