Cass. 2e civ., 2 décembre 2010, n° 09-17.495
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Loriferne
Rapporteur :
Mme Robineau
Avocat général :
M. Mucchielli
Avocats :
SCP Baraduc et Duhamel, SCP Gadiou et Chevallier
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Besançon, 14 octobre 2009), que la caisse de mutualité sociale agricole de Franche-Comté (la CMSA), afin d'obtenir le recouvrement de créances de cotisations sociales, a pris deux inscriptions provisoires de nantissement judiciaire sur les parts sociales détenues par M. X... dans le capital du GFA X... et de l'EARL X... père et fils ; que M. X... a saisi un juge de l'exécution d'une demande tendant à la mainlevée de ces mesures ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de dire que les nantissements judiciaires provisoires de parts sociales régularisés à la demande de la CMSA sont pleinement valables et réguliers, alors, selon le moyen :
1°/ que ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'exécution forcée ou d'une mesure conservatoire les biens dont la loi prescrit ou permet l'insaisissabilité ; que dès lors que l'interdiction de cession de parts sociales, même forcée, sans l'agrément de l'ensemble des associés, est autorisée par la loi, elles ne peuvent faire l'objet d'aucune mesure conservatoire telles qu'une inscription de nantissement judiciaire provisoire ; qu'en déboutant M. X... de sa demande de mainlevée des nantissements de parts sociales diligentés à son encontre par la CMSA aux motifs que cette mesure ne constitue pas un acte de saisie de sorte que les statuts de l'EARL X... et ceux du GFA X... ne sauraient y faire échec, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 38 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 ;
2°/ que dès lors qu'il résulte des dispositions combinées des articles 14 de la loi du 9 juillet 1991 et 39 de son décret d'application du 31 juillet 1992 que les biens mobiliers incorporels nécessaires au travail du saisi et de sa famille ne peuvent être saisis, il en découle nécessairement qu'ils ne peuvent pas non plus faire l'objet d'une mesure conservatoire ; qu'en en jugeant autrement au motif que, ne constituant pas une saisie, les nantissements de parts sociales ne privent pas M. X... de son outil de travail de sorte que les dispositions de l'article 39 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 n'y sont pas applicables, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles 38 et 39 du décret susmentionné ;
Mais attendu que l'arrêt énonce exactement que l'inscription provisoire de nantissement est une mesure de sûreté judiciaire, et non une saisie, que les dispositions statutaires prévoyant l'agrément des associés en cas de cession des parts sociales nanties ne peuvent entraver la prise de cette sûreté et que l'article 39 du décret n° 92-755 du 31 juillet 1992 ne s'applique pas aux parts sociales ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le second moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de le condamner au paiement d'une amende civile de 1 500 euros et de 2 000 euros de dommages-intérêts au profit de la CMSA, alors, selon le moyen :
1°/ que la condamnation à l'amende civile prévue à l'article 559 du code de procédure civile doit être motivée ; qu'en condamnant M. X... au paiement d'une amende civile en se contentant d'affirmer que l'appel qu'il a formé s'inscrit dans le cadre d'une dénégation systématique de la loi consistant à s'opposer par tous les moyens au paiement des cotisations sociales et des majorations de retard dues à la CMSA en vertu de décisions de justice irrévocables et à multiplier les recours, sans relever aucun fait précis de nature à lui permettre de qualifier l'appel de dilatoire ou d'abusif la cour d'appel a violé l'article 559 du code de procédure civile ;
2°/ que la condamnation à des dommages-intérêts pour appel abusif doit également être motivée ; qu'en condamnant M. X... à payer des dommages-intérêts à la CMSA en se contentant d'énoncer que l'appel qu'il a formé s'inscrit dans le cadre d'une dénégation systématique de la loi consistant à s'opposer par tous les moyens au paiement des cotisations sociales et des majorations de retard dues à la CMSA en vertu de décisions de justice irrévocables et à multiplier les recours, sans relever aucun fait précis de nature à caractériser un abus dans l'usage des voies de recours, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que l'appel formé par M. X... s'inscrivait dans le cadre d'une dénégation systématique de la loi, consistant à s'opposer par tous les moyens au paiement des cotisations sociales dues à la CMSA en vertu de décisions de justice irrévocables et à multiplier les recours, la cour d'appel, caractérisant ainsi l'abus commis par M. X..., a pu en déduire que son appel revêtait un caractère abusif et le condamner à une amende civile et à des dommages-intérêts ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.