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Décisions

Cass. 2e civ., 17 novembre 2022, n° 21-13.585

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Pireyre

Rapporteur :

Mme Bohnert

Avocat :

SCP Gouz-Fitoussi

Saintes, du 2 juill. 2020

2 juillet 2020

Faits et procédure

1. Selon le jugement attaqué (tribunal judiciaire de Saintes, 2 juillet 2020), rendu en dernier ressort, par ordonnance d'injonction de payer du 11 avril 2019, le juge des contentieux de la protection d'un tribunal judiciaire a, au titre de factures de travaux de menuiserie de 2018, condamné Mme [H] à payer à la société Formule M, exerçant sous l'enseigne Euro menuiserie (la société), diverses sommes.

2. Mme [H] a formé opposition à cette ordonnance.

Examen des moyens

Sur le premier moyen

Enoncé du moyen

3. Mme [H] fait grief au jugement de dire qu'elle est mal fondée en son opposition et de l'en débouter, de la condamner à payer à la société la somme de 2 584,13 euros, de dire qu'il n'y a pas lieu d'assortir ladite somme des intérêts au taux légal, et de la condamner à la somme de 250 euros de dommages-intérêts pour procédure abusive, alors « qu'il appartient au créancier défendeur à l'opposition, mais demandeur à l'injonction de payer, de prouver la réalité et l'étendue de sa créance ; qu'en affirmant que Mme [H] n'apportait pas la preuve d'avoir contesté en son temps les prestations et n'apportait pas la preuve qu'elle ne serait pas redevable du solde desdites factures, le tribunal, qui a inversé la charge de la preuve, a violé l'article 1315, devenu l'article 1353 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1315, devenu 1353 du code civil :

4. Il résulte de ces articles qu'il appartient au créancier, défendeur à l'opposition, mais demandeur à l'injonction de payer, de prouver la réalité et l'étendue de sa créance.

5. Pour condamner Mme [H] à payer à la société le montant des factures litigieuses, le jugement retient qu'il ressort des débats et des pièces versées au dossier que Mme [H] est bien redevable du solde des factures produites par la société et qu'elle n'apporte pas la preuve d'avoir contesté, en son temps, les prestations de ladite société et qu'elle s'est abstenue de payer sans motif apparent jusqu'à l'opposition à l'ordonnance d'injonction de payer, sans apporter la preuve qu'elle ne serait pas redevable du solde desdites factures.

6. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Sur le deuxième moyen

Enoncé du moyen

7. Mme [H] fait grief au jugement de rejeter toutes ses demandes, alors « que l'article 1417 du code de procédure civile donne compétence au tribunal saisi sur opposition à injonction de payer pour connaître de toutes demandes incidentes et défenses au fond ; qu'en affirmant que dès lors qu'il s'agit d'une opposition à une ordonnance d'injonction de payer, les débats ne sauraient s'écarter de ladite opposition, bien qu'elle aurait dû se prononcer sur le fond de la demande reconventionnelle au vu des pièces produites par Mme [H], le tribunal a violé, par refus d'application, l'article 1417 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1417 du code de procédure civile :

8. Il résulte de cet article que le tribunal, statuant sur opposition, connaît des demandes incidentes.

9. Pour déclarer Mme [H] mal fondée sur ses demandes reconventionnelles et notamment la condamnation de la société à lui payer la somme de 685,25 euros et sur l'application du mécanisme de la compensation, le jugement retient qu'il s'agit d'une opposition à une ordonnance d'injonction de payer portant sur des devis et des factures établis entre le 15 mars 2018 et le 4 avril 2018 et Mme [H] devenant de fait de surcroît demanderesse à l'instance les débats ne sauraient s'écarter de ladite opposition.

10. En se déterminant ainsi, sans rechercher si la demande reconventionnelle présentait un lien suffisant avec la demande initiale, le tribunal n'a pas donné de base légale à sa décision.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a condamné Mme [H] à payer à la société Euro menuiserie la somme de 250 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, le jugement rendu le 2 juillet 2020, entre les parties, par le tribunal judiciaire de Saintes ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ce jugement et les renvoie devant le tribunal judiciaire de La Rochelle.