CA Nancy, ch. de l'execution, 4 mars 2019, n° 18/00721
NANCY
Arrêt
Confirmation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Bridey
Conseillers :
M. Beaudier, Mme Gallet
EXPOSE DU LITIGE
Par acte d'huissier du 8 mars 2017, Elisabeth F. et Marie-Christine F. ont fait signifier à M. L. un itératif commandement de payer aux fins de saisie vente en vertu d'un jugement réputé contradictoire prononcé le 25 février 2009 par le tribunal de grande instance de Nancy.
M. L. a fait assigner Mmes Elisabeth F. et Marie-Christine F. devant le juge de l'exécution de Nancy le 6 avril 2017 afin notamment de voir ordonner la compensation entre sa dette et la créance qu'il détient à leur encontre.
Mesdames F. se sont opposées à cette demande.
Madame Marie-Christine F. a sollicité, au visa de l'article 724 du Code civil , l'attribution du montant appelé en garantie à son encontre en moins disant de sa part successorale à venir.
Le 14 mars le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nancy a débouté M. L. de toutes ses demandes, dit que la demande d'attribution de Mme F. était irrecevable et rejeté les demandes d'indemnité présentées au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 20 mars 2018 M. L. a interjeté appel de cette décision.
Il sollicite de la cour qu'elle infirme le jugement rendu le 14 mars par juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Nancy en ce qu'il l'a débouté de l'intégralité de ses demandes et, statuant à nouveau, de constater la compensation légale entre sa dette et la créance qu'il détient à l'encontre de Marie-Christine F. en exécution du jugement rendu le 25 février 2009 par le tribunal de grande instance de Nancy, de fixer le montant dû par lui en principal et intérêts au 22 mars 2018 à la somme de 6 585.65 € et de condamner Mme Marie Christine F. et Mme Elisabeth F. solidairement entre elles à lui payer la somme de 5 000 € de dommages et intérêts et la somme 2 000 € en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.
Pour faire valoir la compensation, M. L. affirme qu'il détient une créance, tirée du jugement du 25/02/2009, contre Marie-Christine F. en sa qualité personnelle.
Il produit un décompte des sommes versées par lui et retient un solde restant dû de 6.585,65 euros.
M. L. soutient que la somme mise en exécution forcée dépasse celle fixée par le titre exécutoire et souligne l'intention malveillante des intimées qui ont demandé plus que ce à quoi elles avaient droit.
Mme Elisabeth F. demande à la cour de dire et juger mal fondé l'appel interjeté par Monsieur L., de confirmer en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 mars 2018 par le juge de l'exécution du tribunal de grande Instance de Nancy, de débouter Monsieur L. de ses demandes et prétentions et de le condamner à lui verser la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
Elle fait valoir que la compensation légale ne peut s'opérer puisque M. L. est débiteur de l'indivision successorale et non de Marie-Christine F., et que pareillement, cette dernière n'est pas redevable à la succession mais à M. L. personnellement.
Madame Marie-Christine F. demande à la cour de confirmer le jugement rendu le 14 mars 2018 par le juge de l'exécution de Nancy et sollicite la condamnation de M. L. à lui verser une somme de 750 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile
Elle soutient que si le jugement du 25 février 2009 mentionne effectivement un appel en garantie à son encontre, elle était défaillante et n'a pas participé à la procédure.
Elle ajoute qu'elle n'a probablement pas reçu l'assignation en intervention forcée et que le commandement de payer a été initié en son nom par sa soeur Elisabeth F. avec laquelle elle n'a plus aucun contact.
Elle avance qu'il n'est pas démontré que le jugement lui a été signifié. Elle conteste en conséquence les dommages et intérêts sollicités par M. L..
Elle reprend sa demande en intégration à la succession en moins-disant sur le montant qu'il lui reviendra.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Vu les conclusions déposées pour Monsieur L. en date du 4 avril 2018 ;
Vu les écritures de Madame Elisabeth F. en date du 27 avril 2018 ;
Vu les conclusions de Madame Marie-Christine F. du 22 mai 2018 ;
Vu l'ordonnance de clôture prononcée le 10 septembre 2018 ;
Sur la demande de compensation
Aux termes des articles 1347 et suivants du Code civil , la compensation et l'extinction simultanée d'obligations réciproques entre deux personnes. Elle s'opère, sous réserve d'être invoquée, à due concurrence, à la date ou ces conditions sont réunies ; elle n'a lieu qu'entre deux obligations fongibles, certaines, liquides et exigibles.
Il ressort du jugement du tribunal de grande instance de Nancy du 25 février 2009, que Monsieur L. a été condamné à payer à Madame Marie-Jeanne F. la somme de 19 056,13 €, majorée des intérêts au taux légal à compter du 27 janvier 1997.
Ce même jugement a par ailleurs condamné Madame Marie-Christine F. à garantir Monsieur L. du paiement de la condamnation prononcée à son encontre, à concurrence de la moitié de son montant.
S'il est incontestable que ce jugement peut être opposé à Madame Marie-Christine F. laquelle a été condamnée à garantir son ancien conjoint des condamnations prononcées à son encontre, en revanche Madame Élisabeth F. n'est en aucune façon débitrice de Monsieur L..
Pareillement, Monsieur L. est poursuivi, non pas parce qu'il est débiteur de Madame Marie-Christine F. mais parce qu'il est débiteur de l'indivision successorale résultant du décès de Madame Marie-Jeanne F..
En application de l'article 1347 -7 du Code civil , la compensation ne doit pas préjudicier aux droits acquis par des tiers.
Or l'indivision successorale composée des deux filles de Madame Marie-Jeanne F. a acquis des droits sur l'obligation dont Monsieur L. est débiteur.
L'exception soulevée par Monsieur L. n'est donc pas opposable ni à Madame Élisabeth F., ni à l'indivision successorale qui est une partie distincte de la seule Madame Marie-Christine F..
Du fait que la compensation ne concerne pas des obligations réciproques et qu'elle serait de nature à préjudicier aux droits de l'indivision successorale formée par les deux intimées, c'est à bon droit et par de justes motifs, que le premier juge a débouté Monsieur L. de sa demande de compensation.
Sur la demande d'attribution
Selon l'article L 213'6 du code de l'organisation judiciaire, le juge de l'exécution connaît, de manière exclusive, des difficultés relatives au titre exécutoire et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elle porte sur le fond du droit, à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire.
Se prévalant des dispositions de l'article 724 du Code civil , Madame Marie-Christine F. sollicite que soit prononcée l'attribution du montant appelé en garantie à son encontre en moins disant de sa part successorale à venir.
Mais comme l'a rappelé à juste titre le premier juge, il n'appartient pas au juge de l'exécution de statuer sur l'attribution d'une créance dans le cadre d'un partage successoral
Alors même qu'il ne dispose d'aucun élément lui permettant de connaître les masse active et passive de la succession de Madame Marie-Jeanne F., cette attribution permettrait certes un règlement immédiat et intégral de la dette de Madame Marie-Christine F. mais serait de nature à préjudicier aux droits de sa s'ur, Élisabeth F. dans la succession.
Sur les dommages-intérêts
Monsieur L. fonde de sa demande sur les dispositions de l'article 1240 du Code civil et sollicite la condamnation solidaire de Mesdames F. au paiement d'une somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts.
Mais il convient de rappeler que le juge de l'exécution n'est compétent que pour connaître des procédures civiles d'exécution et une demande en paiement de dommages-intérêts fondée sur la responsabilité délictuelle.
Le juge de l'exécution ne peut allouer des dommages-intérêts que dans les limites fixées par les dispositions de l'article L 121'2 du code des procédures civiles d'exécutio, c'est à-dire en cas de mainlevée d'une mesure d'exécution inutile ou abusive.
Or en l'espèce, même si l'attitude de Madame Marie-Christine F. peut être ressentie comme entraînant une situation injuste et inéquitable pour Monsieur L., cette attitude apparaît résulter davantage d'un manque de communication entre les s'urs F. que d'une attitude fautive et abusive imputable à l'une ou l'autre des intimées.
Il convient de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur L. de sa demande en paiement de dommages-intérêts.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Monsieur L. succombant son recours sera condamné aux dépens de l'instance.
Il est équitable de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile à l'encontre de l'une ou l'autre des parties.
PAR CES MOTIFS
La Cour statuant publiquement par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe en application des dispositions de l'article 450 du code de procédure civile,
Déclare recevable mais mal fondé l'appel interjeté par Monsieur L. ;
Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu le 14 mars 2018 par le juge de l'exécution du tribunal de Grande instance de Nancy ;
Déboute Monsieur L. de toutes ses demandes et prétentions ;
Dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires ;
Condamne Monsieur L. aux frais et dépens.