CA Caen, 2e ch. civ. et com., 31 mars 2022, n° 20/00859
CAEN
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
CAETOILE (SNC)
Défendeur :
THOM (SAS)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme EMILY
Conseillers :
Mme COURTADE, M. GOUARIN
Avocats :
Me Gaël B., Me Jérôme N., Me Diane B., Me Brigitte B. S.
Selon acte sous seing privé du 5 décembre 1994, la société GM 92, aux droits de laquelle vient la société Caetoile, a consenti à compter du 1er avril 1995 pour une durée de 12 ans à la société Quatuor, aux droits de laquelle est venue la société Histoire d'or, devenue la société Thom, un bail sur des locaux commerciaux de 150 m2 constitués des lots n°41 et 42 de la galerie marchande du centre commercial Mondeville [...], moyennant un loyer minimum garanti d'un montant de 450.000 francs, soit 68.602,06 euros, indexé et un loyer variable correspondant à 6 % du chiffre d'affaires, l'activité autorisée étant l'horlogerie, la bijouterie et l'orfèvrerie.
Le 30 mars 2007, ce bail commercial a été renouvelé.
Par actes des 25 et 27 septembre 2012, la société Caetoile a fait délivrer à la société Thom un congé au 31 mars 2013 avec une offre de renouvellement à compter du 1er avril 2013, pour une durée de 12 ans, moyennant un loyer annuel d'un montant de 135.000 euros hors taxes (HT) et hors charges (HC), indexé sur l'indice des loyers commerciaux, outre le maintien du loyer variable additionnel correspondant à 6 % HT du chiffre d'affaires.
Suivant lettre du 29 janvier 2013, la société Thom a accepté le principe du renouvellement du bail commercial mais contesté le montant du loyer proposé.
Par lettre recommandée avec demande d'avis de réception du 26 mars 2013, la société Caetoile a notifié à la société Thom un mémoire préalable en fixation du loyer du bail renouvelé puis, suivant acte d'huissier du 8 mars 2017, a fait assigner celle-ci devant le juge des loyers commerciaux du tribunal de grande instance de Caen aux fins, notamment, de voir fixer le loyer du bail renouvelé à compter du 1er avril 2013 à la somme annuelle de 135.000 euros HC et HT, avec intérêts au taux légal.
Selon jugement du 11 septembre 2017, une expertise judiciaire a été ordonnée, confiée à MM. L. et L., experts près la cour d'appel de Caen.
Ces experts ont déposé leur rapport le 30 mars 2018, concluant que la valeur locative des locaux en cause dans le cadre du renouvellement du bail commercial à compter du 1er avril 2013 pouvait être fixée à la somme de 110.100 euros par an HT, sur la base de 734 euros par m2.
Par jugement du 31 janvier 2020, le juge des loyers commerciaux du tribunal judiciaire de Caen a :
- constaté l'accord des parties sur le renouvellement du bail commercial des locaux situés RN 13, centre commercial Mondeville 2 (lots n°41 et 42) à Mondeville à compter du 1er avril 2013
- fixé le prix du loyer annuel du bail renouvelé à partir du 1er avril 2013 à la somme de 102.750 euros hors taxes et hors charges,
- ordonné l'exécution provisoire,
- débouté les parties de leurs demandes fondées sur l'article 700 du code de procédure civile,
- condamné la société Caetoile et la société Cafan à payer chacune la moitié des dépens.
Selon déclaration du 19 mai 2020, la société Caetoile a interjeté appel de cette décision.
Par dernières conclusions du 9 février 2021, l'appelante demande à la cour de la déclarer recevable et bien fondée en son appel, de rejeter l'appel incident de la société Thom ainsi que ses demandes, d'infirmer le jugement attaqué sauf en ce qu'il a constaté l'accord des parties sur le renouvellement du bail commercial à compter du 1er avril 2013 et en ce qu'il a rejeté les demandes d'abattements formées par la société Thom, statuant à nouveau dans la limite de l'appel, de fixer à la somme de 135.000 euros hors taxes et hors charges le loyer annuel du bail renouvelé dont la société Thom sera redevable à compter du 1er avril 2013.
Subsidiairement, elle sollicite la fixation dudit loyer à la somme de 130.500 euros hors taxes et hors charges après prise en compte, exclusivement, de la décapitalisation des droits d'entrée et de la qualité de l'emplacement des locaux loués.
La société Caetoile demande à la cour de dire que la société Thom sera tenue de lui payer les intérêts au taux légal sur les arriérés de loyer à compter du 1er avril 2013 et de condamner celle-ci à lui verser la somme de 4.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire.
Par dernières conclusions du 10 janvier 2022, la société Thom demande à la cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu'il a constaté l'accord des parties sur le renouvellement du bail commercial à compter du 1er avril 2013, de l'infirmer en ce qu'il a fixé le loyer du bail renouvelé à la somme annuelle de 102.750 euros, en ce qu'il l'a déboutée de sa demande de condamnation de la société Caetoile aux dépens comprenant les frais d'expertise judiciaire ainsi qu'au paiement de la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité de procédure.
Elle demande à la cour, statuant à nouveau dans cette limite, de la déclarer recevable en son appel incident, de fixer le montant annuel du loyer du bail renouvelé à la somme de 71.925 euros, subsidiairement, à la somme de 74.309,99 euros en principal, hors taxes et hors charges, à compter du 1er avril 2013.
En tout état de cause, l'intimée sollicite la condamnation de la société Caetoile au paiement de la somme de 5.000 euros à titre d'indemnité de procédure ainsi qu'aux entiers dépens de première instance et d'appel comprenant les frais d'expertise judiciaire.
La mise en état a été clôturée le 26 janvier 2022.
Pour plus ample exposé des prétentions et moyens, il est référé aux dernières écritures des parties.
MOTIVATION
1. Sur la fixation du loyer commercial
A hauteur d'appel, les parties maintiennent leur accord sur le renouvellement du bail commercial en cause à compter du 1er avril 2013.
Les experts judiciaires ont, dans leur rapport le 30 mars 2018, conclu que la valeur locative des locaux litigieux dans le cadre du renouvellement du bail commercial à compter du 1er avril 2013 pouvait être fixée à la somme de 110.100 euros par an HT, sur la base de 734 euros par m2.
L'emploi par les experts à la méthode par comparaison avec des valeurs de référence n'est pas discutée par les parties, lesquelles s'accordent également sur l'évaluation du loyer du bail renouvelé en fonction de la valeur locative des locaux loués.
Aux termes de l'article L. 145-33 du code de commerce, le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
À défaut d'accord, cette valeur est déterminée d'après :
1° les caractéristiques du droit local considéré,
2° la destination des lieux,
3° les obligations respectives des parties,
4° les facteurs locaux de commercialité,
5° les prix couramment pratiqués dans le voisinage.
Ces éléments s'apprécient dans les conditions fixées aux articles R. 145-3 à R. 145-11.
Le fait que les valeurs de référence retenues par les experts judiciaires correspondent à des baux commerciaux concernant des locaux situés dans le même centre commercial que ceux en cause et consentis dans les mêmes conditions ne peut faire obstacle à l'application des dispositions précitées, ces loyers ne servant que de référence et la valeur locative des locaux litigieux étant fixée en fonction des dispositions légales et réglementaires ainsi que de ses caractéristiques propres (3ème civ. 8 avril 2021, n°19-23.183 ; 3ème civ. 24 novembre 2021, n°20-21.570).
Le premier juge a considéré que le loyer annuel du bail renouvelé devait être fixé à la somme de 102.750 euros HT et HC (150 m2 X 685 euros HT et HC/m2/an).
1.1 Sur l'emplacement du local
S'agissant de l'emplacement du local loué au sein de la galerie marchande de Mondeville 2, qui constitue une une unité autonome de marché admise par les parties, le premier juge a retenu qu'il ne présentait pas un caractère exceptionnel comme soutenu par le bailleur, dès lors que, s'ils sont situés à un angle d'allées de circulation des chalands, ces locaux sont éloignés des deux entrées principales du centre commercial et ne sont pas situés dans l'allée de la ligne de caisses de l'hypermarché, lequel est le c'ur commercial de l'ensemble, vers lequel le flux naturel des consommateurs tend à s'orienter pour le rejoindre depuis l'axe des deux entrées, les locaux litigieux se trouvant dans l'allée latérale à partir de ces entrées.
Il en a déduit qu'en l'absence de données objectives sur les flux réels du public dans la galerie marchande que la société Caetoile administre et exploite, il ne pouvait être retenu de majoration de la valeur locative au titre d'un emplacement particulièrement favorable par rapport à ceux qu'ont retenus les experts judiciaires.
La société Thom s'approprie les motifs du premier juge, ajoutant que certains des emplacements de référence relevés par les experts bénéficient d'un meilleur emplacement tel celui d'Etam, situé face à la ligne de caisses et bénéficiant d'une double entrée, ou encore Du pareil au même, Société générale, Promod, Bizbee et Brice.
La société Caetoile soutient que les experts judiciaires ont exactement qualifié de favorable l'emplacement des locaux loués en ce qu'ils sont situés à l'angle de plusieurs allées de circulation et bénéficient d'une entrée largement ouverte tant sur la place centrale du centre commercial Mondeville 2 que sur deux allées de circulation, entre l'un des accès principaux au centre et une entrée de l'hypermarché, et ont justement estimé que la qualité de cet emplacement justifiait une majoration. Elle fait valoir que les locaux loués jouissent d'un emplacement exceptionnel car ils constituent le passage obligé des chalands, qui viennent effectuer leurs achats dans la galerie marchande et/ou pour accéder à l'entrée de l'hypermarché Carrefour et que les magasins situés au droit de la ligne de caisses d'un hypermarché ne profitent pas nécessairement des flux de ce dernier car les clients de l'hypermarché accèdent généralement directement à celui-ci sans flâner devant les boutiques se trouvant face aux caisses et, lorsqu'ils en ressortent, rejoignent directement le parking.
C'est à juste titre que les experts judiciaires ont retenu la situation favorable de l'emplacement des locaux loués à la société Thom, situés sur la place centrale de la galerie marchande, entre les deux entrées du centre commercial, au croisement de quatre allées dont l'une située à l'une des deux entrées de l'hypermarché et deux autres à l'un des deux mails principaux de la galerie marchande, outre celui situé au droit de la ligne de caisses de l'hypermarché Carrefour.
Les constatations et évaluations des experts judiciaires ne sont pas utilement discutées par la société Thom dès lors, notamment, qu'aucun des magasins Bizbee, Brice, Etam, Du pareil au même, Promod et Société générale évoqués par l'intimée ne sont situés au croisement de quatre allées de la galerie marchande, les locaux occupés par Etam étant placés sur le mail conduisant à la ligne de caisses mais ne lui faisant pas face.
Il s'ensuit que la majoration fixée par les experts en fonction de cette situation plus favorable que les autres locaux de référence doit être retenue.
1.3 Sur les obligations respectives des parties
Concernant les obligations respectives des parties et les abattements sollicités par la société Thom, le premier juge a estimé que la circonstance que le bail en cause a été consenti pour une destination restrictive en ce qu'il est limité à une activité d'horlogerie, bijouterie et orfèvrerie ne justifiait pas d'abattement sur les valeurs de référence retenues par les experts judiciaires, au motif qu'il n'était pas établi que ces dernières portent sur des baux tous commerces, les locaux référencés étant loués dans des conditions identiques, et qu'à l'intérieur comme aux abords du centre commercial Mondeville 2 il n'est pas rapporté une forte concurrence dans l'activité considérée.
Ce chef du jugement entrepris n'est pas critiqué.
S'agissant de l'abattement de 5 % au titre de la taxe foncière mise à la charge de la société Thom par le bail, le premier juge l'a écarté parce qu'une telle clause correspond à un usage répandu, non contraire aux dispositions, postérieures au renouvellement du bail litigieux, de l'article R. 145-35 3° du code de commerce issu du décret n°2014-1317 du 3 novembre 2014, et qu'il n'est pas démontré l'existence au sein de cette galerie marchande de baux ne prévoyant pas un tel transfert de la taxe foncière à la charge du preneur.
La société Caetoile s'approprie les motifs du premier juge, ajoutant que le montant du loyer fixé tient compte de la refacturation de la taxe foncière, qu'une telle refacturation est d'usage dans les centres commerciaux et a été appliquée aux autres preneurs du centre commercial Mondeville 2, de sorte qu'appliquer un abattement à ce titre reviendrait à sanctionner doublement le bailleur.
Cependant, la société Thom soutient à juste titre que la mise à sa charge de la taxe foncière constitue une charge exorbitante justifiant un abattement sur la valeur locative des locaux loués en vertu de l'article R. 145-8 du code de commerce car elle pèse sur le preneur sans contrepartie alors qu'elle incombe légalement au bailleur.
En effet, selon l'article R. 145-8 du code de commerce, les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci s'est déchargé sur le locataire constituent un facteur de diminution de la valeur locative.
C'est à tort que le premier juge a retenu qu'il est d'usage, dans les centres commerciaux, que les charges relatives au remboursement de la taxe foncière soient imposées au preneur et que les valeurs locatives de référence concernent des locaux et des baux incluant la prise en charge par le preneur de l'impôt foncier, alors que, sauf disposition expresse, le paiement de la taxe foncière est à la charge du bailleur et que les obligations incombant normalement au bailleur, dont celui-ci s'est déchargé sur le locataire, constituent un facteur de diminution de la valeur locative.
Le jugement entrepris sera infirmé sur ce point, la somme de 2.752,51 euros correspondant au montant de la taxe foncière des locaux loués, non discutée, devant être déduite du montant du loyer annuel.
Sur l'abattement de 10 % au titre des travaux de mise aux normes et celui de 5 % au titre de la prime d'assurance du bailleur, le premier juge a retenu qu'ils devaient être écartés, aux motifs que ces dépenses correspondent à des transferts de charges répandus dont il n'est pas rapporté de situations contraires dans l'unité marchande autonome du centre commercial Mondeville 2 d'après les experts, l'interdiction d'un tel transfert n'étant pas applicable au bail en cause, renouvelé avant l'entrée en vigueur des dispositions de l'article R. 145-35 2° du code de commerce issu du décret n°2014-1317 du 3 novembre 2014.
La société Caetoile estime que la réalisation des travaux de mise en conformité mis à la charge du preneur découle de l'obligation d'entretien et de réparation de ce dernier et ne saurait donner lieu à abattement sur la valeur locative. Elle ne conclut pas sur la prime d'assurance.
Toutefois, ainsi que le soutient à bon droit l'intimée, les travaux de mise en conformité des locaux loués incombent normalement au bailleur et, lorsqu'ils sont mis à la charge du preneur sans contrepartie comme c'est le cas en l'espèce, constituent un facteur de diminution de la valeur locative au sens de l'article R. 145-8 du code de commerce. Il en est de même de la mise à la charge du preneur de la prime d'assurance incombant normalement au bailleur. En l'occurrence, les circonstances de la cause justifient l'application d'un abattement de 5 % concernant la charge des travaux de mise en conformité et de 3 % concernant celle relative à la prime d'assurance du bailleur.
Le jugement entrepris sera infirmé en ce sens sur ce point.
Concernant les obligations respectives des parties et les facteurs de valorisation invoqués par le bailleur, le premier juge, dont l'intimée s'approprie les motifs, a considéré, au visa des articles R. 145-8 et R. 145-33 du code de commerce, que la valeur locative comprend avant tout le loyer périodique dans les rapports du bailleur et du preneur, que les sommes que ce dernier a été amené à payer lors de l'entrée dans les locaux telles que le prix de cession du fonds de commerce, du droit au bail ou d'un droit d'entrée, ne sauraient être valablement qualifiés de compléments de loyer dès lors que ces sommes ont un caractère indemnitaire et définitif, faisant observer que le locataire avait une perspective de récupérer ces sommes en cas de cession de son droit au bail, avec des possibilités de variation à la hausse ou à la baisse, sans que la valeur locative des locaux s'en trouve affectée.
Il en a déduit que la méthode d'évaluation consistant à intégrer par amortissement ou décapitalisation le prix du fonds de commerce, du droit au bail ou du droit d'entrée devait être écartée.
Contrairement à ce que soutient l'appelante, les parties n'ont pas entendu que le loyer renouvelé soit évalué en fonction du droit d'entrée ou du prix de cession du droit au bail, le bail litigieux mentionnant, en son article 5 page 8, qu'à l'occasion de chacun des renouvellements successifs le loyer minimum garanti sera fixé à la valeur locative appréciée au jour de la prise d'effet du bail renouvelé.
En outre, le bail liant les parties ne prévoit pas que le versement du droit d'entrée, d'un montant de 900.000 francs HT, constitue un complément de loyer, étant relevé que ce droit d'entrée est convenu à l'article 16 relatif aux conditions particulières de ce bail et selon lequel ce montant reste acquis au bailleur en cas de résiliation du bail pour quelque cause que ce soit.
C'est donc à juste titre que le premier juge comme les experts judiciaires ont considéré que la valeur locative devait s'apprécier uniquement au regard des valeurs locatives unitaires qui se dégagent des loyers périodiques du même centre commercial et non en tenant compte de celles issues de l'amortissement des droits d'entrée ou des prix de cession, versés aux cédants et non aux bailleurs, et ce notamment pour des emplacements de haute commercialité pour lesquels la valeur du droit au bail commercial qui est payée peut inclure d'autres éléments de valorisation non strictement liés à l'économie du loyer et peuvent revêtir une valeur d'opportunité ou de stratégie de développement.
S'agissant de la faculté de sous-location permise par le bail commercial litigieux, le premier juge, dont l'intimée s'approprie les motifs, a estimé qu'il n'était pas rapporté de valorisation de cette possibilité dans d'autres locaux loués dans la même galerie marchande, de sorte qu'aucune majoration de la valeur locative ne pouvait être retenue à ce titre.
La société Caetoile soutient que la possibilité offerte au preneur de sous-louer les locaux en cause constitue un facteur de majoration de 5 % de la valeur locative.
Cependant, la faculté de sous-location prévue à l'article 14 du bail commercial ne saurait en l'espèce justifier une majoration de la valeur locative dès lors que cette faculté est limitée en ce qu'elle ne peut bénéficier qu'à une société du groupe auquel appartient la société Thom, toute autre sous-location étant subordonnée à l'accord du bailleur.
Concernant l'amélioration des lieux loués par accession au profit du bailleur, le premier juge a considéré que le bailleur n'établissait pas la réalité d'une telle amélioration, les locaux mis à sa disposition étant une case commerciale en béton brut.
La société Caetoile fait valoir que les locaux loués ont été livrés au preneur sous la forme d'une case en béton brut, son aménagement et l'installation des fluides étant à la charge de ce dernier, et que la réalisation d'amélioration des lieux loués par leur aménagement commercial résultait à suffisance des constatations des experts.
La société Thom s'oppose à cette demande, faisant observer que celle-ci aurait dû être soumise aux experts judiciaires notamment afin d'en déterminer le quantum.
Le bail unissant les parties prévoit en son article 2 page 21 que les transformations et améliorations apportées aux lieux loués et devenus propriété du bailleur sont prises en considération pour la détermination de la valeur locative lors du premier renouvellement suivant la date à laquelle ces travaux auront été réalisés.
S'il ressort des constatations des experts judiciaires que les locaux loués ont été aménagés, la date de réalisation de ces travaux n'est pas établie par le rapport d'expertise et il ne résulte pas des productions que ces travaux excèdent la mise en adéquation des locaux livrés brut à leur destination de bijouterie.
Outre que la société Caetoile ne rapporte pas la preuve de la réalisation par le preneur de transformations et améliorations aux lieux loués postérieurement au 30 mars 2007, ceux réalisés avant cette date ne pouvaient, en application du bail, être pris en compte que lors du premier renouvellement du bail intervenu le 30 mars 2007 et non lors du deuxième renouvellement, le 30 mars 2013.
Le jugement entrepris sera confirmé de ce chef.
S'agissant de la clause de loyer variable, la société Thom fait valoir que la présence dans le bail commercial litigieux d'un loyer minimum garanti et d'un complément de loyer calculé sur la base du chiffre d'affaires du preneur justifie un abattement de 10 % de la valeur locative des locaux loués.
Contrairement à ce que soutient la société Caetoile, la stipulation selon laquelle le loyer d'un bail commercial est composé d'un loyer minimum et d'un loyer calculé sur la base du chiffre d'affaires du preneur n'interdit pas, lorsque le contrat le prévoit ce qui est le cas en l'espèce en page 8, de recourir au juge des loyers commerciaux pour fixer, lors du renouvellement, le minimum garanti à la valeur locative, le juge statuant alors selon les critères de l'article L. 145-33 du code de commerce, notamment au regard de l'obligation contractuelle du preneur de verser, en sus du minimum garanti, une part variable, en appréciant l'abattement en découlant.
En l'occurrence, la stipulation d'un loyer binaire composé d'un minimum garanti et d'une part variable égale à 6 % du chiffre d'affaires, en ce qu'elle procure au bailleur un avantage sans contrepartie, justifie un abattement de 5 % sur la valeur locative des locaux loués, peu important que le bailleur n'ait depuis l'origine du bail pas perçu cette part variable.
En conséquence, le jugement entrepris sera infirmé en ce qu'il a fixé le prix du loyer annuel du bail renouvelé à partir du 1er avril 2013 à la somme de 102.750 euros hors taxes et hors charges et en ce qu'il a condamné la société Caetoile et la société Cafan à payer chacune la moitié des dépens.
La cour statuant à nouveau de ces chefs, il y a lieu de fixer le prix du loyer annuel du bail renouvelé à compter du 1er avril 2013 entre la société Caetoile et la société Thom à la somme de 110.100 euros HT et HC déduction à faire des abattements de 5 % au titre des travaux de mise en conformité (-5.505 euros), de 3 % au titre de la prime d'assurance du bailleur (-3.303 euros), de 5 % au titre du loyer binaire (-5.505 euros) et de 2.752,51 euros au titre de la taxe foncière, soit à la somme de 93.034,49 euros HT et HC.
Les loyers arriérés porteront intérêt au taux légal à compter du 1er avril 2013.
2. Sur les demandes accessoires
La société Caetoile, qui succombe en ses principales prétentions, sera condamnée à supporter les dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire, déboutée de sa demande d'indemnité de procédure et condamnée à verser à la société Thom la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris en ce qu'il a fixé le prix du loyer annuel du bail renouvelé à partir du 1er avril 2013 à la somme de 102.750 euros hors taxes et hors charges et en ce qu'il a condamné la société Caetoile et la société Cafan à payer chacune la moitié des dépens ;
Statuant à nouveau du chef des dispositions infirmées,
Fixe le prix du loyer annuel du bail renouvelé à compter du 1er avril 2013 entre la société Caetoile et la société Thom à la somme de 93.034,49 euros HT et HC, les clauses du bail restant inchangées ;
Dit que les arriérés de loyer porteront intérêt au taux légal à compter du 1er avril 2013 ;
Confirme le jugement entrepris pour le surplus ;
Rejette toutes autres demandes ;
Y ajoutant,
Condamne la société Caetoile aux dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise judiciaire ;
Condamne la société Caetoile à payer à la société Thom la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.