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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 5 novembre 2010, n° 09/09918

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

FRANCE EMPIRE (SA)

Défendeur :

M. épouse G., Edmond O.

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Monsieur GIRARDET

Conseillers :

Madame DARBOIS, Madame NEROT

Avoués :

Me Nadine CORDEAU, SCP MIRA - BETTAN, SCP BLIN

Avocats :

Cabinet SHEN, Me Ninon RUTAULT, Me Jean-Paul COMBENEGRE

Paris, du 10 avr. 2009

10 avril 2009

En 1997, une société d'édition canadienne a publié un ouvrage intitulé 'Napoléon Liberté-Egalité-Fraternité' écrit par Monsieur Ben W. avec la collaboration de Monsieur Emile G., notamment rédacteur du chapitre II de l'ouvrage intitulé 'naissance à Ajaccio'.

En avril 2006, la société d'édition française France-Empire a publié un ouvrage de Monsieur Edmond O. intitulé 'Napoléon fils du comte Marbeuf ...'.

Madame Annie M. veuve G., agissant en qualité d'ayant-droit de son époux décédé, a assigné la société France-Empire aux fins d'obtenir la réparation du préjudice subi du fait de la contrefaçon de l'ouvrage auquel celui-ci a collaboré.

L'éditeur a assigné en intervention forcée et en garantie Monsieur O..

Par jugement rendu le 10 avril 2009, le tribunal de grande instance de Paris a, avec exécution provisoire :

- dit que Monsieur Emile G. est co-auteur de l'ouvrage intitulé 'Napoléon Liberté-Egalité-Fraternité', que Madame Annie M. veuve G. a la qualité d'unique ayant-droit d'Emile G. et, en conséquence, déclaré celle-ci recevable à agir en contrefaçon des droits d'auteur d'Emile G. ,

- dit qu'en reproduisant sans son autorisation et sans mention du nom d'Emile G. des extraits du chapitre II de l''uvre intitulée 'Napoléon - Liberté-Egalité-Fraternité' dans l'ouvrage intitulé 'Napoléon fils du comte Marbeuf', édité par la société France-Empire et dont Monsieur O. est l'auteur, ces derniers ont commis des actes de contrefaçon au préjudice de Madame G.,

- fait interdiction à la société France-Empire de poursuivre de tels agissements, et ce sous astreinte de 150 euros par infraction constatée à compter de la signification du jugement,

- condamné in solidum la société France-Empire et Monsieur Edmond O. à verser à Madame Annie M. veuve G. :

* la somme de 10.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux d'auteur,

* la somme de 5.000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de l'atteinte portée à ses droits moraux d'auteur,

* la somme de 3.000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

et à supporter les dépens,

- condamné Monsieur Edmond O. à garantir à hauteur de 50% la société France-Empire des condamnations prononcées à son encontre.

Par dernières conclusions signifiées le 27 mai 2010 , la société anonyme FRANCE-EMPIRE appelante demande à la cour, au visa des articles 1134, 1156 et 1382 du code civil, 4, 12 et 14 du code de procédure civile et du contrat d'édition du 1er septembre 2005 la liant à Monsieur O., de réformer le jugement entrepris, de rejeter les entières prétentions de Madame G., de la débouter de ses demandes indemnitaires ou, à tout le moins, de les minorer aux sommes de 1.231,76 euros et de UN euro symbolique au titre, respectivement, de ses préjudices commercial et moral, d'infirmer le jugement en ce qu'il a limité le recours en garantie et de condamner Monsieur O. à la garantir de toutes condamnations pouvant intervenir au bénéfice de Madame G., de condamner Monsieur O. à lui verser une somme de 1.000 euros à titre de dommages-intérêts et de condamner Madame G. et Monsieur O. aux entiers dépens.

Par dernières conclusions signifiées le 22 juin 2010 Madame Annie M. veuve de Monsieur Emile G. demande à la cour, au visa des articles L 111-1, L 121-1 et 335-2 du code de la propriété intellectuelle ainsi que du testament du 27 août 1998, de constater qu'elle est titulaire de droits moraux et patrimoniaux sur l''uvre 'Napoléon Liberté-Egalité-Fraternité' et recevable et fondée en son action, de dire que la société France Empire et Monsieur O. ont, par la publication de l'ouvrage 'Napoléon fils du comte Marbeuf...' contrefait l'intégralité des droits d'auteur qu'elle détient, et de condamner in solidum la société France-Empire et Monsieur O. à lui verser les sommes de 10.000 euros, de 12.317,22 euros et de 3.000 euros au titre, respectivement, de son préjudice moral, de l'atteinte à ses droits patrimoniaux d'auteur et de ses frais non répétibles en les condamnant, en outre, aux entiers dépens.

Monsieur Edmond O., par dernières conclusions signifiées le 15 septembre 2010 ,demande à la cour de réformer le jugement entrepris en toutes ses dispositions, de débouter Madame G. de toutes ses demandes, de lui donner acte de son engagement de citer et de faire figurer dans la bibliographie des futures éditions de son livre l'ouvrage de Monsieur Ben W. auquel a collaboré Emile G..

Il sollicite, subsidiairement, la limitation aux sommes de 1.231,76 euros et de 1 euro le montant des indemnités au titre des préjudices patrimonial et moral et la limitation de la garantie due à l'éditeur à hauteur de 50 %.

Il demande enfin à la cour d'écarter des débats la totalité des pièces adverses non régulièrement communiquées devant la cour, de débouter Madame G. et l'éditeur de leurs prétentions (arguant, dans le corps de ses écritures et s'agissant de la demande indemnitaire de l'éditeur, d'une compensation avec les profits qu'il a pu réaliser par la commercialisation de son ouvrage durant trois ans) et leur condamnation aux dépens de première instance et d'appel.

SUR CE,

Sur la procédure :

Considérant que, par sommations du 19 avril puis du 11 mai 2010 , l'avoué de Monsieur O. a fait sommation aux avoués représentant les intérêts de Madame G. et de l'éditeur de lui communiquer les 'deux ouvrages sur Napoléon' visés en pièces 6 et 7 du bordereau de communication de pièces de l'avoué représentant les intérêts de Madame G. ;

Qu'il est justifié de la communication de ces deux pièces (numérotées 12 et 13) selon bordereau de communication de pièces de l'avoué de la société France Empire du 16 juin 2010 ;

Que Madame G. et la société France Empire ne venant pas étayer leurs prétentions par d'autres pièces qui n'auraient pas été communiquées, la demande de Monsieur O. tendant à voir écarter des pièces non communiquées par les parties adverses est sans objet ;

Considérant qu'il en est de même de la demande de Madame G. tendant à se voir déclarer recevable en son action dès lors que ni la qualité d'auteur de Monsieur Emile G. ni la qualité d'ayant-droit titulaire des droits d'auteur de son épouse ne sont plus contestées en cause d'appel ;

Sur la contrefaçon :

Considérant que Monsieur O., à qui Madame G. fait grief d'avoir reproduit dans son ouvrage seize phrases ou expressions contenues dans l'ouvrage précédemment édité auquel a collaboré son époux, ne conteste pas la recevabilité des prétentions de Madame G., mais soutient que ne sauraient lui être reprochés les actes de contrefaçon retenus par le tribunal et qui portent sur l'intégralité des seize reprises incriminées ;

Qu'il se prévaut, pour ce faire, de la circonstance qu'il a repris les phrases et expressions non point de l'ouvrage de collaboration intitulé 'Napoléon Liberté-Egalité-Fraternité' mais d'une brochure d'une trentaine de pages datée de 1987 (communiquée le 04 mai 2010 ) qu'à titre amical Monsieur G. lui a remise lors d'une rencontre en 1992 ;

Qu'il précise qu'elle contenait l'hypothèse selon laquelle le comte de Marbeuf aurait été le père de Napoléon B. et que Monsieur G. lui aurait déclaré qu''il lui serait loisible de s'en inspirer' et estime, en conséquence, avoir agi de bonne foi ;

Qu'il conteste, en outre, l'originalité des phrases dont la reproduction est incriminée, mettant en avant la banalité de leur construction, l'emploi de mots du langage courant qu'il avait conservés à l'esprit après lecture du document privé remis par Monsieur G., observe que ce dernier n'a pas hésité à les reprendre dans l'ouvrage de collaboration édité en 1997 et estime que ni la composition ni l'expression des quelques fragments repris dans les deux ouvrages ne permettent de considérer que ceux-ci exprimeraient sérieusement la personnalité de leur auteur et justifieraient l'octroi d'un monopole ;

Considérant, ceci exposé, que pour attester de l'autorisation de reproduction dont il fait état Monsieur O. verse aux débats la brochure datée de 1987 qu'il a conservée outre une lettre datée du 20 avril 2007 que lui a adressée Monsieur V., imprimeur présenté comme le témoin de sa rencontre avec Monsieur G., venant confirmer les propos que Monsieur O. prête à Monsieur G. sur l'utilisation de cette brochure ;

Que ces éléments, équivoques en ce que l'autorisation verbale alléguée est imprécise et peut tout aussi bien concerner l'éclairage particulier donné par Monsieur G. à l'événement historique que constitue la paternité de Napoléon, ne suffisent pas à attester de la renonciation de ce dernier à ses droits d'auteur ;

Que Monsieur O. ne peut, non plus, tirer argument de la reprise, par Monsieur G., de ses propres écrits dans l'ouvrage paru en 1997 ;

Que le moyen que Monsieur O. tire, par ailleurs, de sa bonne foi est inopérant dès lors que la contrefaçon est caractérisée, indépendamment de toute faute ou mauvaise foi, par la reproduction d'une 'uvre de l'esprit en violation des droits de propriété qui y sont attachés ;

Qu'il y a lieu, en revanche, d'apprécier l'originalité des phrases et expressions qu'il est reproché à Monsieur O. d'avoir reprises dès lors que la forme banale, qui n'exprime pas la personnalité de son créateur, n'est pas protégée par le droit d'auteur ;

Qu'à cet égard, certains passages, tels 'la Perfide Albion, ennemie de toujours', figurant en page 32 du livre de Monsieur G. et que l'on retrouve en page 22 du livre de Monsieur O. qui écrit : 'la Perfide Albion ennemie de toujours', ou encore 'très jolie petite sauvageonne' (en page 40 du livre de Monsieur G.) retrouvé en page 27 du livre de Monsieur O. qui écrit : 'une ravissante petite sauvageonne' ou encore la phrase 'va peu à peu fondre sous le charme de ce grand séducteur' figurant en page 42 et en page 34 de chacun des deux ouvrages litigieux doivent être considérés comme des passages appartenant au fonds commun des expressions toutes faites ;

Que tel n'est pas le cas d'autres passages où la personnalité de l'auteur, son empreinte particulière, s'expriment dans l'expression choisie ;

Qu'ainsi, la phrase : 'un regard d'acier qui savait se montrer enjôleur, mais aussi quelquefois qui pouvait lancer des éclairs quand il était en colère' (en pages 39-40 de l'ouvrage de Monsieur G.) reproduite à l'identique en page 25 de l'ouvrage de Monsieur O., ou bien la phrase : 'les deux chefs s'en étaient tenus au modus vivendi qu'ils avaient établi entre eux au cours d'une rencontre en Casinca' (en pages 45 et 41 de chacun des deux ouvrages), de même la phrase : 'c'est seulement alors qu'il pourra jouer un rôle majeur et passionnant pour amener les Corses à aimer la France et à participer à sa gloire et à sa grandeur' (page 45 du livre de Monsieur G.) reproduite avec des différences mineures dans le livre de Monsieur O. (en page 42) à savoir : 'c'est durant cette seconde phase qu'il pourra jouer un rôle majeur et passionnant qui sera de convaincre et persuader les Corses d'aimer la France et surtout de participer à sa gloire et à sa grandeur', ou encore 'sous son commandement, les Français vont subir échec sur échec avec pour apothéose l'infamante capitulation de la garnison de Borgo', figurant en page 46 du livre de Monsieur G. et reproduite à l'identique en page 44 de l'ouvrage de Monsieur O. témoignent d'une originalité les rendant éligibles à la protection du droit d'auteur ;

Qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'en publiant son ouvrage intitulé 'Napoléon, fils du Comte Marbeuf ...' qui reproduisait des passages originaux de l''uvre de Monsieur G., Monsieur O. a commis des actes de contrefaçon au préjudice de ce dernier ou de ses ayants-droit et que le jugement doit être confirmé sur ce point ;

Sur la réparation du préjudice :

Considérant que chacune des parties au litige conteste l'évaluation, par le tribunal, des préjudices résultant de l'atteinte aux droits tant moraux que patrimoniaux de Madame G. pour se prévaloir de l'excès ou de l'insuffisance du montant des indemnisations ;

Que si Monsieur O. demande, à titre principal, à la cour de considérer que son engagement d'insérer dans la bibliographie des futures éditions de son ouvrage, qui comporte quatre pages, le nom de Monsieur G. est de nature à indemniser le trouble causé par les actes de contrefaçon qui lui sont reprochés, cet engagement ne peut être considéré comme réparant à suffisance les préjudices subis ;

Qu'il en est de même du fait que la commercialisation de l'ouvrage de Monsieur O. a cessé dans la mesure où cet événement ne peut, comme le prétend l'éditeur, suffire à réparer le préjudice moral de Madame G. ou à justifier l'allocation d'1 euro symbolique à ce titre ;

Qu'il est constant que les huit emprunts retenus par la cour s'insèrent dans un ouvrage historique de plus de 200 pages portant sur la période napoléonienne qui fait l'objet de nombreuses publications et que l'oeuvre contrefaite, éditée au Canada et publiée neuf ans avant la publication de l'oeuvre contrefaisante, n'a pas eu de diffusion en France ;

Que le montant contractuel des droits d'auteur de Monsieur G. sur le livre auquel il a collaboré s'établissait à 3 % du montant des ventes ;

Que selon les pièces produites par la société France-Empire appelante, l'ouvrage de Monsieur O. a été tiré en avril 2006 à 3.220 exemplaires sur lesquels 722 exemplaires ont été vendus en France jusqu'en novembre 2007 au prix unitaire de 17,06 euros (soit une recette totale HT de 12.317,32 euros) avec un coût de fabrication de 8.951,48 euros HT, l'éditeur percevant 45 % du prix de vente et l'auteur, à qui un à-valoir de 1.800 euros a été versé, 10 % de ce prix ;

Qu'en considération de ces éléments, il y a lieu d'infirmer le jugement entrepris en son évaluation du montant des dommages-intérêts et d'allouer à Madame G. une somme de 2.000 euros en réparation de l'atteinte portée au droit moral de l'auteur et de 1.000 euros venant réparer l'atteinte portée à ses droits patrimoniaux ;

Sur la garantie :

Considérant que la société France-Empire reproche au tribunal d'avoir limité à 50 % la garantie de Monsieur O. alors que ce dernier ne la contestait pas et n'en demandait pas la limitation et d'avoir dénaturé les termes clairs et dénués d'ambiguïté de la convention la liant à Monsieur O., arguant surabondamment du fait qu'en dépit de sa qualité de professionnelle de l'édition, elle était dans l'incapacité de connaître les emprunts litigieux, Monsieur O., qui fournissait une bibliographie abondante, l'assurant au surplus de l'entière originalité de son 'uvre ;

Que si, comme indiqué ci-avant, la mauvaise foi est indifférente pour caractériser le délit civil de contrefaçon, la société France Empire est fondée à se prévaloir du contrat d'édition qu'elle a signé avec Monsieur O. le 1er septembre 2005 et qu'elle produit ;

Qu'en des termes qui ne requièrent pas interprétation, il est stipulé en son article 2 : 'l'auteur garantit la jouissance entière et libre de toutes servitudes du droit d'édition cédé à l'éditeur contre tous troubles, revendications ou évictions quelconques. Il déclare, notamment, que son 'uvre est entièrement originale et ne contient aucun emprunt à une autre 'uvre de quelque nature que ce soit, qui serait susceptible d'engager la responsabilité de l'éditeur.' ;

Qu'en application de la convention ainsi formée entre les parties, conforme aux dispositions de l'article L 132-8 du code de la propriété intellectuelle, et sans qu'il y ait lieu de tenir compte des considérations d'équité dont se prévaut Monsieur O., il convient de réformer le jugement entrepris sur ce point en condamnant celui-ci à garantir son éditeur des entières condamnations prononcées à son encontre ;

Sur les demandes accessoires :

Considérant que la demande indemnitaire que la société France-Empire forme à l'encontre de Monsieur O. au motif qu'elle a dû cesser la commercialisation de l'ouvrage et n'a pu bénéficier, comme le prévoyait l'article 12 du contrat d'édition, du produit de la vente au rabais du stock de livres restant, deux ans après leur commercialisation, ne peut prospérer dès lors qu'en éditant l''uvre contrefaisante, elle a concouru à la réalisation de l'infraction ;

Que, sans qu'il y ait lieu de se prononcer sur l'argumentation de Monsieur O. sur ce point, sa demande sera rejetée ;

Que l'équité ne conduit pas à faire application, en cause d'appel, des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile au profit de l'une des parties au litige ;

Que Monsieur O. qui succombe supportera les dépens de première instance et d'appel ;

PAR CES MOTIFS,

Dit n'y avoir lieu à écarter des débats des pièces pour défaut de communication aux parties adverses ;

Confirme le jugement entrepris à l'exception de ses dispositions relatives au quantum des indemnités, à la garantie réclamée par l'éditeur et aux dépens et, statuant à nouveau des chefs infirmés en y ajoutant :

Condamne in solidum la société anonyme France-Empire et Monsieur Edmond O. à verser à Madame Annie M. veuve G. :

- la somme de 2.000 euros en réparation de l'atteinte portée au droit moral d'auteur,

- la somme de 1.000 euros en réparation de l'atteinte portée au droit patrimonial d'auteur,

Condamne Monsieur Edmond O. à garantir la société France-Empire de l'intégralité des condamnations prononcées à son encontre au profit de Madame G. ;

Rejette la demande en paiement de dommages-intérêts formée par la société France Empire ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel ;

Condamne Monsieur Edmond O. aux dépens de première instance et d'appel qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.