CA Paris, Pôle 5 ch. 7, 18 mars 2021, n° 20/05171
PARIS
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
Société RTE Réseau de Distribution d'Électricité (SA)
Défendeur :
Société Poste de Cressy (SAS), Commission de Régulation de l'Énergie
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
Mme Brun-Lallemand
Conseillers :
Mme Schmidt, Mme Tréard
Avocats :
Me Baechlin, Me Vogel, Me Boccon Gibod, Me Guiheux
Vu la décision n° 11-38-19 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie en date du 17 février 2020 sur le différend qui oppose la société Poste de Cressy à la société RTE relatif aux conditions de raccordement d'une installation de production au réseau public de transport d'électricité ;
Vu la déclaration de recours formé contre cette décision, contenant un exposé sommaire des moyens, déposée au greffe le 18 mars 2020 par la société RTE Réseau de transport d'électricité ;
Vu l'exposé complet des moyens déposé au greffe le 17 avril 2020 par la société RTE Réseau de transport d'électricité ;
Vu les conclusions en réponse déposées au greffe les 28 septembre 2020 et 26 janvier 2021 par la société Poste de Cressy ;
Vu les observations déposées au greffe le 13 novembre 2020 par la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu les mémoires no 2 et 3 déposés au greffe les 5 janvier et 5 février 2021 par la société RTE Réseau de transport d'électricité ;
Vu l'avis du ministère public du 10 février 2021, transmis le même jour aux parties ;
Ayant entendu à l’audience publique du 11 février 2021 le conseil de la société RTE Réseau de transport d'électricité, celui de la société Poste de Cressy, le représentant de la Commission de régulation de l'énergie ainsi que le ministère public.
1. Le différend qui oppose la société RTE Réseau de transport d’électricité (ci-après la société RTE ») à la société Poste de Cressy porte sur les conditions financières du raccordement des installations de production d’électricité photovoltaïque de cette dernière au réseau de transport &électricité. Le différend porte plus précisément sur l’inscription du raccordement de ces installations au schéma régional de raccordement au réseau des énergies renouvelables (S3REnR) de la région Picardie, devenue Hauts-de-France, et partant sur son obligation au paiement de la quote-part prévue par ce schéma.
2. Par une décision n° 11-38-19 du 17 février 2020, le Comité de règlement des différends et des sanctions (le CoRDiS) de la Commission de régulation de l'énergie (la CRE) a dit que :
- la société Poste de Cressy n'est pas redevable de la contribution au titre des ouvrages propres et de la quote-part des ouvrages mutualisés en application du deuxième alinéa de l'article L.342-1 et de l'article L.342-12 du code de l'énergie ;
- la société RTE communiquera à la société Poste de Cressy, dans un délai d’un mois à compter de la notification de la présente décision, une version corrigée et modificative de la proposition technique et financière, ou le cas échéant, de la convention de raccordement, établie en application du premier alinéa de l'article L.342-1 du code de l'énergie.
3. Par son recours, la société RTE demande à la Cour d'annuler et, en tout état de cause, d’infirmer cette décision et de juger que la société Poste de Cressy est redevable de la quote-part prévue par le S3REnR de la région anciennement dénommée Picardie.
4. La CRE invite la Cour à rejeter ce recours.
5. Par ses conclusions du 26 janvier 2021, la société Poste de Cressy demande à la Cour, à titre principal, de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt de la Cour de cassation devant intervenir dans l'affaire « société PMS7 c/ RTE » qui présente une question similaire à celle posée par le recours formé par la société RTE.
6. À titre subsidiaire, elle conclut au rejet du recours et demande à la Cour de condamner la société RTE à lui payer la somme de 10 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.
7. La société RTE conclut à l'irrecevabilité de la demande de sursis au motif qu'elle n'a pas été présentée in limine litis en application de l'article 74 du code de procédure civile.
8. Sur le fond, elle demande à la Cour de rejeter cette demande de sursis et de statuer sur le mérite de son recours.
9. Le ministère public invite la Cour à surseoir à statuer.
Sur ce, la Cour,
10.En application des articles 73 et 74 du code de procédure civile, les demandes de sursis à statuer, qui relèvent des exceptions de procédure, doivent, à peine d'irrecevabilité, être présentées simultanément et avant toute défense au fond ou fin de non-recevoir.
11. Il ressort de l'article R. 134-21 du code de l'énergie que ces dispositions sont applicables dans le cadre d'un recours formé contre une décision du CoRDiS, en l'absence de dispositions contraires prévues par le titre III du livre de la partie réglementaire de ce code.
12. En l'espèce, la demande de sursis à statuer a été présentée par la société Poste de Cressy dans ses conclusions du 26 janvier 2021, après le dépôt de ses premières conclusions du 28 septembre 2020 demandant à la Cour le rejet du recours de la société RTE.
13. Toutefois, à la date du dépôt de ses premières conclusions, la cause invoquée par la société Poste de Cressy au soutien de sa demande de sursis n’existait pas, le pourvoi en cassation contre l'arrêt rendu le 19 novembre 2020 par la Cour, qui a tranché des questions similaires à celles posées par le présent recours, ayant été formé le 17 décembre 2020.
14. La demande de sursis, formée pour la première fois par conclusions du 26 janvier 2021, est donc recevable.
15. Il convient d'ajouter que la nécessité d'un sursis dans un souci de bonne administration de la justice peut, en tout état de cause, être examinée par la Cour à tout moment.
16. Le recours dont est saisi la Cour pose la question de l'inscription du raccordement des installations de la société Poste de Cressy au S3REnR de la région Hauts-de-France et de l'obligation subséquente de cette société au paiement de la quote-part prévue par ce schéma. Plus précisément, les parties s'opposent sur l'interprétation des dispositions des articles L.342-l, alinéa 2 et L.342-12 du code de l'énergie qui prévoient que la quote-part est due lorsque le raccordement est destiné à desservir une installation de production d'énergie renouvelable et qu'il s’inscrit dans un S3REnR.
17. Cette question se pose dans les mêmes termes que dans le différend ayant opposé un autre producteur d'énergie renouvelable, la société Pays de Montmédy Solaire 7, à la société RTE et que la Cour a tranché, par un arrêt du 19 novembre 2020, à l'occasion du recours formé par la société Pays de Montmédy Solaire 7 contre une décision du CoRDiS.
18. Cet arrêt du 19 novembre 2020 ayant fait l'objet d’un pourvoi en cassation formé par la société Pays de Montmédy Solaire 7 le 17 décembre 2020, enregistré sous le no 20-23.163, et la CRE le 22 décembre 2020, enregistré sous le numéro 20-23.339, la Cour considère qu'il est d'une bonne administration de la justice de surseoir à statuer dans l'attente de l'arrêt à intervenir sur ces pourvois.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
SURSOIT À STATUER sur le recours formé par la société RTE Réseau de transport d'électricité contre la décision du CoRDiS no 11-38-19 jusqu'à ce que la Cour de cassation se soit prononcée sur les pourvois formés par la société Pays de Montmédy Solaire 7 et la Commission de régulation de l'énergie, enregistrés sous les n° 20-23.163 et 20-23.339, les 17 et 22 décembre 2020 ;
RENVOIE l'affaire à l'audience de procédure du 28 juin 2022 afin qu'un nouveau calendrier de procédure soit établi entre les parties à la suite de l'arrêt rendu par la Cour de cassation ;
RÉSERVE les dépens.