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Décisions

CA Rennes, 2e ch., 28 octobre 2022, n° 21/07468

RENNES

Arrêt

Confirmation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Christien

Conseillers :

M. Jobard, Mme Barthe-Nari

Avocats :

Me Bourges, Me Siad, Me Lhermitte, Me Thomas-Blanchard

CA Rennes n° 21/07468

27 octobre 2022

EXPOSE DU LITIGE :

Suivant procès-verbal en date du 20 mai 2021 de la société Huissiers BZH, M. [X] [J] a fait réaliser une saisie-attribution sur le compte de dépôt de Mme [E] [T] ouvert dans les livres de la Société générale en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 10 septembre 2020 pour obtenir paiement de la somme de 3 672,98 €.

Suivant acte d'huissier en date du 9 juin 2021, Mme [E] [T] a assigné M. [X] [J] devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Vannes.

Suivant jugement en date du 2 novembre 2021, le juge a :

Déclaré recevables les demandes de Mme [E] [T].

Constaté la validité de la saisie-attribution réalisée le 20 mai 2021.

Débouté Mme [E] [T] de ses demandes de mainlevée de la mesure et de dommages et intérêts.

Débouté Mme [E] [T] de ses demandes indemnitaires à l'égard de M. [X] [J].

Autorisé Mme [E] [T] à s'acquitter des condamnations prononcées à son encontre au titre de l'article 700 et des dépens suivant arrêt de la Cour de cassation en date du 10 septembre 2020, suivant jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Vannes en date du 2 février 2021, suivant ordonnance du premier président de la cour d'appel de Rennes en date du 29 juin 2021 et suivant la décision déférée en vingt-quatre mensualités de 150 €, la dernière étant augmentée du solde de la dette.

Débouté M. [X] [J] de sa demande de dommages et intérêts pour troubles et tracas.

Condamné Mme [E] [T] à payer à M. [X] [J] la somme de 800 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Condamné Mme [E] [T] aux dépens.

Débouté les parties de toutes demandes, fins et prétentions plus amples ou contraires.

Rappelé que l'exécution provisoire était de droit.

Suivant déclaration en date du 29 novembre 2021, Mme [E] [T] a interjeté appel.

En ses dernières conclusions en date du 7 mars 2022, Mme [E] [T] demande à la cour de :

La recevoir en son appel et l'y dire bien fondé.

Réformer le jugement déféré en toutes ses dispositions sauf en ce qu'il lui a accordé vingt-quatre mois de délai de grâce pour régler le solde des sommes qu'elle reste devoir à M. [X] [J] par application des dispositions de l'article 1345-5 du code civil.

Dire que les sommes allouées à M. [X] [J] par la cour d'appel de Rennes dans son arrêt en date du 18 septembre 2018 ont fait l'objet d'un accord de paiement échelonné sur quarante-huit mois accepté par les deux parties qui est encore à ce jour en cours d'exécution.

Dire qu'elle a versé au jour de la saisie contestée la somme totale de 2 132 € en exécution dudit accord.

Dire que lors de la deuxième saisie effectuée le 20 mai 2021, sa dette s'élevait à la somme de 3 672 ,98 € correspondant aux condamnations prononcées par la Cour de cassation.

Dire qu'à la même époque la société Huissiers BZH devenue Aktice détenait une somme de 3 797,39 € non causée.

Dire que M. [X] [J] en lui restituant des sommes reconnaissait ainsi sa situation de débiteur.

Dire qu'elle était au jour de la saisie litigieuse créancière de M. [X] [J].

Dire que seul M. [X] [J] en tant que débiteur pouvait se prévaloir d'une compensation par application des dispositions de l'article 1347 du code civil et qu'il a préféré mettre en oeuvre une voie d'exécution forcée qui s'est révélée infructueuse.

Constater que l'huissier de justice, postérieurement à la saisie litigieuse, lui a également demandé de cesser de régler les échéances de l'accord de paiement et rejeté les paiements effectués par elle lui donnant quitus de sa dette.

Dire que M. [X] [J], en agissant de la sorte, entend empêcher toute discussion sur l'objet du litige concernant la première saisie rendant celle-ci dépourvue d'intérêt, et par voie de conséquence, mettre de manière unilatérale un terme définitif à la procédure actuellement pendante devant la cour en la privant de statuer sur la régularité et la validité de cette saisie eu égard à l'accord de paiement parfaitement exécuté par elle.

En conséquence,

Vu l'article 1231-1 nouveau du code civil ,

Dire que le créancier en pratiquant une rétention de sommes qu'il détenait sans droit ni titre, l'a privée d'effectuer un règlement amiable avec lesdites sommes et faire ainsi l'économie d'une saisie-attribution qui est une procédure lourde et onéreuse.

Dire que M. [X] [J] qui était redevable de sommes trop-perçues pouvait en tant que son débiteur se prévaloir d'une compensation aux termes de l'article 1347 du code civil .

Déclarer abusive la saisie-attribution de 3 672,98 € pratiquée le 20 mai 2021.

En conséquence, en ordonner la mainlevée.

Dire que le compte présenté par le créancier portant sur les sommes dues par elle au titre de la première saisie est erroné dès lors qu'il retient des intérêts jusqu'au 11 juin 2021 alors que la saisie a été pratiquée le 7 juillet 2020 et que des sommes sont versées par elle au titre de l'accord de paiement depuis le 5 juin 2019.

Dire que les sommes à elle restituées sont par voie de conséquence également erronées.

Ordonner à M. [X] [J] de faire un compte détaillé des versements effectués par elle et des sommes déjà saisies.

Vu sa situation financière gravement obérée,

Confirmer le jugement déféré en ce qu'il lui a accordé vingt-quatre mois de délais de grâce pour régler le solde des sommes qu'elle reste devoir à M. [X] [J] par application de l'article 1345-5 du code civil.

Dire que le recouvrement forcé d'une somme inférieure à celle qui était déjà en possession du créancier sans droit ni titre est constitutif d'un abus de saisie dommageable qui doit être réparé par de justes dommages et intérêts en raison du préjudice moral et matériel subi par elle.

Condamner M. [X] [J] à lui verser la somme de 2 000 € en réparation du préjudice subi et à lui rembourser les frais bancaires de 222 € générés par cette saisie sur justificatifs.

Déclarer irrecevable et à défaut mal fondée la demande de M. [X] [J] [J] tendant à sa condamnation au paiement de la somme de 1 000 € de dommages et intérêts sur le fondement de l'article 1240 du code civil .

Condamner M. [X] [J] à lui verser la somme de 2 000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux dépens.

En ses dernières conclusions en date du 11 février 2022, M. [X] [J] demande à la cour de :

Vu les articles 30, 31, 122, 501 et 700 du code de procédure civile,

Vu l'article 1240 du code civil ,

Rejeter l'intégralité des demandes, fins et conclusions de Mme [E] [T].

Confirmer le jugement déféré.

En tout état de cause,

Condamner Mme [E] [T] à lui payer la somme de 1 000 € au titre des préjudices subis.

Condamner Mme [E] [T] à lui payer la somme de 1 500 € en application de l'article 700 du code de procédure civile.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu'aux dernières conclusions des parties.

L'ordonnance de clôture a été rendue le 9 juin 2022.

MOTIFS DE LA DECISION :

Il est constant que la saisie-attribution réalisée le 20 mai 2021 sur le compte de dépôt de Mme [E] [T] l'a été en exécution d'un arrêt de la Cour de cassation en date du 10 septembre 2020. Il sera précisé qu'il ressort d'une lettre de la Société générale en date du même jour que la saisie-attribution s'est révélée infructueuse.

Mme [E] [T] soutient que cette saisie-attribution était injustifiée car en exécution de précédentes condamnations, un jugement du tribunal d'instance de Vannes en date du 10 septembre 2015 et un arrêt de la cour d'appel de Rennes en date du 12 septembre 2018, elle avait payé à M. [X] [J] la somme de 9 575,88 € pour une créance totale de 5 778,49 € de sorte qu'il existait un solde en sa faveur de 3 797,39 €, soit une somme supérieure aux causes de la saisie en date du 20 mai 2021. Elle ajoute qu'une compensation aurait dû légalement s'opérer mais qu'elle s'est trouvée elle-même dans l'impossibilité de l'invoquer dès lors qu'elle ignorait que les paiements réalisés étaient supérieurs à la somme due. Elle demande à la cour de déclarer abusive la saisie-attribution de 3 672,98 € réalisée le 20 mai 2021.

M. [X] [J] confirme que par suite des versements spontanés et d'une saisie-attribution réalisée le 7 juillet 2020, Mme [E] [T] n'est plus débitrice d'aucune somme en vertu du jugement du tribunal d'instance en date du 10 septembre 2015 et de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes en date du 12 septembre 2018. Il ne donne pas d'explication spécifique quant au trop-perçu dont Mme [E] [T] se prévaut à hauteur de la somme de 3 797,39 €. Il produit un décompte en date du 11 juin 2021 aux termes duquel il apparaît que Mme [E] [T] était redevable en vertu des deux condamnations précitées de la somme de 6 245,91 € en principal, frais et intérêts.

Mme [E] [T] peut utilement se prévaloir du fait qu'une précédente saisie-attribution réalisée le 7 juillet 2020 a éteint la créance de M. [X] [J] telle qu'elle résultait du jugement du tribunal d'instance de Vannes en date du 10 septembre 2015 et de l'arrêt de la cour d'appel de Rennes en date du 12 septembre 2018, la saisie ayant porté sur une somme de 7 413,42 €. Le paiement est devenu effectif à la date à laquelle a été notifiée aux parties la décision du juge de l'exécution en date du 2 février 2021 rejetant la contestation de la débitrice.

Par aucune pièce produite aux débats, Mme [E] [T] ne démontre qu'à la date du 20 mai 2021, la créance de M. [X] [J] telle qu'elle résultait de la condamnation de la Cour de cassation en date du 10 septembre 2020 était intégralement éteinte le cas échéant par compensation. De manière plus générale, elle ne démontre pas que les sommes payées à cette date à l'huissier de justice, en ce compris les paiements réalisés de manière volontaire, avaient permis de solder l'ensemble des créances. Si elle critique le décompte établi par le créancier, elle ne produit pas les éléments permettant d'établir un décompte qui serait plus exact notamment concernant la date et le montant des paiements réalisés de manière volontaire.

M. [X] [J] étant muni d'un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible au sens de l'article L. 111-2 du code des procédures civiles d'exécution, c'est par de justes motifs que le premier juge a constaté la validité de la saisie-attribution réalisée le 20 mai 2021 et débouté Mme [E] [T] de sa demande de mainlevée et de condamnation de M. [X] [J] à lui payer diverses sommes à titre indemnitaire ou à titre de dommages et intérêts.

Les délais de paiement accordés par le premier juge ne sont pas discutés.

A titre reconventionnel, M. [X] [J] sollicite la condamnation de Mme [E] [T] à lui payer la somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 1240 du code civil en réparation des troubles et tracas causés par les multiples procédures intentées par elle. Cette prétention est recevable en cause d'appel puisqu'elle n'est que la conséquence du recours intenté par l'appelante. Pour autant, M. [X] [J] ne justifie d'aucun préjudice particulier et sa demande doit être rejetée.

Le jugement déféré sera confirmé en toutes ses dispositions.

L'équité commande de ne pas faire application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile.

Mme [E] [T] sera condamnée aux dépens de la procédure d'appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour,

Confirme en toutes ses dispositions le jugement du juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Vannes en date du 2 novembre 2021.

Y ajoutant,

Condamne Mme [E] [T] aux dépens de la procédure d'appel.

Rejette toute demande plus ample au contraire.