Cass. 2e civ., 8 juillet 2004, n° 02-19.468
COUR DE CASSATION
Arrêt
Rejet
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Séné
Rapporteur :
M. Loriferne
Avocat général :
M. Kessous
Avocats :
SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, Me Blondel
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Grenoble, 13 juin 2002), que MM. X..., Y... et Z... ont cédé à la société Denis Bonzy Editions, aux droits de laquelle vient la société Didier Richard, des actions et parts qu'ils détenaient dans diverses sociétés, cette cession étant assortie d'une convention de garantie de passif qui comportait une clause d'arbitrage en cas de difficulté s'élevant à l'occasion de l'interprétation ou de l'exécution de cet engagement ; que la garantie de passif ayant été mise en oeuvre par le cessionnaire, le tribunal arbitral a rendu une sentence qui a été annulée par la cour d'appel qui a ensuite statué au fond ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Didier Richard fait grief à l'arrêt d'avoir dit que, par application de l'article 485 du nouveau Code de procédure civile, la cour d'appel était incompétente pour statuer sur ses demandes au titre du coût des relances, du manque de trésorerie et du préjudice commercial, invoqués par elle à titre de préjudice complémentaire aux créances impayées, alors, selon le moyen :
1 / que lorsque son investiture procède d'une clause compromissoire, l'arbitre peut être saisi par une partie d'une demande incidente dès lors qu'entrant par son objet dans les prévisions de la clause compromissoire, cette demande se rattache par un lien suffisant aux prétentions originaires que la partie lui avait soumises ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir constaté que l'investiture du tribunal arbitral procédait d'une clause compromissoire, de sorte que, tenue de statuer sur le fond du litige dans les limites de la mission de l'arbitre, elle était compétente pour connaître des demandes incidentes de la société Didier Richard, dont elle devait apprécier la recevabilité, en recherchant si elles se rattachaient par un lien suffisant aux prétentions originaires qu'elle lui avait soumises, la cour d'appel a violé les articles 1442 et 1445, ainsi que 4 et 1460, du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 1485 du même Code ;
2 / que lorsque son investiture procède d'un compromis, l'arbitre est compétent pour se prononcer sur les demandes nouvelles des parties qui se présentent comme l'accessoire des demandes qui y ont été formulées ; qu'en déclinant sa compétence pour en connaître sans rechercher si les demandes incidentes de la société Didier Richard ne pouvaient pas être tenues pour des accessoires de ses demandes initiales, la cour d'appel a en toute hypothèse privé sa décision de base légale au regard des articles 1447 et 1448, ainsi que 4 et 1460, du nouveau Code de procédure civile, ensemble l'article 1485 du même Code ;
Mais attendu que, la cour d'appel, statuant sur le fond dans les limites de la mission de l'arbitre, peut être saisie par une partie d'une demande incidente, dès lors qu'entrant par son objet dans les prévisions de la clause compromissoire, cette demande se rattache aux prétentions originaires par un lien suffisant de dépendance, dont l'appréciation relève de son pouvoir souverain ;
Et attendu qu'ayant retenu que les demandes incidentes concernaient le coût des relances, le manque de trésorerie et le préjudice commercial, toutes invoquées à titre de préjudice supplémentaire, la cour d'appel qui a ainsi motivé sa décision, l'a légalement justifié ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Didier Richard fait également grief à l'arrêt de l'avoir déboutée de sa demande tendant à la condamnation de MM. X..., Y... et Z... à lui payer quelque somme que ce soit au titre de la garantie de passif, alors, selon le moyen que selon l'article 3.2 de la convention du 25 juillet 1991, "les restitutions du prix effectuées en application des paragraphes qui précèdent ne pourront être réclamées qu'à condition que leur montant cumulé soit supérieur à 100 000 francs. Si cette condition venait à être remplie, le versement s'exécutera au premier franc et portera sur le montant total des restitutions du prix dues en vertu des présentes" ; qu'il résulte des énonciations de l'arrêt, que la société Didier Richard pouvait prétendre obtenir, à ce titre, une somme de 937 191,66 francs, cependant qu'elle était pour sa part débitrice d'une somme de 854 515,05 francs, ce dont il s'évince que la clause précitée n'avait pas vocation à s'appliquer et que la société Didier Richard devait se voir allouer, après compensation, la somme de 82 774,61 francs ;
qu'en se prononçant de la sorte, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé dans la convention de garantie de passif l'existence d'une clause de franchise qu'elle a souverainement interprétée, la cour d'appel a pu décider qu'aucune somme ne restait due à la société Didier Richard ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.