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Décisions

Cass. crim., 4 juin 2009, n° 09-81.886

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Dulin

Rapporteur :

M. Bloch

Avocat général :

M. Lucazeau

Avocat :

SCP Waquet, Farge et Hazan

Bordeaux, du 18 févr. 2009

18 février 2009

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire du code de procédure pénale, des articles 145 et 593 du même code, des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble violation des droits de la défense, du principe du contradictoire et du principe d'égalité des armes ;

" en ce que l'arrêt attaqué a refusé de prononcer la nullité de l'ordonnance de placement en détention de Michel X...;

" aux motifs qu'il ressort de l'examen du procès-verbal du débat contradictoire que le juge des libertés et de la détention, après avoir notamment avisé Michel X...qu'il envisageait son placement en détention provisoire et que le débat contradictoire aurait lieu en audience de cabinet, a procédé à un débat contradictoire en entendant successivement les réquisitions du ministère public, les observations du mis en examen et celles de son conseil, et avisé Michel X...qu'il délivrait ce jour une ordonnance motivée de placement en détention provisoire et décernait un mandat de dépôt ; que ce procès-verbal comporte, à la suite des signatures du juge des libertés et de la détention, de son greffier et de Michel X..., la mention manuscrite suivante également signée du juge des libertés et de la détention, de son greffier et de Michel X...: « A la demande de Me Z..., mentionnons que, à la suite du débat contradictoire en vue du placement de M. X...en détention provisoire, à la demande du juge des libertés et de la détention, le procureur de la République est resté quelques minutes dans le bureau, alors que les autres participants étaient sortis – porte fermée » ; qu'il ne résulte aucunement de cette mention que le représentant du ministère public, quand bien même aurait-il été présent quelques minutes dans le cabinet du juge des libertés et de la détention, se soit entretenu de la même affaire avec ce magistrat, ou ait pu participer en quoi que ce soit au délibéré ou tenu des propos de nature à influencer le juge dans sa prise de décision, dans des conditions qui constitueraient une violation du principe du procès équitable ;

" alors que, selon l'article 145 du code de procédure pénale, le juge des libertés et de la détention statue après un débat contradictoire au cours duquel il entend le ministère public qui développe ses réquisitions, puis les observations de la personne mise en examen et, le cas échéant, celles de son avocat ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure et notamment des mentions du procès-verbal du débat contradictoire du 6 février 2009, qu'à l'issue du débat contradictoire, mais avant que le juge des libertés et de la détention fasse connaître sa décision, « à la demande du juge des libertés et de la détention, le procureur de la République est resté quelques minutes dans le bureau, alors que les autres participants étaient sortis, porte fermée » ; qu'il résulte de l'existence de cette mention que le principe du contradictoire a pu ne pas être respecté ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la chambre de l'instruction a violé les textes et principes susvisés " ;

Vu l'article 145 du code de procédure pénale ;

Attendu que, selon ce texte, lorsque le juge des libertés et de la détention envisage d'ordonner la détention provisoire de la personne mise en examen, il statue après un débat contradictoire au cours duquel il entend le ministère public en ses réquisitions, puis les observations de la personne mise en examen et, le cas échéant, celles de son avocat ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que Michel X...ayant été mis en examen du chef de tentative d'escroquerie en bande organisée, le juge d'instruction a saisi, en vue d'un placement en détention provisoire, le juge des libertés et de la détention ;
que le mis en examen n'ayant pas demandé de délai pour préparer sa défense, le juge des libertés et de la détention a entendu le ministère public en ses réquisitions, puis Michel X...et son avocat en leurs observations ; qu'ensuite, il les a avisés que, par ordonnance du même jour, il plaçait le mis en examen en détention provisoire et décernait mandat de dépôt à son encontre ;

Attendu que, sur le procès-verbal de débat contradictoire figure, après les signatures du juge des libertés et de la détention, du greffier et du mis en examen, la mention suivante : « A la demande de Me Z..., mentionnons que à la suite du débat contradictoire en vue du placement de M. X...en détention provisoire, à la demande du juge des libertés et de la détention, le procureur de la République est resté quelques minutes dans le bureau alors que les autres participants étaient sortis-porte fermée. » ; que cette mention est signée des mêmes personnes ;

Attendu que Michel X...a interjeté appel de l'ordonnance de placement en détention provisoire et demandé son annulation aux motifs qu'il résulte de la mention susvisée que le secret du délibéré et la règle suivant laquelle le prévenu et son conseil auront toujours la parole le dernier ont été violés ;

Attendu que, pour rejeter cette demande d'annulation et confirmer l'ordonnance entreprise, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;

Mais attendu qu'en, statuant ainsi, alors que la mention figurant sur le procès-verbal de débat contradictoire ne permet pas de s'assurer que le principe du contradictoire a été respecté, la chambre de l'instruction a méconnu le texte ci-dessus visé ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, en date du 18 février 2009 ;

CONSTATE l'inexistence d'un titre de détention régulier ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé.