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Décisions

CA Aix-en-Provence, ch. 1-1, 2 mai 2023, n° 22/12912

AIX-EN-PROVENCE

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Assurances du Crédit Mutuel Iard

Défendeur :

Electrolux Home Products France (SAS), Société Philippe Angel - Denis Hazane (SCP)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Brue

Conseillers :

Mme Demont, Mme de Bechillon

Avocats :

Me Lopez, Me Demichelis, Me Schnell

TJ Toulon, du 14 mars 20219

14 mars 2021

Exposé du litige

EXPOSÉ DE LA PROCÉDURE

Le 19 janvier 2010, M. [X] [W] et Mme [V] [Z] épouse [W] ont fait l'acquisition, auprès de la société Privilège, d'une table de cuisson de marque Electrolux Arthur Martin, fonctionnant au gaz de ville et recouverte d'une plaque de décor en verre vitrocéramique.

Le 1er avril 2015, leur fille, [N] [W], alors âgée de 18 mois, a été victime de brûlures thermiques au 2ème degré superficiel, au niveau du cou, du menton, de la main droite et des deux plantes de pieds, suite à l'explosion de la plaque de décor en verre de la table de cuisson et à la projection de morceaux de verre incandescents.

Soutenant que cette explosion et la projection subséquente de débris de verre étaient dus à un défaut de la plaque de cuisson acquise, ils ont saisi le juge des référés du tribunal de grande instance de Toulon lequel, par ordonnance du 7 février 2017 a désigné en qualité d'expert M. [M] [C] [R], médecin, tout en rejetant leur demande de provision, considérant que l'existence de l'obligation indemnitaire du fabricant et/ou du vendeur était sérieusement contestable.

L'indemnisation des dommages matériels allégués a été prise en charge par l'assureur des époux [W], la société Assurances du Crédit Mutuel Iard, à hauteur de 7 964,60 €, qui a également mandaté un expert technique, le cabinet Cunningham Lindsey, afin d'examiner la plaque de cuisson.

M. [R], médecin expert, a déposé son rapport d'expertise médicale le 24 juin 2017.

Par acte du 17 juillet 2017, M. et Mme [W] agissant, tant en leur nom personnel qu'en qualité de représentants légaux de leur fille mineur [N], et leur assureur, la société Assurances du Crédit Mutuel Iard ont fait assigner la société Electrolux Home Products France (société Electrolux), la société Privilège et la société Axa France, assureur de cette dernière, en présence de la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Var, devant le tribunal de grande instance de Toulon afin d'obtenir des dommages et intérêts sur le fondement de la responsabilité du fait des produits défectueux.

Par jugement du 14 mars 2019, cette juridiction a :

- déclaré le jugement commun et opposable à la Caisse primaire d'assurance maladie du Var ;

- mis hors de cause la société Privilège et son assureur la société Axa France ;

- débouté M. et Mme [W], agissant pour le compte de leur enfant mineur [N], et la société Assurances du crédit mutuel Iard de l'ensemble de leurs demandes ;

- débouté la société Electrolux de sa demande indemnitaire pour procédure abusive ;

- condamné M. et Mme [W], agissant pour le compte de leur enfant mineur [N], et la société Assurances du crédit mutuel Iard in solidum à verser à la société Electrolux la somme de 1 000 euros au titre de l'article 700 du de procédure civile ;

- condamné M. et Mme [W], agissant pour le compte de leur enfant mineur [N], et la société Assurances du crédit mutuel Iard in solidum à payer à la société Privilège et à la société Axa France la somme de 500 euros chacune au titre de l'article 700 du code de procédure civile;

- condamné in solidum M. et Mme [W], pour le compte de leur enfant mineur [N], et la société Assurances du crédit mutuel Iard aux dépens, distraits au profit de Maître Alexandra Bouclon Lucas, avocat ;

- dit n'y avoir lieu à exécution provisoire du jugement.

Par acte du 20 mai 2019, M. et Mme [W] et la société Assurances du Crédit Mutuel Iard ont interjeté appel à l'encontre du jugement en ce qu'il :

- les a déboutés de l'ensemble de leurs demandes ;

- a condamné, M. et Mme [W], es qualité de représentants de leur enfant mineur [N], in solidum avec la société Assurances du crédit mutuel Iard, à verser à la société Electrolux la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- les a condamnés in solidum à verser à la société Privilège et à la société Axa France Iard la somme de 500 euros chacune au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile;

- les a condamnés in solidum aux entiers dépens.

Par arrêt rendu en date du 10 décembre 2020, la cour a :

- déclaré la société Electrolux irrecevable en sa demande afin que les conclusions notifiées le 20 août 2020 par M. et Mme [W] et la société Assurances mutuelles du crédit Iard, soient déclarées irrecevables ;

- infirmé le jugement, hormis sur l'indemnité de l'article 700 du code de procédure civile allouée à la société Privilège et à la société AXA ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

- dit que la responsabilité de la société Electrolux products home est engagée du fait de la défectuosité de la table de cuisson Arthur Martin acquise par M. et Mme [W] le 19 janvier 2000;

- condamné la société Electrolux products home à payer à M. et Mme [W], es qualité de représentants légaux de leur fille [N] [W], une somme de 5 000 euros à titre de provision à valoir sur l'indemnisation du préjudice corporel de cette dernière ;

- condamné la société Electrolux products home à payer à la société Assurances du crédit mutuel,

En qualité de subrogée dans les droits de M. et Mme [W], la somme de 7 964,60 euros au titre des dommages matériels subis par ces derniers ;

- ordonné la capitalisation des intérêts dûs au moins pour une année entière dans les conditions

Fixées par l'article 1342-3 du code de procédure civile ;

- débouté la société Electrolux home products de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive ;

- condamné la société Electrolux products home aux dépens de première instance et d'appel ;

- condamné la société Electrolux home products à payer à M. Et Mme [W], es qualité de représentants légaux de leur fille [N] [W], une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés

En première instance et en cause d'appel ;

- condamné la société Electrolux home products à payer à la société Assurances du crédit mutuel Iard une indemnité de 2 000 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés en première instance et en cause d'appel ;

- condamné M. et Mme [W] à payer à la société Privilège et la société AXA, ensemble, une indemnité de 1 200 euros en application de l'article 700 du code de procédure civile au titre des frais non compris dans les dépens exposés en cause d'appel.

La société Electrolux home products a formé un pourvoi en cassation à l'encontre de cette décision, invoquant un moyen unique de cassation, en ce que la cour s'est fondée, pour la déclarer responsable du dommage, exclusivement sur une expertise réalisée unilatéralement à la demande d'une partie.

Par arrêt du 6 juillet 2022, la 1ère chambre de la Cour de cassation a :

Moyens

- cassé et annulé, sauf en ce qu'il déclare la société Electrolux en sa demande afin que les conclusions notifiées le 20 août 2020 par M. et Mme [W] et la société Assurances mutuelles du crédit Iard, soient déclarées irrecevables, l'arrêt rendu par la cour d'appel d'Aix en Provence;

- remis sur ce point l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les a renvoyées devant la cour d'appel d'Aix en Provence autrement composée;

- mis hors de cause la société Privilège et la société Axa France Iard;

- condamné M. et Mme [W] et la société Assurances mutuelles du crédit mutuel Iard aux dépens;

- rejeté les demandes formées sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

- dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt serait transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé.

La Cour de cassation a jugé, au visa des dispositions de l'article 16 du code de procédure civile, que le juge ne pouvait se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande d'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci.

Dans leurs dernières conclusions notifiées et déposées par voie électronique le 1er mars 2023, auxquelles il convient de se référer pour un plus ample exposé des moyens, M. [X] [W] et Mme [V] [Z] épouse [W] et la société Assurances du Crédit Mutuel Iard demandent à la cour de :

- infirmer en toutes ses dispositions, le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Toulon le 14 mars 2019, sauf en ce qu'il a mis hors de cause la société Privilège et son assureur.

La société Axa France ;

Statuer à nouveau,

- débouter de l'ensemble de leurs demandes la société Elextrolux home Products France, la SCP Philippe Angel- Denis Hazane, commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de la société Electrolux et la SELARL V&V Associés, administrateur judiciaire de la société Elextrolux,

- déclarer responsable la société Electrolux dans la survenance du sinistre intervenu le 1er avril 2015, au domicile de M. et Mme [W], en ce que ce produit est défectueux au sens des dispositions de l'article 1368-1 et suivants du code civil ;

- condamner la société Electrolux à verser à M. et Mme [W], agissant es qualité de représentants de leur enfant mineur [N], la somme de 17.300 euros à titre de provision à valoir en réparation de son préjudice corporel, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance, soit le 17 juillet 2017, avec capitalisation des dits intérêts;

- condamner la société Electrolux à verser à la société Assurances du Crédit Mutuel, pris en sa qualité d'assureur de M. et Mme [W] et subrogée dans leurs droits, la somme de 7 964,60 euros, au titre du préjudice matériel subi par ces derniers, avec intérêts au taux légal à compter de l'assignation introductive d'instance, soit le 17 juillet 2017, avec capitalisation des dits intérêts;

- condamner la société Electrolux à verser à M. et Mme [W], agissant es-qualité de représentant de leur enfant mineur [N], la somme de 4 000 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Electrolux à verser à la société Assurances du crédit mutuel Iard la somme de 4 000 euros, au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile ;

- condamner la société Electrolux aux entiers dépens de première instance et d'appel, en ce compris les frais d'expertise médicale confiée à M. [R].

Au soutien de leurs prétentions, les époux [W] font valoir qu'en application des articles 1386-1 et suivants du code civil, le producteur est responsable du dommage causé par un défaut de son produit, qu'il soit lié ou non par un contrat avec la victime ; le produit défectueux est celui qui n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, l'appréciation étant opérée en tenant compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation.

Les appelants se fondent sur le rapport d'expertise amiable établi à la demande de leur assureur, concluant que l'explosion avait pour siège la plaque de verre qui habille la plaque de cuisson, de sorte que le dommage a nécessairement selon lui une origine interne au produit ; que le sinistre a vraisemblablement pour origine l'extinction de la flamme sur un des feux, laquelle a entraîné une diffusion de gaz entre le fond métallique et la surface vitrée, provoquant un mélange st'chiométrique qui, en atteignant 15 % et mélangé à l'air, en présence d'une chaleur importante, a explosé, diffusant l'ensemble des verres dans la cuisine et le salon ; qui précise qu'aucune cause externe n'a été mise en évidence, puisque aucune fuite de gaz n'a été détectée à la faveur des contrôles.

Les époux [W] ajoutent que la notice d'utilisation de la plaque ne comporte aucun avertissement des consommateurs quant aux risques d'explosion de la plaque en verre, ce dont ils déduisent que le produit n'offre pas la sécurité à laquelle ils pouvaient légitimement s'attendre, et produisent un procès-verbal de constat d'huissier relevant que l'alimentation de la plaque en gaz de ville est faite par un flexible dont la date de péremption est de 2020.

Ils indiquent que le responsable des expertises chez Electrolux, dans un courrier du 27 mai 2015 confirme, à l'instar de l'expert amiable, qu'aucune cause étrangère n'explique les faits.

Ils en déduisent qu'ils disposent de présomptions graves, précises et concordantes de la défectuosité du produit, aucune cause extrinsèque n'ayant été découverte.

Considérant qu'il appartient au producteur, en ce cas, d'apporter la preuve d'une faute des acquéreurs dans l'usage du produit, pour s'exonérer de sa responsabilité, ils estiment qu'Electrolux ne justifie pas d'un usage anormal de la plaque de cuisson.

Ils sollicitent l'allocation d'une provision de 17 300 euros, au titre du préjudice corporel de leur fille, en l'absence de consolidation, ainsi que la somme de 7 964,60 euros à verser à l'assureur en réparation du préjudice matériel subi.

Dans leurs dernières conclusions, notifiées et déposées par voie électronique le 6 mars 2023, auxquelles il convient de renvoyer pour un exposé plus exhaustif des moyens, la SAS Electrolux Home Products France, la SCP Philippe Angel-Deniz Hazane, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de la sociéité Electrolux Home Products et la SELARL V & V associés, en qualité d'administrateur judiciaire de la même société, toutes deux intervenantes volontaires à l'instance, demandent à la cour de :

A titre principal :

- confirmer le jugement du tribunal de grande instance de Toulon en date du 14 mars 2019 en ce qu'il a déclaré le jugement commun et opposable à la Cpam du Var, mis hors de cause la société Privilège et son assureur la société Axa France, débouté les époux [W] agissant pour le compte de l'enfant [N] [W], ainsi que leur assureur de l'ensemble de leurs prétentions, condamné in solidum les époux [W], ainsi que leur assureur à lui verser la somme de 1 000 €, au titre de l'article 700 du code de procédure civile, condamné in solidum les époux [W] ainsi que leur assureur à verser à la société Privilège la somme de 500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile, condamné les époux [W] ainsi que leur assureur aux dépens et dit n'y avoir lieu à exécution provisoire ;

- infirmer le jugement en ce qu'il l'a déboutée de sa demande indemnitaire pour procédure abusive ;

Jugeant à nouveau :

- condamner in solidum les époux [W] et la société Assurances du Crédit mutuel Iard à verser à la société Electrolux la somme de 5 000 € pour procédure abusive en première instance ;

- condamner in solidum les époux [W] à lui rembourser la somme de 7 026 euros versée dans le cadre de l'exécution provisoire, majorée des intérêts au taux légal depuis son versement ;

- condamner la société Assurances du crédit mutuel Iard à lui rembourser la somme de 11 486,78 euros versée dans le cadre de l'exécution provisoire, majorée des intérêts au taux légal depuis son versement ;

- condamner in solidum les époux [W] et la société Assurances du Crédit mutuel Iard à verser à la société Electrolux la somme de 4 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens ;

A titre subsidiaire,

- réduire le montant de l'indemnisation du préjudice corporel de l'enfant pour les souffrances endurées à 4 000 euros, pour le préjudice esthétique à 1 000 euros, pour le déficit fonctionnel temporaire à 250 euros ;

- ramener le préjudice financier de la société Assurances du crédit mutuel Iard à la stricte mesure du montant justifié et pouvant être mis à la charge du fabricant dans le cadre de l'engagement de sa responsabilité ;

- juger que les condamnations éventuelles devront être prononcées en deniers ou quittances tenant les versements effectués par la société Electrolux Home Products entre les mains des époux [W] à hauter de la somme globale de 7 026 euros versées, et de son assureur à hauteur de la somme de 11 486,78 euros.

Au soutien de leurs prétentions, les intimées font valoir que la responsabilité du fait des produits défectueux ne dispense pas la victime de rapporter la preuve du fait générateur de responsabilité, à savoir un défaut du produit en lien de causalité avec les dommages allégués ; qu'il ne s'agit pas d'une responsabilité de plein droit à partir de la seule implication d'un produit dans la réalisation du dommage, le seul fait que la plaque ait explosé et qu'elle ait causé des dommages ne suffisant pas à faire présumer l'existence d'un défaut du verre de la plaque de cuisson.

La société Electrolux et son commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire ajoutent que le défaut engageant la responsabilité d'un producteur doit être concomitant à la mise en service du produit.

Les intimées relèvent en outre qu'en l'absence d'expertise judiciaire sur le produit, il n'est pas démontré l'existence de présomptions graves et concordantes, notamment sur les circonstances précises du bris de verre trempé, que les déclarations des parents de l'enfant sont évolutives depuis le début de la procédure quant au positionnement de l'enfant et regrettent que la plaque de cuisson ait été détruite après l'expertise amiable, ne permettant pas de nouvelle étude.

Elles ajoutent qu'il n'est pas démontré qu'une explosion a eu lieu, seule une expertise judiciaire aurait en effet selon elles permis de démontrer si l'appareil avait explosé suite à une accumulation de gaz ou si seule la dalle de verre s'est brisée, et observent que même l'expert amiable a conclu que l'origine du sinistre reste accidentelle et qu'aucun recours ne pourra être exercé à l'encontre du fabriquant Electrolux.

Les intimées estiment que les appelants utilisent la notice d'utilisation de façon inappropriée, en ce que la plaque litigieuse n'est pas dotée d'un thermocouple contrairement à un autre modèle de la marque visé par la notice et ajoutent en réplique que ladite notice est parfaitement claire, relevant enfin que la plaque n'a présenté aucun dysfonctionnement durant cinq ans, ce qui rend peu probable l'existence d'un défaut de sécurité au jour de la mise sur le marché.

Motivation,

MOTIFS,

Sur le droit à indemnisation,

Aux termes de l'article 1386-4 ancien du code civil applicable au cas d'espèce, un produit est défectueux au sens du présent titre lorsqu'il n'offre pas la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre.

Dans l'appréciation de la sécurité à laquelle on peut légitimement s'attendre, il doit être tenu compte de toutes les circonstances et notamment de la présentation du produit, de l'usage qui peut en être raisonnablement attendu et du moment de sa mise en circulation.

Un produit ne peut être considéré comme défectueux par le seul fait qu'un autre, plus perfectionné, a été mis postérieurement en circulation.

Conformément aux prescriptions de l'article 1386-9 du même code, il appartient aux demandeurs de prouver le dommage, le défaut et le lien de causalité entre le défaut et le dommage.

Afin d'établir le défaut imputé à la table de cuisson litigieuse, les époux [W] produisent un rapport d'expertise amiable diligenté à la demande de leur assureur. Celui-ci indique que « la cause du sinistre est très probablement l'extinction de la flamme sur un des feux qui a provoqué la diffusion du gaz entre le fond métallique et la surface vitrée provoquant un mélange stoechiométrique qui lorsqu'il a atteint 15 % mélangé à l'air et en présence d'une chaleur importante a explosé provoquant la diffusion de l'ensemble des verres dans la cuisine et le salon. »

L'expert amiable précise que la table n'était pas pourvue de coupure de thermocouple sur les quatre zones de cuisson et que l'absence de ce dispositif peut expliquer la diffusion du gaz accidentelle dans la plaque après extension de la flamme sur l'un des gaz.

Il conclut, dans un paragraphe intitulé "Responsabilité – Recours", que "lors de ces opérations d'expertise contradictoires, il n'a pu être mis en exergue une quelconque fuite sur la plaque de cuisson de marque Electrolux pouvant être à l'origine du sinistre explosion ayant occasionné les dommages chez votre assuré.

L'origine du sinistre reste donc accidentelle par diffusion probable du gaz suite à l'extension d'un des feux lors de la cuisson de dentées alimentaires par votre assuré.

Aucun recours ne pourra être exercé à l'encontre des magasins Privilège ni à l'encontre du fabriquant Electrolux.

Etant acquis en droit que le juge ne peut se fonder exclusivement sur une expertise non judiciaire réalisée à la demande de l'une des parties, peu important qu'elle l'ait été en présence de celles-ci, il appartient aux appelants, demandeurs en première instance, de produire aux débats des éléments de preuve corroborant les constatations du technicien intervenu à la demande de leur assureur.

A cette fin, les époux [W] produisent notamment un courrier adressé par le responsable des expertises de la société Electrolux à l'expert privé sus cité, le 27 mai 2015, indiquant « les tests de l'appareil remis sous pression de gaz n'ont démontré aucune fuite ni aucun défaut de l'appareil. »

Ils invoquent également le procès-verbal de constat d'huissier effectué en date du 3 avril 2015 dans lequel il est attesté que le flexible de gaz comporte mention d'une date de péremption en 2020.

Ces pièces ne sont pas de nature à corroborer les dires de l'expert amiable retenant comme probable cause la diffusion du gaz entre le fond et la surface de la plaque et en tout état de cause, sont insuffisantes à rapporter la preuve d'une défectuosité du produit à l'origine directe du dommage, le seul fait que la plaque de verre ait explosé et ne suffisant pas à faire présumer l'existence d'un défaut du verre de la plaque de cuisson, étant rappelé que l'expert amiable a lui-même retenu le caractère accidentel du sinistre et l'absence de recours utile à l'encontre de la société Electrolux.

Il n'est donc pas rapporté la preuve du défaut de la plaque de cuisson acquise auprès de la société Electrolux, de sorte qu'il convient de confirmer le jugement en ce qu'il a débouté les époux [W] et leur assureur de leurs demandes indemnitaires.

Sur la demande en dommages et intérêts pour procédure abusive,

L'article 32-1 du code de procédure civile sanctionne l'abus du droit d'agir ou de se défendre en justice par le versement d'une amende civile au trésor public et de dommages et intérêts à l'adversaire.

L'abus suppose la caractérisation d'une faute susceptible de faire dégénérer en abus le droit d'ester ou de se défendre en justice.

En l'espèce, il n'est pas démontré que par leur positionnement en procédure, les époux [W] et leur assureur auraient entendu causer un dommage à la société Electrolux.

Cette demande sera donc rejetée et le jugement confirmé de ce chef.

Il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de remboursement des sommes versées dans le cadre de l'exécution provisoire, la présente décision constituant un titre de ce chef.

Sur les frais du procès,

Les dépens de l'appel seront assumés par les consorts [W] et leur assureur, lesquels seront par ailleurs condamnés à régler à la SAS Electrolux Home Products France, la SCP Philippe Angel-Deniz Hazane, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de la sociéité Electrolux Home Products et la SELARL V & V associés, en qualité d'administrateur judiciaire de la même société ensemble la somme de 2 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d'appel.

Dispositif

PAR CES MOTIFS

La cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions soumises à la cour ;

Y ajoutant,

Dit n'y avoir lieu de faire droit à la demande de remboursement des sommes versées dans le cadre de l'exécution de l'arrêt rendu par la cour d'appel le 10 décembre 2020,

Condamne M. [X] [W] et Mme [V] [Z] épouse [W] et la société Assurances du Crédit Mutuel Iard in solidum aux entiers dépens de l'instance ;

Condamne M. [X] [W] et Mme [V] [Z] épouse [W] et la société Assurances du Crédit Mutuel Iard in solidum à régler à la SAS Electrolux Home Products France, la SCP Philippe Angel-Deniz Hazane, agissant en qualité de commissaire à l'exécution du plan de redressement judiciaire de la sociéité Electrolux Home Products et la SELARL V & V associés, en qualité d'administrateur judiciaire de la même société ensemble la somme de 2 500 euros, en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.