CA Pau, 1re ch., 9 mai 2023, n° 21/02200
PAU
Arrêt
Infirmation
PARTIES
Demandeur :
Advenis Conseil (SAS), Advenis Facility Management (SAS)
Défendeur :
Cap Immo (SARL)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Faure
Conseillers :
Mme Rosa-Schall, Mme Rehm
Avocats :
Me Lopez, Me Duale
La société Advenis Conseil et la société Cap Immo sont liées par un contrat de convention de franchise signé le 30 août 2017 aux termes duquel le franchiseur, la société Advenis Conseil, doit faire bénéficier le franchisé, la société Cap Immo, de son savoir-faire dans le domaine du conseil immobilier d'entreprise, à charge pour le franchisé de verser des redevances en contrepartie de cette prestation, outre un droit d'entrée de 30 000 euros.
La société Cap Immo a réglé la moitié du droit d'entrée puis, estimant ne bénéficier d'aucun des avantages prévus au contrat, n'a pas réglé les redevances prévues.
Par LRAR du 4 février 2019, se plaignant de l'inexécution de ses obligations par la société Cap Immo, la société Advenis conseil a résilié le contrat de franchise signé le 30 août 2017.
Le 17 avril 2019, la société Advenis Conseil lui a fait délivrer par acte d'huissier une sommation de payer, pour un montant de 12 041,49 euros.
Par courrier du 8 juillet 2019, la société Cap Immo lui a opposé l'exception d'inexécution.
La société Advenis Conseil a déposé une requête en injonction de payer.
Par ordonnance du 12 août 2019, le président du tribunal de grande instance de Pau a enjoint à la société Cap Immo, représentée par Mme [Y] [R], de payer à la SAS Adevnis conseil, représentée par M. [W] [B], la somme de 12 016,62 euros avec intérêts au taux légal à compter de l'ordonnance.
Cette ordonnance a été signifiée par huissier à la société débitrice le 16 septembre 2019.
Le 30 septembre 2019, la société Cap Immo y a fait opposition.
Par jugement du 4 mai 2021, le tribunal judiciaire de Pau a :
- prononcé la mise à néant de l'ordonnance d'injonction de payer du 12 août 2019 du tribunal de grande instance de Pau qui a enjoins à la société Cap Immo de payer à la société Advenis Conseil la somme de 12 016,62 euros,
- condamné la société Advenis Conseil à payer à la société Cap Immo la somme de 15 000 euros, avec intérêt au taux légal à compter du jugement,
- débouté les parties de leurs autres demandes,
- condamné la société Advenis Conseil à payer à la société Cap Immo la somme de 1 500 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi que les dépens,
- ordonné l'exécution provisoire.
La société Advenis Facility Management a interjeté appel de ce jugement le 30 juin 2021 pour faire rectifier une erreur matérielle contenue dans le jugement de première Instance.
La société Advenis Conseil a interjeté appel de ce jugement le 1er juillet 2021.
Par conclusions du 29 septembre 2021 (RG 21/2236 et RG 21/2200), la société Advenis Facility Management et la société Advenis Conseil demandent :
- d'ordonner la jonction des procédures inscrites sous les numéros RG 21/02200 et RG 21/02236,
- de réformer la décision rendue par le tribunal judiciaire de Pau le 4 mai 2021 dans sa totalité,
- de rectifier l'erreur matérielle qui y est contenue, de mettre hors de cause la SAS Advenis Facility Management et de rectifier l'identité des parties en indiquant que c'est la SAS Advenis Conseil qui est demandeur à l'injonction de payer et défendeur à la procédure d'opposition.
Et sur le fond, considérant que la SARL Cap Immo est défaillante dans le respect de ses obligations contractuelles à l'égard de la SAS Advenis Conseil, elles demandent :
- de condamner la SARL Cap Immo à rembourser la somme de 15 000 euros versée par la SAS Advenis Conseil en exécution du jugement de première instance.
Y ajoutant,
- de condamner la SARL Cap Immo à payer à la SAS Advenis Conseil la somme de 12 016,62 euros au titre des redevances impayées, de la licence d'exploitation du logiciel professionnel et des indemnités de recouvrement,
- de juger que les sommes produiront intérêt au taux d'intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de dix (10) points de pourcentage,
- de juger que ce taux d'intérêt au titre des pénalités de retard sera appliqué à chacune des sommes dues au jour suivant la date de règlement figurant sur la facture,
- de condamner la SARL CAP Immo à payer à la SAS Advenis Conseil la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile outre aux entiers dépens de l'instance.
Par conclusions du 29 décembre 2021, dans le dossier RG 21/02200 la SARL Cap Immo demande :
- de dire irrecevable par application des dispositions des articles 462 et suivants mais également de l'article 542 du code de procédure civile l'appel interjeté par la société Advenis Facility Management.
À titre subsidiaire, de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur les mérites de la rectification d'erreur matérielle sollicitée.
En tout état de cause, de condamner la société Advenis Facility Management au paiement d'une somme de 3 000 euros sur la base de l'article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens de première instance et d'appel et d'octroyer à la SELARL Duale Ligney Bourdalle le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
Par conclusions du même jour, dans le dossier RG 21/02236, la SARL Cap Immo demande :
- de dire irrecevable et en tout cas mal fondé l'appel interjeté par la société Advenis Conseil et dans l'hypothèse d'une jonction entre les 2 appels d'Advenis Conseil et Advenis Facility Management, de déclarer l'appel d'Advenis Facility Management irrecevable et à titre subsidiaire, de donner acte à la société Cap Immo qu'elle s'en rapporte à justice sur la rectification d'erreur matérielle demandée ;
- de débouter les appelantes de leurs appels ainsi que de toutes leurs demandes, fins et conclusions ;
- de confirmer la décision de première Instance en toutes ses dispositions.
Statuant à nouveau,
- de condamner solidairement la société Advenis Conseil et solidairement avec Advenis Facility Management en cas de jonction des appels au paiement d'une somme de 5 000 euros sur la base de l'article 700 du code de procédure civile ainsi qu'aux entiers dépens de première instance comme d'appel et d'octroyer à la SELARL Duale Ligney Bourdalle le bénéfice des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.
L'ordonnance de clôture a été rendue le 8 février 2023.
Sur ce :
La demande de jonction des procédures est sans objet, puisqu'elle a été effectuée par le magistrat de la mise en état par l'ordonnance de jonction du 4 janvier 2022 dont il résulte que la procédure est désormais suivie sous le numéro 21/02220.
La SARL Cap Immo soulève la fin de non-recevoir afférente à recevabilité de l'appel de la société Advenis conseil et dans l'hypothèse d'une jonction entre les 2 appels, de celui de la société Advenis Facility management.
Cette fin de non-recevoir n'ayant pas été soulevée lors de l'examen par le magistrat de la mise en état de la demande de jonction des procédures, la SARL Cap Immo n'est plus recevable à le faire devant la cour.
Sur la demande de rectification d'erreur matérielle,
Aux termes de l'article 462 du code civil, les erreurs et omissions matérielles qui affectent un jugement, même passé en force juger, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré.
Il résulte des pièces du dossier et du jugement n° 21/428 rendu le 4 mai 2021 par le tribunal judiciaire de Pau :
- que les parties liées au contrat de franchise objet du litige sont la société Advenis conseil immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 479 112 252 ;
- que l'ordonnance d'injonction de payer du 12 août 2019, contestée par la SARL Cap Immo, a été rendue entre la société Advenis conseil et la SARL Cap Immo ;
- que si figure dans l'en-tête du jugement déféré, en partie défenderesse, la société Advenis Facility management, il résulte tant de la motivation du jugement, qui se réfère aux conclusions de la société Advenis conseil et du dispositif de la décision, que la défenderesse à l'instance est la société Advenis conseil.
En conséquence, il convient de rectifier l'erreur matérielle affectant le jugement n° 21/428, en ce qu'il fait figurer dans son en-tête, comme partie défenderesse, la société Advenis Facility management alors que la partie défenderesse est la société Advenis conseil.
La société Advenis Facility management sera mise hors de cause.
Sur le paiement de la somme de 12 016,62 euros.
Aux termes de l'article 1353 du code civil « celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de l'obligation. »
L'article 1219 du code civil dispose qu'une partie peut refuser d'exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l'autre n'exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.
La société Advenis conseil soutient avoir respecté ses obligations contractuelles alors que la société Cap Immo maintient pour s'opposer à l'ordonnance d'injonction de payer que les prestations promises par le franchiseur n'ont pas été mises en œuvre.
Le contrat liant les parties prévoyait notamment, à la charge du franchiseur :
- la transmission du savoir-faire,
- la mise à disposition et utilisation des marques et des droits de propriété intellectuelle,
- des prestations de formation assistance et animation du réseau,
- la mise à disposition des outils informatiques (site Internet et Intranet, logiciels et bases de données),
- l'engagement d'assurer une communication promotionnelle du réseau et des marques et des droits de propriété intellectuelle à l'échelle nationale.
Des éléments versés aux débats il résulte que :
La société Advenis conseil justifie des plusieurs mails, dont les suivants adressés à plusieurs franchisés ou exclusivement à Madame [Y] [R] gérante de la SARL Cap Immo :
- en date du 13 février 2018, adressé à Madame [Y] [R] concernant des contacts internes Advenis,
- du 14 février 2018, concernant le mandat national UNEDIC,
- le 16 mars 2018, le directeur général adjoint de la société Advenis conseil, constatant des difficultés pour communiquer avec Madame [Y] [R] depuis plus d'un mois lui a envoyé un mail pour solliciter un entretien téléphonique. Il était demandé à Madame [R] de contacter [X], pour faire un "gros point administratif",
- le 21 juin 2018, adressé uniquement à Madame [Y] [R] pour lui demander si tout se passait bien concernant la prise des marques, des outils, d'Eudonet etc,
- en date des 3 et 6 septembre 2018, concernant une formation "immobilier et fiscalité",
- du 26 septembre 2018, pour une information concernant la réunion nationale le 6 septembre 2018 pour laquelle il était demandé de bien vouloir confirmer la présence,
- du 27 septembre 2018, pour la communication des atterrissages au 31 décembre 2018 en vue de la réunion du 6 novembre 2018,
- du 7 novembre 2018, afférent au support distribué lors de la réunion notamment une plaquette LCB-FT mise à jour,
- du 5 octobre 2018, adressé nominativement à Madame [Y] [R] pour lui demander de rappeler suite à un message laissé la semaine précédente,
- du 15 octobre 2018, mail de Monsieur [I] à Madame [R] lui demandant de le rappeler précisant : nous sommes très inquiets qu'il n'y ait aucune activité chez Advenis conseil [Localité 4],
- du 19 novembre 2018, concernant la participation des salariés à une formation sur les actualités juridiques et baux,
- du 2 janvier 2019, concernant une demande de communication de la proposition concernant l'objectif 2019 de l'agence.
Sur l'ensemble de ces mails, les seules réponses de Madame [Y] [R] dont il est justifié sont celles envoyées le 14 septembre et le 8 octobre 2017, pour indiquer qu'elle serait présente à la formation des nouveaux entrants du 9 au 13 octobre à [Localité 3] puis qu'elle arriverait avec retard.
Pour se prévaloir de l'inexécution qu'elle allègue, la SARL Cap Immo produit 2 attestations :
- de Monsieur [J] [C] selon lequel malgré de multiples relances auprès d'Advenis par Madame [R] aucune des actions d'accompagnement technique et administrative ou sur le site de [Localité 4] ne furent appliquées. Il ajoute qu'à l'occasion d'un déjeuner avec Monsieur [I] celui-ci a reconnu les manquements vis-à-vis de la franchise justifiant des réorganisations au niveau du groupe ;
- de Monsieur [D] [S], compagnon de Madame [R] qui indique que Madame [R] a attendu en vain les prestations de la société Advenis et relate la restructuration de cette société et la désignation du nouveau directeur général adjoint Monsieur [P] [I].
Selon lui, Advenis conseil n'est pas en capacité de gérer et animer une franchise. Il indique qu'il n'existe aucun accompagnement administratif commercial et encore moins juridique.
Pour autant, force est de constater que la SARL Cap Immo :
- ne produit aucun élément permettant de savoir si elle a répondu aux mails ci-dessus rappelés que lui a envoyé la société Advenis conseil,
- ni aucun élément qui permettrait d'établir qu'elle se serait plainte à un moment quelconque après la signature du contrat, auprès de la société Advenis conseil du non-respect de ses obligations par le franchiseur.
Par ailleurs, par la lettre recommandée du 7 décembre 2018, Madame [Y] [R] a été mise en demeure de mentionner dans le logiciel Eudonet les informations concernant son activité depuis l'entrée en vigueur du contrat, de transmettre ses comptes annuels 2017 et une situation comptable à la date de réception de la présente (LRAR) et de régler la somme de 10 739,20 euros TTC au titre des redevances et refacturations Eudonet.
Or, parmi les obligations contractuelles figure au point 7.2, pour chacune des parties, l'engagement d'utiliser le logiciel et la base de données G+ (ou tout autre outil de même type qui leur serait substitué) de manière active et à maintenir ces informations à jour et à les rectifier si nécessaire.
La SARL Cap Immo ne justifie pas de la réponse donnée à ce courrier.
Il s'ensuit que la SARL Cap Immo ne rapporte pas la preuve d'une inexécution suffisamment grave de ses obligations par la société Advenis conseil qui aurait justifié qu'elle refuse de payer les redevances dues en vertu du contrat de franchise et régulièrement facturées.
En conséquence, le jugement qui a prononcé la mise à néant de l'ordonnance d'injonction de payer du 12 août 2019 qui a enjoint la société Cap Immo de payer à la société Advenis conseil de la somme de 12 016,62 euros sera infirmé en toutes ses dispositions et la SARL Cap Immo, qui ne conteste pas le montant de 12 016,62 euros réclamé par la société Advenis conseil au titre des redevances impayées, de la licence d'exploitation, des logiciels professionnels et des indemnités de recouvrement, sera condamnée à payer cette somme à la société Advenis conseil.
Conformément à la sommation de payer qu'elle a fait délivrer à la SARL Cap Immo le 17 avril 2019 et à l'ordonnance d'injonction de payer du 12 août 2019, la somme de 12 016,62 euros sera assortie des intérêts au taux légal à compter du 12 août 2019, date de l'ordonnance.
Sur la demande de remboursement de la somme de 15 000 euros.
La société Advenis conseil demande de condamner la SARL Cap Immo à lui rembourser la somme de 15 000 euros versée en exécution du jugement de première instance.
La cour rappelle :
- que le présent arrêt infirmatif emporte de plein droit obligation de restitution et constitue le titre exécutoire ouvrant droit à cette restitution,
- que les sommes ainsi restituées portent intérêts au taux légal à compter de la notification valant mis en demeure de l'arrêt infirmatif.
En conséquence, il n'y a pas lieu de statuer sur la demande de restitution.
Sur les demandes sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et les dépens
Le jugement sera infirmé de ces chefs.
La SARL Cap Immo sera condamnée aux dépens de première instance et d'appel, déboutée de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile et condamnée à payer à la société Advenis conseil la somme de 3 000 euros au titre des frais irrépétibles qu'elle a exposés en première instance et en appel.
Il n'y a pas lieu à application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile à l'égard de l'avocat de la SARL Cap Immo.
Par ces motifs,
La cour après en avoir délibéré, statuant publiquement, contradictoirement, et en dernier ressort,
Vu l'ordonnance de jonction du 4 janvier 2022,
Constate que la demande de jonction des procédures RG 21/02236 et RG 21/02220 est sans objet,
Dit que la SARL Cap Immo est irrecevable en sa fin de non-recevoir afférente à la recevabilité de l'appel,
Vu les dispositions de l'article 462 du code de procédure civile,
Rectifie l'erreur matérielle affectant l'en-tête du jugement n° 21/428 rendu par le tribunal judiciaire de Pau le 4 mai 2021 en ce que la défenderesse n'est pas la société Advenis Facility management mais la société Advenis conseil immatriculée au RCS de Paris sous le numéro 479 112 252,
Dit que la rectification résultant du présent arrêt sera mentionnée sur la minute et les expéditions du jugement et notifiée par le présent arrêt,
En conséquence, met la société Advenis Facility Management hors de cause,
Infirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour,
Statuant à nouveau :
Condamne la SARL Cap Immo à payer à la société Advenis conseil la somme de 12 016,62 euros qui produira intérêt au taux légal à compter du 12 août 2019.
Rappelle que le présent arrêt infirmatif emporte de plein droit obligation de restitution et que les sommes ainsi restituées portent intérêts au taux légal à compter de la notification du présent arrêt valant mis en demeure,
En conséquence,
Dit n'y avoir lieu à statuer sur la demande de restitution des sommes versées en vertu de l'exécution provisoire attachée au jugement déféré à la cour,
Y ajoutant,
Condamne la SARL Cap Immo à payer à la société Advenis conseil, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile en cause d'appel,
Déboute la SARL Cap Immo de sa demande sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Cap Immo aux dépens de première instance et d'appel et dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.