CRE, cordis, 28 novembre 2019, n° 07-38-19
COMMISSION DE RÉGULATION DE L'ÉNERGIE
Arrêt
sur le différend qui oppose la société Eolmed à la société RTE relatif aux conditions de raccordement d’une ferme pilote d’éoliennes flottantes au réseau public de transport d’électricité
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Tuot
Rapporteur :
Mme Corradi
Avocats :
Me Gelas, Me Vogel
Le comité de règlement des différends et des sanctions est saisi par la société Eolmed des faits suivants.
Le 5 août 2015, l’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie (ADEME) a lancé, dans le cadre du programme d’investissements d’avenir, un appel à projets pour la réalisation en mer de fermes pilotes d’éoliennes flottantes.
L’appel à projets prévoyait que le projet devrait présenter les caractéristiques suivantes :
- être localisé sur l’un des sites décrits en annexe 5 du cahier des charges ;
- être connecté au réseau public d’électricité ;
- comprendre entre 3 et 6 éoliennes, de puissance unitaire du même ordre que celle prévue pour de futurs projets commerciaux, de 5 MW minimum, sauf à démontrer qu’une puissance unitaire moindre mais du même ordre de grandeur reste pertinente pour de futurs projets commerciaux ;
- avoir une durée de démonstration au minimum de deux années, étant entendu qu’en cas de succès technico-économique de la ferme pilote des durées d’exploitation supérieures, de l’ordre de 15 ou 20 années sont souhaitées.
Les projets retenus dans le cadre de l’appel étaient financés par une aide au fonctionnement et par une aide à l’investissement.
L’appel à projets définissait également les modalités de sélection des projets, l’instruction étant conduite sous la responsabilité de l’ADEME et un comité de pilotage composé de représentants des ministères en charge de l’industrie, de la recherche, de l’écologie et du développement durable rendant un avis au Commissariat général à l’investissement (CGI) sur le projet présenté. La décision finale d’octroi de l’aide est prise par le Premier ministre, sur avis du CGI.
Le 29 août 2016, le Premier Ministre a notifié à la société Quadran l’attribution d’une participation du programme d’investissements d’avenir à hauteur maximale de 78 000 000 € au projet « EOLMED GRUISSAN » qu’elle avait présenté pour la zone de Gruissan.
Par un courrier du 30 mars 2017, la société RTE a attesté à la société Quadran de la réservation d’une capacité d’accueil de 24,8 MW pour le site de Gruissan pour le raccordement de la ferme pilote au réseau public de transport.
Le 21 avril 2017, la société Quadran, mandataire de la société Eolmed pour effectuer auprès de la société RTE toutes les formalités et démarches nécessaires à la formalisation des conventions de raccordement concernant le projet Eolmed, a adressé à la société RTE une demande de proposition technique et financière pour le raccordement du parc d’éoliennes flottantes, pour une puissance active de production installée de 24,6 MW.
Le 17 avril 2018, la société Quadran a signé, pour le compte de la société Eolmed, la proposition technique et financière n°2017-183 établie par la société RTE. La société RTE proposait alors un raccordement des éoliennes au réseau public de transport à la tension 63 kV au poste RTE existant de Port-la-Nouvelle via un transformateur élévateur de tension 33/63 kV situé dans le poste RTE, et une liaison sous-marine et souterraine 33kV. Aux termes de cette proposition, le montant hors taxes à la charge du producteur est estimé à 32 401 100 € au titre des ouvrages propres de raccordement de l’installation. En outre, la proposition technique et financière indique que le producteur était également redevable de la quote-part définie dans le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR), à hauteur de 35 630€/MW, avec un coefficient de révision de 1,011.
Par un courrier du 18 avril 2018, la société Quadran a fait part de réserves tenant à la nécessité de réaliser la liaison terrestre prévue ainsi qu’à « l’application de la quote-part des schémas régionaux cumulative avec le paiement intégral des travaux d’aménagement du poste source ».
Par un courrier du 18 mai 2018, la société RTE a indiqué à la société Quadran que le projet bénéficiera de la capacité d’accueil nécessaire sur le poste de Port la Nouvelle du S3REnR Languedoc-Roussillon et qu’à ce titre, elle devait s’acquitter de la quote-part associée.
Par un courrier du 15 mars 2019, la société Quadran a demandé à la société RTE de revoir le coût figurant dans la proposition technique et financière n°2017-183 afin d’exclure le paiement de la quote-part.
Par un courrier du 17 mai 2019, la société RTE a indiqué à la société Quadran que les conditions de l’inscription de la demande de raccordement dans le dispositif S3REnR étaient remplies.
C’est dans ces conditions que la société Eolmed a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d’une demande de règlement de différend.
Vu la procédure suivante :
Par une saisine, un mémoire et un mémoire récapitulatif enregistrés sous le numéro 07-38-19, les 5 août 2019, 23 septembre 2019 et 17 octobre 2019, la société Eolmed, représentée par son représentant légal et ayant pour avocat Me Hélène GELAS, LPA CGR Avocats, demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures, de :
˗ constater que le projet de la société Eolmed ne relève pas du champ d’application de la quote-part prévue dans le S3REnR ;
˗ par conséquent, ordonner à la société RTE de transmettre à la société Eolmed, sous le délai de trois semaines, une proposition technique et financière excluant les coûts imputés au producteur au titre de l’opération de raccordement et liés à l’application erronée de la quote-part.
S’agissant de l’inscription de l’installation dans le S3REnR Languedoc-Roussillon, elle soutient que :
- le mécanisme d’appel à projets de l’ADEME et les appels d’offres prévus à l’article L.311-10 du code de l’énergie poursuivent le même objectif, à savoir le développement et la mise en œuvre des projets qui ne pourraient voir le jour sans soutien public et bénéficient d’un dispositif de soutien de 20 ans. En tout état de cause, les différences entre ces deux procédures de mise en concurrence n’ont aucune influence sur les conditions techniques ou financières de leur raccordement ;
- l’appel à projets de l’ADEME vise également à sélectionner des projets candidats au regard d’un cahier des charges et des critères qu’il pose ;
- l’appel à projets de l’ADEME pour le projet de Gruissan entrant dans le cadre de l’article L.311-10 du code de l’énergie, celui-ci bénéficie d’une des exceptions prévues par l’article D. 321-10 du même code, dès lors qu’il s’agit d’une procédure de mise en concurrence et que des conditions de raccordement étaient annexées aux documents de consultation à travers l’étude de faisabilité sur le raccordement ;
- en conséquence, l’installation de Gruissan ne s’inscrit pas dans le S3REnR et son raccordement relève du premier alinéa de l’article L.342-1 du code de l’énergie.
S’agissant de l’absence de volet géographique particulier pour les installations en mer au sein du S3REnR Languedoc-Roussillon, elle soutient que :
- dès lors que le S3REnR ne contient pas de volet géographique particulier pour le raccordement des installations de production situées en mer, le projet de parc éolien n’est pas inscrit dans le S3REnR. Or, un volet géographique était bien pertinent, dans la mesure où l’exploitation et la maintenance des liaisons particulières vont être assurées par la société RTE, de manière coordonnée pour les trois projets éoliens en mer flottant situés en mer Méditerranée et lauréats du même appel à projets et eu égard aux particularités des installations en mer à caractère expérimental ;
- le projet de ferme pilote d’éoliennes en mer ne bénéficie d’aucune capacité réservée au titre des installations de production à partir de source d’énergie renouvelable, les capacités des appels à projets présentant un régime distinct des capacités réservées dans le S3REnR ;
- l’éolien en mer est exclu du schéma régional climat air énergie puisqu’il dépend du document maritime de façade. La capacité de 35MW réservée au poste de Port-la-Nouvelle n’est donc pas réservée pour le projet flottant et le calcul de la quote-part n’a pas été fait en considération de la puissance des projets en mer.
S’agissant de la décision du comité n°19-38-16 du 19 juillet 2017 concernant le raccordement de la société Volkswind France, elle soutient que :
- la décision du comité du 19 juillet 2017 démontre que toute installation de production à partir de source d’énergie renouvelable n’est pas, par principe, redevable du paiement de la quote-part ;
- le projet ne profite d’aucun ouvrage prévu dans le S3REnR associé au poste de Port-la-Nouvelle puisque les ouvrages propres au raccordement du projet au poste de Port-la-Nouvelle sont redondants avec ceux prévus au sein du S3REnR avec notamment l’ajout d’un transformateur spécifique, participant des ouvrages propres du producteur. Le projet ne profite par conséquent nullement du périmètre de mutualisation.
Par un mémoire en défense et un mémoire récapitulatif, enregistrés les 6 septembre 2019 et 8 octobre 2019, la société RTE, représentée par son représentant légal et ayant pour avocat Me Joseph VOGEL, SELAS VOGEL & VOGEL, demande au comité de règlement des différends et des sanctions, dans le dernier état de ses écritures, de :
- débouter la société Eolmed de toutes ses demandes ;
- constater que l’installation de production d’électricité de la société Eolmed s’inscrit dans le S3REnR Languedoc-Roussillon ;
- constater que l’installation de production d’électricité de la société Eolmed ne relève pas des exceptions du dispositif prévues à l’article D. 321-10 du code de l’énergie ;
- constater que RTE n’a pas l’obligation d’adopter un volet géographique particulier en mer ;
- constater que la société Eolmed est redevable de la quote-part au titre du S3REnR Languedoc-Roussillon ;
- rejeter la demande de la société Eolmed de transmission par RTE d’une nouvelle proposition technique et financière excluant les coûts liés à l’application de la quote-part dans un délai de trois semaines.
S’agissant de l’inscription de l’installation dans le S3REnR Languedoc-Roussillon, elle soutient que :
- le cadre juridique des appels à projets lancés par l’ADEME diffère fortement de celui des appels d’offres relevant de l’article L.311-10 du code de l’énergie, dans la mesure où ils se situent en amont du marché , afin de stimuler des innovations sur le marché, alors que les appels d’offres issus de l’article L.311-10 visent à pallier une dynamique insuffisante d’un marché déjà existant. En outre, les appels d’offres de l’article L.311-10 sont encadrés juridiquement et suivent une procédure bien spécifique dont les modalités sont définies par décret en Conseil d’Etat alors que chaque appel à projets de l’ADEME dispose d’un cadre juridique ad hoc et dont la procédure n’est pas encadrée par le code de l’énergie. Enfin, l’étude de faisabilité sur le raccordement jointe aux documents de la consultation ne fixait pas les conditions de raccordement du projet ;
- dès lors que l’appel à projets de l’ADEME ne répond pas aux conditions fixées dans le cadre des dispositions de l’article L.311-10 du code de l’énergie, le raccordement de l’installation d’Eolmed ne bénéficie pas de l’exception prévue à l’article D.321-10 du code de l’énergie ;
- les services de l’Etat rappellent dans un document de planification d’avril 2015 que l’installation de la société Eolmed s’inscrit dans le S3REnR Languedoc-Roussillon.
S’agissant de l’absence de volet géographique particulier pour les installations en mer au sein du S3REnR Languedoc-Roussillon, elle soutient que :
- la création d’un volet géographique particulier n’est pas automatique et doit être justifiée essentiellement par des raisons de cohérence propres aux réseaux électriques dont les gestionnaires de réseaux d’électricité sont les garants. En l’espèce, le S3REnR n’a pas identifié de gisement en mer qui nécessiterait des créations ou renforcements d’ouvrages du réseau public de transport en mer mentionnés au 1° et 3° de l’article D.321-15 du code de l’énergie : aucun ouvrage mutualisé en mer n’est ni prévu ni nécessaire pour raccordement le projet Eolmed ;
- le poste de Port-la-Nouvelle sur lequel le raccordement du projet Eolmed est réalisé constitue un poste de transformation relevant du réseau public de transport à terre, relevant des ouvrages du périmètre de mutualisation. Les créations et renforcements d’ouvrages prévus au S3REnR et permettant le raccordement du projet Eolmed sont donc réalisés dans des conditions techniques et des échelles de coûts compatibles avec le raccordement des autres productions d’énergie à partir de source renouvelable de la région et avec le niveau de quote-part lié aux travaux terrestres du S3REnR ;
- en tout état de cause, l’absence d’adoption d’un volet géographique particulier dans le cadre du S3REnR Languedoc-Roussillon ne saurait exclure l’application du paiement de la quote-part à l’installation de la société Eolmed.
S’agissant de la décision du comité n°19-38-16 du 19 juillet 2017 concernant le raccordement de la société Volkswind France, elle soutient que :
- la décision du comité n°19-38-17 du 19 juillet 2017 est inopérante dans l’espèce, dans la mesure où la société Eolmed est, contrairement à la société Volkswind, un producteur d’électricité et où le différend concerne un poste du réseau public de transport appartenant au périmètre de mutualisation du S3REnR et non un poste de transformation privé ;
- le transformateur spécifique, rendu nécessaire du fait du choix technique de la solution de raccordement opéré par la société Eolmed, fait intégralement partie des ouvrages propres mais n’est pas redondant avec l’ajout d’un transformateur Enedis 63/20 kV qui est prévu au poste de Port-la-Nouvelle dans le cadre des ouvrages de mutualisation du S3REnR ;
- la société Eolmed bénéficie d’un ouvrage du périmètre de mutualisation car la production de son installation sera évacuée grâce à un nouvel autotransformateur financé par la quote-part et qui vient remplacer un ouvrage de puissance moindre au poste La Gaudière ;
- la société Eolmed bénéficie de capacités réservées dans le S3REnR.
Par une décision du 14 octobre 2019, la clôture de l’instruction a été fixée au 4 novembre 2019 à 12h00.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
˗ le code de l’énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants, R. 134-7 et suivants ;
˗ vu le S3REnR de la région Languedoc-Roussillon approuvé par arrêté préfectoral en date du 23 décembre 2014 ;
˗ la décision du 13 février 2019, portant adoption du règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie ;
˗ la décision du 12 août 2019 du président du comité de règlement des différends de la Commission de régulation de l’énergie, relative à la désignation d’un rapporteur pour l’instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 07-38-19.
Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique, qui s’est tenue le 25 novembre 2019, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de M. Thierry TUOT, président, M. Henri DE LAROSIERE DE CHAMPFEU, M. Nicolas MAZIAU et Mme Hélène VESTUR, membres, en présence de :
Mme Alexandra BONHOMME, directrice des affaires juridiques et représentant le directeur général empêché, Mme Jennifer CORRADI, rapporteur,
Les représentants de la société Eolmed, assistés de Me Hélène GELAS,
Les représentants de la société RTE, assistés de Me Joseph VOGEL, Après voir entendu :
˗ le rapport de Mme Jennifer CORRADI, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
˗ les observations de Me Hélène GELAS, pour la société Eolmed ; la société Eolmed persiste dans ses moyens et conclusions ;
˗ les observations de Me Joseph VOGEL, M. Benjamin DURET, chef de pôle et M. Erwan PUVIS, attaché juridique à la direction juridique pour la société RTE ; la société RTE persiste dans ses moyens et conclusions.
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré après que les parties, le rapporteur, le public et les agents des services se sont retirés.
Sur le paiement de la quote-part au titre des S3REnR
1. Aux fins de régler le présent différend, relatif au paiement de la quote-part au titre du S3REnR de la région Languedoc-Roussillon par la société Eolmed pour le raccordement d’une ferme pilote d’éoliennes flottantes au réseau public de transport d’électricité, il y a lieu, dès lors que la première échéance de paiement est due au moment de l’acceptation de la proposition technique et financière, d’appliquer la réglementation en vigueur au moment de l’acceptation de cette proposition, soit en l’espèce le 17 avril 2018.
2. Aux termes de l’article L. 342-1 du code de l’énergie, « Le raccordement d'un utilisateur aux réseaux publics comprend la création d'ouvrages d'extension, d'ouvrages de branchement en basse tension et, le cas échéant, le renforcement des réseaux existants.
Par dérogation à l'alinéa précédent, lorsque le raccordement est destiné à desservir une installation de production à partir de sources d'énergie renouvelable et s'inscrit dans le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables mentionné à l'article L. 321-7, le raccordement comprend les ouvrages propres à l'installation ainsi qu'une quote-part des ouvrages créés en application de ce schéma ».
3. L’article L. 342-12 du code de l’énergie prévoit que « Lorsque le raccordement est destiné à desservir une installation de production à partir de sources d'énergie renouvelable et s'inscrit dans le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables mentionné à l'article L. 321-7, le producteur est redevable d'une contribution au titre du raccordement propre à l'installation ainsi qu'au titre de la quote-part définie dans le périmètre de mutualisation mentionné à l'article L. 321-7. Cette quote-part est calculée en proportion de la capacité de puissance installée sur la puissance totale disponible garantie sur le périmètre de mutualisation. La prise en charge prévue au 3° de l'article L. 341-2 porte sur l'un ou sur l'ensemble des éléments constitutifs de cette contribution. Est précisé par voie réglementaire le mode de détermination du périmètre de mutualisation des postes du réseau public de transport, des postes de transformation entre les réseaux publics de distribution et le réseau public de transport et des liaisons de raccordement au réseau public de transport, inscrits dans le schéma de raccordement au réseau des énergies renouvelables, que ces ouvrages soient nouvellement créés ou existants. […] ».
Sur l’application du troisième alinéa de l’article D. 321-10 du code de l’énergie
4. La société Eolmed soutient que le projet de ferme d’éoliennes flottantes sur le site de Gruissan entre dans le cadre de l’article L. 311-10 du code de l’énergie et qu’il y aurait dès lors lieu d’appliquer l’article D. 321-10 du même code, qui prévoit que de telles installations ne s’inscrivent pas dans le S3REnR.
5. L’article D. 321-10 du code de l’énergie précise que : « La présente section et la section 6 du chapitre II du titre IV du présent livre fixent les conditions de raccordement aux réseaux publics d'électricité des catégories d'installation suivantes :
- installation de production d'électricité à partir de sources d'énergies renouvelables d'une puissance de raccordement supérieure à 100 kilovoltampères ;
- installations groupées dont la somme des puissances de raccordement est supérieure à 100 kilovoltampères. […]
Pour l'application du deuxième alinéa de l'article L. 342-1, les installations dont les conditions de raccordement sont fixées dans le cadre des dispositions de l'article L. 311-10 ne s'inscrivent pas dans le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables. »
6. L’article L. 311-10 du code auquel il est renvoyé dispose que « Lorsque les capacités de production ne répondent pas aux objectifs de la programmation pluriannuelle de l'énergie, notamment ceux concernant les techniques de production et la localisation géographique des installations, l'autorité administrative peut recourir à une procédure de mise en concurrence dont les modalités sont définies par décret en Conseil d'Etat. »
7. Aux termes des dispositions de l’article R. 311-12 du même code, issues du décret n°2016-170 du 18 février 2016 relatif à la procédure d’appel d’offres pour les installations de production d’électricité, pris pour application de l’article L. 311-10 du code précédemment cité, « Les procédures de mise en concurrence prévues à l'article L. 311-10 auxquelles peut recourir le ministre chargé de l'énergie sont :
1° Soit la procédure d'appel d'offres décrite à la sous-section 1, par laquelle le ministre chargé de l'énergie choisit l'offre économiquement la plus avantageuse sans négociation sur la base de critères objectifs préalablement portés à la connaissance des candidats ;
2° Soit la procédure de mise en concurrence avec dialogue concurrentiel décrite à la sous-section 2, par laquelle le ministre chargé de l'énergie dialogue avec les candidats admis à participer à la procédure en vue de définir ou développer les solutions de nature à répondre à ses besoins et sur la base desquelles ces candidats sont invités à remettre une offre. »
8. Les appels à projets de l’ADEME lancés dans le cadre du programme d’investissements d’avenir ne sont pas régis par les dispositions de l’article R. 311-12 et suivantes du code de l’énergie et ne relèvent ainsi pas du cadre prévu par les dispositions de l’article L. 311-10 du même code. Les installations issues des appels à projets de l’ADEME ne peuvent donc être regardées comme les installations dont les conditions de raccordement sont fixées par une procédure de mise en concurrence mentionnées au troisième alinéa de l’article D. 321-10 du code, qui s’applique uniquement aux procédures de mises en concurrence mises en œuvre par le ministre chargé de l’énergie afin de répondre à la carence des capacités de production aux objectifs de la programmation pluriannuelle de l’énergie en application des articles L. 311-10 et suivants et R. 311-12 et suivants du code de l’énergie.
9. En conséquence, la société Eolmed ne peut se prévaloir de l’application du troisième alinéa de l’article D. 32110 du code de l’énergie.
10. Il y a donc lieu d’appliquer les conditions des articles L. 342-1, alinéa 2 et L. 342-12, alinéa 1 du code de l’énergie afin de déterminer si la société Eolmed est redevable du paiement de la quote-part au titre du S3REnR de la région Languedoc-Roussillon.
Sur la qualification d’installation de production à partir de sources d’énergie renouvelable
11. Il ressort des pièces du dossier que la société Eolmed a demandé à la société RTE le raccordement d’une ferme d’éoliennes flottantes sur le site de Gruissan, pour une puissance d’injection de 24,6 MW et une puissance de soutirage de 0,5 MW, dépassant ainsi le seuil des 100 kV prévu à l’article D. 321-10 du code de l’énergie.
12. Dès lors, la société Eolmed a demandé à la société RTE le raccordement d’une installation de production à partir de sources d’énergie renouvelable.
Sur « l’inscription » de l’installation dans le S3REnR au sens des dispositions de l’article L. 342-12 du code de l’énergie
13. L’article L. 321-7 du code de l’énergie auquel les articles L. 342-1 et L. 342-12 précédemment cités renvoient dispose que « […] le schéma régional de raccordement définit les ouvrages à créer ou à renforcer pour atteindre les objectifs fixés par le schéma régional du climat, de l’air et de l’énergie. Il définit également un périmètre de mutualisation des postes du réseau public de transport, des postes de transformation entre les réseaux publics de distribution et le réseau public de transport et des liaisons de raccordement de ces postes au réseau public de transport […] ».
14. L’article D. 321-15 du même code prévoit que « le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables comprend :
1° Un document identifiant les postes sources, les postes du réseau public de transport ainsi que les liaisons entre ces différents postes et le réseau public de transport, dès lors que ces différents ouvrages ont vocation à intégrer le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables ; il s’agit aussi bien des ouvrages à créer que des ouvrages existants, ces derniers pouvant le cas échéant être à renforcer ;
3° La liste détaillée des ouvrages électriques mentionnés au 1° à créer, le cas échéant par volet particulier, qui ont vocation à intégrer le périmètre de mutualisation prévu à l’article L. 321-7 et, le cas échéant, la liste détaillée des ouvrages à créer par volet particulier du schéma ».
15. Il ressort des pièces du dossier que l’installation de production de la société Eolmed sera raccordée au poste existant de Port-la-Nouvelle, appartenant au réseau public de transport, via un transformateur élévateur de tension 33/63 kV et une liaison sous-marine et souterraine 33kV. Le poste de Port-la-Nouvelle constitue bien un poste du réseau public de transport au sens de l’article L. 321-7 et a ainsi vocation à intégrer le périmètre de mutualisation du S3REnR de la région Languedoc-Roussillon. En l’espèce, le poste de Port-la-Nouvelle est identifié dans le S3REnR de la région Languedoc-Roussillon.
16. En outre, contrairement à ce que soutient la société Eolmed, il ressort du S3REnR de la région LanguedocRoussillon, des états techniques et financiers de la mise en œuvre de ce schéma de 2016 et 2017, ainsi que du courrier de la société RTE du 30 mars 2017, documents antérieurs au présent différend, que des capacités ont bien été réservées dans le S3REnR Languedoc-Roussillon, sur le poste de Port-la-Nouvelle, pour le projet de ferme éoliennes flottantes de la société Eolmed.17. Il s’ensuit que l’installation de production de la société Eolmed s’inscrit dans le S3REnR de la région Languedoc-Roussillon.
18. La société Eolmed soutient que dès lors que le S3REnR de la région Languedoc-Roussillon ne contient pas de volet géographique particulier pour le raccordement des installations de production situées en mer au sens des dispositions de l’article D. 321-13 du code de l’énergie, son projet de ferme éoliennes flottantes n’est pas inscrit dans le S3REnR.
19. Aux termes des dispositions de l’article D. 321-12 du code, « […] Le schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables comporte, le cas échéant, un volet particulier pour le raccordement des installations de production situées en mer. ». Contrairement à ce que soutient la société Eolmed, ces dispositions n’ont pas pour objet de conditionner l’inscription d’installations de production situées en mer dans un S3REnR à l’existence d’un volet particulier pour le raccordement de ces installations.
20. Comme le soutient la société RTE, le gestionnaire du réseau public de transport n’est pas tenu d’élaborer un volet particulier pour le raccordement des installations de production en mer si, au cas d’espèce, les conditions techniques du raccordement de ces installations aux ouvrages du réseau ne l’exigent pas.
21. Dès lors, le fait que le S3REnR de la région Languedoc-Roussillon ne prévoit pas de volet particulier pour le raccordement des installations de production situées en mer est sans incidence sur l’inscription de l’installation de production de la société Eolmed dans le S3REnR de la région Languedoc-Roussillon.
Sur le paiement de la quote-part au titre du S3REnR de la région Languedoc-Roussillon
22. Il résulte de ce qui précède que l’installation de la société Eolmed est une installation de production à partir de sources d'énergie renouvelable et s’inscrit dans le schéma S3REnR de la région Languedoc-Roussillon.
23. En conséquence, la demande de raccordement doit être regardée comme présentée au titre du deuxième alinéa de l’article L. 342-1 du code de l’énergie et la société Eolmed est dès lors redevable de la quote-part au titre du S3REnR de la région Languedoc-Roussillon.
Sur la demande de communication d’une proposition technique et financière
24. La société Eolmed demande au comité d’enjoindre à la société RTE, sous un délai de trois semaines, de lui adresser une proposition technique et financière excluant les coûts imputés au producteur au titre de l’opération et liés à l’application de la quote-part.
25. Il résulte de tout ce qui précède qu’il n’y a pas lieu pour le comité de règlement des différends et des sanctions d’enjoindre à la société RTE d’adresser à la société Eolmed une proposition technique et financière.
DÉCIDE :
Article 1er. – La société Eolmed est redevable de la contribution au titre des ouvrages propres et de la quote-part des ouvrages mutualisés en application du schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables de la région Languedoc-Roussillon.
Article 2. – Les demandes de la société Eolmed sont rejetées.
Article 3. – La présente décision sera notifiée à la société Eolmed et à la société RTE. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.