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Décisions

Cass. crim., 7 novembre 1994, n° 93-83.951

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Gondre

Rapporteur :

Mme Mouillard

Avocat général :

M. Galand

Avocat :

SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez

Bourges, ch. corr., du 22 juill. 1993

22 juillet 1993

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :

- X... Henri, partie civile,

contre l'arrêt de la cour d'appel de Bourges, chambre correctionnelle, en date du 22 juillet 1993, qui, après avoir condamné Michel Y... pour abus de confiance, a déclaré irrecevable sa constitution de partie civile.

LA COUR,

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 513 et 592 du Code de procédure pénale, manque de base légale :

" en ce qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que, lors des débats du 24 juin, la Cour était composée de M. Gayat de Wecker, conseiller faisant fonction de président qui avait fait le rapport moral de l'affaire, ainsi que de Mme Renon et Mme Perrin, conseillers, et que, pour le prononcé de l'arrêt, la Cour était composée de Mme Chéron, premier président, M. Baudron et Mme Perrin, conseillers ;

" alors que, d'une part, les dispositions de l'article 513 du Code de procédure pénale imposant la présence à toutes les audiences de débats, de délibéré et de prononcé de l'arrêt, du magistrat qui a présenté le rapport, la décision attaquée, dont les mentions établissent avec certitude que M. Gayat de Wecker ne faisait pas partie de la formation qui a rendu la décision le 22 juillet encourt dès lors l'annulation ;

" alors que, d'autre part, l'arrêt attaqué, qui fait état d'une composition différente lors des débats et du prononcé de l'arrêt lequel n'est intervenu qu'après mise en délibéré et qui mentionne que le dispositif de l'arrêt a été lu par Mme Perrin, conseiller, sans indiquer que les débats aient été repris devant Mme Chéron et M. Baudron et sans préciser qu'il ait été fait application des dispositions de l'article 485 du Code de procédure pénale, n'apporte pas en lui-même la preuve de la régularité de sa composition " ;

Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que les magistrats qui ont assisté aux débats ont participé au délibéré et qu'il a été donné lecture de la décision par l'un d'eux, en vertu de l'article 485 du Code de procédure pénale, dont le visa n'a pas à être reproduit ;

Que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;

Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 169, alinéa 2, de la loi n° 85-98 du 25 janvier 1985, 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré la constitution de partie civile de M. X...irrecevable ;

" aux motifs que, " si la fraude corrompt tout y compris le principe de l'absence de reprise des poursuites individuelles en cas de clôture pour insuffisance d'actif, l'emploi du pluriel fraudes à l'égard des créanciers oblige à prendre en compte les seules fraudes concernant l'ensemble des créanciers et non un seul d'entre eux aussi important fût-il ; qu'il suit que c'est à tort que le premier juge s'est fondé sur la notion de fraude pour déclarer recevable la constitution de partie civile de M. X... ; qu'il conviendra eu égard à l'existence du principe de l'absence de reprise de poursuite individuelle posé par l'article 169 de la loi, de déclarer la constitution de partie civile de M. X... irrecevable et de réformer en ce sens le premier jugement " ;

" alors que l'exception au principe d'absence de reprise du droit de poursuite individuelle des créanciers après jugement de clôture, posée à l'article 169, alinéa 2, exige uniquement, pour autoriser la reprise des poursuites individuelles, que le fait préjudiciable repose sur une fraude, sans opérer de distinction selon l'objet de la fraude ou le nombre des créanciers concernés ;

" que l'arrêt qui, tout en constatant l'existence d'une fraude à l'origine de la créance du demandeur, a néanmoins cru devoir déclarer irrecevable sa constitution de partie civile au motif que cette fraude ne concernerait pas l'ensemble des créanciers, a ajouté au texte visé au moyen une condition qu'il ne prévoit pas, privant ainsi sa décision de base légale " ;

Vu lesdits articles ;

Attendu qu'il résulte de l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985 que le jugement de clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d'actif fait recouvrer aux créanciers, en cas de fraude à leur égard, l'exercice individuel de leurs actions contre le débiteur ;

Attendu que pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile d'un client, X..., à l'encontre de Y..., courtier en véhicule condamné pour abus de confiance, la cour d'appel énonce que l'exception prévue par l'article 169 de la loi du 25 janvier 1985 ne peut recevoir application, l'emploi du pluriel dans l'expression " fraudes à l'égard des créanciers " mentionnée par ce texte obligeant à prendre en considération les seules fraudes concernant l'ensemble des créanciers ;

Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel, qui a soumis l'application de cette disposition à une condition non prévue par la loi, a méconnu les texte et principe susvisés ;

D'où il suit que la cassation est encourue ;

Par ces motifs :

CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Bourges, en date du 22 juillet 1993, mais en ses seules dispositions civiles, toutes autres dispositions étant expressément maintenues, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi dans les limites de la cassation ainsi prononcée :

RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Poitiers.