Cass. 1re civ., 20 février 1962
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. BATTESTINI
Avocat général :
M. JODELET
Avocats :
Me ROQUES, Me LANDOUSY
SUR LE PREMIER MOYEN : ATTENDU QU' A LA SUITE DU DECES DE LA DAME VEUVE Z... DE GRENEDAN, SES QUATRE FILLES ONT PROCEDE, LE 16 SEPTEMBRE 1920, AU PARTAGE DES BIENS IMMOBILIERS, DEPENDANT DE SA SUCCESSION ET DE CELLE DE LEUR PERE DECEDE QUELQUES SEMAINES AVANT SA FEMME ;
QUE DANS L'ACTE AUTHENTIQUE REALISANT CE PARTAGE, IL A ETE STIPULE QUE POUR LE CAS DE VENTE PAR UNE OU PLUSIEURS DES CO-PARTAGEANTES DE TOUT OU PARTIE DE LEUR LOT, LES AUTRES POSSEDERAIENT ;
QUE LE 16 FEVRIER 1957, L'UNE DES CO-PARTAGEANTES, LA DEMOISELLE LOUISE A... A, DANS UN ACTE SOUS SEING PRIVE, DECLARE VENDRE VENDRE AU DOCTEUR Y..., DIVERSES PARCELLES EN NATURE DE VIGNES ET DE LANDES PROVENANT DU PARTAGE AINSI QUE LES PARTS DE CAVE COOPERATIVE DONT ELLE RESTAIT PROPRIETAIRE, MAIS QUE LE TRANSFERT DE PROPRIETE A ETE DIFFERE JUSQU'AU JOUR DE LA REALISATION DE LA VENTE PAR ACTE AUTHENTIQUE ET DU PAYEMENT DU PRIX ;
QUE LE 28 DU MEME MOIS, LA DAME DE X... DE VAULX SOEUR DE LA DEMOISELLE LOUISE A..., A SIGNIFIE AU DOCTEUR Y... UN ACTE EXTRAJUDICIAIRE PAR LEQUEL ELLE LUI MANIFESTAIT L'INTENTION D'EXERCER SON DROIT DE PREFERENCE ET DE PREEMPTION SUR LES BIENS ATTRIBUES LORS DU PARTAGE A SA SOEUR ET DECLARAIT SE RESERVE LE DROIT DE FAIRE PRONONCER LA NULITE DE TOUTES VENTES QUI INTERVIENDRAIENT AU MEPRIS DE LA CLAUSE DE PREEMPTION DANS L'ACTE DU 16 SEPTEMBRE 1920 ;
QUE NEANMOINS UN ACTE AUTHENTIQUE DE VENTE ETAIT ETABLI LE 7 MARS 1957 ENTRE SAVIGNAC, AUQUEL LA DEMOISELLE A... AVAIT DONNE MANDAT LE 25 FEVRIER 1957, ET LE DOCTEUR Y..., ET QUE CET ACTE A ETE ENREGISTRE LE 14 MARS 1957 ;
ATTENDU QUE LE POURVOI FAIT GRIEF A L'ARRET CONFIRMATIF ATTAQUE D'AVOIR DECLARE CETTE VENTE AU MOTIF QUE LE TIERS ACQUEREUR, QUI CONNAISSAIT L'EXISTENCE DU DROIT DE PREFERENCE DES CO-PARTAGEANTES ET L'INTENTION DE LA DAME DE X... DE VAULX D'EN USER, ETAIT DE MAUVAISE FOI, ALORS QU'IL RESULTAIT DES PROPRES CONSTATIONS DES JUGES DU FOND QUE L'ACQUEREUR N'AVAIT CONNU LE PACTE DE PREFERENCE QU'APRES LA CONCLUSION D'UNE PROMESSE DE VENTE SYNALLAGMATIQUE, ET QUE LA MECONNAISSANCE DE CE PACTE NE POUVAIT JUSTIFIER L'ANNULATION DE LA VENTE MAIS DEVAIT SEULEMENT DONNER LIEU A DES DOMMAGES-INTERETS DE LA PART DU PROMETTANT VIS-A-VIS DU BENEFICE DUDROIT DE PREFERENCE ;
MAIS ATTENDU QUE LA COUR D'APPEL, INTERPRETANT SOUVERAINEMENT LES CONVENTIONS DES PARTIES, A VU DANS L'ACTE SOUS SEING PRIVE DU 16 FEVRIER 1957, UNE SIMPLE PROMESSE CONDITIONNELLE DE VENTE ;
QU'ELLE A USE DE SON POUVOIR D'APPRECIATION EN DECIDANT QUE LE DOCTEUR Y..., INFORME LE 23 FEVRIER DE L'EXISTENCE DU DROIT DE PREFERENCE ET DE L'INTENTION DE L'UN DE SES TITULAIRES DE L'EXERCER, ETAIT DE MAUVAISE FOI LORSQUE, LE 7 MARS SUIVANT, IL AVAIT SIGNE L'ACTE AUTHENTIQUE DE VENTE, QUI RAPPELAIT D'AILLEURS LUI-MEME LA TENEUR DE LA CLAUSE LITIGIEUSE DE L'ACTE DE PARTAGE ;
QUE SI LE BENEFICIAIRE D'UN PACTE DE PREFERENCE NE POSSEDE, EN PRINCIPE, QU'UN SIMPLE DROIT DE CREANCE LORSQUE SON DROIT A ETE MECONNU, IL EN VA DIFFEREMMENT LORSQUE LE TIERS ACQUEREUR A ETE DE MAUVAISE FOI ;
QU'EN PAREIL CAS, LES JUGES DU FOND ONT LA FACULTE D'ACCORDER LA REPARATION QUI LEUR PARAIT LA PLUS ADEQUATE AU DOMMAGE SUBI ET NOTAMMENT DE PRONONCER L'ANNULATION DE LA VENTE ;
QU'IL SUIT DE LA QUE LE MOYEN N'EST PAS FONDE ;
SUR LE DEUXIEME MOYEN : ATTENDU QU'IL EST EGALEMENT REPROCHE A L'ARRET ATTAQUE D'AVOIR CONDAMNE L'ACQUEREUR A PAYER UNE INDEMNITE AU BENEFICIAIRE DU DROIT DE PREFERENCE ALORS QUE LEDIT ACQUEREUR N'AVAIT COMMIS AUCUNE FAUTE GRAVE EQUIVALENTE AU DOL EN USANT DU DROIT DE DEFENDRE A UNE ACTION EN JUSTICE QUI S'ETAIT TERMINEE PAR UN PREMIER ARRET EN SA FAVEUR ET EN DEMANDANT A LA JURIDICTION DE RENVOI DE NE PAS PRONONCER LA NULLITE DE LA VENTE QUI EN TOUTE HYPOTHESE, NE S'IMPOSAIT PAS A ELLE ;
MAIS ATTENDU QUE LE RAPPROCHEMENT DES CONCLUSIONS D'APPEL PRISES PAR LA DAME DE X... DE VAULX ET DES MOTIFS DE L'ARRET MONTRE QU'EN CONDAMNANT Y... A PAYER A CETTE DERNIERE 1.000 NF A TITRE DE DOMMAGES-INTERETS, LES JUGES D'APPEL ONT ENTENDU AVANT TOUT REPARER UN PREJUDICE MATERIEL ET MORAL CAUSE DE MAUVAISE FOI PAR UN PLAIDEUR QUI A ABUSE DE L'INEXPERIENCE D'UNE VENDERESSE AGEE ;
QUE LE MOYEN NE SAURAIT DONC ETRE ACCUEILLI ;
SUR LE TROISIEME MOYEN : ATTENDU QUE, SELON LE POURVOI, L'ARRET ATTAQUE AURAIT A TORT REFUSE DE CONDAMNE R LA DEMOISELLE A... A GARANTIR LE DOCTEUR Y... DE LA CONDAMNATION A DES DOMMAGES-INTERETS PRONONCE AU PROFIT DE LA DAME DE X... DE VAULX, ET A LUI VERSER UN INDEMNITE, ALORS QUE LA COUR A ELLE-MEME DECLARE LA VENTE NULLE POUR MECONNAISSANCE PAR LA VENDERESSE DES OBLIGATIONS ;
MAIS ATTENDU QUE L'ARRET RELEVE QUE LA DEMOISELLE A... N'A COMMIS PERSONNELLEMENT AUCUNE FAUTE, ET QU'IL APPARTENAIT AUX TIERS DE NOTIFIER AUX BENEFICIAIRES DU DROIT DE PREFERENCE LEUR INTENTION D'ACQUERIR;
QUE CETTE INTERPRETATION DE L'ACTE DE PARTAGE DE 1920 EST EXEMPTE DE DENATURATION ;
QU'A BON DROIT, DES LORS, LA COUR D'APPEL A REJETE L'ACTION EN GARANTIE DIRIGEE CONTRE LA VENDERESSE ;
D'OU IL SUIT QUE L'ARRET A LEGALEMENT JUSTIFIE SA DECISION ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE LE POURVOI FORME CONTRE L'ARRET RENDU LE 4 JUILLET 1960 PAR LA COUR D'APPEL DE NIMES.