CA Paris, Pôle 5 ch. 1, 31 mars 2015, n° 13/23894
PARIS
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
ASCENT CONSULTING (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Monsieur Benjamin RAJBAUT
Conseillers :
Madame Anne-Marie GABER, Mme Nathalie AUROY
Avocats :
SELARL Antoine G. Avocats, Me Sylvie C., Me Pierre L.
Vu le jugement rendu contradictoirement le 28 novembre 2013 par le tribunal de grande instance de Paris .
Vu l'appel interjeté le 12 décembre 2013 par la SARL ASCENT CONSULTING, intimant M. Yves B. et Mme Catherine B..
Vu l'ordonnance rendue le 01 avril 2014 par le conseiller de la mise en état, rejetant la demande aux fins d'exécution provisoire de la mainlevée de la saisie conservatoire prononcée par le jugement dont appel.
Vu les dernières conclusions n° 3 de la SARL ASCENT CONSULTING, transmises le 16 septembre 2014.
Vu les dernières conclusions n° 3 de M. Yves B. et de Mme Catherine B., transmises le 31 octobre 2014.
Vu l'ordonnance de clôture en date du 18 novembre 2014.
Considérant que dans la mesure où la SARL ASCENT CONSULTING n'a pas intimé sur son appel l'association La France en 100 Portraits et où aucun appel incident n'est formé à l'encontre de cette association, celle-ci n'est plus partie à l'instance devant la cour ;
Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ;
Considérant qu'il suffit de rappeler que la SARL ASCENT CONSULTING est une maison d'édition exerçant son activité sous la dénomination 'Les éditions CALU' ;
Que M. Yves B. est un artiste connu en tant que peintre, photographe et écrivain et Mme Catherine B. est photographe ; qu'ils se sont rapprochés des éditions CALU pour signer le 15 mai 2011 un contrat d'édition portant sur un coffret regroupant l'ouvrage intitulé 'Portraits de France', réunissant les portraits photographiques de diverses personnalités en France ainsi que le 'making of' ;
Que M. Jean-Yves A., dirigeant de la SARL ASCENT CONSULTING, a déposé le 09 août 2011 la marque semi-figurative 'collection 101 / 101 Editions Calu' sous le numéro 11 3 852 008 dans les classes 9, 16 et 41 ;
Que M. Yves B. et Mme Catherine B. ont mis un terme au contrat d'édition par lettre recommandée avec accusé de réception du 13 décembre 2011, reprochant aux éditions CALU l'inexécution de ses obligations contractuelles ;
Que la SARL ASCENT CONSULTING a fait assigner le 20 mars 2012 M. Yves B. et Mme Catherine B. pour exécution fautive du contrat du 15 mai 2011, rupture unilatérale brutale et actes de dénigrement ;
Que le 05 juin 2012 la SARL ASCENT CONSULTING a fait procéder sur les comptes bancaires de M. Yves B. et de Mme Catherine B., à la saisie conservatoire d'une partie de sa créance, soit la somme de 47.507 € en exécution d'une ordonnance du juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Compiègne en date du 24 mai 2012 ;
Que le 14 septembre 2012 le juge de l'exécution du tribunal de grande instance de Compiègne a débouté M. Yves B. et Mme Catherine B. de leur contestation de cette saisie, cette décision ayant été confirmée par arrêt de la cour d'appel d'Amiens en date du 11 juin 2013 ;
Considérant que le jugement entrepris a, en substance :
I : SUR LA QUALITÉ À AGIR DE LA SARL ASCENT CONSULTING :
Considérant que si aux motifs de leurs conclusions M. Yves B. et Mme Catherine B. invoquent à titre liminaire l'absence de qualité à agir de la SARL ASCENT CONSULTING au motif que l'ouvrage en cause a été édité par les ÉDITIONS CALU qui n'est ni l'enseigne, ni le nom commercial de la SARL ASCENT CONSULTING, force est de constater qu'ils ne reprennent pas au dispositif de leurs conclusions - qui seul saisit la cour de leurs prétentions conformément au 2ème alinéa de l'article 954 du code de procédure civile - leur demande d'irrecevabilité de l'action de la SARL ASCENT CONSULTING pour défaut de qualité à agir, de telle sorte que la cour n'est pas formellement saisie d'une telle demande ;
Considérant qu'il apparaît qu'en réalité cette argumentation vient à l'appui de leur demande en nullité du contrat d'édition du 15 mai 2011 qui ne constitue pas une exception de procédure devant être examinée à titre liminaire, ni même une fin de non-recevoir mais une demande reconventionnelle qui sera examinée ci-après avec le fond du litige ;
II : SUR LA DEMANDE EN NULLITÉ DU JUGEMENT :
Considérant qu'à titre principal la SARL ASCENT CONSULTING demande à la cour d'annuler le jugement entrepris au motif que le tribunal aurait statué sur le fondement d'un moyen soulevé d'office, non contradictoire et erroné, à savoir une prétendue faculté contractuelle de résiliation unilatérale des parties, qu'il aurait conféré, contre toute règle de droit, un caractère péremptoire à une opinion relative d'un témoin, qu'il aurait ignoré ses pièces, faits et moyens, qu'il aurait laissé aux intimés le produit de leur fraude, qu'il aurait empêché son avocat de poursuivre sa plaidoirie lors de l'audience du 14 octobre 2013 et aurait ainsi statué avec partialité, la privant d'un procès équitable, violant les articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et les articles 12, 14 et 16 du code de procédure civile ;
Considérant que M. Yves B. et Mme Catherine B. répliquent que les moyens développés par l'appelante sont totalement infondés, que les premiers juges ont parfaitement tenu compte de l'ensemble des éléments fournis et que c'est l'avocat de la SARL ASCENT CONSULTING qui a choisi de quitter la salle d'audience 'de manière très théâtrale' le 14 octobre 2013 ;
Considérant ceci exposé, que la question de la validité de la résiliation unilatérale du contrat d'édition par M. Yves B. et Mme Catherine B. était aux débats devant les premiers juges ; que le tribunal n'a soulevé aucun moyen d'office en statuant sur ce point et qu'il n'y a donc eu aucune violation du principe du contradictoire ;
Considérant qu'il n'est en outre nullement établi que le tribunal aurait ignoré les pièces, faits et moyens invoqués par la SARL ASCENT CONSULTING puisque, au contraire, le jugement entrepris a statué sur l'ensemble des demandes de l'appelante après avoir analysé ses pièces ;
Considérant d'autre part que le prétendu incident d'audience qui serait survenu lors des débats devant le tribunal le 14 octobre 2013 n'est corroboré par aucune demande de donner acte qui aurait pu figurer au plumitif d'audience, étant en tout état de cause rappelé que conformément aux dispositions de l'article 440 du code de procédure civile, le président dirige les débats et peut faire cesser les plaidoiries lorsque la juridiction s'estime éclairée ;
Considérant enfin que les autres moyens soulevés par la SARL ASCENT CONSULTING ont en réalité trait au débat sur le fond du litige et la pertinence des pièces produites par les parties ;
Considérant en conséquence qu'il n'est nullement justifié que le tribunal aurait statué avec partialité et ainsi privé la SARL ASCENT CONSULTING d'un procès équitable, qu'elle sera dès lors déboutée de sa demande en annulation du jugement ;
III : SUR LA DEMANDE EN ANNULATION DU CONTRAT D'ÉDITION :
Considérant que M. Yves B. et Mme Catherine B. demandent l'annulation du contrat d'édition du 15 mai 2011 aux torts exclusifs de la SARL ASCENT CONSULTING en ce qu'il ne répond pas aux exigences légales d'un contrat d'édition, telles que définies par les articles L 131-3 à L 132-18 du code de la propriété intellectuelle ;
Qu'ils font valoir que les ÉDITIONS CALU, qui n'est ni l'enseigne, ni le nom commercial de la SARL ASCENT CONSULTING, ne sont référencées ni à la BNF, ni au Syndicat des éditeurs et qu'au jour de la conclusion du contrat elle n'avait absolument pas le statut d'éditeur qui est une profession strictement réglementée ;
Qu'ils soutiennent ainsi que la SARL ASCENT CONSULTING, alors spécialisée en ingénierie, n'avait pas la qualité pour signer avec eux un contrat d'édition de livre d'art ;
Considérant que la SARL ASCENT CONSULTING réplique qu'il s'agit d'une demande nouvelle en cause d'appel, irrecevable conformément aux dispositions de l'article 564 du code de procédure civile ;
Qu'elle ajoute avoir la personnalité morale et la pleine capacité juridique et qu'un prétendu hiatus entre son objet social et l'objet du contrat n'est pas une cause de nullité du contrat mais une éventuelle cause de responsabilité du représentant de la société envers ses associés ;
Qu'elle fait enfin valoir que le contrat du 15 mai 2011 répond bien à la règle de l'article L 131-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Considérant ceci exposé, que l'article 564 du code de procédure civile dispose qu''à peine d'irrecevabilité relevée d'office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles prétentions si ce n'est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l'intervention d'un tiers, ou de la survenance ou de la révélation d'un fait' ;
Considérant qu'en l'espèce la demande de M. Yves B. et de Mme Catherine B. en annulation du contrat d'édition tend à faire écarter les prétentions adverses de la SARL ASCENT CONSULTING en dommages et intérêts pour exécution fautive du dit contrat, que de ce fait cette demande présentée pour la première fois en cause d'appel est bien recevable conformément aux dispositions de l'article 564 précité ;
Considérant qu'il sera rappelé en premier lieu que contrairement à ce que soutiennent M. Yves B. et Mme Catherine B., la profession d'éditeur n'est pas une 'profession strictement réglementée' et peut s'exercer sous une forme associative ou commerciale ;
Considérant que le contrat d'édition du 15 mai 2011 a été signé par la SARL ASCENT CONSULTING, propriétaire des éditions CALU ; que cette société est immatriculée au registre du commerce et des sociétés depuis le 05 juin 2008 et est bien dotée de la personnalité morale ; que si à sa création, son objet social était 'la réalisation, directement ou indirectement, d'études techniques, de prestations d'ingénierie en tous domaines et notamment en hautes technologies ; la fourniture de conseils aux personnes physiques et morales ; l'exécution de tous services et prestations s'y rapportant ; toute opération d'intermédiaire, de courage, commissionnaire en relation notamment avec les prestations et activités qui précèdent' et non pas l'activité d'édition de livres, cela ne saurait être une cause d'annulation du dit contrat mais tout au plus une éventuelle cause de responsabilité du représentant légal de la société vis-à-vis de ses associés et qu'en tout état de cause cette société a modifié en ce sens son objet social lors de son assemblée générale extraordinaire du 24 juin 2011 pour celle d''activités directes ou indirectes de création, d'imprimerie, de communication événementielle; d'éditions sous toutes ses formes et plus particulièrement, l'édition de livres' ainsi que cela ressort de son dernier extrait Kbis ;
Considérant enfin que ce contrat précise bien en son article 1er l'objet de la cession des droits des auteurs, que l'article 2 délimite bien le domaine d'exploitation des droits cédés quant à son étendue et à sa destination et quant au lieu et à sa durée et que l'article 5 prévoit le prix de la cession ; qu'ainsi ce contrat répond bien aux exigences de l'article L 131-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Considérant en conséquence que M. Yves B. et Mme Catherine B. seront déboutés de leur demande en annulation du contrat du 15 mai 2011 ;
IV : SUR LA RÉSILIATION DU CONTRAT DU 15 MAI 2011 :
Considérant qu'à titre subsidiaire la SARL ASCENT CONSULTING affirme que le contrat d'édition ne prévoit pas de faculté unilatérale de résiliation sauf en cas de non publication de l'ouvrage dans un délai de douze mois et qu'en conséquence les auteurs devaient la mettre en demeure de remplir les obligation prétendument non accomplies ; qu'elle conclut donc à l'infirmation du jugement qui a estimé que la résiliation unilatérale faite par M. Yves B. et Mme Catherine B. était justifiée ;
Qu'elle fait en outre valoir que les griefs allégués, à supposer qu'ils lui soient imputables, étaient réparables et ne justifiaient pars la résiliation du contrat ; que la qualité des reproductions est irréprochable ainsi que les deux coauteurs l'ont admis dans un courriel du 17 novembre 2011 et en donnant leur bon à tirer ; que le livre a fait l'objet d'un dépôt légal le 20 décembre 2011, un numéro ISBN lui ayant été attribué ; que les coquilles sont des erreurs vénielles ; que l'absence des mentions obligatoires n'ont causé aucun préjudice aux auteurs ;
Qu'elle soutient qu'en revanche M. Yves B. et Mme Catherine B. ont violé leurs obligations contractuelles en ne justifiant pas des autorisations nécessaires pour l'exploitation de leurs photographies dans l'ouvrage en cause et demande la résiliation du contrat d'édition à la date de l'arrêt à intervenir, aux torts des deux coauteurs ;
Considérant que M. Yves B. et Mme Catherine B. concluent pour leur part à la confirmation du jugement entrepris au motif que la résiliation unilatérale du contrat est largement justifiée par les manquements graves de l'éditeur ; qu'une mise en demeure préalable n'aurait eu aucune utilité puisqu'aucune correction n'était plus possible, le livre étant déjà sorti depuis plus de deux mois ;
Qu'ils font ainsi valoir que l'éditeur n'a pas procédé au dépôt légal de l'oeuvre qui est obligatoire, ce qui a eu pour conséquence de faire de cet ouvrage un ouvrage hors commerce ; qu'il n'y a pas de code ISBN, que le prix de l'ouvrage n'est pas mentionné et qu'en publiant sans assurer la viabilité de l'ouvrage imprimé, l'éditeur a commis une faute professionnelle grave ; qu'en s'abstenant de leur présenter l'ouvrage final avant mise en circulation, l'éditeur a violé l'article 4 du contrat d'édition ;
Qu'ils font encore valoir la reproduction exécrable des photographies en faisant état des réclamations des personnes photographiées et qu'en ne respectant pas la qualité de leurs photographies originales, l'éditeur a manqué à ses obligations professionnelle en dénaturant totalement la réalisation de leur projet ;
Qu'ils font enfin valoir le nombre exorbitant de fautes 'd'orthographes et de syntaxes' (sic) alors que l'éditeur a l'obligation de corriger de telles fautes nonobstant le bon à tirer signé par eux et qu'ainsi l'éditeur a gravement manqué à ses devoirs et à ses obligations contractuelles, compromettant largement la diffusion de l'ouvrage ;
Qu'ils contestent par ailleurs les manquements contractuels que leur reproche la SARL ASCENT CONSULTING, aucune garantie sur les droits à l'image des personnes et des biens photographiés n'étant prévue au contrat d'édition, rappelant en outre le caractère tacite de l'autorisation de cession de droits à l'image d'une personne posant pour le photographe ;
Considérant ceci exposé, qu'en vertu du principe de la force obligatoire des conventions posé par l'article 1134 du code civil, un contrat à durée déterminée ne peut faire l'objet d'une résiliation unilatérale que si celle-ci est contractuellement stipulée à l'acte ou dans les cas expressément prévus par la loi (contrats de mandat, de dépôt, de bail d'habitation, de courtage matrimonial) ;
Considérant qu'en l'espèce le contrat d'édition du 15 mai 2011 ne prévoit, en son article 4-2, qu'un seul cas de résiliation de plein droit dans les trois mois d'une mise en demeure en cas de non publication de l'ouvrage passé un délai de douze mois à compter de l'acceptation définitive du manuscrit ;
Considérant que c'est donc à tort que les premiers juges ont estimé qu'il ressortait de ce contrat qu'il pouvait être résilié unilatéralement par chacune des parties 'en raison d'un manquement grave à ses obligations de la part du co-contractant' (page 8, 3ème paragraphe du jugement) ;
Considérant enfin que l'exception d'inexécution invoquée implicitement par M. Yves B. et Mme Catherine B. pour justifier la résiliation unilatérale du contrat du 15 mai 2011 n'a pas pour objet de permettre la rupture unilatérale du lien contractuel mais au contraire d'astreindre l'autre partie à exécuter ses propres obligations, seule une résiliation judiciaire pouvant mettre fin au contrat ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera infirmé et qu'il sera statué à nouveau sur les demandes respectives de résiliation judiciaire du contrat ;
Les manquements contractuels reprochés à la SARL ASCENT CONSULTING :
Considérant que dans leur lettre adressée le 13 décembre 2011 à la SARL ASCENT CONSULTING pour résilier unilatéralement le contrat du 15 mai 2011, M. Yves B. et Mme Catherine B. reprochent à l'éditeur une qualité de reproduction des photographies qualifiée d''exécrable', de nombreuses coquilles, l'absence des mentions légales pour les livres (enregistrement ISBN, adresse de l'éditeur, nom et adresse de l'imprimeur, mention du dépôt légal et du copyright des auteurs des photographies, prix du livre en euros) ;
Mais considérant qu'il ressort en premier lieu des pièces versées aux débats que M. Yves B. et Mme Catherine B. ont tous deux validé l'ensemble des bons à tirer (pièces n° 10 à 15 du dossier de la SARL ASCENT CONSULTING) en paraphant chacun d'eux avec la mention 'Bon pour accord de tirage' le 10 septembre 2011 et que l'éditeur a tenu compte des observations et réserves formulées par les auteurs sur ces bons à tirer ;
Considérant que la livraison des ouvrages pré-commandés a débuté au cours du mois de novembre ainsi qu'il en est justifié par les factures produites (pièce n° 58 du dossier de la SARL ASCENT CONSULTING) ; que le 16 novembre 2011 M. Yves B. adressait à M. Jean-Yves A. un courriel qualifiant le coffret de 'splendide' et que dans un second courriel du 03 décembre 2011 il écrivait que 'les accueils sont unanimes et chaleureux. Ils (ceux que j'ai vus) aiment beaucoup le livre et attendent de voir les vrais [sic] photos impatiemment. Vous devriez avoir un beau succès dimanche' ;
Considérant que M. Laurent D., auteur de la préface de l'ouvrage, atteste avoir organisé le 09 décembre 2011 une soirée de dédicaces à Paris et précise que l'ouvrage 'a reçu un excellent accueil' et que ses 'amis ont apprécié la qualité de l'ouvrage et la variété des portraits et certains en ont même acheté plusieurs exemplaires pour les offrir à leur famille ou à des clients choisis' ; que cette attestation est confirmée par le témoignage d'un des participants, M. Eric D. et qu'il apparaît qu'effectivement au cours du mois de décembre 2011 des commandes supplémentaires de l'ouvrage ont eu lieu (de la part des éditions Lafitte Hébrard, de M. Godevroy de B. et de la société TAITTINGER pour 20 exemplaires) ;
Considérant que si M. Yves B. et Mme Catherine B. affirment que c'est au cours de la soirée de lancement du coffret au restaurant le Fouquet's le 11 décembre 2011 qu'ils auraient reçu 'des dizaines de réclamations' et essuyé 'un nombre incommensurable de critiques des invités et des modèles photographiés' , il n'est fait état que d'une seule critique ce soir-là de la part du P-DG de la société TOTAL qui a restitué les dix coffrets commandés au motif d'une erreur sur l'intitulé de sa fonction (attestation de Mme Sophie D.) ; qu'au contraire M. Eric D. et Mme Marianne L. épouse FELIX, présents à la soirée du 11 décembre 2011 déclarent n'avoir entendu ce soir-là aucune critique de l'ouvrage et M. David M., également présent, indique que 'la qualité des livres comme des photographies a d'ailleurs été soulignée par le public lors de cette soirée' ;
Considérant que ce n'est en réalité que postérieurement à cette soirée que certaines des personnes photographiées dans le coffret ont fait état de leur mécontentement ou de leur déception quant à la qualité des reproductions photographiques (ainsi Mme Nathalie G., M. Philippe G., Mme Clara L. épouse GAYMARD, Mme Pia de B., Mme Claudine D., M. Jean-François C., Mme Sophie de M., M. Jean-Jacques O., M. Jean-Jacques O.) ;
Mais considérant qu'à l'inverse la SARL ASCENT CONSULTING produit des attestations de personnes satisfaites de la qualité de l'ouvrage (ainsi M. Didier C., M. Jacques D., Mme Marianne L. épouse FELIX, M. Gaétan J., M. Damien J., M. David M.) ; que M. Yves B. et Mme Catherine B. se contentent de contester péremptoirement la valeur de ces attestations en fonction de la personnalité de leurs auteurs sans porter de critique de fond ni justifier d'un dépôt de plainte pour fausses attestations ;
Considérant qu'il apparaît en réalité que l'appréciation de la qualité de reproduction de photographies (surtout par rapport à un fichier numérique) est une notion purement subjective propre à la personne concernée, qu'ainsi à titre d'exemple M. Vincent M., dans son attestation du 18 septembre 2012 produite par les intimés eux-mêmes, indique avoir trouvé 'excellentes' les premières photographies qu'avait prises de lui M. Yves B. alors que celui-ci 'semblait insatisfait' et a d'ailleurs recommencé la prise de vues ;
Considérant enfin que les avis subjectifs de M. Yann A.-B., de M. Francis D. et de M. Pierre B., sollicités par M. Yves B., ne sauraient être retenus par la cour comme des expertises objectives ; qu'en effet ces personnes, invitées par M. Yves B. à donner leur opinion de professionnels de la photographie, n'indiquent pas comment ils ont procédé à la comparaison entre les reproductions des photographies figurant dans le coffret et des originaux dont il convient de rappeler qu'en l'espèce ce ne sont pas des clichés argentiques mais des fichiers numériques qui font l'objet de retouches informatiques avant leur impression sur papier (attestation de M. Julien B. du laboratoire POURSUITE qui a procédé pour M. Yves B. à l'impression de ses photographies exposées lors de la soirée au Fouquet's et que le courriel d'un ancien salarié du laboratoire, M. Christophe F., ne vient pas sérieusement contredire, confirmant au contraire la réalité des retouches) ;
Considérant qu'en ce qui concerne les fautes d'orthographe et de syntaxe, force est de constater que tous les exemples cités par M. Yves B. et Mme Catherine B. portent sur des erreurs qu'ils ont eux-même négligées au moment de parapher les bons à tirer, ce qui relativise leur caractère qualifié par eux d''inadmissibles' ;
Considérant que les auteurs reprochent encore à l'éditeur d'avoir violé l'article 4-1 du contrat en ne leur proposant pas le projet de représentation de l'ouvrage mais que cette clause (qui figure au demeurant dans le paragraphe 'Prérogatives de l'EDITEUR' et non pas dans celui consacré aux 'Prérogatives de l'AUTEUR') n'est soumise à aucune forme particulière et qu'il sera rappelé que les auteurs ont eu communication des bons à tirer qu'ils ont paraphés ;
Considérant qu'en ce qui concerne l'omission des mentions légales, il ressort des pièces versées aux débats que le dépôt légal à la BNF a été effectué le 20 décembre 2011 et qu'un numéro ISBN a donc bien été attribué à l'ouvrage ; que les autres manquements (en particulier l'omission du prix du livre) sont avérés mais pouvaient faire l'objet d'une régularisation, notamment en exigeant de l'éditeur par une mise en demeure, une réimpression à ses frais de l'ouvrage ;
Considérant qu'il apparaît en conséquence que les manquements contractuels imputés à l'éditeur soit ne sont pas objectivement établis (la qualité des reproductions photographiques), soit sont dus à la responsabilité partagée de l'éditeur et des auteurs (les coquilles), soit pouvaient être régularisés (les mentions légales) ;
Les manquements contractuels imputés à M. Yves B. et à Mme Catherine B. :
Considérant que si la SARL ASCENT CONSULTING, dans son rappel des faits aux pages 4 à 10 de ses conclusions, expose les difficultés qu'elle affirme avoir rencontrées avec M. Yves B. lors de l'édition de l'ouvrage litigieux (retards, exigences, absence de remise d'un texte commentant les photographies) et lui reproche ainsi qu'à Mme Catherine B. une diffusion privée et unilatérale du coffret le 11 décembre 2011, force est de constater que le seul manquement contractuel que l'éditeur impute expressément aux auteurs pour demander la résiliation du contrat d'édition à leurs torts est le fait que ces derniers ne justifient pas des autorisations nécessaires pour l'exploitation des photographies dans l'ouvrage litigieux, faute de s'être assurés auprès des personnes photographiées qu'elles cédaient leur droit à l'image (pages 29 et 30 des conclusions) ;
Considérant qu'en ce qui concerne ce grief, M. Yves B. et Mme Catherine B. répliquent qu'aucune garantie sur les droits à l'image des personnes et des biens photographiés n'est prévue au contrat d'édition du 15 mai 2011 et rappellent, en tout état de cause, le caractère tacite de l'autorisation de cession de droits à l'image d'une personne postant pour le photographe lorsque la fixation d'image a été accomplie au vu et au su de cette personne sans qu'elle s'y soit opposée ;
Considérant que l'article 2-1 du contrat du 15 mai 2011 stipule que 'L'AUTEUR garantit la jouissance des droits cédés par les présentes contre tous troubles, revendications ou évictions quelconques' ; que si en vertu de cette clause (qui reprend l'obligation légale de garantie de l'article L 132-8 du code de la propriété intellectuelle) M. Yves B. et Mme Catherine B. sont ainsi tenus à garantie vis-à-vis de l'éditeur notamment en cas de réclamation de certaines personnes photographiées pour atteinte au droit à leur image, en revanche le contrat ne contient aucune obligation pour les auteurs de justifier auprès de l'éditeur d'avoir obtenu des personnes ainsi photographiées une cession explicite de leur droit à l'image ; qu'il sera en effet rappelé que cette cession peut être tacite lorsque la personne photographiée a posé devant le photographe dont elle connaissait la qualité et ne s'est pas opposée à la prise de vue ;
Considérant qu'il apparaît en conséquence que ce manquement contractuel imputé aux auteurs n'est pas établi ;
Considérant que de façon incidente et elliptique en page 30 de ses conclusions ('La rupture contractuelle voulue par les coauteurs s'est accompagnée d'actes de dénigrements'), la SARL ASCENT CONSULTING fait également valoir l'existence d'actes de dénigrement fautifs qui auraient selon elle accompagné la rupture contractuelle voulue par les auteurs ;
Que ces actes de dénigrement ne sont pas autrement décrits mais qu'à la lecture de l'exposé des faits (pages 11 à 13 de ses conclusions), il apparaît que la SARL ASCENT CONSULTING vise en premier lieu sous cette qualification les trois courriels adressés les 15, 18 et 21 décembre 2011 par M. Yves B. aux deux associés de cette société, M. Jean-Yves A. et M. Eric P., mais que s'agissant de messages privés échangés entre les parties et n'ayant pas fait l'objet d'une diffusion auprès de tiers, ils ne peuvent servir de fondement à une action en dénigrement, chacun pouvant se parler librement même en recourant à des propos parfois vifs ;
Considérant que la SARL ASCENT CONSULTING vise également des propos figurant sur la page Facebook de M. Yves B. à la date du 18 décembre 2011 mais que d'une part ces propos s'adressent à la personne physique de M. Jean-Yves A. et non pas à la SARL ASCENT CONSULTING et que d'autre part il ne peut être reproché à M. Yves B. les propos tenus par des tiers sur sa page Facebook ;
Qu'en tout état de cause aucun fait de dénigrement ne peut être imputé à Mme Catherine B. ;
Considérant en conséquence que les actes de dénigrement allégués ne peuvent pas davantage être imputés aux auteurs pour justifier la résiliation du contrat à leurs torts exclusifs ;
La résiliation judiciaire du contrat d'édition du 15 mai 2011 :
Considérant qu'il résulte de l'analyse qui précède que s'il ne peut être reproché aux cocontractants des manquements à leurs obligations contractuelles susceptibles de justifier la résiliation judiciaire du contrat d'édition du 15 mai 2011 aux torts exclusifs de l'une ou de l'autre des parties contractantes, il apparaît toutefois que depuis le 13 décembre 2011 les parties se trouvent dans une situation conflictuelle telle qu'analysée précédemment, rendant impossible la poursuite de l'exécution de ce contrat dont la résiliation est expressément demandée par les parties ;
Considérant dès lors qu'en raison de l'opposition manifeste de l'ensemble des parties au maintien de leurs relations contractuelles, la cour prononce la résiliation judiciaire à compter de ce jour du contrat d'édition du 15 mai 2011 sans préjudice et aux torts partagés des parties ;
Considérant que de ce fait d'une part la SARL ASCENT CONSULTING sera déboutée de ses demandes en réparation d'un préjudice matériel et moral consécutif à cette résiliation et d'autre part M. Yves B. et Mme Catherine B. seront également déboutés de leurs propres demandes en réparation d'un préjudice matériel et moral consécutif à cette résiliation ;
Considérant que dans la mesure où la SARL ASCENT CONSULTING est déboutée de l'ensemble de ses demandes indemnitaires à l'encontre de M. Yves B. et de Mme Catherine B., il convient d'ordonner la mainlevée de la saisie-conservatoire pratiquée le 05 juin 2012 sur le compte courant bancaire détenu par M. Yves B. à l'agence de Compiègne (Oise) de la banque BARCLAYS pour un montant de 45.340,74 € et de celle pratiquée le même jour sur le compte courant bancaire et sur le compte épargne détenus par Mme Catherine B. à l'agence de Compiègne de la banque HSBC pour des montants respectifs de 2.107, 31 € et de 114,48 € ;
Considérant que M. Yves B. et Mme Catherine B. réclament en outre à la SARL ASCENT CONSULTING la somme de 10.000 € à titre de dommages et intérêts en raison de l'acharnement judiciaire à leur encontre et pour appel abusif ;
Mais considérant que dans la mesure où le jugement entrepris est infirmé en toutes ses dispositions, l'appel de la SARL ASCENT CONSULTING ne peut être considéré comme abusif et qu'en tout état de cause il n'est pas établi que cette société aurait fait dégénérer en abus son droit d'ester en justice ; qu'en conséquence M. Yves B. et Mme Catherine B. seront déboutés de leur demande en dommages et intérêts de ce chef ;
Considérant qu'aucune raison tirée de l'équité ne commande le prononcé de condamnations au paiement des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Considérant que dans la mesure où les parties sont déboutées de leurs demandes respectives en dommages et intérêts et où la résiliation du contrat du 15 mai 2011 est prononcée à leurs torts partagés, il sera jugé que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens tant de première instance que d'appel ;
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement ;
Déboute la SARL ASCENT CONSULTING de sa demande en annulation du jugement entrepris ;
Infirme le jugement entrepris et, statuant à nouveau :
Déclare M. Yves B. et Mme Catherine B. recevables en la forme en leur demande reconventionnelle en annulation du contrat d'édition du 15 mai 2011 mais mal fondés au fond ;
Déboute en conséquence M. Yves B. et Mme Catherine B. de leur demande en annulation du contrat d'édition du 15 mai 2011 ;
Prononce la résiliation du contrat d'édition du 15 mai 2011 à la date du présent arrêt, sans préjudice et aux torts partagés des parties ;
Déboute la SARL ASCENT CONSULTING de sa demande en dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral consécutifs à la résiliation du contrat du 15 mai 2011 ;
Déboute M. Yves B. et Mme Catherine B. de leur demande en dommages et intérêts en réparation des préjudices matériel et moral consécutifs à la résiliation du contrat du 15 mai 2011 ;
Ordonne la mainlevée immédiate de la saisie-conservatoire pratiquée le 05 juin 2012 sur le compte courant bancaire détenu par M. Yves B. à l'agence de Compiègne (Oise) de la banque BARCLAYS pour un montant de 45.340,74 € et de celle pratiquée le même jour sur le compte courant bancaire et sur le compte épargne détenus par Mme Catherine B. à l'agence de Compiègne de la banque HSBC pour des montants respectifs de 2.107, 31 € et de 114,48 € ;
Déboute M. Yves B. et Mme Catherine B. de leur demande en dommages et intérêts contre la SARL ASCENT CONSULTING pour acharnement judiciaire à leur encontre et appel abusif ;
Dit n'y avoir lieu à prononcer de condamnations au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
Dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres dépens tant de première instance que d'appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.