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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 11, 24 mars 2023, n° 21/00663

PARIS

Arrêt

Infirmation

PARTIES

Demandeur :

Energy Pool Afrique (SAS), Energy Pool Développement (SAS)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Ardisson

Conseillers :

Mme Primevert, Mme l'Eleu de la Simone

Avocats :

Me Etevenard, Me Rostagni, Me Nathoo

T. com. Créteil, du 10 nov. 2020, n° 201…

10 novembre 2020

Les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool International (devenue Energy Pool Afrique) sont des sociétés de droit français spécialisées dans le pilotage et l'optimisation de la consommation énergétique.

Au cours de l'année 2011, la société Energy Pool Afrique (anciennement Energy Pool International) s'est rapprochée de M. [E] [A] [M] [X], ressortissant français d'origine camerounaise, afin de l'aider à pénétrer le marché du Cameroun en vue d'y développer une activité de modulation de la consommation d'électricité.

Un « rapport des activités du Groupe de Travail mis en place par le Ministre de l'Énergie et de l'Eau sur les projets d'efficacité énergétique et de centrale de modulation de la consommation électrique proposés par Energy Pool » a été dressé le 2 décembre 2011, mettant en évidence à l'attention du Ministre les avantages de la centrale de modulation et du projet d'efficacité énergétique dans les bâtiments publics sur les plans financier, économique, environnemental, social et technologique.

Le 29 mars 2012, les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool International, devenue Energy Pool Afrique, et M. [E] [A] [M] [X] se sont associés pour créer une société anonyme de droit camerounais Energy Pool Cameroun dont le siège social est situé à [Localité 9] au Cameroun, selon la répartition suivante :

M. [X] : 510 actions,

Energy Pool International : 489 actions,

Energy Pool Développement : 1 action.

M. [M] [X] a été désigné Président du Conseil d'Administration, M. [T] [W] Directeur Général, les trois membres du Conseil d'Administration étant M. [M] [X] et les sociétés EPA et EPD.

Le 26 juin 2012, afin de satisfaire le Marché Public envisagé avec l'Etat camerounais, EPD a signé un contrat de prestation de services avec EPC représentée par M. [M] [X].

Le 21 août 2012 un Pacte d'actionnaires de la société Energy Pool Cameroun a été signé entre M. [M] [X] d'une part et les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool International d'autre part.

Un marché public a ensuite été signé le 26 décembre 2013 entre le Ministère des Marchés Publics et la société locale EPC.

Les sociétés Energy Pool ont alors conclu plusieurs contrats avec des industriels sur place, telles les sociétés Soctral le 15 mars 2016, Brasseries du Cameroun le 25 janvier 2016, Alucam le 15 mars 2016 et FME Gaz le 13 mai 2015.

Lors du Conseil d'administration de la société EPC du 23 septembre 2015, les sociétés Energy Pool ont autorisé la conclusion d'un contrat cadre d'apporteur d'affaires et de prestations entre elles et M. [M] [X], précisant les modalités financières de rémunération de ce dernier.

Lors de l'Assemblée Générale des actionnaires du 29 juin 2016, les comptes sociaux de l'exercice 2015 n'ont pas été approuvés.

Compte-tenu des différends de plus en plus importants entre les parties, les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique ont démissionné de leurs fonctions d'Administrateurs fin juillet 2016.

Le Ministère chargé des Energies Renouvelables a adressé une lettre de mise en demeure le 7 novembre 2016 pour inviter le contractant à respecter le Marché Public et installer la centrale de pilotage de la modulation électrique au Cameroun.

Le 2 décembre 2016 l'Assemblée Générale de la société EPC, au cours de laquelle M. [M] [X] étant le seul actionnaire présent, a délibéré sur la désignation de nouveaux administrateurs aux lieu et place des sociétés Energy Pool.

Par courrier du 8 décembre 2016, la société EPC représentée par M. [X] a rompu le contrat de sous-traitance avec la société Energy Pool Développement.

Le 9 décembre 2016 s'est tenu un Conseil d'administration de la société EPC où M. [M] [X] s'est nommé Président Directeur Général de la société EPC.

Les sociétés Energy Pool ont sollicité en référé la désignation d'un administrateur provisoire, ce qu'elles ont obtenu par ordonnance du 8 mars 2017.

Reprochant à M. [X] d'avoir violé le pacte d'actionnaires et les statuts de la société Energy Pool Cameroun, les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool International ont fait assigner M. [X] en cession forcée des parts sociales devant le tribunal de commerce de Créteil.

Par jugement du 9 octobre 2018, le tribunal de commerce de Créteil s'est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir.

Par arrêt du 19 mars 2019, la cour d'appel de Paris a infirmé ledit jugement en toutes ses dispositions, a dit le tribunal de commerce de Créteil compétent et lui a renvoyé l'affaire.

Par jugement du 10 novembre 2020, le tribunal de commerce de Créteil :

a dit M. [E] [A] [M] [X] recevable, mais mal fondé en sa demande de sursis à statuer et l'en a débouté,

a dit les sociétés Energy Pool Developpement et Energy Pool Afrique mal fondées à établir que M. [E] [A] [M] [X] a violé les dispositions du Pacte et des statuts de la société EPC, et que les conditions de mise en œuvre de la procédure de cession forcée des titres de M. [E] [A] [M] [X] à leur bénéfice sont réunies, et les a déboutées de leurs demandes formées de ce chef,

a dit les sociétés Energy Pool Developpement et Energy Pool Afrique mal fondées en leurs demandes de dommages et intérêts et les en a déboutées,

a dit M. [E] [A] [M] [X] mal fondé en sa demande de dommages et intérêts et l'en a débouté,

a condamné les sociétés Energy Pool Developpement et Energy Pool Afrique à payer chacune à M. [E] [A] [M] [X] une somme de 5.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, a débouté M. [E] [A] [M] [X] du surplus de sa demande et a débouté les parties demanderesses de leur demande formée de ce chef,

a dit qu'il n'y a pas lieu à exécution provisoire du jugement,

a condamné M. [E] [A] [M] [X] aux dépens.

La société Energy Pool Afrique et la société Energy Pool Developpement ont formé appel de ce jugement par déclaration du 5 janvier 2021 enregistrée le 12 janvier 2021.

Le 1er juillet 2021, un avis d'irrecevabilité des conclusions de l'intimé a été émis.

Suivant conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 13 août 2021, les sociétés Energy Pool Afrique et Energy Pool Developpement ont demandé au conseiller de la mise en état :

de confirmer l'avis d'irrecevabilité des conclusions de l'intimé du 1er juillet 2021,

de déclarer irrecevables les conclusions régularisées par l'intimé le 20 juillet 2021 et les pièces 1 à 56 produites par l'intimé, ainsi que toutes éventuelles nouvelles conclusions adverses au fond à venir,

de condamner M. [M] [X] aux dépens de l'incident.

Suivant conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 21 août 2021, M. [E] [A] [M] [X] demandait au conseiller de la mise en état, au visa des articles 909 et 910-3 du code de procédure civile, de déclarer recevables les conclusions d'intimé déposées le 20 juillet 2021 par M. [E] [A] [M] [X] et les pièces n° 48 à 56 produites, ainsi que toutes éventuelles nouvelles conclusions en réponse aux conclusions adverses à venir.

Par ordonnance du 3 février 2022, le conseiller de la mise en état a :

déclaré recevables les conclusions d'intimé transmises le 20 juillet 2021 par M. [E] [A] [M] [X] ainsi que les pièces produites ;

réservé les dépens en fin de cause.

Suivant leurs dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats les 28 octobre et 8 novembre 2022, les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique (anciennement Energy Pool International) demandent à la cour :

Vu l'article 9 de l'ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats, du régime général et de la preuve des obligations,

Vu les articles 1134, 1135, 1147 ancien du code civil applicables aux engagements contractuels des parties,

Vu l'article 1231 et suivants du Code civil,

de confirmer le jugement dont appel en ce que le Tribunal a rejeté la demande indemnitaire formée par M. [A] [X] à titre reconventionnel.

d'infirmer le jugement du tribunal de commerce en qu'il a :

« DIT les sociétés ENERGY POOL DEVELOPPEMENT et ENERGY POOL AFRIQUE mal fondées à établir que M. [E] [A] [M] [X] a violé les dispositions du Pacte et des statuts de la société EPC, et que les conditions de mise en œuvre de la procédure de cession forcée des titres de M. [E] [A] [M] [X] a leur bénéfice sont réunies, et les déboute de leurs demandes formées de ce chef.

DIT les sociétés ENERGY POOL DEVELOPPEMENT et ENERGY POOL AFRIQUE mal fondées en leurs demandes de dommages et intérêts et les en déboute.

CONDAMNÉ les sociétés ENERGY POOL DEVELOPPEMENT et ENERGY

POOL AFRIQUE à payer chacune à M. [E] [A] [M] [X] une somme de

5.000 euros au titre de l'article 700 du CPC »

Et, statuant à nouveau,

de juger les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique recevables et fondées en toutes leurs demandes et en leur appel,

d'ordonner, immédiatement à compter de l'arrêt d'appel à intervenir, la cession forcée de l'intégralité des actions détenues par M. [A] [M] [X] dans le capital social de la société EPC, au bénéfice de la société EPD qui en devient plein propriétaire et détient tous pouvoirs pour opérer le transfert de propriété desdites actions, y compris par signature du ou des ordres de mouvements de titres, y compris par la signature de tous documents ou actes devant être signés par M. [M] [X], et par la régularisation de tous documents, démarches, actes et votes permettant ce transfert de propriété ;

d'ordonner la désignation d'un expert pour la fixation du prix de cession des Titres sous Option,

de condamner M. [X] au paiement de la somme de 2.408.900,44 euros au titre de la dette d'EPC ;

de condamner M. [M] [X], à payer à la société EPD, la somme de 352.809,82 euros, majorée des intérêts applicables, au titre des frais nécessairement engagés par Energy Pool ;

de condamner M. [M] [X] à payer à la société EPD la somme de 6.282.341,21 euros majorés des intérêts légaux applicables au titre du manque à gagner ;

de condamner M. [M] [X] à payer aux sociétés Energy Pool, la somme de 100.000 euros au titre du préjudice moral ;

de condamner M. [M] [X] à payer aux sociétés Energy Pool Développement la somme de 225.961,12 euros TTC en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de l'instance.

Suivant ses dernières conclusions transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 20 juillet 2021, M. [E] [A] [M] [X] demande à la cour, au visa des articles 1103, 1147 et 1315 du code civil :

A titre principal :

de débouter les sociétés Energy Pool Afrique et Energy Pool Développement de l'ensemble de leurs demandes relatives à la cession forcée des titres de M. [M] [X], ainsi qu'à la désignation d'un expert et aux diverses demandes de paiements et d'indemnisations.

A titre reconventionnel :

de condamner les sociétés Energy Pool Afrique et Energy Pool Développement au paiement de dommages et intérêts d'un montant de deux cent mille euros (200.000 euros) à M. [M] [X] pour le préjudice subi.

de condamner les sociétés Energy Pool Afrique et Energy Pool Développement de la somme de 8.000 euros au titre de l'article 700 du Code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

*

La clôture a été prononcée suivant ordonnance en date du 15 décembre 2022.

SUR CE, LA COUR,

Sur les dernières conclusions et pièces de l'intimé

L'intimé a transmis via le RPVA des conclusions et pièces le jour de la clôture, le 15 décembre 2022, à 23h26. Les sociétés appelantes demandent à la cour, suivant conclusions de procédure du 6 janvier 2023, de les déclarer irrecevables au visa de l'article 802 du code de procédure civile. M. [M] [X] réplique par conclusions de procédure du 7 janvier 2023 en soutenant qu'il lui était loisible de conclure jusqu'à 23h59 le 15 décembre 2022.

Aux termes de l'article 802 du code de procédure civile :

« Après l'ordonnance de clôture, aucune conclusion ne peut être déposée ni aucune pièce produite aux débats, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office.

Sont cependant recevables les demandes en intervention volontaire, les conclusions relatives aux loyers, arrérages, intérêts et autres accessoires échus et aux débours faits jusqu'à l'ouverture des débats, si leur décompte ne peut faire l'objet d'aucune contestation sérieuse, ainsi que les demandes de révocation de l'ordonnance de clôture.

Sont également recevables les conclusions qui tendent à la reprise de l'instance en l'état où celle-ci se trouvait au moment de son interruption. ».

Il ressort des pièces procédurales versées aux débats que la clôture de l'instruction de l'affaire a, après avoir été reportée, été prononcée lors de l'audience de mise en état du 15 décembre 2022 à 10 heures, les parties ayant été préalablement averties de la date et de l'heure fixées pour la clôture.

En transmettant de nouvelles conclusions et de nouvelles pièces postérieurement à la mise en état du jour - et donc après la signature de l'ordonnance de clôture ', audience qui n'a pas pour habitude de se prolonger jusqu'à 23h59, l'intimé a nécessairement fait signifier ses écritures et pièces hors délai, sans toutefois réclamer de révocation de l'ordonnance de clôture ni fait savoir les raisons de cette communication tardive.

Il y a donc lieu de déclarer irrecevables les conclusions n° 2 et pièces n° 57 à 63 transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 15 décembre 2022 par M. [E] [A] [M] [X]. La cour n'est en conséquence saisie que des conclusions n° 1 et des pièces n° 1 à 56 transmises le 20 juillet 2021 par M. [E] [A] [M] [X] ;

Sur les demandes des sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique

Les sociétés Energy Pool soutiennent que M. [M] [X] a violé les dispositions du Pacte et des statuts de la société EPC et notamment la clause de non-concurrence du Pacte, et que les conditions de mise en œuvre de la procédure de cession forcée des titres de M. [M] [X] à leur bénéfice sont réunies. Plus précisément, les sociétés appelantes font valoir les griefs formulés à l'encontre de l'intimé qui aurait violé le Pacte d'actionnaires i) en orientant la stratégie et le développement d'EPC sans l'accord du président d'EPA (anciennement EPI) et/ou EPD et contre la stratégie globale du groupe ENERGY POOL (article 3.2 (b) du Pacte d'actionnaires) ; ii) en ne sollicitant pas au préalable l'accord du président d'EPI pour des décisions et des actions impliquant ou faisant référence à une des sociétés du groupe ENERGY POOL ou impliquant l'utilisation de l'image ou des marques du groupe ENERGY POOL (article 3.3, m) ; iii) en ne sollicitant pas au préalable l'accord du président d'EPI sur les modalités de gestion de la trésorerie de la Société et des Filiales au-dessus d'un montant de 10.000.000 FCFA HT (article 3.3,t) ; iv) en ne sollicitant pas au préalable l'accord du président d'EPI sur le choix des solutions relatives aux systèmes technologiques d'information, y compris notamment le choix des matériels et logiciels (article 3.3,v) ; v) en ne sollicitant pas au préalable l'accord du président d'EPI pour toute décision sur les moyens d'optimiser la mutualisation des fonctions support du Groupe Energy Pool et la politique d'achats des Sociétés du Groupe Energy Pool (article 3.3 w).

De manière plus particulière, [A] [M] [X] aurait également méconnu le Pacte d'actionnaires i) en s'arrogeant un contrôle exclusif sur la comptabilité d'EPC et faire des choix de dépenses occultes et injustifiées sans solliciter l'accord du président d'EPA et/ou EPD ; ii) en modifiant les pouvoirs de signature bancaire sans même en informer EPC ou ENERGY POOL ni leur demander leur accord, iii) en s'arrogeant un pouvoir de représentation à titre subsidiaire puis iv) de se nommer Président Directeur Général de la Société sans solliciter l'accord d'EPA et v) de résilier le contrat de prestation de services qui liait EPC et EPD pour l'exécution du Marché public, dans le but de confier cette sous-traitance à un concurrent d'ENERGY POOL. Ces violations des termes du Pacte d'actionnaires se seraient poursuivies pendant plusieurs années de 2017 à 2021 puisque [A] [M] [X] a empêché l'Administrateur provisoire d'exécuter sa mission et privé EPC de jouir de ses locaux historiques, rendant impossible l'exécution du Marché Public. L'ensemble des agissements de [A] [M] [X] constitue, en outre, des actes de concurrence déloyale et de parasitisme, en violation de l'article 11 du Pacte d'actionnaires qui stipule un engagement d'exclusivité et de non-concurrence par lesquels [A] [M] [X] s'est interdit de porter atteinte aux droits d'EPC et de toute société du groupe ENERGY POOL, par des actions de concurrence déloyales (Voir Pièce n°9 précitée).

L'intimé fait valoir que ce sont au contraire les sociétés Energy Pool qui ont manqué à toutes leurs obligations, qu'elles ont entendu s'arroger tous pouvoirs alors qu'il détenait 51 % des parts et que le Pacte d'actionnaires produit est un faux, ainsi que le contrat d'apporteur d'affaires produit par les sociétés Energy Pool et daté du 2 janvier 2012. M. [M] [X] soutient en effet n'avoir jamais apposé ses initiales en paraphe. Il fait valoir qu'il a œuvré pour la signature du Marché public le 26 décembre 2013 entre le Ministère des Marchés Publics et la société EPC et que les délais prévus n'ont pas été respectés par la sous-traitant, la société EPD. Il explique ne outre que les statuts de la société EPC ont été rédigés par les avocats du cabinet Fidal de la société EPA et qu'ils contiennent des erreurs rendant invalides certains points au regard de l'Acte Uniforme relatif au Droit des Sociétés Commerciales (OHADA). Il déclare enfin que les sociétés Energy Pool avaient pour objectifs de garder le contrôle de la société locale, de récupérer l'argent qui y rentrait ainsi que la majorité du capital et à ne pas installer à [Localité 9] la centrale de modulation de l'énergie.

Sur la responsabilité contractuelle

Aux termes de l'article 1134 ancien du code civil :

« Les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

Elles ne peuvent être révoquées que de leur consentement mutuel, ou pour les causes que la loi autorise.

Elles doivent être exécutées de bonne foi. »

En vertu de l'article 1147 ancien du même code :

« Le débiteur est condamné, s'il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts, soit à raison de l'inexécution de l'obligation, soit à raison du retard dans l'exécution, toutes les fois qu'il ne justifie pas que l'inexécution provient d'une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu'il n'y ait aucune mauvaise foi de sa part. »

Bien que contestant la validité du Pacte d'actionnaires du 21 août 2012, M. [M] [X] n'apporte aucun élément de nature à démontrer que sa signature et ses paraphes sur les pages du Pacte d'actionnaires sont des faux.

Le Pacte d'actionnaires du 21 août 2012 précise que la société Energy Pool Cameroun « a été constituée dans le but notamment de mettre en place l'exploitation d'un pilote de modulation d'électricité, plus généralement de développer une activité de modulation de consommation d'électricité et ponctuellement des missions d'efficacité énergétique ou d'accompagnement stratégique dans le domaine de l'énergie, conformément à l'objet social de la Société tel que détaillé dans les Statuts de la Société. ».

L'article 3.2 b) précise que « Le Président du Conseil d'Administration, dirigeant non exécutif, oriente la stratégie et le développement de la Société, d'un commun accord avec le Président d'EPI et/ou EPD et en lien avec la stratégie globale du Groupe Energy Pool. ».

Il résulte clairement de cet article - mais également des Statuts d'EPC - que le Pacte n'a pas entendu conférer à M. [M] [X], désigné Président du Conseil d'Administration pour cinq ans, de fonction exécutive au sein de la société EPC. La fonction de M. [M] [X] n'était en effet pas de prendre des mesures exécutives relatives au Projet, en témoignent les différents contrats négociés sur place avec des industriels, signés de la main du Directeur Général de la société EPC. Les sociétés Energy Pool ont en effet conclu plusieurs contrats avec des industriels sur place, telles les sociétés Soctral le 15 mars 2016, Brasseries du Cameroun le 25 janvier 2016, Alucam le 15 mars 2016 et FME Gaz le 13 mai 2015.

L'article 3.3 du Pacte prévoit une liste des décisions relatives à la Société et ses Filiales qui doivent préalablement être approuvées par le président d'EPI, et notamment en 3.3 m) « toute décision ou action impliquant ou faisant référence à une société du Groupe Energy Pool, à l'exclusion de la Société, ou impliquant l'utilisation des marques ou de l'image du Groupe Energy Pool par la Société », « les modalités de gestion de la trésorerie de la Société et des Filiales, y compris notamment la réalisation de tous placements financiers au-dessus d'un montant de 10.000.000 FCFA HT » (3.3 t), « le choix des solutions relatives aux systèmes technologiques d'information, y compris notamment le choix des matériels et logiciels » (3.3v) et « toute décision sur les moyens d'optimiser la mutualisation des fonctions support du Groupe Energy Pool et la politique d'achats des Sociétés du Groupe Energy Pool » (3.3 w).

La production en appel des décisions correctionnelles rendues à l'encontre de l'intimé postérieurement au prononcé du jugement de première instance constitue un élément nouveau qui donne un éclairage important sur les griefs formulés par les sociétés Energy Pool.

Le tribunal de première instance, section correctionnelle, de Douala-Bonanjo, a, par jugement le 16 septembre 2021, confirmé par décision du 17 février 2022 à la suite de l'opposition de M. [M] [X], reconnu ce dernier coupable de détournement d'actifs, de faits de débiteur frauduleux et de tromperie envers associés au regard des articles 74, 313, 334-2 et 331 du code pénal applicable camerounais, pour avoir procédé à des décaissements et retraits de sommes dans les comptes d'EPC et EPD dont il n'a pu ni justifier l'usage ni la destination, pour avoir attribué les locaux d'Energy Pool à une autre société dont il est le gestionnaire (2L International Engeneering), ce, à l'insu des Sociétés Energy Pool, pour s'être soustrait à l'obligation de rembourser aux Sociétés Energy Pool le prêt qu'elles lui avaient consenti aux fins de lui permettre d'acquérir 51% du capital d'EPC, pour s'être soustrait à son obligation de payer le loyer des locaux occupés par EPI et EPD, les rendant ainsi redevables de plusieurs mois de loyers échus et impayés. M. [M] [X] a donc été condamné à une peine de 3 ans d'emprisonnement et 2.000.000 F d'amende, à payer aux Sociétés Energy Pool la somme de 376.224.418 FCFA, s'est vu décerner un mandat d'incarcération pour le recouvrement des condamnations pécuniaires prononcées à son encontre au profit de l'État camerounais et un mandat d'arrêt pour l'exécution de la peine privative de liberté prononcée à son encontre.

Il a également été reconnu coupable de rébellion et refus d'exécution une décision de justice devenue définitive, au sens des articles 74, 157 et 181-1 du code pénal applicable au Cameroun, pour avoir opposé une résistance à l'exécution de l'ordonnance définitive de désignation de l'administrateur provisoire des sociétés EPI et EPD du 8 mars 2017 (désignant M. [F] [H] [C], expert agréé en audit finance et comptabilité), en faisant irruption sur les lieux refusant de décliner son identité aux forces de l'ordre, pour avoir menacé l'administrateur provisoire, pour l'avoir dénigré, pour s'être opposé avec l'aide de complices avec résistance à l'ouverture de la porte des locaux obligeant l'administrateur provisoire et l'huissier à quitter les lieux. Il a donc été condamné à une peine d'un an d'emprisonnement et à payer aux Sociétés Energy Pool la somme de 5.000.000 FCFA par le Tribunal correctionnel de Douala-Bonanjo qui a également décerné un mandat d'arrêt pour l'exécution de la peine privative de liberté. A la suite de l'opposition de [A] [M] [X], ces condamnations prononcées par le Tribunal correctionnel de Douala-Bonanjo, le 16 septembre 2021 ont été confirmées par la juridiction le 17 février 2022

Or, le 26 décembre 2013, un Marché Public a été passé entre EPC et l'État camerounais avec pour objet « la réalisation de l'étude de faisabilité de la modulation de la consommation électrique au Cameroun à partir de l'établissement et l'exploitation d'une centrale virtuelle de 20MW à [Localité 9] », la société EPD étant désignée comme sous-traitant exclusif. Les trois phases prévues pour la réalisation de ce marché ont cependant été entravées par les manquements, largement développés par la juridiction pénale camerounaise et ayant donné lieu à condamnation, de M. [M] [X] qui de plus n'a eu de cesse de contester la nomination de l'administrateur provisoire désigné au regard de la « mésintelligence avérée doublée d'un conflit d'intérêt patent entre les organes tant de gestion, de direction que des parties litigantes du reste actionnaires de la société Energy Pool Cameroun, toutes choses ayant conduit à la démission des demanderesses d'une part et la mise en œuvre de la procédure d'alerte d'autre part » (ordonnance de référé du président du tribunal de première instance Douala-Bonanjo du 8 mars 2017). Les appelantes rappellent que le marché initialement prévu pour 27 mois devait s'achever mi-2016 mais qu'à ce jour la 3ème phase n'a pas encore été réceptionnée. Alors qu'il avait été chargé par le conseil d'administration d'EPC du 29 juin 2012 de signer le Marché et de l'exécuter, il n'a fait aucune diligence. Les détournements de fonds et actes frauduleux ont creusé le déficit ultérieurement constaté dans les comptes d'EPC, ce que les juridictions pénales camerounaises ont imputé à M. [M] [X], condamné pénalement.

Par ailleurs, l'échange de courriels entre M. [T] [W] et M. [E] [A] [M] [X] les 8 et 14 février 2012 confirme l'existence d'un contrat d'apporteur d'affaires et de prestations entre EPI et M. [M] [X], un exemplaire signé et paraphé daté du 2 janvier 2012 étant d'ailleurs produit. M. [X] devait intervenir en qualité d'apporteur d'affaires afin de :

développer le réseau d'Energy Pool International au Cameroun afin d'avoir accès aux décideurs du pays pour mettre en place un mécanisme d'effacement et favoriser la création d'une centrale de modulation d'Energy Pool,

introduire Energy Pool auprès des principaux consommateurs du pays,

accompagner Energy Pool International dans la recherche de financements pour une centrale de modulation pilote sur 24 mois.

Il a été amplement démontré supra que M. [M] [X] n'a pas œuvré pour respecter les termes de son engagement mais a au contraire détourné les fonds de la société EPC à des fins personnelles, ainsi qu'en attestent notamment le rapport du commissaire aux comptes sur les comptes de l'exercice clos le 31 décembre 2014 et l'examen du compte courant de l'intimé et des comptes d'EPC, permettant de relever de nombreuses dépenses injustifiées et étrangères à l'objet de la société EPC ainsi que des virements en faveur de proches de M. [M] [X].

Enfin le 28 septembre 2016, M. [M] [X], qui n'était plus président du conseil d'administration depuis 2014, a écrit à la Banque Société Générale afin de s'attribuer un pouvoir exclusif sur les comptes bancaires d'EPC à l'insu des sociétés Energy Pool, caractérisant une nouvelle fois les dissimulations opérées par l'intimé.

En outre, l'article 1er du Pacte précise : « le Pacte constitue un accord supplémentaire aux Statuts de la Société, que chacune des Parties s'engage à respecter. ».

L'article 27 des Statuts de la société EPC prévoit que : « L'assemblée ne délibère valablement, sur première convocation, que si au moins deux actionnaires sont présents ou représentés. »

M. [M] [X] a convoqué et tenu une assemblée générale le 2 décembre 2016 au cours de laquelle il était seul présent, violant donc le minimum requis de deux actionnaires pour la validité de l'assemblée, comme le prévoit l'article 27 précité.

Ainsi est produit le jugement n° 272/COM du tribunal de grande instance de Wouri à Douala en date du 5 juin 2017, annulant les résolutions de l'Assemblée générale du 2 décembre 2016. Dans cette décision, la juridiction camerounaise reconnaît au préalable, face aux moyens soulevés par M. [M] [X], que les statuts de la société EPC sont « parfaitement réguliers » et « constituent la loi des parties ». Elle relève ensuite que les sociétés EPI et EPD n'ont reçu aucune convocation pour l'Assemblée Générale et que la publcation dans le Cameroun Tribune est intervenue 11 jours seulement avant la tenue de l'Assemblée, au lieu des 15 jours calendaires prévus par l'article 23 de statuts.

Est également versé aux débats le jugement n°273/COM du tribunal de grande instance de Wouri à Douala en date du 5 juin 2017, annulant le procès-verbal de réunion du Conseil d'Administration de EPC du 16 décembre 2016. La juridiction camerounaise a retenu que M. [M] [X] s'était auto désigné Directeur Général de EPC sans que cette nomination n'ait été proposée par EPI et en dehors de la présence de ses deux administrateurs que sont EPD et EPI, violant ainsi l'article 16 de statuts d'EPC, avait créé un poste de Directeur d'exploitation avec nomination audit poste et avait procédé à la rupture unilatérale du contrat de prestation entre EPC et EPD, sous-traitant.

L'intimé ne peut donc plus s'appuyer sur ces résolutions qui ont été annulées par la juridiction camerounaise.

Par ailleurs, les griefs avancés par M. [M] [X] sur les objectifs visés par les sociétés Energy Pool, qui auraient fait preuve de déloyauté dès le début des relations contractuelles, ne résistent pas à l'examen des faits, dans la mesure où le Marché Public s'est poursuivi et qu'elles ont au contraire tout mis en œuvre pour que les trois phases du Projet soient réceptionnées, malgré le retard pris en raison des déboires d'EPC résultant des fraudes opérées par M. [X].

Les sociétés appelantes démontrent par les éléments justificatifs qu'elles produisent que M. [M] [X] a poursuivi ses violations du Pacte d'actionnaires et manquements contractuels de 2017 à 2021, empêchant la bonne exécution du Marché Public. Ces manquements ont généré des préjudices pour les sociétés Energy Pool. Sa responsabilité contractuelle est engagée. Le jugement sera infirmé en ce qu'il a débouté les sociétés Energy Pool de toutes leurs demandes.

Sur la demande de cession forcée des titres de M. [M] [X] et de désignation d'un expert

L'article 9 du Pacte prévoit le droit, pour les sociétés Energy Pool, de forcer M. [X] à vendre sa participation sous forme d'« option d'achat » dans les termes suivants :

 

« 9.1. Non-respect du Pacte

 

En cas d'inexécution par une Partie d'une des dispositions du Pacte ou des Statuts, et non régularisée dans les quinze jours après mise en demeure restée infructueuse, les autres Parties pourront, si elles le souhaitent, demander à bénéficier de leur droit de cession forcée portant sur l'intégralité des Titres de la Partie défaillante et dans les conditions stipulées au présent article 10, sans préjudice de toute action en responsabilité civile.

La Partie défaillante s'engage à vendre à l'une ou l'autre des Parties ou à toute personne à qui elle se substituerait, la totalité des Titres (ci-après ensemble les « Titres sous Option ») qu'elle détient ou détiendra au jour de la levée d'option, aux conditions détaillées ci-dessous.

Le prix de cession des Titres sous Option, à défaut d'accord entre les parties concernées, sera déterminé par un expert.

En cas d'infraction du Majoritaire aux dispositions du Pacte, des Statuts, ou d'une disposition du contrat de prestation de services entre la Société et EPD, EPD pourra, à sa discrétion, résilier le contrat de prestation de services entre la Société et EPD. L'ensemble des licences accordées par EPD à la Société dans le cadre du contrat susmentionné sera résilié et la Société n'aura ainsi plus aucun droit d'usage sur la marque ou le système d'information du Groupe Energy Pool.

 

9.2 Procédure

 

La promesse stipulée ci-dessus est consentie, et acceptée en tant que promesse, pour la durée du Pacte.

La levée d'option, conférée au titre de la promesse ci-dessus, pourra intervenir par notification à tout moment à compter de la survenance de tout évènement lui ayant donné naissance et ce pendant toute la durée du Pacte ['] ».

M. [M] [X] a signé le Pacte d'actionnaires et s'est donc engagé à vendre la totalité de ses parts à ses coactionnaires qui en feraient la demande dans l'hypothèse où il manquerait à ses obligations au regard du Pacte et des statuts d'EPC.

Ses nombreux manquements et fraudes ont été démontrés supra et justifient la cession forcée de ses parts.

Il convient par conséquent d'ordonner à compter de la signification du présent arrêt, la cession forcée de l'intégralité des actions détenues par M. [A] [M] [X] dans le capital social de la société Energy Pool Cameroun, au bénéfice de la société Energy Pool Développement.

Il y a lieu également d'ordonner la désignation d'un expert pour la fixation du prix de cession des Titres sous Option, selon des modalités prévues au présent dispositif.

Sur l'évaluation des préjudices

La société Energy Pool Développement réclame en premier lieu la somme de 2.408.900,44 euros au titre de la dette de la société Energy Pool Cameroun. Elle a en effet dû assumer des surcoûts afin de pallier les fraudes de M. [M] [X] et poursuivre le Marché Public et n'a pas été réglée des frais facturés au titre du contrat de prestation de services. Celui-ci prévoit en effet la refacturation de frais (exemple : informatique pour 307.000 euros).

La somme de 2.408.900,44 euros est justifiée par la pièce 120 retenant les deux sommes de 1.592.916,21 euros et 815.984,22 euros au titre de la créance de EPD envers EPC (les deux sommes sont bien présentes en F CFA dans la certification de créance du Commissaire aux comptes [V] [P] datée du 24 février 2022 à [Localité 9] et sont ici converties en euros). Ce montant est en outre justifié par les différentes factures émises à l'ordre de la société EPC par EPD et qui n'ont jamais été réglées.

L'appelante réclame en outre dans son dispositif la somme de 352.809,82 euros au titre des frais engagés par elle dont, notamment :

120.625,76 euros pour diverses factures citées en pièce n°113 telles que des honoraires d'avocat ou de consulting dont frais d'hébergement et de restauration. Ces factures toutes en Francs CFA semblent cependant sans lien avéré avec les manquements reprochés à l'intimé.

137.231,54 euros pour des dizaines de factures citées en pièce n°114, de nouveau pour des frais d'avocat et des consulting pour le compte d'EPC. Cette somme est un doublon comme ayant déjà été réclamée au titre de la dette d'EPC.

Il est finalement fait état d'une certification de créance par Commissaire aux comptes de 348.845,80 euros du 24 février 2022 en pièce n°120, pour justifier du montant sollicité au demeurant différent dans les motifs de celui réclamé au dispositif. Cependant, celui-ci écrit pour la somme de 230 936 411 précisée en Francs CFA (correspondant aux 348.845,50 euros) «...nous sommes dans l'impossibilité de nous prononcer sur l'exactitude ou non de la créance... ». Cette certification dont se prévaut l'appelante pour justifier des frais engagés n'a donc pas été validée par le Commissaire aux comptes. Les appelantes seront déboutées de leur demande à ce titre.

La société EPD réclame ensuite la somme de 6.282.341,21 euros au titre de son manque à gagner dont :

1 603 171,53 euros pour la rupture abusive du contrat comprenant :

Une rémunération de 10% du chiffre d'affaire lié à la modulation électrique qui aurait dû être de 46 762,77 euros par trimestre donc 1 028 781,02 euros pour 22 trimestres. Si la pièce n°6 (contrat de prestation entre EPD et EPC) comprend bien cette rémunération de 10% à l'article 4.2, le calcul de la somme de 46 762,77 euros par trimestres pendant 22 trimestres n'est absolument pas étayé.

Une redevance annuelle de 10.000 euros pour la fourniture du système d'information explicitée en pièce n°6 renvoyant au contrat de prestation entre EPD et EPC. La clause 4.4 du contrat fait bien état de cette redevance de 10.000 euros qui aurait dû courir depuis le 8 décembre 2016 pour un montant total de 60.000 euros. Cette somme est donc justifiée et n'a pu être perçue par la société EPD en raison de la résiliation abusive de son contrat à l'initiative de M. [M] [X].

Une rémunération de 5% du chiffre d'affaire par trimestres lié à la modulation électrique qui aurait dû être de 514 390,51 euros pour 22 trimestres. La pièce n°6 comprend bien cette rémunération de 5% à l'article 4.4 mais les appelantes ne justifient pas du calcul de la somme totale de 514 390,51 euros. Elles en seront déboutées.

758 029,30 euros pour la perte du gain espéré sur ce marché. La pièce citée n°7 étant le procès-verbal des délibérations et décision du CA du 29 juin 2012 fait bien état d'un coût de 900 000 euros mais aucune autre pièce n'est présentée pour justifier de la somme de 758 029,30 euros.

3 921 140,38 euros au total de perte de revenu futur pour un contrat de 2,4 millions d'euros par an avec une marge espérée de 30,41% donc 729 840 euros par an. Les pièces n°11 et n°130 mentionnées comportent des sommes uniquement en Francs CFA où la réalité des sommes perçues ou dues n'est pas justifiée. La pièce n°31 qui est un fichier Powerpoint et la pièce n°122 comportant un tableau dont la provenance reste inconnue et le contenu est inexploitable sont insuffisantes à justifier le montant sollicité.

Ainsi seule la somme de 60.000 euros au titre des redevances non perçues pour la licence du système d'information constitue un préjudice indemnisable car justifié.

Enfin les sociétés Energy Pool soutiennent avoir subi un préjudice moral mais ne démontrent pas l'atteinte à son image qui résulterait des agissements de M. [M] [X] vis-à-vis du public et partenaires commerciaux. Elles en seront déboutées.

Il convient par conséquent de condamner M. [E] [A] [M] [X] à payer à la société Energy Pool Développement les sommes de 2.408.900,44 euros au titre de la dette de la société Energy Pool Cameroun et celle de 60.000 euros au titre du manque à gagner résultant des redevances non perçues pour la licence du système d'information.

Sur la demande reconventionnelle de M. [E] [A] [M] [X]

L'intimé forme une demande reconventionnelle à hauteur de 200.000 euros sans toutefois démontrer de manquements des sociétés appelantes et alors que ses propres violations contractuelles ont été caractérisées supra.

Il sera débouté de sa demande à ce titre et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les dépens et l'article 700 du code de procédure civile

L'intimé succombant à l'action, il convient d'infirmer le jugement en ce qu'il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles. Il sera condamné aux dépens de première instance et d'appel. Il apparaît équitable de le condamner à payer aux sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

DECLARE irrecevables les conclusions n° 2 et pièces n° 57 à 63 transmises par le réseau privé virtuel des avocats le 15 décembre 2022 par M. [E] [A] [M] [X] ;

DECLARE en conséquence que la cour n'est saisie que des conclusions n° 1 et des pièces n° 1 à 56 transmises le 20 juillet 2021 par M. [E] [A] [M] [X] ;

INFIRME le jugement en toutes ses dispositions sauf en qu'il a débouté M. [E] [A] [M] [X] de sa demande reconventionnelle ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

ORDONNE à compter de la signification du présent arrêt, la cession forcée de l'intégralité des actions détenues par M. [A] [M] [X] dans le capital social de la société Energy Pool Cameroun, au bénéfice de la société Energy Pool Développement ;

ORDONNE une expertise et DESIGNE pour y procéder, en qualité d'expert M. [U] [K], commissaire aux comptes,

ACE

[Adresse 4]

[Localité 7]

Tél : [XXXXXXXX02]

Fax : [XXXXXXXX01]

Port :[XXXXXXXX03]

Courriel : [Courriel 10]

Avec pour mission d'évaluer le prix de cession des Titres sous Option de la société Energy Pool Cameroun ;

Dit que pour procéder à sa mission l'expert devra :

- convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l'occasion de l'exécution des opérations ou de la tenue des réunions d'expertise,

- se faire remettre toutes pièces utiles à l'accomplissement de sa mission,

- à l'issue de la première réunion d'expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations, l'actualiser ensuite dans le meilleur délai - en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations, - en les informant de l'évolution de l'estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s'en déduisent, sur le fondement de l'article 280 du code de procédure civile, et dont l'affectation aux parties relève du pouvoir discrétionnaire du juge suivant l'article 269 du même code, - en fixant aux parties un délai impératif pour procéder aux interventions forcées, - en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse,

- au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s'expliquera dans son rapport (par ex : réunion de synthèse, communication d'un projet de rapport), et y arrêter le calendrier impératif de la phase conclusive de ses opérations, compte tenu des délais octroyés devant rester raisonnable, - en fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse, - en rappelant aux parties, au visa de l'article 276, alinéa 2, du code de procédure civile, qu'il n'est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au delà de ce délai ;

Dit que l'expert devra communiquer un pré-rapport aux parties en leur impartissant un délai raisonnable pour la production de leurs dires écrits auxquels il devra répondre dans son rapport définitif ;

Fixe à la somme de 8.000 euros la provision concernant les frais d'expertise qui devra être consignée par les sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique à la régie de la cour d'appel de Paris le 20 avril 2023 au plus tard ;

Dit que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou de demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l'expert sera caduque et de nul effet ;

Dit que l'expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1 du code de procédure civile et qu'il déposera l'original de son rapport au greffe de la cour d'appel de Paris dans les dix mois suivant la date à laquelle il aura été informé de la consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge chargé du contrôle des expertises ;

Renvoie la cause et les parties et le contrôle de l'exécution de la mesure de l'instruction devant le magistrat chargé de la mise en état ;

CONDAMNE M. [E] [A] [M] [X] à payer à la société Energy Pool Développement les sommes de 2.408.900,44 euros au titre de la dette de la société Energy Pool Cameroun et celle de 60.000 euros au titre du manque à gagner résultant des redevances non perçues pour la licence du système d'information ;

DEBOUTE la société Energy Pool Développement de sa demande en paiement de la somme de 352.809,82 euros ;

DEBOUTE les sociétés Energy Pool Afrique et Energy Pool Développement de leur demande au titre de préjudice moral ;

CONDAMNE M. [E] [A] [M] [X] aux dépens de première instance et d'appel

CONDAMNE M. [E] [A] [M] [X] à payer aux sociétés Energy Pool Développement et Energy Pool Afrique la somme de 15.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.