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Décisions

CA Paris, 1re ch. sect. cbv, 24 juin 1991, n° 91/009294

PARIS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Devanlay (SA)

Défendeur :

Galeries Lafayette (Sté), Crédit Commercial de France, Société Générale, La Banexi (SA), Compagnie d'Investissement de Paris, Conseil des Bourses de Valeurs, Président de la Commission des Opérations de Bourse

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vengeon

Conseillers :

Mlle Aubert, M. Canivet, M. Guerin, Mme Mandel

Avoués :

SCP Parmentier-Hardouin, SCP Fisselier-Chilloux Boulay

Avocats :

SCP Moquet Borde et associés, Me Schmidt, Me Prat, Me Darrois, Me Villey

CA Paris n° 91/009294

23 juin 1991

Statuant en application de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 sur les Bourses de Valeurs et du décret N° 88-603 du 7 mai 1988 relatif aux recours exercés devant la Cour d'Appel de Paris contre les décisions du Conseil des Marchés à terme et du Conseil des Bourses de Valeurs.

Et après avoir entendu les Conseils des Parties et des Bourses de Valeurs, le représentant du Président de la Commission des Opérations de Bourse et le Ministère Public en leurs observations.

Par lettre datée du 16 avril 1991, la société des Galeries Lafayette, détentrice de 22,81 % du capital et de 28,08 % des droits de vote de la Société Française des Nouvelles Galeries Réunies (FNGR), a informé le Conseil des bourses de valeurs (le Conseil) de l'acquisition, auprès du groupe Proventus, d'un bloc d'actions représentant 16,43 % du capital et 10,34 % des droits de vote de la dite société en sollicitant, par application des dispositions du paragraphe 5 de l'article 5-3-6 du règlement général du Conseil, une dérogation à l'obligation, résultant de l'article 5-3-1, alinéa 1er, de déposer un projet d'offre publique d'achat des deux tiers du nombre total des titres conférant des droits de vote, en alléguant que les sociétés du groupe Devanlay, de concert avec d'autres actionnaires, possédaient une fraction du capital de la dite société leur conférant la majorité des droits de vote aux assemblées générales.

Dans cette correspondance, elle précisait que le solde de la participation de la société Proventus faisait l'objet d'un reclassement.

Le même jour, était en effet transmise au Conseil une convention résultant d'un échange de lettres datées des 10 et 14 avril 1991, aux termes desquelles le CCF avait acquis le solde de la participation détenue par la société Proventus dans le capital de la société FNGR, en vue de son reclassement, dans un délai maximum de six mois, auprès d'investisseurs non susceptibles de perturber l'équilibre "actuel" de l'actionnariat de la société concernée.

Selon cet accord, la société des Galeries Lafayette, qui s'engageait à couvrir les pertes éventuellement subies par l'établissement bancaire lors du reclassement des actions, bénéficiait sur celles-ci d'une faculté de préemption et exprimait le souhait que les cessionnaires acceptent de lui consentir le même droit.

Il était en outre admis que le CCF conservait sa liberté de vote aux assemblées générales.

Le 22 avril suivant, le Conseil a fait publier les déclarations de franchissement des seuils, du tiers pour l'une et de 5 % pour l'autre, des titres de capital et des droits de vote dans la société FNGR, par la Société des Galeries Lafayette et le Crédit Commercial de France (CCF) respectivement détenteurs de 38,42 % et 5,83 % des droits de vote existants.

Estimant quant à elle qu'à la suite de l'accord conclu entre eux , la Société des Galeries Lafayette et le CCF avaient, dans le cadre d'une action de concert, acquis du groupe Proventus un bloc de titres susceptible de leur conférer le contrôle majoritaire de la société FNGR, la Société Devanlay, titulaire de 33,43 % des actions et 40,79 % des droits de vote de cette société, a, par une lettre du 24 avril 1991, demandé au Conseil de mettre en oeuvre la procédure de garantie de cours prévue par les articles 5-4-1 de son règlement général.

Aux termes d'un communiqué daté du 26 avril 1991, publié au bulletin officiel de la cote le 30 du même mois, le Conseil a fait savoir que, compte tenu des actions de la société FNGR que détenait déjà la société des Galeries Lafayette, sa participation au capital de cette société avait, par l'acquisition susvisée, franchi le seuil du tiers au-delà duquel les textes en vigueur imposent d'effectuer une offre publique d'achat et qu'il l'avait invitée à y procéder.

Dès le 30 avril 1991, la société des Galeries Lafayette saisissait le Conseil d'un projet d'offre publique d'achat, publié le 2 mai suivant, au cours de 863,50 francs, équivalant au prix unitaire de cession du bloc d'actions par la société Proventus, en se réservant la faculté d'acquérir tous les titres proposés ou d'en réduire proportionnellement le nombre afin de limiter sa participation aux deux tiers des titres du capital conférant des droits de vote.

Puis, par un avis du 6 mai 1991, le Conseil a rendu publique la convention d'actionnaires liant le CCF et la société des Galeries Lafayette qui lui avaient été communiquée le 16 avril précédent.

Ayant publié l'avis de recevabilité de l'offre publique d'achat le 7 mai 1991, le Conseil, après visa de la notice d'information par la Commission des opérations de bourse le 13 mai, a le 23 mai fait paraître l'avis d'ouverture, fixant, du 21 juin au 1er juillet 1991, la reprise des négociations interrompues depuis le 29 avril.

La société Devanlay, à laquelle se sont jointes par voie d'intervention : la Société Générale, la Société Banexi et la Compagnie d'Investissement de Paris, toutes actionnaires minoritaires de la Société FNGR, a formé des recours successifs contre les décisions susvisées du Conseil des 26 avril 1991, 7 mai 1991 et 23 mai 1991 visant à l'annulation et à la réformation des décisions du Conseil relatives à la procédure d'offre publique d'achat obligatoire présentée par la Société des Galeries Lafayette et demandant à la Cour de dire cette société et le CCF solidairement tenus de mettre en oeuvre la procédure de garantie de cours conformément aux articles 5-4-1 et suivants du règlement général du Conseil.

A cette fin elles font valoir que :

- la décision du 26 avril 1991 a été prise au mépris du principe de contradiction, en ce que le Conseil n'a que postérieurement et partiellement rendu publique la convention conclue entre la société des Galeries Lafayette et le CCF, sans qu'il soit possible de connaître les documents sur lesquels il s'est déterminé et notamment s'il a pris connaissance des observations contenues dans la lettre de la Société Devanlay du 24 avril 1991 ;

- la dite décision n'est pas motivée en ce qu'elle ne fournit, ni les raisons pour lesquelles a été rejetée la procédure de garantie de cours, ni celles qui ont conduit à écarter de l'offre publique d'achat les Sociétés Bazar de l'Hôtel de Ville et Uniprix, cependant toutes deux contrôlées par la Société FNGR et respectivement cotées sur le marché à règlement mensuel et au comptant ;

- l'échange de lettres entre la société des Galeries Lafayette et le CCF, assimilable à une convention de portage, caractérise une action de concert au sens de l'article 356-1-3 de la loi du 24 juillet 1966 ;

- l'action de concert ainsi constituée permet aux deux sociétés précitées, ayant procédé ensemble à l'acquisition du bloc de titres détenu par la société Proventus, une prise de contrôle majoritaire immédiate et absolue de la société FNGR dès lors que, par l'effet inéluctable des droits de vote doubles conférés par l'article 16 des statuts aux actions de la société FNGR nominativement inscrites depuis deux ans au moins, la société des Galeries Lafayette est assurée de détenir, à l'expiration de ce délai, 51,34 % des droits de vote et que de ce fait le Conseil aurait dû mettre en oeuvre une procédure de garantie de cours ;

- toute autre solution serait contraire aux principes d'égalité des actionnaires et de transparence du marché voulus par la loi du 22 janvier 1988 puisque, dans le cadre de l'offre publique d'achat, tous les actionnaires minoritaires ne sont pas assurés de céder leur actions au prix de l'offre identique à celui de l'acquisition du bloc de contrôle, supérieur de 30 % au cours moyen de l'action pour les six derniers mois, et qu'ils conserveront des titres dépourvus de liquidité, alors que par la convention susvisée le CCF dispose d'une garantie sur le prix de cession de l'ensemble des titres qu'il détient ;

- la perte de liquidité des titres délaissés à l'issue de la procédure d'offre publique d'achat et l'impact de la réorientation des activités de la société FNGR sur la valeur du titre doivent conduire à accorder aux porteurs minoritaires de parts de capital de ladite société la faculté de retrait que constitue la garantie de cours ;

- la société des Galeries Lafayette aurait dû obtenir l'avis du comité des établissements de crédit, préalablement à la procédure d'offre qui vise à lui faire prendre des participations excédant les seuils fixés par l'article 5 du règlement du comité de réglementation bancaire du 25 juillet 1990 dans le capital des sociétés financières Cofinoga et Soficarte et de la banque Sygma, filiales de la société FNGR.

Prenant l'engagement dont il prie la Cour de lui donner acte, de ne pas convertir au nominatif les actions en sa possession émises par la société FNGR et actuellement toutes au porteur, le CCF conclut au rejet des recours aux motifs que :

- contrairement à ce que prétend la Société Devanlay, l'article 6 bis introduit par l'article 15 de la loi du 2 août 1989 dans la loi du 22 janvier 1988, au sens duquel ne déroge pas et ne pourrait déroger l'article 5-4-1 du règlement général du Conseil, n'édicte une obligation d'achat de l'ensemble des actions d'une société qu'en cas d'acquisition d'un bloc de titres qui confère immédiatement au cessionnaire plus de 50 % des droits de vote existant dans ladite société, ce qui n'est pas en l'espèce le cas ;

- toute interprétation différente des termes de l'article 5-4-1 du règlement susvisé devrait conduire la Cour à en apprécier la légalité dans la mesure où il violerait la loi du 22 janvier 1988 en portant une atteinte grave au droit de propriété ou, si elle s'estime incompétente pour ce faire, de surseoir à statuer jusqu'à ce que le tribunal administratif de paris se soit prononcé sur l'exception d'illégalité qu'il soulève à titre subsidiaire ;

- en outre, que s'il est exact que lui-même et la société des Galeries Lafayette ont ensemble acquis un bloc de titres que la Société Proventus ne voulait séparer, il n'y a de concert entre eux, ni en vue d'exercer des droits de vote pour la mise en oeuvre d'une politique commune ni même pour l'acquisition des titres ou pour leur revente, l'accord conclu à cette occasion ne pouvant s'analyser en une convention de portage.

A titre principal, la Société des Galeries Lafayette conclut à l'irrecevabilité des recours formés par la Société Devanlay qui, ne détenant elle-même aucune action de la Société FNGR, est dépourvue d'intérêt pour agir en application du décret du 7 mai 1988.

Elle en déduit que l'intervention de la Société Générale est irrecevable de même que celles des Sociétés Banexi et Compagnie d'Investissement de Paris, tardives en ce qu'elles tendent à l'annulation des décisions du Conseil des 26 avril et 7 mai 1991 et sans fondement quant à celle du 23 mai 1991.

Pour conclure subsidiairement au rejet des recours, la Société des Galeries Lafayette oppose des moyens identiques à ceux développés par le CCF quant aux conditions légales et réglementaires de mise en oeuvre de la procédure de garantie de cours et prétend en outre que :

- les décisions attaquées du Conseil sont suffisamment motivées pour permettre aux personnes concernées de comprendre le "cheminement de la pensée" de l'autorité qui les a prononcées ;

- même s'il avait agi de concert avec la Société des Galeries Lafayette, aucune disposition du règlement général du Conseil n'interdit au CCF d'être la banque présentatrice de l'offre publique d'achat ;

- l'autorisation du comité des établissements de crédit ayant été sollicitée et accordée préalablement à l'ouverture de la procédure d'offre, le moyen tiré par la requérante d'un prétendu défaut de cette formalité est sans fondement ;

- certains membres du groupe Devanlay détiennent des actions de la société FNGR qui n'ont pas été déclarées dans le concert des actionnaires contrôlant actuellement cette société, lesquelles actions lui permettront de détenir dans deux ans plus de 50 % des droits de vote.

Aux termes des observations qu'il a présentées le Conseil des bourses de valeurs expose que :

- sa décision du 26 avril 1991 répond de façon motivée à la demande de dérogation présentée par la Société des Galeries Lafayette compte tenu notamment de la position de la Société Devanlay, aux arguments de laquelle elle n'était toutefois pas tenue de répondre expressément ;

- les conventions qui lui ont été communiquées ne permettent pas de déduire que la Société des Galeries Lafayette et le CCF ont agi de concert, dans la mesure où ce dernier a affirmé sa volonté de ne demeurer actionnaire que pour un temps limité et s'est engagé à reclasser les actions dans le public en accordant un droit de préemption à la Société des Galeries Lafayette tout en veillant à ne pas rompre l'équilibre existant entre les deux principaux groupes d'actionnaires de la société FNGR ;

- à supposer que la Société des Galeries Lafayette exerce son droit de préemption, elle devrait alors respecter les obligations qui pourraient être mises à sa charge en fonction du nombre de titres acquis et que s'il lui apparaissait que son règlement a été contourné il pourrait, le moment venu prendre les initiatives nécessaires ;

- même s'ils avaient agi de concert, la Société des Galeries Lafayette et le CCF ne posséderaient actuellement en commun que 48,54 % du capital et 44,05 % des droits de vote de la Société FNGR et que, dès lors, ne pouvait être décidée, sur les actions de cette société, une procédure de maintien de cours qui, aux termes de l'article 6 bis de la loi du 22 janvier 1988 et de l'article 5-4-1 du règlement général pris pour son application, ne peut être ordonnée que lorsque le bloc de titre acquis confère immédiatement et en tout cas certainement la majorité des droits de vote existants ;

- une telle certitude n'existe pas, en raison de l'engagement public pris par le CCF de ne plus être actionnaire avant l'expiration de la période de deux années permettant l'acquisition des droits de vote doubles et de la multiplicité des événements susceptibles de se produire durant cette période ;

- conformément à l'article 5-2-7 de son règlement général, il peut estimer que le public est suffisamment garanti par l'engagement de bonne fin du banquier présentateur de l'offre, même si celui-ci est partie prenante à l'opération de marché, ce qui, en la cause, est à tort reproché au CCF.

Invité, par application de l'article 12-1 de l'ordonnance du 28 septembre 1967, à présenter ses observations, le président de la Commission des opérations de bourse a, sur l'ensemble des points contestés, donné un avis motivé duquel il résulte, qu'en l'espèce, le Conseil n'a pas fait une appréciation erronée de son règlement général.

Aux termes de ses observations orales, le Ministère public a conclu au rejet des recours, au motif qu'en jugeant incertaine l'acquisition par la Société des Galeries Lafayette de la majorité absolue des droits de vote de la société FNGR, le Conseil a fait une exacte appréciation de la situation qui lui était soumise.

Sur quoi la Cour :

Considérant que la Société Devanlay justifie détenir personnellement depuis le 2 mai 1991 des actions de la société FNGR ; qu'elle est, en outre, l'animateur d'un groupe d'actionnaires, comprenant notamment la Société Safat, sa filiale à 85 %, lesquels, agissant de concert, détiennent ensemble 47,69 % des droits de vote de cette société ; que de ce fait, elle est une personne intéressée au sens de l'article 3 du décret du 7 mai 1988, comme telle recevable à former les recours visant à contester les décisions relatives à l'offre publique d'achat portant sur les actions de la même société, ainsi que le sont aussi les autres actionnaires en leurs interventions, pour celles qui ont été formées et soutenues dans le délai prévu par l'article 3 du décret du 7 mai 1988 au regard de chacune des décisions soumises à recours ;

Considérant que le Conseil s'est prononcé le 26 avril 1991 sur la demande de dérogation à une offre publique d'achat concernant les actions de la Société FNGR, présentée par la Société des Galeries Lafayette, au vu, selon ce qu'il indique, des informations contenues dans la lettre que lui a adressée cette société le 16 avril 1991, des correspondances datées des 10 et 14 avril 1991 échangées entre celle-ci et le CCF qui lui ont été communiquées le même jour et, en outre, des observations contenues dans la lettre, datée du 24 avril suivant, émanant de la Société Devanlay ;

Que les Sociétés requérantes et intervenantes n'invoquent pas, en l'espèce, de manquements à l'obligation d'information des actionnaires et du public telle qu'organisée par les dispositions de l'article 356-1 de la loi du 24 juillet 1966 et du règlement général du Conseil, ni que celui-ci se soit déterminé sur des renseignements incomplets, erronés ou fallacieux ; qu'elle ne peuvent en conséquence soutenir que l'instruction des décisions soumises à recours s'est déroulée en fraude à leurs droits ;

Considérant que le Conseil des bourses de valeurs est un organisme professionnel investi de la mission de service public définie par la loi du 22 janvier 1988 ; que dès lors, doivent être motivées les décisions qu'il est habilité à prendre dans l'exercice de cette mission, consacrant ou refusant l'exercice d'un droit ou d'une prérogative et qui relèvent de la compétence des juridictions judiciaires ;

Que, seule contestée à cet égard, la décision du 26 avril 1991, qui rejette la demande de dispense présentée par la Société des Galeries Lafayette et l'invite à déposer une offre publique d'achat, expose clairement et complètement, si l'on se réfère à la publication de l'avis du 22 avril précédent, la participation de la Société des Galeries Lafayette dans le capital de la Société FNGR ; que l'indication du franchissement du seuil du tiers du capital de cette société renvoie tacitement à l'article 5-3-1 du règlement général, tout en excluant, implicitement mais nécessairement, la mise en oeuvre de la procédure de garantie de cours prévue par l'article 5-4-1 ;

Que s'il eût été préférable que la décision en cause comprenne, en elle-même, l'énoncé complet des éléments de fait et le visa explicite des textes qui en constituent le fondement, sa motivation paraît en l'espèce suffisante pour en comprendre la logique, le sens ou la portée et, à la juridiction de recours, pour en contrôler la légalité et l'opportunité ;

Considérant que le grief relatif au défaut de motifs de l'omission des filiales de la Société FNGR dans la procédure d'offre est inopérant puisqu'en l'état des recours cette question n'est pas discutée au fond ;

Considérant que la Société des Galeries Lafayette, qui dit avoir souhaité n'acquérir qu'une partie des actions de la Société FNGR détenues par la Société Proventus laquelle n'acceptait de les céder qu'en leur totalité, a sollicité et obtenu le concours du CCF ; qu'ensemble, le 16 avril 1991, ils ont acheté un bloc de titres correspond à 25,7 % du capital de la société visée, à concurrence de 16,43 % pour la première, le second en acceptant le solde aux fins de reclassement dans un délai maximum de 6 mois ;

Qu'aux termes de la convention résultant de leur échange de lettres, le CCF s'est obligé à rétrocéder sa participation dans un délai de six mois et en concertation avec la Société des Galeries Lafayette quant au choix des acquéreurs, tout en consentant à celle-ci un droit de préemption sur les titres reclassées, voire même sur les titres cédés aux porteurs qu'elle aurait agréés et qu'en contrepartie, il a bénéficié de la garantie d'un prix de cession au moins égal au prix de revient des titres ;

Qu'il se déduit de ces éléments que l'objet de cet accord était de permettre à la société des Galeries Lafayette d'acheter à la société Proventus un bloc d'actions lui transférant 10,32 % des droits de vote de la société FNGR, tout en lui offrant la possibilité de contrôler la destination d'une autre fraction de 5,83 % des mêmes droits ou de les acquérir elle-même ;

Que les avantages qu'il procure au CCF ne sont pas de nature à donner un caractère individuel à sa démarche alors qu'ils ne sont que la rémunération de son concours pour l'acquisition et la détention momentanée des droits en cause ; que le bref délai qui lui est donné pour reclasser les titres tend à rendre certain l'exercice par la Société des Galeries Lafayette de son droit de préemption et que la liberté de vote qui est reconnue à l'établissement porteur durant cette courte période est sans incidence sur le transfert desdits droits ;

Qu'en montrant ainsi la commune intention des deux sociétés concernées d'acquérir des droits de vote afin de les transmettre à l'une d'elles ou à des porteurs choisis par elle, l'accord qui les oblige caractérise une action de concert entrant dans le champ d'application de l'article 356-1-3 de la loi du 24 juillet 1966 et qu'en conséquence, les deux sociétés qui l'ont conclu sont solidairement tenues aux obligations résultant de la loi du 22 janvier 1988 et du règlement général du Conseil ;

Considérant que les articles 6 et 6 bis de la loi du 22 janvier 1988 habilitent le Conseil à établir un règlement général fixant notamment, afin d'assurer l'égalité des actionnaires et la transparence du marché, les conditions dans lesquelles le projet d'acquisition d'un bloc de titres, conférant (à) la majorité du capital ou des droits de vote d'une société inscrite à la cote officielle ..., oblige le ou les acquéreurs à acheter en bourse, au cours ou au prix auquel la cession du bloc est réalisée, les titres qui leur sont alors présentés ;

Qu'il n'est pas contestable que la préposition "à" devant le terme "la majorité" a été ajoutée par erreur dans le texte de la loi publiée au Journal Officiel ;

Considérant que, par application de ces dispositions légales, l'article 5-4-1 du règlement général du Conseil prescrit que le projet d'acquisition, par une ou plusieurs personnes déterminées, d'un bloc de titres susceptibles de conférer le contrôle majoritaire en droits de vote d'une société dont les titres sont inscrits à la cote officielle ... fait l'objet d'une demande adressée au Conseil et que, selon l'article 5-4-2, l'acquéreur du bloc doit s'engager à acheter en bourse toutes les quantités de titres qui lui seront présentées au cours ou au prix auquel la cession du bloc de titres doit être réalisée ;

Considérant que la condition du contrôle majoritaire en droits de vote, qui ne renvoie ni explicitement, ni implicitement à la majorité dans les assemblées générales au sens de l'article 355-1 de la loi du 24 juillet 1966, suppose la détention de plus de 50 % des droits de vote attachés aux actions existantes de la société visée ;

Mais considérant que s'il n'est pas contesté qu'au terme de deux années, l'obtention des droits de vote doubles prévus par les statuts de la Société FNGR sur le bloc de titres acquis de concert par le CCF et la Société des Galeries Lafayette, ajoutés à ceux déjà détenus par cette dernière, leur permettrait d'exercer 51,34 % des droits de vote de la société visée ; il ne leur confère actuellement la majorité ni en capital (48,54 %) ni en droits de vote (44,26 %) ;

Considérant au surplus, que selon l'accord qui lie ces deux sociétés, l'obtention d'une telle majorité était soumise, soit à leur choix de conserver ensemble, pour le CCF en violation de ses engagements, les titres cédés par la société Proventus, de les faire inscrire nominativement et d'acquérir conjointement, par une détention continue durant deux ans, des droits de vote doubles, soit à la volonté de la Société des Galeries Lafayette d'exercer sa faculté de préemption sur tout ou partie des actions reclassées ; qu'elle supposait en conséquence de leur part des décisions et levées d'options successives auxquelles il leur était loisible de renoncer, permettant en tout cas au Conseil de prendre, en fonction de celles-ci, les mesures prévues par son règlement général quant au franchissement des seuils déterminés par la loi ;

Qu'il s'ensuit que cet organisme professionnel a fait une exacte application dudit règlement général en estimant qu'au regard des conditions fixées par l'article 6 bis - 2 de la loi du 22 janvier 1988, l'acquisition du bloc de titre de la société Proventus ne conférait, ni aux sociétés CCF et Galeries Lafayette agissant de concert, ni à cette dernière personnellement, la majorité du capital ou des droits de vote de la société FNGR ;

Considérant que la société requérante prétend que la Société des Galeries Lafayette et le CCF ont d'ores et déjà atteint le contrôle majoritaire de la Société FNGR par la perte des droits de vote doubles attachés aux actions apportées à l'offre publique d'achat, celles-ci étant de ce fait même converties au porteur ;

Mais considérant que la validité des décisions soumises à recours ne peut être mise en cause par l'allégation d'une situation qui, à la supposer avérée, leur est postérieure ;

Considérant que la convention conclue entre la Société des Galeries Lafayette et le CCF prévoyant, au bénéfice du second, la garantie d'un prix de cession de titres de la Société FNGR, ne peut, ni affecter la validité des décisions relatives à la mise en oeuvre d'une offre publique d'achat obligatoire visant cette société, ni commander le déclenchement d'une procédure de garantie de cours dont les conditions légales ne sont pas réunies ;

Considérant que la Société des Galeries Lafayette justifie avoir été autorisée par décision du comité des établissements de crédit, conformément à la loi du 24 janvier 1984 et au règlement du 25 juillet 1990, à acquérir, par l'intermédiaire de la Société FNGR, le contrôle indirect des établissements de crédit Sygma Banque, Compagnie Financière des Nouvelles Galeries, Soficarte, Union Industrielle et Commerciale de France, Société de Gestion et d'Études Financières et Cofinoga Épargne ; qu'il s'ensuit que le moyen de nullité de la décision d'ouverture de l'offre publique d'achat tiré de l'inobservation de cette formalité est dépourvu de fondement ;

Considérant que même si, pour les raisons sus-indiquées, le CCF doit être regardé comme un initiateur de l'opération de marché en cause, il n'est pas douteux, ainsi que le relève le Conseil dans ses observations, que cette banque possède une surface financière suffisante pour garantir, à l'égard du public, conformément aux dispositions des articles 5-2-1 et 5-2-5 du règlement général, le caractère irrévocable des engagements pris dans le cadre de l'offre publique d'achat et qu'en conséquence, il a pu être valablement choisi comme établissement présentateur de l'offre ;

Considérant que, pour les motifs sus-indiqués, les recours et interventions visant à l'annulation et à réformation des décisions du conseil relatives à la mise en oeuvre de la procédure d'offre publique d'achat visant la société FNGR doivent être rejetés ;

Considérant que l'équité ne commande pas de faire application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile au profit du CCF qui en fait la demande ;

Par ces motifs :

Rejette les recours formés contre les décisions prises par le Conseil des bourses de valeurs les 26 avril, 7 mai et 23 mai 1991 relatives à l'offre publique d'achat présentée par la Société des Galeries Lafayette et visant les actions de la Société Française des Nouvelles Galeries Réunies ;

Rejette les interventions de la Société Générale, de la Société Banexi et de la Compagnie d'Investissement de Paris ;

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du Nouveau Code de Procédure Civile ;

Laisse à la requérante la charge des dépens à l'exception de ceux afférents aux interventions qui seront supportés par leurs auteurs.