CA Nîmes, 1re ch., 18 février 2021, n° 18/04407
NÎMES
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Banque Populaire de Bourgogne Franche Comte (Sté)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bruyere
Conseillers :
Mme Toulouse, Mme Leger
Avocats :
Me Lecat, Me Aitali, Me Lextrait, Me Menvielle
EXPOSE DU LITIGE
Suivant offre de prêt du 3 juillet 1999, X… a souscrit auprès de la société coopérative anonyme Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté (ci-après Banque Populaire) un prêt immobilier pour un montant de 1 850 000 francs, soit 282 030,68 euros, remboursable en 180 mensualités, au taux effectif global de 5,233020%, destiné à l'acquisition d'un appartement à usage de résidence secondaire, ainsi qu'à financer le rachat de deux prêts.
Ce prêt a été assorti d'un nantissement d'un contrat d'assurance vie Fructivi Profil numéro l09X4019l35, souscrit à hauteur de 850 000 francs, outre une assurance décès.
Le 30 novembre 2007, un avenant au contrat de prêt a été signé, substituant la garantie du contrat Fructivi Profil, par un compte plan épargne action nº0 1 098548 199 (ci-après compte PEA) au nom de M. Z…, entraînant une modification du taux effectif global à hauteur de 4,806%.
Se plaignant d'échéances impayées, le 8 décembre 2015 et le 18 janvier 2016, la Banque Populaire a mis en demeure M. Z… de payer le montant des sommes restant dues et devenues exigibles, en vain.
Par courrier du 4 mars 2016, la Banque Populaire a proposé à M. Z… un règlement amiable du litige.
Par acte du 8 juin 2016, la Banque Populaire a assigné M. Z… devant le Tribtmal de grande instance de Privas en remboursement du prêt.
Par acte du 19 août 2016, M. Z… a appelé en cause Y…, son ex-épouse, devant le Tribunal de grande instance de Privas afin que le jugement prononcé lui soit déclaré commun et opposable.
Par jugement contradictoire du 26 novembre 2018, le tribunal de grande intance de Privas a :
- débouté la Banque Populaire de l'intégralité de ses demandes,
- rejeté l'exception de nullité soulevée par Y…;
- débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,
- condamné la Banque Populaire à payer à M. Z… la somme de 2 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la Banque Populaire aux entiers dépens,
- ordonné l'exécution provisoire du présent jugement.
Par déclaration du 11 décembre 2018, la Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté a interjeté appel de cette décision.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 12 octobre 2020, elle demande à la cour de :
Infirmer le jugement attaqué en ce qu'il a :
-considéré que la Banque Populaire n'apportait pas la preuve d'une créance certaine et exigible dans son quantum et a, en conséquence,
-débouté la banque de sa demande principale en remboursement du prêt,
- condamné la Banque Populaire à régler la somme de 2.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile à M. Z… et l'a condamné aux entiers dépens ;
Le confirmer en ce qu'il a débouté M. Z… de ses demandes reconventionnelles formées à l'égard de la Banque Populaire, déclarer les demandes de M. Z… prescrites et en conséquence irrecevables, et à tout le moins l'en débouter en ce qu'elles sont infondées;
Statuant à nouveau des chefs infirmés, elle lui demande de :
Condamner M. Z… à lui payer la somme de 223.074,57 euros, outre intérêts au taux de 4,800 % sur la somme de 172.520,05 euros à compter du 8 mars 2019 et jusqu'à parfait règlement et au taux légal sur la somme de 12.076,40 euros à compter du 8 mars 2019 et jusqu'à parfait règlement ; ordonner la capitalisation annuelle des intérêts ; condamner M. Z… au paiement d'une somme de 4.000 euros sur le fondement des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens. Débouter Y… de sa demande de condamnation de la Banque Populaire au paiement des dépens et de la somme de 2500 euros à son égard au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 septembre 2020, M. Z… demande à la cour de :
Confirmer la décision de première instance en ce qu'elle a débouté la banque de l'intégralité de ses demandes ;
A défaut,
Débouter la banque de sa demande de paiement des intérêts et de l'indemnité forfaitaire ; rejeter l'appel incident formulé à titre subsidiaire par Y…; dire que la dette constitue une dette commune incombant à la communauté; déclarer la décision opposable à Y…;
En tout état de cause :
Condamner la Banque Populaire au paiement d'une somme de 3000 euros au titre de l'article 700 ainsi qu'aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 5 novembre 2019, Y… demande à la cour de :
confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté la Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté de ses demandes et en ce qu'il a débouté M. Z… des demandes formées contre elle; condamner la Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté aux entiers dépens de l'instance en allouant à Maître Menvielle avocat, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et par voie de conséquen' au paiement d'une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, condamner à défaut, A… aux entiers dépens de l'instan' en allouant à Maître Menvielle, le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et par voie de conséquence au paiement d'une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Subsidiairement et sur l'appel d’incident,
Prononcer la nullité de l'assignation délivrée par M. Z…,
Très subsidiairement,
débouter M. Z… de ses demandes formées contre elle; la mettre hors de cause ; lui donner acte que la Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté ne formule aucune demande à son encontre; donner acte à la Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté de son absence de contradiction à ces demandes; dire que l'éventuelle condamnation prononcée au bénéfice de la Banque Populaire de Bourgogne Franche Comté contre M. Z… seul ne pourra faire l'objet d'un recouvrement que sur les biens propres de M. Z…; condamner M. Z… aux entiers dépens de l'instance en allouant à Maître Menvielle le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile et par voie de conséquence au paiement d'une somme de 2.500 euros sur le fondement de l'article 700 du Code de Procédure Civile.
Par ordonnance du 12 mai 2020, la procédure a été clôturée le 19 octobre 2020 et l'affaire a été fixée à l'audience du 2 novembre 2020.
Il est fait renvoi aux écritures susvisées pour un plus ample exposé des éléments de la cause, des moyens et prétentions des parties, conformément aux dispositions de l'article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l'existence d'une créance certaine, liquide et exigible
La banque critique le jugement déféré en ce qu'il a rejeté sa demande en paiement de sommes à l'encontre de M.Z… en raison de l'absence de caractère certain et exigible de la créance au regard du décompte produit qui ne permet pas de distinguer le montant du principal sur lequel viendrait s'imputer la réalisation du nantissement et de l'irrégularité même de ce nantissement.
Sa contestation est donc essentiellement relative au caractère certain, liquide et exigible que lui a dénié le tribunal de la créance qu'elle réclame.
Elle soutient qu’elle rapporte la preuve de sa créance et de son exigibilité et qu'en toute hypothèse, l'irrégularité de la réalisation du nantissement et la restitution des titres qui n'est pas demandée, ne remettraient pas en cause pour autant la certitude de sa créance. Elle ajoute qu'à suivre le raisonnement de M.Z… sur le caractère fluctuant de la valeur du portefeuille reconstitué, seule la créance qu'elle lui devrait à lui serait alors inconnue et non celle qu'elle lui réclame.
En vertu des dispositions des articles 2346 et 2347 du code civil, il est prévu en droit commun du gage qu'à défaut de paiement de la dette garantie, le créancier peut faire ordonner que le bien lui demeure en paiement.
Selon l'article L 521-3 du code de commerce, le créancier gagiste peut demander l'attribution judiciaire du gage ou convenir de son appropriation conformément aux articles 2347 et 2348 du code civil.
Selon l'article L. 211-20 du code monétaire et financier dans la section relative au nantissement de comptes titres et de titres financiers : "Le créancier nanti titulaire d'une créance certaine, liquide et exigible peut, pour les titres financiers, français ou étrangers, négociés sur un marché réglementé, les parts ou actions d'organismes de placement collectif, ainsi que pour les sommes en toute monnaie, réaliser le nantissement, civil ou commercial, huit jours ' ou à l'échéance de tout autre délai préalablement convenu avec le titulaire du compte ' après mise en demeure du débiteur remise en mains propres ou adressée par courrier recommandé".
Il résulte de ces dispositions que la réalisation d'un nantissement sur compte titres suppose que le créancier nanti soit titulaire d'une créance certaine liquide et exigible, justifie d'une mise en demeure et du respect d'un délai à compter de la mise en demeure
Il appartient à la banque de justifier de la réunion de ces trois conditions pour solliciter l'attribution judiciaire des actions nanties en application des dispositions rappelées.
En l'espèce, il n'est pas contesté que le prêt souscrit était remboursable en 179 mensualités de 1226,83 euros et une échéance mensuelle de 283 257,52 euros, la dernière échéance étant exigible le 15 juillet 2014.
Par avenant du 30 novembre 2007, la garantie du prêt a été modifiée. Le nantissement du contrat d'assurance vie Fructi profil vie a été remplacé par le nantissement d'un PEA nº 01098548199 ouvert au nom de M.Z….
L'avenant prévoit que l'emprunteur est parfaitement informé des modalités de remboursement des prêts in fine et il assume l'entière responsabilité de l'intérêt financier de l'opération. Il reconnaît par ailleurs avoir été averti par la banque du risque d'insuffisance de la valeur acquise du placement affecté à la garantie du prêt pour en assurer le remboursement jusqu'à son terme et en assume là encore, la responsabilité.
Il s'engage ainsi à disposer sur son compte de la provision nécessaire au règlement de la dernière échéance du prêt telle que prévue au tableau d'amortissement.
Le relevé de compte produit par la banque aux débats démontre que deux échéances n'ont pas été payées au 15 juin 2014 et celle du terme du 15 juillet 2014 soit un total de 283 257,51 euros impayés.
Les conditions générales du contrat de prêt litigieux mentionnent que toutes les sommes dues au titre du prêt, tant en principal qu'en intérêts, frais et accessoires, deviendront exigibles, huit jours après une lettre simple recommandée, avec accusé de réception dans l'un des cas suivants le contrat est résilié : ... défaut de paiement d'une échéance de prêt.
Le paragraphe 'défaillance de l'emprunteur' indique également : si la banque exige le remboursement immédiat du capital restant dû et des intérêts échus, les sommes restants dues jusqu'à la date de paiement effectif produisent des intérêts de retard aux taux égal à celui du prêt. En outre, sauf dans le cas de décès et d'incendie prévus ci-dessus, la banque peut demander si bon lui semble une indemnité dont le montant est fixé à sept pour cent des sommes dues au titre du capital restant dû des intérêts échus et non versés, et le cas échéant des intérêts de retard.
Il n'est pas contesté ni contestable au regard des pièces produites, que le montant des sommes dues au titre de l'emprunt garanti par le nantissement du compte PEA détenu par M.Z… dans les livres de la banque, a été diminué du montant de la réalisation du PEA pour un montant de 110 961,35 euros le 28 janvier 2015.
La banque invoque un autre versement en février 2015 venant en déduction, pour réclamer au titre du solde du prêt après déductions des sommes versées, une créance à hauteur de 172 520,05 euros, somme à laquelle elle a ajouté les intérêts de retard et une indemnité légale de 7% conformément aux termes du contrat.
Enfin, il est également acquis au débat qu'aucune mise en demeure spécifique à la réalisation du PEA n'a été adressée à M.Z… antérieurement à la réalisation du PEA et que les deux mises en demeure de payer les sommes dues au titre du soldes des échéances impayées déduction faites de la valeur de réalisation du PEA et des deux versements rappelés ci-dessus, ont été adressées à M.Z… par la banque les 8 décembre 2015 et 18 janvier 2016 et sont restées sans effet.
En d'autres termes, l'exigibilité de la créance de la banque n'est pas sérieusement contestable ni son caractère certain. Des échéances sont effectivement demeurées impayées et malgré mise en demeure, M.Z… ne s'en est pas acquitté. Seul le montant de cette créance est en question dés lors que c'est sans respect de la mise en demeure préalable que la banque a réalisé le nantissement et déduit le montant des sommes ainsi obtenues du solde restant dû.
Si M.Z… soutient avec raison que le défaut de mise en demeure faisait obstacle à la réalisation du gage, la conséquence en est que la banque doit lui restituer l'intégralité du portefeuille réalisé et non la valeur reconstituée du portefeuille comme il le prétend.
Ainsi tenue de restituer le portefeuille de titres, la banque ne peut procéder à la déduction du montant réalisé du nantissement (au 28 janvier 2015) du montant de sa créance au titre des sommes du prêt restant dues, et cette contestation d'une partie de la créance ne suffit pas à remettre en cause l'existence de la créance de la banque elle-même.
Cette contestation ne prive donc pas la banque de la possibilité de se faire régler une partie de sa créance dont le principe est établi.
M.Z… ne peut en effet sérieusement contester l'exigibilité de la créance de la banque en faisant valoir que les sommes que doit lui restituer la banque au titre du nantissement étant fluctuantes, elle ne peut établir que des sommes lui resteraient dues.
Il invoque en second lieu que la créance serait soldée car la banque ne peut lui réclamer les intérêts dont elle doit être déchue et seul le capital restant dû serait exigible, somme qu'il aurait déjà payée en remboursant plus de 315 000 euros.
Ainsi il prétend d'une part, qu’au regard des dispositions de l'article L.312-8 du code de la consommation la banque ne justifierait pas de l'envoi de l'offre de prêt, de telle sorte que la sanction de la déchéance du droit aux intérêts est encourue. En conséquence, la banque se doit de faire un nouveau décompte entre les parties en tenant compte de la déchéance pour déterminer si elle dispose d'une créance liquide et exigible.
La banque lui oppose la prescription de ce moyen.
En ce qui concerne le point de départ de la prescription, l'action en déchéance du droit aux intérêts pour non-respect des règles en matière d'offre de prêt, seule sanction applicable, est soumise à la prescription décennale ramenée à la prescription quinquennale par la réforme de
2008 dont le délai se calcule à compter de la date à laquelle l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d'agir, ou à la date où il a connu ou aurait dû connaître l'erreur. Cette prescription quinquennale s'applique également à l'action soulevée par voie d'exception dans une instance en paiement lorsque l'obligation a reçu un commencement d'exécution, ce qui est le cas en l'espèce.
Ce moyen ayant été soulevé par M.Z… le 4 avril 2017, alors que le prêt a été signé le 17 juillet 1999 et l'avenant le 30 novembre 2007 et qu'il a été exécuté jusqu'en 2015, la prescription quinquennale qui a commencé à courir à la date d'entrée en vigueur de la loi de 2008 le 19 juin 2008 est acquise au jour de la demande.
D'autre part, M.Z… invoque la déchéance du droit aux intérêts sur le fondement de l'erreur de TEG.
La banque fait là encore valoir l'irrecevabilité de la demande de déchéance du droit des intérêts seule sanction encourue contrairement à ce que développe l'intimé sur la nullité de la stipulation d'intérêts, sur le seul fondement de l'irrégularité du TEG au motif de la prescription de l'action de M.Z….
Comme rappelé ci-dessus le délai de prescription court du jour où l'emprunteur a connu ou aurait dû connaître l'irrégularité qu'il invoque et la prescription commence à courir à compter de la date de conclusion du contrat de prêt si l'emprunteur est en mesure de déceler par lui-même, à la seule lecture de l'acte, les erreurs affectant le taux.
L'erreur est décelable notamment lorsque le contrat mentionne expressément les éléments à partir desquels le calcul du TEG a été effectué, qu'il manque des mentions obligatoires de façon apparente ou que l'examen des documents contractuels révèle des discordances.
M.Z… invoque que les frais de prise de garantie n'ont pas été intégrés dans le calcul, qu'il en a été de même lors de l'avenant. Il ajoute que pour l'avenant le taux de période annoncé n'est pas proportionnel au TEG annoncé.
M.Z… se réfère donc au contrat de prêt et à l'avenant pour en déduire que les frais de nantissements ou de mainlevée du nantissement du contrat d'assurance vie au titre de la garantie initiale, n'ont pas été incorporés dans le calcul du TEG.
Il rappelle que l'avenant mentionne un TEG qui n'est pas proportionnel au taux de période pour en déduire qu'il est erroné en application de l'article R313-1 du code de la consommation.
Toutefois, c'est à juste titre que la banque lui oppose l'irrecevabilité de ses demandes en déchéances du droit aux intérêts liées à un TEG erroné, dès lors que le mode de calcul des intérêts conventionnels était indiqué dans l'acte de prêt et qu'il n'incluait pas les frais de garantie, ce que ne conteste pas la banque qui indique qu'ils étaient alors indéterminés, tout comme la non proportionnalité du TEG au taux de période annoncé dans l'avenant, ces mentions ne présentant aucune difficulté de compréhension particulière et permettaient à l'emprunteur même non averti de déceler, à la seule lecture des actes, que les frais de garantie n'étaient pas inclus dans le TEG et que le TEG mentionnait à l'avenant n'était pas proportionnel au taux de période de 0,401% annoncé.
Le délai de prescription, concernant ces manquements de la banque à ses obligations légales, a donc commencé à courir dès la date de l'acceptation de l'offre le 17 juillet 1999 et la date de l'avenant le 30 novembre 2007 dont la seule lecture faisait clairement apparaître les faits qu'invoque M.Z… au soutien de son action, l’emprunteur ne pouvant différer ce point de départ au vu de faits apparents et connus de lui dès l'origine, au motif qu'il serait un profane en la matière.
En conséquence, l'action s'appuyant sur les faits ci-dessus évoqués soutenue dans les conclusions de M.Z… le 4 avril 2017, est prescrite.
Dans ces conditions, la banque établit sa créance conformément aux dispositions contractuelles à la somme (minimale) qu'elle demande de 223 074,57 étant observé que M.Z… n'a pas demandé judiciairement la restitution de son portefeuille d'actions.
Dans ces conditions, il convient d'infirmer la décision entreprise en toutes ses dispositions et de condamner M.Z… à payer à la banque la somme de 223 074,57 euros arrêtée au 8 mars 2019.
Sur la responsabilité de la banque
M.Z… invoque enfin, le manquement de la banque à son devoir d'information de loyauté et d'honnêteté.
Il indique ainsi qu'elle est à l'origine de ce montage financier qui s'est révélé très avantageux pour elle mais au détriment de son client.
Il ajoute que la banque n'a nullement insisté auprès de lui sur le risque lié au prêt in fine et notamment sur celui de non-couverture de la dernière échéance et demande à ne pas avoir à payer quoique ce soit à la banque dès lors qu'il a déjà remboursé 315 000 euros pour un capital emprunté de 282 030,68 euros.
Ce faisant, M.Z… ne se fonde pas uniquement sur un manquement à un devoir de conseil et de loyauté général mais également sur un manquement de la banque à son devoir de mise en garde né de l'octroi d'un crédit excessif avec un risque d'endettement pour son client.
Il sera en premier lieu rappelé que ce devoir de mise en garde du banquier trouve sa justification dans l'inaptitude de l'emprunteur non averti, qualité que la banque conteste à M.Z… avocat de profession. Cependant, sa spécialisation en droit public comme il le soutient ou même en droit immobilier comme le soutient la banque, ne peut la dispenser de cette obligation, M.Z… ayant pu ne pas mesurer malgré ses connaissances en droit, par lui-même le risque d'endettement excessif résultant de l'octroi du crédit in fine.
En deuxième lieu, la banque soutient encore que le préjudice subi qui s'analyse en la perte de chance de ne pas contracter un emprunt inapproprié se réalise dès l'octroi du crédit. Elle en déduit que l'action de M.Z… est également prescrite y compris au jour de l'avenant.
Cependant, l'évolution dans l'appréciation de ce devoir de mise en garde initiée par la Cour de cassation fait partir le délai de prescription de l'action en indemnisation d'un tel dommage non à la date de conclusion du contrat de prêt mais à la date d'exigibilité des sommes au paiement desquelles l'emprunteur n'est pas en mesure de faire face dans l'hypothèse d'un crédit in fine, soit en l'espèce de la dernière échéance le 14 juillet 2014.
Il n'est pas contesté que M.Z… a dès la première instance invoquée dans ses écritures la responsabilité de la banque (ses dernières écritures sont du 7 juin 2018) de sorte que son action à ce titre n'est pas prescrite.
Pour autant, l'exposé des revenus ainsi que de son patrimoine auquel la banque procède à l'aide de ses propres déclarations (pièces 36 et 37), permettent de retenir que M.Z…
Estimait son patrimoine entre 500 000 et 1 000 000 d'euros au 22 février 2012. Il a déclaré par ailleurs en 2015 plus de 73 000 euros de revenus annuels tels que cela résulte de son avis d'imposition. Si ces éléments sont postérieurs à la souscription du prêt et de son avenant de 2007, ils révèlent toutefois une situation financière et patrimoniale antérieure permettant de juger que le prêt n'était pas inapproprié à sa capacité financière et à son patrimoine.
Force est de constater également, qu'il ne démontre pas lui-même par des éléments rapportés aux débats que ce prêt était inadapté à ses capacités financières, le seul fait qu'il n'ait pu faire face à la dernière échéance n'étant pas à lui seul suffisant.
Enfin en troisième lieu, M.Z… ne peut reprocher à la banque un manquement à son devoir de conseil en vertu du principe de non-immixtion de cette dernière dans les affaires de son client.
Au regard de l'ensemble de ces éléments il ne peut être reproché à la banque un quelconque manquement.
Sur la mise en cause de Y…
- sur la nullité de l'assignation
M.Z… a appelé en la cause Y… aux fins que la décision rendu lui soit opposable. En ce sens il a visé aux termes de son assignation les seules dispositions de l'article 331 du code de procédure civile et a développé dans le corps de l'assignation les faits qui l'incitait à agir de la sorte et notamment la qualification de dette commune du prêt pour lequel sa condamnation était recherchée par la banque. Il n'a pas au stade de cette assignation sollicité la condamnation de Y… à quoique ce soit.
Dès lors c'est à bon droit que le premier juge a considéré que l'assignation délivrée le 19 août 2016 à Y… par M.Z… n'encourait pas sur le fondement de l'article 56 du code de procédure civile la nullité cette dernière étant parfaitement informé de l'objet du litige et des raisons pour lesquelles M.Z… l'appelait en la cause.
- sur la déclaration de décision commune
M.Z… soutient que le prêt litigieux a été contracté pour les besoins du ménage durant la vie commune.
Il est constant que ce prêt a été contracté au cours du mariage de M.Z… et Y… qui ont divorcé par jugement du 23 avril 2015. Ils étaient mariés sous le régime légal de la communauté puis sous le régime de la communauté universelle à compter de 2005.
L'objet de ce prêt tel qu'il figure au contrat était le financement d'un rachat de prêts ainsi que l'achat d'un appartement à usage de résidence secondaire de l'emprunteur situé aux Arcs.
Y… soutient qu'elle ne saurait contribuer à la dette dès lors que M.Z… ne démontre pas que ce prêt aurait été souscrit dans l'intérêt commun.
Elle ajoute qu'en 1999 ils étaient mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts et que le prêt avait pour but de solder des dettes antérieures de son mari et financer un bien qui lui était propre.
Il doit être retenu que lors de la souscription du prêt les époux étaient préalablement mariés sous le régime de la communauté légale, et il est exact que l'article 1415 du code civil dispose que chacun des époux ne peut engager que ses biens propres et ses revenus, par un cautionnement ou un emprunt, à moins que ceux-ci n'aient été contractés avec le consentement exprès de l'autre conjoint. Il est par ailleurs constant que Y… n'a pas consenti au prêt et que ce dernier n'est pas un emprunt ménager portant sur des sommes modestes qui sont régis par les dispositions de l'article 220 du Code civil.
Cependant, le changement de régime matrimonial opéré en 2005, invoqué par M. Z…, au terme duquel les époux ont adopté le régime de la communauté universelle renvoie aux dispositions de l'article 1526 du code civil selon lequel toutes les dettes des époux, présentes et futures y compris personnelles, sont supportées définitivement par la communauté universelle des époux.
Par voie de conséquence, s'agissant d'une dette commune, le fait que Y… n'ait pas consenti au contrat de prêt litigieux, ne la met pas hors de cause comme elle le prétend et M.Z… est fondé dans le cadre de la liquidation de la communauté des époux Z… -Y… à voir déclarer le présent arrêt commun et opposable à Y…. Etant précisé qu'il s'agit de la seule demande de M.Z… à l'encontre de son ex-épouse.
Dès lors, cette dernière sera déboutée de sa demande de voir juger que la condamnation au bénéfice de la banque ne pourra être recouvrée que sur les biens propres de M.Z….
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Succombant principalement M.Z… supportera les dépens de première instance et d'appel et sera débouté de sa demande au titre des frais irrépétibles.
Il sera condamné à payer à la Sa Banque populaire de Bourgogne Franche Comté la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Enfin, l''équité ne commande pas de faire droit à la demande de Y… sur ce même fondement.
PAR CES MOTIFS
LA COUR, après en avoir délibéré conformément à la loi,
Statuant publiquement par arrêt rendu par mise à disposition au greffe, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a rejeté la demande de nullité de l'assignation formée par Y… ;
Statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne X… à payer à la Sa Banque populaire de Bourgogne Franche Comté la somme de 223 074,57 euros, assortie des intérêts au taux contractuel de 4,800 % à compter du 8 mars 2019 et ordonne que les intérêts capitalisés produiront intérêts conformément aux dispositions de l'article 1343-2 du code civil ;
Condamne X… à payer à la Sa Banque populaire de Bourgogne Franche Comté la somme de 2000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Déboutes-Y… de sa demande de voir juger que la condamnation au bénéfice de la banque ne pourra être recouvré que sur les biens propres de M.Z… et de celle sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;
Condamne X… à supporter les dépens de première instance et d'appel ;
Déclare le présent arrêt opposable à Y… ;
Déboute les parties du surplus de leurs demandes.