Cass. com., 4 février 1970, n° 68-13.303
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Guillot
Rapporteur :
M. Larère
Avocat général :
M. Robin
Avocat :
Me Giffard
SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU'IL RESULTE DES ENONCIATIONS DE L'ARRET ATTAQUE (ROUEN, 14 MAI 1968), QUE LANGE, ELEVEUR A BEUZEVILLE-LA-GUERARD, A VENDU, DE DECEMBRE 1961 A FEVRIER 1964, PAR L'INTERMEDIAIRE DU GROUPEMENT NATIONAL AGRICOLE DES CENTRES UTILISATEURS DE TAUREAUX NORMANDS (GNA), UN CERTAIN NOMBRE DE TAUREAUX DESTINES A ETRE UTILISES COMME GENITEURS PAR HUIT CENTRES C'INSEMINATION ARTIFICIELLE FAISANT PARTIE DU GNA;
QUE CHACUNE DE CES VENTES DONNAIT LIEU A LA REDACTION D'UN CONTRAT ECRIT CONTENANT UNE CLAUSE AUX TERMES DE LAQUELLE "EN CONTREPARTIE DES AVANTAGES PRECISES CI-DESSUS DONT IL RECONNAIT BENEFICIER, L'ELEVEUR-VENDEUR S'INTERDIT PENDANT UNE DUREE DE CINQ ANS TOUTE CESSION A UN PARTICULIER OU A UN CENTRE, TOUT MOYEN D'EXPLOITATION PAR INSEMINATION ARTIFICIELLE (DIRECTEMENT OU PAR PERSONNE INTERPOSEE) DE TOUT MALE BOVIN NORMAND, NE, FAISANT PARTIE OU EXPLOITE DANS SON ELEVAGE, SANS AVOIR RESERVE LA PRIORITE PAR LETTRE RECOMMANDEE AVEC ACCUSE DE RECEPTION AU GNA";
QU'APRES AVOIR PRECISE LES MODALITES D'EXERCICE DE CE DROIT DE "PRIORITE" PAR LE GNA, LE CONTRAT PREVOYAIT QUE "L'UTILISATION D'UN TEL ANIMAL PAR LE PROPRIETAIRE LUI-MEME OU PAR LE QUICONQUE EN VUE DE L'INSEMINATION ARTIFICIELLE ET SANS ACCORD ECRIT DU GNAN OBLIGERA L'ELEVEUR SIGNATAIRE DU PRESENT CONTRAT A VERSER AU GNA UNE INDEMNITE EGALE A 50 % DE LA TOTALITE DES SOMMES PERCUES OU A PERCEVOIR DU FAIT DE CETTE UTILISATION";
QUE LANGE AYANT CONFIE, A UNE DATE POSTERIEURE A LA SIGNATURE DE CES CONTRATS, UN TAUREAU LUI APPARTENANT A UNE SOCIETE COOPERATIVE D'ELEVAGE ET D'INSEMINATION ARTIFICIELLE NON AFFILIEE AU GNA SANS AVOIR PREVENU AU PREALABLE CETTE ASSOCIATION, LE GNA ET LES HUIT CENTRE D'INSEMINATION ARTIFICIELLE SUSVISES L'ONT FAIT ASSIGNER DEVANT LE TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE EN PAIEMENT DE DOMMAGE-INTERETS POUR VIOLATION DE SES OBLIGATIONS CONTRACTUELLES;
ATTENDU QU'IL EST FAIT GRIEF A L'ARRET CONFIRMATIF DEFERE D'AVOIR DECLARE LANGE REDEVABLE AU GNA ET AUX COOPERATIVES AFFILIEES D'UNE INDEMNITE A DETERMINER PAR EXPERTISE, AU MOTIF QU'EN SE DESSAISISSANT D'UN TAUREAU REPRODUCTEUR DE SON ELEVAGE POUR LE METTRE EN PENSION CHEZ UN TIERS SANS L'AUTORISATION DU GNA, LANGE AVAIT VIOLE LA DISPOSITION DU CONTRAT QUI LE LIAIT A CET ORGANISME ET QUI CONFERAIT A CE DERNIER UN DROIT DE PRIORITE D'ACHAT DONT LE MAINTIEN DE LA GARDE PAR SON PROPRIETAIRE, POUR UNE DUREE LIMITEE, ETAIT LA GARANTIE;
ALORS QUE, SELON LE POURVOI, LA DISPOSITION INVOQUEE PAR L'ARRET, UNIE PAR UN LIEN INDIVISIBLE ET D'AILLEURS INDISCUTE A SON CONTEXTE, VISAIT TOUS LES ANIMAUX REPRODUCTEURS DE L'ELEVAGE ET AVAIT POUR EFFET DE LES SEQUESTRER POUR CINQ ANS, NON PAS POUR FACILITER UNE PREEMPTION OCCASIONNELLE, MAIS POUR ASSURER LE JEU D'UN MECANISME CONTRACTUEL QUI CONFERAIT D'ORES ET DEJA AU GNA UNE OPTION GENERALE D'ACHAT DE TOUS LES ANIMAUX A DES CONDITIONS INDETERMINEES ET SANS INDICATION DE PRIX, QU'UNE TELLE CLAUSE ETAIT NULLE ET ENTACHAIT DE NULLITE LE CONTRAT TOUT ENTIER, PRIVANT L'ELEVEUR DE LA DISPOSITION DE LA MAJEUR PARTIE DE SON FONDS;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL RELEVE QUE LANGE FAIT ABSTRACTION DANS SON RAISONNEMENT DE LA PARTIE CENTRALE DE LA CLAUSE LITIGIEUSE AUX TERMES DE LAQUELLE "EN TOUT ETAT DE CAUSE L'ELEVEUR VENDEUR EST ASSURE DE RECEVOIR DANS UN DELAI DE QUINZE JOURS FRANCS SUIVANT L'EXPEDITION DE LA LETTRE ADRESSEE AU GNA, SOIT UNE OPTION D'ACHAT, SOIT UNE DECHARGE DEFINIRIVE LUI PERMETTANT DE CEDER L'ANIMAL A QUI BON LUI SEMBLE ET POUR N'IMPORTE QUEL USAGE ET A N'IMPORTE QUELLES CONDITIONS";
QUE L'ARRET AJOUTE QUE "LE GNA AFFIRMANT QUE L'ELEVEUR ETAIT LIBRE DE PROPOSER SOIT POUR LA VENTE, SOIT POUR L'UTILISATION, LE PRIX QUI LUI CONVENAIT ET QUE DANS LE CAS OU LE PRIX NE SERAIT PAS ADOPTE PAR LE GNA L'ELEVEUR RECOUVRAIT SON ENTIERE LIBERTE, LANGE A FAIT DEMANDER PAR CONCLUSIONS QU'IL LUI SOIT DONNE ACTE DE CETTE DECLARATION SANS RENCONTRER D'OPPOSITION DE LA PART DE SON ADVERSAIRE";
QUE LA COUR D'APPEL A DONNE A LANGE L'ACTE REQUIS;
QUE DES LORS LE MOYEN EST MAL FONDE A SOUTENIR QUE LA CLAUSE LITIGIEUSE VISANT TOUS LES ANIMAUX REPRODUCTEURS DE L'ELEVAGE AVAIT POUR EFFET DE LES "SEQUESTRER" POUR CINQ ANS;
QUE LA COUR D'APPEL DECLARE QUE CETTE DISPOSITION DU CONTRAT, QUI NE VISE D'AILLEURS QUE L'UTILISATION DES TAUREAUX POUR L'INSEMINATION ARTIFICIELLE, NE CONSTITUAIT PAS UN MONOPOLE D'ACHAT CONTRAIRE AUX TEXTES ET AUX PRINCIPES INVOQUES PAR LANGE MAIS UN SIMPLE DROIT DE PRIORITE VALABLE PENDANT CINQ ANS, DONC LIMITE DANS LE TEMPS ET CIRCONSCRIT A L'UTILISATION DES TAUREAUX NORMANDS;
QU'AYANT AINSI ANALYSE LA CLAUSE PRECITEE COMME UN PACTE DE PREFERENCE, LA COUR D'APPEL EN DEDUIT QU'IL NE S'AGIT "NI D'UN ACCORD PORTANT ATTEINTE A LA LIBERTE D'UN TIERS D'EXERCER SA PROFESSION, SON COMMERCE OU SON INDUSTRIE, NI D'UN ACCORD PAR LEQUEL UNE PERSONNE S'INTERDIT D'EXERCER UNE ACTIVITE DEFINIE DE FACON ILLIMITEE DANS L'ESPACE ET LE TEMPS";
QU'EN CONSEQUENCE L'ARRET A PU DECIDER QUE LA CLAUSE LITIGIEUSE ETAIT VALABLE;
D'OU IL SUIT QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE;
SUR LE SECOND MOYEN, PRIS EN SES DIVERSES BRANCHES : ATTENDU QU'IL EST EGALEMENT REPROCHE A LA COUR D'APPEL D'AVOIR DECLARE QUE LA DISPOSITION CONTRACTUELLE INVOQUEE CONTRE LANGE NE CONSTITUAIT PAS UN MONOPOLE D'ACHAT CONTRAIRE AUX TEXTES OU AUX PRINCIPES, ALORS QUE, SELON LE POURVOI, CETTE NEGATION NON MOTIVEE NE POUVAIT ETRE CONSIDEREE COMME UNE REPONSE AUX CONCLUSIONS DANS LESQUELLES LANGE FAISAIT VALOIR QUE LA CONVENTION LITIGIEUSE AVAIT ETE ELABOREE PAR L'ACTION CONCERTEE DE NOMBREUX ORGANISMES TENDANT A FAIRE DISPARAITRE A LEUR PROFIT LA LIBRE CONCURRENCE ET QUE, DES AVANT L'INTERVENTION DE L'ORDONNANCE DU 28 SEPTEMBRE 1967, LES MENEES AYANT POUR OBJET D'ENTRAVER LE FONCTIONNEMENT NORMAL DU MARCHE ETAIENT PROHIBEES, ET ALORS QU'EN FAIT LE GNA ENGLOBANT LA QUASI-TOTALITE DES CENTRES D'INSEMINATION ARTIFICIELLE (CIA), ACHETAIT LES TAUREAUX DE NORMANDIE POUR LES REPARTIR ENTRE LES CENTRES, QUI PROCEDAIENT ENSUITE A DES ENCHERES PRIVEES A DES COURS DEPASSANT LE PRIX D'ACHAT CHEZ LES ELEVEURS, QU'AU SURPLUS HUIT DE CES CENTRES, DONT LES JUGES ONT ADMIS LA RECEVABILITE DE L'ACTION, BIEN QU'ILS N'EUSSENT AUCUN LIEN DE DROIT AVEC LANGE, ETAIENT PRESENTS DANS LA PROCEDURE AUX COTES DU GNA;