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Décisions

CA Paris, Pôle 5 ch. 2, 16 décembre 2016, n° 15/23499

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

M. Jahloul B. Dit C.

Défendeur :

OFFSTAGE Inc (Sté), S.E.L.A.F.A. MANDATAIRES JUDICIAIRES ASSOCIES (MJA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Colette PERRIN

Conseillers :

Mme Sylvie NEROT, Mme Véronique RENARD

Avocats :

SELARL RECAMIER AVOCATS ASSOCIES, AARPI S. - G., SELARL W., SELARL I.

Paris, du 12 nov. 2015

12 novembre 2015

Le groupe de musiciens dénommé « Les Gipsy Kings », composé à compter de 1986 de 9 membres, à savoir : messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. ainsi que de monsieur Jahloul B. dit C. (lequel s'est séparé du groupe en 1991), ont enregistré deux albums intitulés « Gipsy Kings » (en 1987) et « Mosaïque » (en 1989) puis, après le départ de monsieur B., divers albums désignés par les parties comme constituant les enregistrements du back catalogue du groupe.

Un contrat a été conclu le 1er décembre 1986 par lequel les artistes précités ont confié aux « promoteurs », à savoir messieurs T. et M. auxquels se sont substituées les sociétés Productions et Editions Claude M. (ci-après PEM) et Vanessa Production l'exclusivité de l'exploitation de la production artistique de leur groupe dans le monde entier, ceci pour une première durée de cinq ans.

Un second contrat a été signé, en 1992 et pour une durée de six ans, liant les consorts R. et B. et la société PEM désignée comme étant « le producteur ».

L'exploitation du back catalogue a été confiée, sous licence et sans limitation de durée, à deux sociétés : une société aux droits de laquelle est venue la société Nonesuch Records selon contrat de licence exclusive du 08 novembre 1988 pour son exploitation sur le territoire des Etats-Unis, d'une part, et une société devenue Sony Music Entertainment pour son exploitation dans le reste du monde selon contrat conclu le 04 mars 1990, d'autre part.

La société PEM a mis en place avec ces deux licenciées, à compter de 2001 puis de 2003, un paiement direct des artistes par le biais de « lettres de direction ».

A l'issue de la période d'exclusivité bénéficiant à la société PEM, les artistes précités (à l'exclusion de monsieur B.) ont signé, le 17 décembre 2003, avec leur société d'édition musicale et phonographique, la SARL Gipsy Kings Productions, et la société Pascal I. Enteprises Ltd un contrat de management prévoyant au profit de cette dernière une rémunération de 15 % sur tous les revenus de cette SARL versés directement, le cas échéant, par ces sociétés licenciées.

Le 18 novembre 2004, la société PEM a fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire, convertie le 17 octobre 2005 en liquidation judiciaire et a été désignée la Selafa MJA, prise en la personne de Maître F. en qualité de liquidateur judiciaire, lequel a été remplacé par Maître Frédérique L. par jugement du 20 décembre 2012.

Par ordonnance rendue le 26 mars 2009, le juge-commissaire a autorisé, moyennant le prix de 300.000 euros, la cession des droits attachés aux enregistrements du back catalogue des Gipsy Kings, à savoir l'ensemble des phonogrammes et vidéogrammes produits entre 1986 et 2002 dépendant de l'actif de la société PEM, à la société de droit américain Offstage Inc. ayant pour représentant légal monsieur Pascal I..

Cette cession est effectivement intervenue le 31 mars 2010 selon deux actes, l'un portant sur les phonogrammes, l'autre sur les vidéogrammes.

Par acte du 19 novembre 2010 , monsieur B. a assigné devant le Conseil des Prud'hommes de Paris la société Offstage, prise en sa qualité de cessionnaire des droits corporels et incorporels des enregistrements du back catalogue des Gipsy Kings ainsi que Maître F., ès-qualités de représentant des créanciers de la société PEM, en paiement de ses redevances d'artiste-interprète au titre des royalties dues pour l'exploitation aux Etats-Unis de 2001 à 2009.

Par jugement rendu le 08 octobre 2012, cette juridiction s'est déclaré incompétente au profit de tribunal de grande instance de Paris pour juger de la validité de l'acte de cession du 31 mars 2010 notamment contestée.

Les membres du groupe Gipsy Kings précités sont intervenus volontairement à l'instance selon conclusions du 18 juin 2014 et ont présenté une demande en contrefaçon des enregistrements en cause par conclusions notifiées le 07 mai 2015.

Par jugement contradictoire rendu le 12 novembre 2015, le tribunal de grande instance de Paris a, en substance et sans assortir sa décision de l'exécution provisoire :

> rejeté l'exception d'incompétence soulevée par Maître L., ès-qualités,

> déclaré messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. recevables à agir en contrefaçon pour l'exploitation des enregistrements produits entre 1986 et 1992, ceci à compter du 07 mai 2010 mais leur action prescrite pour les faits antérieurs à cette date,

> rejeté les autres fins de non-recevoir,

> déclaré messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. ainsi que monsieur B. recevables à agir en nullité de la cession intervenue le 31 mars 2010 mais les a déboutés de leur demande à ce titre,

> débouté messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. de leur action en contrefaçon,

> déclaré messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. ainsi que monsieur B. recevables en leur action en résolution ou résiliation des contrats d'enregistrement de 1986 et 1992 mais les en a déboutés,

> débouté monsieur B. de l'ensemble de ses demandes,

> déclaré messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. irrecevables à agir au titre du contrat du 17 décembre 2003 et les a déboutés de leurs autres demandes,

> débouté la société Offstage et Maître L., ès-qualités, de leurs demandes indemnitaires fondées sur la procédure abusive,

> condamné monsieur B. à verser à la société Offstage et à Maître L., ès-qualités, une somme de 3.000 euros, au profit de chacun, au titre de l'article 700 du code de procédure civile et, sur ce fondement, condamné in solidum messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. à verser à chacun de ces deux défendeurs la somme de 6.000 euros en condamnant, enfin, messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. ainsi que monsieur B. aux entiers dépens.

Monsieur Jalhoul B. dit C. a interjeté appel de ce jugement,

Vu l'article 455 de code de procédure civile,

Vu les dernières conclusions (n° 4) notifiées par monsieur Jalhoul B. dit C. le 18 novembre 2016 ,

Vu les dernières conclusions (n° 3) notifiées le 21 novembre 2016 par messieurs Tonnino Antoine, Maurice Diego et Jacques Paco B., Nicolas, Paul, André, Pachaï et François Canut R. le 24 novembre 2016 ,

Vu les dernières conclusions (n° 3) notifiées le 18 novembre 2016 par la Selafa Mandataires Judiciaires Associés (MJA), représentée par Maître Frédérique L., agissant ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Productions et Editions Claude M.,

Vu les dernières conclusions (n° 5) notifiées par la société de droit américain Offstage Inc. le 17 novembre 2016 ,

SUR CE,

I - Sur l'action des consorts R. et B. en contrefaçon de leurs droits d'artistes-interprètes à l'encontre des sociétés PEM et Offstage et l'action en contrefaçon de monsieur B. à l'encontre de la société Offstage

1) sur la recevabilité à agir de monsieur B. en contrefaçon à l'encontre de la société Offstage du fait de l'exploitation de ses enregistrements

Considérant qu'à l'exception de nouveauté en cause d'appel que lui oppose la société Offstage en se fondant sur les dispositions de l'article 564 du code de procédure civile , monsieur B. se prévaut des dispositions des articles 565 et 566 du même code en affirmant que cette demande, dont il ne conteste pas qu'elle est formulée pour la première fois en cause d'appel, tend aux mêmes fins que les demandes contenues dans le dispositif de ses dernières conclusions de première instance (pièce 73 Offstage) et est, en tout cas, identique à celle que formulaient les consorts R. et B. devant les premiers juges ; que l'article 566 a également vocation à trouver application, selon lui, puisque cette demande au titre de la contrefaçon est le complément et la conséquence de ses précédentes demandes ;

Mais considérant que la demande en contrefaçon a pour objet de sanctionner, sur le terrain délictuel, une atteinte à un droit privatif tandis que les dispositions de première instance invoquées par monsieur B., s'inscrivant dans le cadre d'une exécution contractuelle, portaient sur une condamnation en paiement provisionnel de la société Offstage et de la Selafa MJA « au titre de l'exploitation des enregistrements (') à parfaire en fonction des redditions de comptes qui seront communiquées» et de « royalties due pour l'exploitation aux Etats-Unis depuis 2001 jusqu'à décembre 2004 » ;

Qu'il ne peut, dans conditions, valablement prétendre que la présente demande tend aux mêmes fins que les précédentes ni qu'il s'agit, comme il se borne à le dire sans circonstancier son argumentation, qu'elle en est le complément et la conséquence ;

Qu'il y a donc lieu de considérer qu'il est irrecevable à agir en contrefaçon ;

2 ) sur la recevabilité à agir des consorts R. et B. en contrefaçon de leurs droits d'artistes-interprètes à l'encontre de la Selafa MJA et de la société Offstage

Considérant que la Selafa MJA, ès-qualités, ne poursuit pas l'infirmation du jugement en ce qu'il l'a déclarée irrecevable en son exception d'incompétence mais se prévaut de la fin de non-recevoir tirée de la prescription, retenue par le tribunal, pour les faits antérieurs au 07 mai 2010 ; qu'elle s'associe, par ailleurs, à la société Offstage pour solliciter l'infirmation du jugement en ce qu'il a rejeté leurs moyens tirés, d'une part, du défaut d'intérêt à agir de leurs adversaires et, d'autre part, de l'application du principe de l'estoppel ;

Considérant, s'agissant d'abord de la fin de non-recevoir tirée de la prescription pour les faits antérieurs au 07 mai 2010, qu'il y a lieu de considérer, comme le soutient la Selafa MJA et sans contestation des consorts R. et B. sur ce point, que les droits détenus par la société PEM sur les enregistrements en cause ont été cédés le 31 mars 2010 ;

Qu'il en résulte qu'à compter de cette date elle ne détenait ni n'exerçait aucun droit sur ceux-ci en sorte qu'ils doivent être déclarés irrecevables à agir à l'encontre de la Selafa MJA, ès-qualités ;

Considérant, s'agissant ensuite du défaut d'intérêt à agir des consorts R. et B., alors que le tribunal a considéré, au visa des articles 31 du code de procédure civile et L 335-4 du code de la propriété intellectuelle, que les artistes-interprètes bénéficient d'une action civile en contrefaçon, ces intimées font valoir que l'exploitation de leurs enregistrements a été donnée en licence à deux sociétés tierces dont les contrats se poursuivent sans que la cession intervenue le 31 mars 2010 n'ait modifié cette situation, qu'elles-mêmes n'ont pas la qualité d'exploitantes et que la société PEM, contrairement à ce que prétendent leurs adversaires, était contractuellement autorisée à se prévaloir des prérogatives prévues à l'article L 212-3 du même code ; que la société Offstage ajoute que l'action en contrefaçon sur le fondement des droits voisins appartient au seul titulaire des droits voisins (dont les droits d'exploitation ont été cédés, précise-t-elle, en l'espèce) et doit être dirigée à l'encontre d'un défendeur ayant qualité à défendre ;

Mais considérant qu'il est constant que l'intérêt à agir n'est pas subordonné à la démonstration préalable du bien-fondé de l'action ; que les arguments invoqués par la Selafa MJA, ès-qualités et par la société Offstage, qui ne contestent pas la qualité d'artistes-interprètes de ces musiciens ni le fait que les artistes-interprètes pris dans leur généralité bénéficient d'une protection, tendent à faire échec à leur action mais sont inopérants pour en contester la recevabilité ; que ce moyen ne peut donc prospérer ;

Considérant, s'agissant enfin du principe de l'estoppel qui leur est opposé, que les consorts R. et B. se voient reprocher leur comportement procédural puisqu'aux termes de leur intervention volontaire et afin de la voir déclarée recevable, ils réclamaient le paiement de redevances, admettant ainsi implicitement la validité de l'exploitation des enregistrements du back catalogue, mais qu'ils reviennent désormais sur leur position initiale en affirmant que le contrat du 1er décembre 1986 n'emportait pas, à leur sens, l'autorisation de les fixer, reproduire et communiquer au public ; que cette dernière demande est d'ailleurs en contradiction avec la position de monsieur B. qui ne se prévaut que du caractère d'intuitu personae de ce contrat faisant obstacle à toute cession ultérieure et qu'elle est, de plus, incohérente puisqu'ils sollicitent également la résolution ou la résiliation du contrat ;

Mais considérant que si les consorts R. et B. ont pu modifier leur position juridique en cours de procédure, la seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement une fin de non-recevoir, ainsi que cela ressort d'ailleurs, de la doctrine de la Cour de cassation, et que le principe invoqué ne saurait porter atteinte à celui de la liberté de la défense ;

Qu'en l'espèce, faute de plus amples éléments sur l'absence de bonne foi et de loyauté procédurales des consorts R. et B., il convient de relever qu'ils précisaient dans leurs conclusions d'intervention volontaire qu'ils « se réservent le droit de conclure plus avant sur le présent litige, compte tenu du fait qu'ils n'ont appris que très récemment qu'une telle procédure portant sur des enregistrements dont ils sont les artistes-interprètes et dans laquelle des informations erronées sont affirmées à leur encontre , était en cours» (pièce 74 Offstage) ; que cette précision étant ainsi donnée, rien ne permet de mettre en doute leurs affirmations selon lesquelles ils ont ajouté à leur demande durant la mise en état de la procédure dès lors qu'elle implique la communication de pièces et la nécessaire réplique aux moyens adverses ; qu'en outre, leur demande de résolution ou de résiliation des contrats en cause, jugée paradoxale par leurs adversaires, n'a jamais été formée qu'à titre subsidiaire ;

Que cet autre moyen d'irrecevabilité ne pouvant prospérer, doit être confirmé le jugement en ce qu'il les déclare recevables à agir en contrefaçon, mais uniquement à l'encontre de la société Offstage, compte tenu de ce qui précède ;

3) sur l'action en contrefaçon des consorts R. et B. à l'encontre de la société Offstage

Considérant qu'alors que pour les déclarer irrecevables en leur action (selon les motifs du jugement) ou les en débouter (selon son dispositif), le tribunal a observé que la nullité du contrat de 1986 n'était pas réclamée et a recherché la commune intention des parties à l'examen de ses stipulations mais aussi en prenant en considération les actes subséquents auxquels ils ont souscrit, avenants et contrats de licence, les consorts R. et B. demandent à la cour de considérer que les sociétés PEM et Offstage ont commis des actes de contrefaçon de leurs droits d'artistes-interprètes au sens de l'article L 335-4 du code de la propriété intellectuelle en fixant, reproduisant et communiquant au public les enregistrements produits entre 1986 et 1992 (phonogrammes et vidéogrammes) ;

Qu'ils réclament l'allocation d'une somme provisionnelle de 150.000 euros au titre de leur préjudice patrimonial dans l'attente de l'évaluation du montant des redevances perçues qu'en fera l'expert dont ils sollicitent la désignation, outre l'allocation à chacun d'eux, en raison de la violation de leur droit moral d'artistes-interprètes, des sommes de 20.000 euros, 10.000 euros et 10.000 euros au titre de la contrefaçon, respectivement, des albums intitulés «Gipsy Kings », « Mosaïque » et « Este Mundo » ;

Que pour se prévaloir du fait que ces sociétés n'étaient pas titulaires de droits sur ces enregistrements, ils analysent le contrat de 1986 en un contrat-cadre et, invoquant l'article L 212-3 du même code selon lequel «sont soumises à autorisation écrite de l'artiste-interprète la fixation de sa prestation, sa reproduction et sa communication au public, ainsi que toute utilisation séparée du son et de l'image de la prestation lorsque celle-ci a été fixée à la fois pour le son et pour l'image», soutiennent que ce texte d'ordre public exige que la cession de ces droits soit formalisée par l'artiste-interprète au moyen d'un écrit et ceci de manière expresse ;

Qu'en réplique aux motifs du jugement et aux moyens adverses, ils font valoir que cette exigence n'est pas seulement requise ad probationem mais vise à protéger l'artiste-interprète, qu'ils contestent la portée du contrat et non point sa validité, que les sociétés PEM et Offstage ne peuvent en pallier la carence en se prévalant de contrats de licence équivalant à une autorisation, d'autant que celle-ci a été requise au cas par cas et que la jurisprudence, soumettant la cession à un principe de spécialité, refuse toute cession implicite ; qu'en outre, les procédures, décisions judiciaires ou protocoles concernant monsieur B. ne leur sont pas opposables et qu'en toute hypothèse, si le contrat devait être considéré comme une cession de droits, il ne pourra qu'être jugé que cette cession était limitée à cinq ans ;

Considérant, ceci rappelé, qu'en raison de l'accueil du moyen tiré de la prescription invoqué par la Selafa MJA, ils sont irrecevables à agir à ce titre à son encontre, comme il a été dit ;

Que, s'agissant par conséquent des faits de contrefaçon imputables à la seule société Offstage, s'il ne saurait être contesté que l'article L 212-3 invoqué contient des dispositions d'ordre public de protection en faveur des artistes-interprètes, l'exigence d'une autorisation écrite qu'il formule est seule requise et ne l'est qu'à titre probatoire ;

Qu'en l'espèce, c'est avec pertinence que la société Offshore soutient qu'il résulte de la simple lecture du contrat (pièce 1 B.) que pendant la durée d'exclusivité, fixée à cinq ans dans le contrat de 1986 (article 3) « les artistes confi(ant) aux promoteurs l'exclusivité de l'exploitation de la production artistique dans le monde entier à savoir : l'édition graphique, musicale, phonographique,... cinématographique et de l'exploitation de tous procédés, visuels ou audiovisuels de reproduction existants ou à venir en respect des réglementations existantes ou à exister en matière de droit d'auteur, de droit de reproduction et de tout autre droit voisin ; enfin l'exploitation de tous les autres droits qui découlent de l'activité de l'artiste (') droits dérivés ou encore droits connexes » (article 1) s'engageaient à enregistrer en exclusivité pour la Production, qu'ils l'autorisaient à reproduire ces enregistrements de leurs prestations et à les exploiter dans le monde entier sans aucune restriction et, partant, pendant la durée des droits voisins (article 1) moyennant le paiement d'une redevance proportionnelle aux ventes de 8 % base BIEM réduite pour les ventes à l'étranger (article 2) ;

Qu'en effet, la généralité de cette clause ne peut la rendre inopérante dès lors que le législateur n'a pas repris l'exigence de certaines mentions obligatoires spécifiées, pour le seul droit d'auteur, à l'article L 131-3 du code de la propriété intellectuelle ;

Que force est de considérer au cas particulier que les droits cédés ont été ultérieurement délimités, quant à leurs objet et portée, dans les contrats de licence d'exploitation concédées (et toujours en vigueur) par la Production aux ayants-cause de la société Nonesuch, selon acte du 08 novembre 1988 dont les consorts R. et B. ont signé l'annexe A, tout comme ils ont signé, en leur qualité d'artistes-interprètes, l'avenant du contrat de licence du 1er janvier 1996, outre le contrat de licence consenti à la société Sony UK du 08 mars 1990, la lettre accord du 10 mai 1991 étendant le territoire de sa licence, la lettre d'accord du 11 novembre 1998 ou encore les lettres de direction organisant un paiement direct à leur profit, toutes conventions dont la société Offstage justifie (pièces 1, 1bis, 27-1, 27-2, 48) et dont les consorts R. et B. ne remettent en cause ni la validité ni la portée ;

Que, par ailleurs, les consorts R. et B. ne peuvent valablement prétendre tout à la fois que la cession aurait été limitée à cinq ans et solliciter, en réparation des actes de contrefaçon qu'ils incriminent vainement, non point des dommages-intérêts correspondant à une réparation par équivalent mais le paiement des redevances perçues par les sociétés PEM et Offstage à déterminer à dire d'expert qui ne pourraient être dues qu'en contrepartie de l'exécution de stipulations contractuelles ;

Qu'il suit qu'ils doivent être déboutés de leur action en contrefaçon, comme en dispose le jugement entrepris ;

II Sur la validité des contrats de cession intervenus le 31 mars 2010

1) sur la recevabilité à agir de monsieur B. en nullité de l'acte de cession du back catalogue des Gipsy Kings intervenu le 31 mars 2010 entre la Selafa MJA, ès-qualités, et la société Offstage

Considérant qu'aux termes du dispositif des dernières conclusions de la Selafa MJA et de la société Offstage délimitant, en application de l'article 954 du code de procédure civile , la saisine de la cour d'appel seul est sollicité le prononcé de l'irrecevabilité à agir à ce titre de monsieur B. ;

Qu'au soutien de leur moyen et alors que le tribunal s'est fondé sur l'évolution du litige pour le rejeter, le Selafa MJA et la société Offstage reprennent leur fin de non-recevoir tirée de l'application du principe de l'estoppel, opposant à monsieur B. qui poursuit désormais la nullité de la cession, les demandes initialement formées devant le Conseil des prud'hommes ;

Qu'à cet égard, la Selafa MJA cite les conclusions écrites de ce dernier devant la juridiction prud'homale, à savoir : « malgré l'échec du redressement judiciaire, la mise en oeuvre de la liquidation judiciaire et la cession du fonds de commerce par Maître F. à la société Offstage, celui-ci n'a jamais payé à monsieur Jalhoul B. les royalties dues alors que la continuation de l'exploitation a eu lieu postérieurement à la date de liquidation judiciaire (prononcée le 17 octobre 2005) » ;

Que la société Offstage se réfère, quant à elle, aux conclusions de monsieur B. du 25 septembre 2012 écrivant : « le cédant déclare n'avoir perçu aucune des redevances depuis la date de liquidation judiciaire. C'est en conséquence à la société Offstage qu'il appartient de réclamer à Nonesuch les redevances de monsieur B. et ce d'après l'article 1.3 du contrat de cession. Le Conseil déboutera la société Offstage de sa demande de mise hors de cause »

Que la société Offstage estime que l'intervention volontaire des consorts R. et B. était destinée à permettre à monsieur B. de se prémunir du risque que lui soit opposée cette fin de non-recevoir ; que toutes deux stigmatisent les diverses modifications de ses demandes, outre leur absence de cohérence en relevant qu'il ne peut prétendre à la fois détenir des droits au titre des conventions de cession intervenues le 31 mars 2000 et en soulever la nullité ou, à tout le moins, l'inopposabilité ;

Mais considérant que, comme précédemment énoncé s'agissant de ce même moyen opposé aux consorts R. et B., la seule circonstance qu'une partie se contredise au détriment d'autrui n'emporte pas nécessairement une fin de non-recevoir, ainsi qu'il ressort de la doctrine de la Cour de cassation, et que le principe invoqué ne saurait porter atteinte à celui de la liberté de la défense ;

Qu'en l'espèce, si la société Offstage critique le manque de cohérence interne des demandes de cet appelant, il y a néanmoins lieu de relever qu'elles s'articulent en demandes principales et subsidiaires et, pour ce qui est de la nullité ou de l'inopposabilité des cessions du 31 mars 2010, que ce moyen est soutenu en fait et en droit par monsieur B. qui invoque, en particulier, le différend personnel et ancien opposant le groupe au dirigeant de la société Offstage, outre le défaut d'information sur la cession du back catalogue ;

Que ce moyen d'irrecevabilité sera, par conséquent, rejeté ;

2) sur la validité ou l'opposabilité des actes de cession du 31 mars 2010

Considérant qu'il convient de rappeler que l'offre d'achat des enregistrements du back catalogue par la société Offstage a été autorisée par le juge commissaire et que le transfert est intervenu par l'effet de deux actes de cession datés du 31 mars 2010, l'un portant sur les phonogrammes comprenant 26 références parmi lesquelles les titres les plus connus du groupe, l'autre sur le catalogue vidéo des Gipsy Kings composé de 20 vidéogrammes (pièces 5 et 15- Offstage) ;

Considérant qu'au soutien de leur demande d'infirmation du jugement, les consorts R. et B., tout comme monsieur B., tirent à nouveau argument de l'absence de titularité des droits d'exploitation phonographique de la société PEM en vertu du contrat du 1er décembre 1986 ou de la durée de cinq années stipulée pour en déduire qu'est nécessairement nulle la cession de droits corporels et incorporels relatifs aux enregistrements ;

Que les consorts R. et B., suivis aussi sur ce point par monsieur B., soutiennent encore que ni le contrat de 1986 ni celui de 1992 (qui concernait les premiers) ne prévoyaient, comme il est d'usage, la possibilité de transférer le bénéfice du contrat ; que leur autorisation était donc indispensable, d'autant que cette cession était créatrice de droits et d'obligations pour le producteur et pour l'artiste, et que, tout au moins, ils auraient dû en être avisés par application de l'article 1690 du code civil ; qu'ils se réfèrent également aux règles de l'indivision issues de ce même code ;

Qu'ils tirent, en outre, argument des dispositions des articles L 132- 16 , L 132-19 alinéa 4 et L 132-20 alinéa 3 du code de la propriété intellectuelle applicables au droit d'auteur qui exigent l'accord de ce dernier dans le cadre du transfert ou de la cession de son contrat et de l'article L 1224-1 du code du travail visant le transfert de l'activité ou du fonds de commerce pour en conclure de plus fort que l'accord du groupe Gipsy Kings était indispensable lors de la cession de leurs contrats d'enregistrement, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal et à ce que prétend la société Offstage ;

Qu'ils se prévalent enfin du caractère intuitu personae du contrat d'enregistrement exclusif qui a perduré en l'espèce, nonobstant la signature des lettres de direction ; qu'il fait nécessairement obstacle, selon eux, à la cession des contrats (dont ils n'ont pas été informés, contrairement à ce que prétend la Selafa MJA qui se refuse à en justifier) à une personne en conflit avec l'artiste ; qu'ils évoquent plus précisément la personne de monsieur Pascal I. à qui ils avaient fait savoir que leurs liens, personnels ou à travers les sociétés PIE Ltd et Onstage Présentations qu'il dirigeait, étaient rompus selon courriel du 11 juillet 2007 et dont les qualités de manager et de producteur sont totalement incompatibles, affirment-ils, selon l'article L 7121-9 du code du travail ;

Que monsieur B. ajoute à ces différents moyens de nullité le fait que cette cession est intervenue à un prix dérisoire (soit 300.000 euros) eu égard à l'objet de la cession, quantitativement et qualitativement, et aux revenus que les membres du groupe ont pu en retirer puisque cette somme correspond approximativement au montant des seuls droits d'artistes-interprètes sur les seuls enregistrements phonographiques exploités uniquement sur le territoire des Etats-Unis durant cinq ans ; que, selon lui, le prix de cession aurait dû être au moins cinq fois plus élevé ;

Considérant, ceci étant rappelé, que ne peut prospérer le moyen tenant au fait que les contrats de 1986 et de 1992 n'ont pas emporté cession des droits voisins, eu égard à ce qui précède ; qu'il ne peut donc en être tiré une nullité subséquente de la cession litigieuse ;

Que, par ailleurs, c'est par motifs pertinents que la cour fait siens que le tribunal a écarté l'application au cas d'espèce des dispositions des articles L 1224-1 et 7121-9 du code du travail , du fait qu'étaient arrivées à leur terme les prestations des artistes-interprètes qui y sont soumises et qu'il n'y a donc pu y avoir transfert d'un contrat de travail, comme soutenu par la société Offstage ; qu'il en va de même des articles L 132- 16 et L 132-30 du code de la propriété intellectuelle qui ne concernent que le droit d'auteur ; que sur ce point, la Selafa MJA qui indique qu'elle a purgé le droit de préemption à l'égard des auteurs et co-auteurs du back catalogue des Gipsy Kings n'était nullement tenue de le faire à l'égard des artistes-interprètes parties au présent litige qui ne démontrent pas qu'ils disposent sur eux ni de la qualité d'auteur ou de celles de co-auteur ou de co-producteur ;

Que les dispositions issues du droit commun ne peuvent davantage être valablement invoquées dès lors que les articles du code civil visés par les consorts R. et B. et monsieur B. sont issus du droit des successions ou des obligations qui n'ont pas vocation à trouver application au cas particulier régi par un droit spécial ;

Que la Selafa MJA précise, en effet, exactement que la cession litigieuse n'a pas porté sur un contrat mais sur le droit de propriété des masters ainsi que le droit d'exploitation exclusif dont était titulaire la société PEM en exécution des contrats d'artistes, tandis que la société Offstage fait valoir que l'indivision est la situation juridique d'un bien ou d'un ensemble de biens sur lesquels s'exercent conjointement plusieurs droits de même nature sans division et que tel n'est pas le cas en l'espèce ;

Que, poursuivant la nullité ou l'inopposabilité de la convention en cause, aucun de ces artistes-interprètes ne peut, par conséquent, se prévaloir d'une disposition légale imposant le recueil de son accord en cas de cession par le producteur des enregistrements auxquels il a participé pas plus que d'une pratique d'insertion de clauses ressortant, au cas par cas, de la liberté de ceux qui s'engagent ;

Qu'ils échouent, également, en leur moyen tiré de la circonstance que le contrat objet de la cession serait un contrat intuitu personae dans la mesure où il s'agit d'une cession de droits patrimoniaux sur un catalogue phonographique et non d'un contrat d'enregistrement, expiré depuis de nombreuses années, comme le soutient la Selafa MJA ; que l'argument tenant à une incompatibilité entre la qualité de manager et de producteur est, par ailleurs, justement combattu par la société Offstage qui lui oppose le fait qu'il s'agit d'une réglementation concernant les agents artistiques français qui n'est, au demeurant, sanctionnée que par le refus d'une licence d'agent artistique et que la société de droit américain Offstage cessionnaire n'a jamais été le manager du groupe les Gipsy Kings ;

Qu'enfin, s'agissant du moyen fondé sur le vil prix de la cession intervenue dans le cadre de la procédure collective, il ne saurait être contesté que ces artistes-interprètes, assistés de leurs conseils, étaient informés de la procédure collective puisqu'ils ont déclaré leur créance au passif de la société PEM (pièce 6 - Selafa MJA) et qu'ils ne pouvaient ignorer qu'elle conduit nécessairement à la vente des actifs ;

Que la société Offstage, rappelant que les enregistrements en cause sont anciens et évoquant un marché du disque qui accuse un mouvement baissier en replaçant cette cession dans son contexte, oppose justement à ce moyen le fait que son offre d'achat a été formulée dès le 04 avril 2008 (pièce 4), qu'elle a été régulièrement autorisée par le juge-commissaire et qu'elle n'a abouti qu'environ deux années après sans qu'aucune offre concurrente n'ait été présentée à la Selafa MJA ;

Qu'observant tout aussi pertinemment qu'aucun des membres du groupe n'a manifesté d'intérêt pour cette cession malgré la durée de la procédure et qu'au surplus elle ne leur cause aucun grief puisque demeure inchangée l'exploitation des enregistrements confiée aux sociétés Nonesuch et Sony UK, la Selafa MJA et la société Offstage sont fondées à prétendre que ce moyen de nullité ne peut prospérer;

Qu'il s'évince de tout ce qui précède que les consorts R. et B. ainsi que monsieur B. ne sont pas fondés en leur moyen et que le jugement doit être confirmé ;

III - Sur la demande subsidiaire des consorts R. et B. ainsi que de monsieur B. aux fins de résolution ou de résiliation du contrat du 1er décembre 1986 et, pour les premiers d'entre eux, de 1992

Considérant que si les consorts R. et B. ainsi que monsieur B. ne contestent pas le jugement en ce qu'il a limité la période pertinente d'appréciation des manquements invoqués aux cinq années précédant les demandes formées à ce titre, soit pour les premiers à compter du 18 juin 2009 et pour le dernier à compter du 10 novembre 2005, ils imputent à nouveau à faute à la seule société Offstage (la Selafa MJA observant qu'aucun grief n'est articulé à son encontre) plusieurs manquements contractuels, dont la gravité justifie pour chacun, selon monsieur B., la sanction réclamée, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, et qui imposent, selon les consorts R. et B., l'application de l'article 1184 du code civil ;

Qu'au rang des obligations essentielles du producteur de phonogrammes, ils font valoir que la société Offstage ne leur a jamais adressé les redditions de compte prévues aux contrats de 1986 et 1992 et que les lettres de direction n'avaient pas pour objet de substituer à la société PEM les sociétés licenciées pour l'exécution de cette obligation ; qu'en outre, le fait que les artistes-interprètes acceptent de recevoir directement leurs redevances des licenciées durant la procédure collective n'est pas de nature à décharger le producteur de ses obligations, d'autant qu'en réalité, du fait des agissements de « la société PIE (puis aujourd'hui Offstage) ancien manager des concluants », ces redevances ne sont pas perçues ; qu'en outre, ils ne reçoivent aucun décompte de la société Offstage qui a perçu plus de la moitié des avances leur revenant ;

Que, sur le paiement des redevances, monsieur B. qui fait état d'un protocole transactionnel signé en 2007 avec la société Sony UK soutient qu'il en a été privé depuis au moins l'année 2010, pour un montant d'environ 50.000 euros, ceci sous de fallacieux prétextes tenant, notamment, à l'identification du compte CARPA ouvert à cet effet et que ce n'est que tardivement, soit un mois avant les plaidoiries de première instance, que la situation a été régularisée ; que ces difficultés de paiement de redevances persistent, ajoute-t-il, en précisant que celles-ci seraient en cours de règlement mais amputées d'avances perçues par le groupe au titre d'un contrat signé en 2003 alors qu'il n'en faisait plus partie ; que, selon lui, nonobstant cette convention avec la société Sony UK, le producteur reste responsable à l'égard des artistes-interprètes de la régularité des redditions de comptes et du paiement des redevances ; qu'invoquant une atteinte à son droit moral, il fait état d'une publicité exploitant l'enregistrement « Bamboleo » ou encore d'une synchronisation pour une publicité diffusée au Japon pour lesquelles l'accord des autres membres du groupe Les Gipsy Kings a été sollicité et non le sien, alors même que la société Offstage, qui réitère ces manquements en pleine connaissance de cause, ne conteste pas son caractère indispensable au titre du droit moral de l'artiste-interprète ;

Que les consorts R. et B. soutiennent, de plus, qu'a été méconnue l'obligation de moyen renforcée que constitue l'obligation d'exploitation continue et permanente des enregistrements en précisant que la société Offstage se borne à collecter les redevances de producteur de phonogrammes, anciennement dues à la société PEM, et ne saurait se contenter, pour satisfaire à cette obligation, de conclure des contrats de licence ;

Que sont enfin incriminées des inexécutions au principe général de bonne foi qualifiées de graves, s'agissant de l'acquisition du back catalogue du groupe, le 31 mars 2010, alors que la société Offstage savait pertinemment que les artistes-interprètes s'y opposeraient, ou de la perception de sommes qui font obstacle au paiement des redevances versées par les licenciées ou par la société de perception américaine SoundExchange ;

Considérant, ceci étant exposé, que si l'obligation de rendre compte est effectivement une obligation essentielle pesant sur le producteur dès lors qu'elle permet à l'artiste-interprète d'exercer son droit à redevances, il résulte des pièces versées aux débats qu'il a été convenu, par des lettres de direction successives, que les artistes-interprètes devaient recevoir directement des sociétés exploitantes Nonesuch, pour l'exploitation aux Etats-Unis, Sony UK pour le reste du monde (non attraites en la cause) les redditions de comptes et paiements, en accord avec le producteur ;

Qu'à cet égard et s'agissant des griefs de monsieur B., la société Offstage reprend très précisément la chronologie des événements ayant trait à la question des redevances qui lui sont dues ; qu'elle évoque notamment le protocole transactionnel qui a mis fin à son différend avec la société Sony UK, et, n'ayant eu connaissance des réclamations qu'il n'a formulées que par ses conclusions de première instance du 20 janvier 2015 et, par la suite, d'impayés reprochés à la société Nonesuch, elle justifie de ses diligences pour y remédier (pièces 80, 86 notamment) ; qu'il y a lieu de considérer, à leur examen, qu'elle peut être suivie lorsqu'elle soutient que les paiements litigieux, tels celui effectué par Sony UK le 24 mars 2016 ou ceux qui ont été adressés en temps et en heure par la société Nonesuch sans être encaissés, n'ont subi de retard qu'en raison de la négligence de monsieur B. et qu'il ne peut lui être reproché d'avoir manqué à son obligation à son endroit ;

Que, s'agissant des griefs des consorts R. et B., la société Offstage expose que depuis les lettres de direction de 2001 et de 2003, il existe deux comptes dans la comptabilité de chaque société exploitante, à savoir : un compte « artistes » pour les redevances à leur revenir et un compte producteur ou « partie contractante » et qu'elle en déduit donc à juste titre que la société Offstage n'a pas la qualité de manager ; que c'est, par ailleurs, de manière pertinente qu'elle oppose à ces artistes-interprètes le fait qu'ils n'ont aucunement manifesté leur volonté de mettre fin aux paiements directs et redditions de comptes tels qu'initialement convenus, que ce soit auprès de l'administrateur judiciaire qui les interrogeait sur la poursuite des modalités de l'exploitation en cours ou à la faveur de demandes en justice ; qu'en réponse à l'allégation d'impayés, elle justifie par ailleurs d'une convention qui permettait d'imputer sur toutes les redevances catalogue les avances que la société Sony UK a consenties à la société Gipsy Kings SARL au titre de l'exploitation des nouveaux enregistrements à compter de 2003 et, en outre, des décomptes des sociétés exploitantes ; qu'il résulte de l'ensemble de ces éléments qu'il ne saurait lui être reproché d'avoir failli aux obligations dont il est fait état ;

Que le manquement à l'obligation d'exploiter les enregistrements également incriminé se heurte, comme le fait valoir la société Offstage, au fait que ces artistes-interprètes ont eux-mêmes donné leur aval aux contrats de licence d'exploitation consentis aux sociétés Nonesuch et Sony pour toute la durée des droits voisins ; qu'elle en déduit justement qu'il ne peut lui être fait le reproche de respecter cette convention et que cet autre grief ne peut prospérer ;

Que les autres manquements invoqués par les artistes-interprètes ne permettent pas davantage de justifier la résiliation ou la résolution des contrats du 1er décembre 1986 et du contrat d'enregistrement exclusif signé en 1992, qu'il s'agisse de la méconnaissance du principe général d'exécution de bonne foi des conventions qui n'a pas vocation à trouver application, tel que présenté, ou de l'atteinte à son droit moral dont fait état monsieur B., laquelle n'est que prétendue, eu égard au courriel du 06 novembre 2014 versé aux débats par la société Offstage, relatif à l'utilisation publicitaire d'un titre concerné, qui était notamment envoyé à l'adresse électronique <[...]> et au fait que cet artiste ne caractérise pas autrement l'atteinte précisément incriminée qu'en citant le texte applicable et une jurisprudence de la Cour de cassation ;

Qu'il ressort de l'ensemble de ces éléments que cette demande formée à titre subsidiaire doit être rejetée ; qu'il en va de même des demandes subséquentes des consorts R. et B. tendant à voir ordonner une mesure d'interdiction d'exploitation des phonogrammes et vidéogrammes issus des contrats en cause et à voir condamner la société Offstage à leur verser « l'intégralité des bénéfices qu'elle a perçus depuis la résiliation des contrats » en lui ordonnant, sous astreinte, de communiquer les comptes y afférents ;

IV ' Sur les contrats de management

Considérant qu'aux termes du dispositif des dernières conclusions de monsieur B., celui-ci, sous le titre « sur la commission de 15 % perçue par la société Offstage » demande à la cour de lui enjoindre, sous astreinte, de communiquer toute reddition de comptes relative aux enregistrements litigieux portant sur les périodes du 1er janvier 2013 au jour de l'arrêt à intervenir faisant apparaître la commission de 15 % perçue par elle sur l'exploitation des enregistrements du groupe aux Etats-Unis et de la condamner à lui verser, à titre provisionnel, une somme indemnitaire de 25.000 euros au titre de son manque à gagner découlant de la commission indûment prélevée ;

Que les consorts R. et B. poursuivent, quant à eux, l'infirmation du jugement qui les a jugés irrecevables à agir au titre du contrat de management du 17 décembre 2003 ; qu'ils demandent à la cour de dire que la société Offstage intervient en qualité de manager et de producteur de leurs enregistrements audiovisuels en violation des dispositions du code du travail et de prononcer en conséquence la résolution de ce contrat de management, subsidiairement sa résiliation, en la condamnant à lui verser la somme de 281.387, 54 euros du fait de ses manquements contractuels ;

1) sur le contrat conclu le 26 avril 1989 entre la société Alive Enterprises et les membres du groupe Gipsy Kings dont faisait alors partie monsieur B. et la cession intervenue le 22 novembre 1993 entre cette société Alive Enterprises et la société Pascal I. Enterprises (PIE)

Considérant que monsieur B. fait valoir que le premier de ces contrats trouvait son terme à l'issue d'une période de trois ans, qu'est totalement injustifié le prélèvement d'une commission de 15 % sur l'exploitation des albums « Gipsy Kings » et « Mosaïque », que l'addendum ultérieur qui ne comporte pas sa signature ne lui est pas opposable et que le contrat du 22 novembre 1993 ne peut avoir pour effet de céder les effets d'un contrat déjà expiré de sorte que c'est sans droit que la société PEM a perçu cette commission depuis 2001 puis, depuis juin 2012, la société Offstage qui est subrogée dans ce droit à perception ; que ne sauraient, par ailleurs, lui être opposés la lettre d'engagement conclue entre la société PIE et la société Gipsy Kings du 28 mars 2003 pas plus que le contrat de management et de production exécutive du 17 décembre 2003 puisqu'il est constant qu'il ne faisait plus partie du groupe à ces dates ;

Qu'en réponse aux motifs du jugement qui a considéré, pour les rejeter, que ses demandes concernaient le paiement d'une commission qui aurait été versée à monsieur I. ou à la société de droit américain PIE Ltd pendant une durée et sur un territoire qu'il n'était pas en mesure de déterminer, il précise qu'il est fondé à solliciter le reversement de cette commission perçue par la société PIE puis Offstage depuis le 19 novembre 2005, compte tenu de la date d'introduction de son action et de la prescription quinquennale ; qu'il précise aussi qu'elle porte sur les territoires gérés par la société Nonesuch, à savoir les Etats-Unis et qu'à s'en tenir aux décomptes produits, elle peut s'établir à la somme annuelle de 2.200 euros, soit un total de 15.400 euros de 2006 à 2012 ; qu'il s'estime, en outre, fondé en sa demande de communication de pièces du fait que depuis une lettre du 14 juin 2012 de monsieur Pascal I. (pour le compte de la société PIE Ltd) à la société Warner Music Group (dont la société Nonesuch est une division) cette commission n'apparaît plus dans les décomptes de la société Warner alors que Pascal I. continue de la percevoir ;

Considérant, ceci exposé, que la société Offstage fait à juste titre valoir qu'elle n'a pas qualité à défendre en ce que l'action telle que menée par monsieur B. se rattache à des commissions qui ont été versées par la société exploitante aux Etats-Unis, tiers à la présente procédure, au profit d'une société qui a également la qualité de tiers et qu'elle-même n'a été subrogée dans la créance de commission par la société PIE Ltd qu'à compter du 14 juin 2012 ;

Que, sur le bien-fondé de l'action pour les faits postérieurs à cette date, le contrat conclu le 26 avril 1989 stipulait notamment en son article 4 b) :

« Les commissions convenues qui doivent être payées au manager seront basées sur les recettes brutes générées ou reçues par vous pendant la durée du contrat ou ultérieurement à la terminaison du contrat (« this agreement ») dès lors qu'elles sont le résultat des activités suivantes sur le Territoire : (')

(iii) tout contrat entré en vigueur avant le présent contrat, dans la mesure où vous effectuez les services pendant la durée du présent contrat,

(iv) les ventes, licence ou autre exploitation commerciale dans le Territoire du disque intitulé « Gipsy Kings » commercialisé par Elektra/Asylum Records, que ces ventes soient intervenues avant ou pendant la durée du contrat, ou :

(v) tout produit de vos services ou talent ou de toute création créée par vous en totalité ou en partie pendant la durée du contrat, incluant sans limitation les disques enregistrés ou commercialisés pendant la durée du contrat » ;

Qu'il ressort des pièces de la procédure et de ces stipulations que sont concernés par cette convention l'enregistrement de l'album intitulé « Gipsy Kings » et celui de l'album intitulé « Mosaïque » dont monsieur B. ne prétend que de manière hypothétique qu'il est postérieur au terme du contrat alors que la société Offstage lui oppose le contrat de licence exclusive signé le 08 novembre 1988 avec la société Nonesuch pour le territoire des Etats-Unis ;

Que, sauf à contester la validité de cette convention signée par des personnes morales ayant des liens de rattachement avec les Etats-Unis, comme le suggère la société Offstage, c'est pertinemment que cette dernière en oppose les termes à monsieur B., l'article 4 sus-repris prévoyant en effet que le versement des commissions était prévu pendant la durée du contrat ou ultérieurement à la terminaison du contrat (« this agreement ») et qu'elle ne se confond pas avec les activités qui en sont la contrepartie prévues aux (iii), (iv) et (v) et limitées dans le temps ;

Qu'ainsi qu'en a décidé le tribunal, monsieur B. doit par conséquent être débouté de ses demandes de communication de pièces et de paiement provisionnel présentées à ce titre ;

2) sur la demande formée par les consorts R. et B. au titre du contrat de management du 17 décembre 2003 les liant, avec la SARL Gipsy Kings, à la société Pascal I. Enterprises Ltd (PIE) et la lettre de monsieur I. datée du 14 juin 2012 demandant que « tous les paiements et décomptes dus à la société PIE Ltd soient changés en Offstage Productions à partir de juin 2012 »

Considérant qu'alors que le tribunal les a déclarés irrecevables à agir à l'encontre de la société Offstage aux motifs que l'intitulé d'une annexe du contrat de 2003 qu'ils invoquent ne fait pas de la société Offstage une partie au contrat, qu'en outre cette annexe récapitule des frais avancés par la société PIE Ltd et qu'enfin l'instruction contenue dans la lettre du 14 juin 2012 ne saurait à elle seule établir la subrogation de la société Offstage en qualité de manager, ces artistes-interprètes font valoir que la société Offstage se présente comme subrogée dans les droits à commission de la société PIE Ltd, qu'elle perçoit les redevances en découlant, que les licenciés indiquent que la société Offstage se présente comme le manager du groupe et que les sociétés Offstage et PIE sont en réalité toutes deux dirigées et détenues par monsieur Pascal I. ;

Mais considérant qu'il n'est pas démontré que la société Offstage qui n'était pas partie à la convention conclue le 17 décembre 2003 a reçu, du fait de la subrogation conventionnelle litigieuse, autre chose que la créance dont la société PIE Ltd (non attraite en la cause) disposait et qui trouvait sa cause dans l'article 2-6 de cette convention, à savoir le remboursement de frais avancés pour un montant de près de 500.000 US $ dont il était prévu l'acquittement par imputation sur la quote-part d'avances à revenir à la SARL Gipsy Kings, (qui n'est pas davantage partie au litige) ;

Que le tribunal a justement considéré que la lettre du 14 juin 2012 dont il est question ne pouvait suffire à donner à la société Offstage la qualité de manager, d'autant que cette dernière fait état, en en justifiant, de lettres recommandées datées du 24 janvier 2007 par lesquelles la société PIE Ltd a notifié au groupe sa décision de ne pas reconduire le contrat de management à son terme, au 30 juin 2007 ; qu'il apparaît qu'indépendamment de l'application de l'article 10 de la convention selon lequel « PIE Ltd continuera toutefois à percevoir, pendant toute la durée du copyright, sa rémunération au titre des enregistrements réalisés au jour de la résiliation » les membres du groupe, citant monsieur C. et monsieur H. suivant les territoires concernés, ont pu consentir à l'exercice de l'activité de manager par d'autres personnes ;

Qu'il s'en déduit que le jugement qui les déclare irrecevables à agir en résolution ou en résiliation du contrat du 17 décembre 2003 mérite confirmation ;

V - Sur les demandes de restitution de sommes perçues de la société SoundExhange formées par les consorts R. et B. ainsi que par monsieur B. à l'encontre de la société Offstage

Considérant que les consorts R. et B. entendent voir infirmer le jugement qui les a déclarés irrecevables à agir à l'encontre de la société Offstage en restitution de sommes par elle perçues de la société américaine SoundExchange en charge de la collecte et de la redistribution des droits des artistes-interprètes et des producteurs aux Etats-Unis et poursuivent sa condamnation au paiement « de la somme de 45.617,37 US $, soit environ 42.000 euros » tandis que monsieur B. demande à la cour d'enjoindre, sous astreinte, à la société Offstage de communiquer les redditions de compte détaillées faisant apparaître les sommes indûment perçues en provenance de cette société et qui lui reviennent, réclamant en outre sa condamnation au paiement de la somme provisionnelle de 6.000 euros, à parfaire, au titre de son manque à gagner de droits voisins d'artiste ;

Considérant qu'alors que le tribunal a déclaré les consorts R. et B., qui se fondaient sur l'article 1376 du code civil , irrecevables à agir en contemplation des termes d'un courriel du 17 juin 2013 émanant de cette société de perception, du fait qu'il n'est pas rapporté la preuve d'un litige aux Etats-Unis et en se fondant sur les termes mêmes de cet article 1376 selon lequel « celui qui reçoit par erreur ou sciemment ce qui ne lui est pas dû s'oblige à le restituer à celui de qui il l'a indûment perçu », ces artistes-interprètes soutiennent que si le tribunal a justement retenu que les juridictions françaises pouvaient être saisies de ce litige, il les a, à tort, déclarés irrecevables à agir et fondent leur demande en cause d'appel sur l'enrichissement sans cause en faisant valoir que les conditions en sont ici réunies ;

Mais considérant que le tribunal a fait une exacte application de l'article 1376 précité en considérant que dans la mesure où la société Offstage a reçu les sommes en question de la société SoundExchange, c'est à cette dernière seulement qu'elle doit restitution ;

Que, s'agissant de l'action de in rem verso dont la cour se trouve désormais saisie, s'il peut être retenu un appauvrissement, un enrichissement corrélatif et une erreur, comme le font valoir les consorts R. et B., il n'en demeure pas moins que la société Offstage est fondée à se prévaloir de la subsidiarité de cette action, laquelle ne peut être admise qu'à défaut de toute autre action ouverte au demandeur et qu'en l'espèce, les consorts R. et B. disposent d'une action à l'encontre de cette société de gestion collective s'ils s'en estiment créanciers ;

Qu'il s'en déduit que leur action à l'encontre de la société Offstage ne peut prospérer, étant précisé qu'il ne s'agit pas là d'une fin de non-recevoir au sens de l'article 122 du code de procédure civile mais d'une condition inhérente à l'action, si bien qu'ils en seront déboutés ;

Considérant par ailleurs, s'agissant de la demande telle que présentée par monsieur B. qui s'est associé à la réclamation des premiers en cours de procédure devant le tribunal, que ce dernier, précisant qu'il n'est débiteur d'aucune somme à l'égard de la société Offstage qui pourrait justifier une compensation, fait valoir que cette société qui a perçu les droits revenant aux membres du groupe Gipsy Kings a nécessairement perçu la part lui revenant et qu'il lui paraît « choquant » qu'elle ne l'ait pas avisé ni de cette perception ni de cette rétention ; qu'il s'associe en cause d'appel au moyen des consorts R. et B. fondé sur l'enrichissement sans cause et, répondant au moyen d'irrecevabilité qui lui est opposé et qui tient à son défaut d'affiliation à la société SoundExchange, il juge ce raisonnement « totalement absurde » dès lors que la qualité à agir d'un artiste à l'égard de son producteur et son éventuelle inscription à une société de gestion collective n'ont aucun lien ;

Mais considérant que le moyen d'irrecevabilité invoqué par la société Offstage ne tient pas à sa propre qualité de producteur mais au défaut d'intérêt à agir de monsieur B. dès lors qu'elle relève qu'il résulte de la pièce  43 qu'il communique, s'agissant d'un courriel daté du 23 avril 2015 adressé par la société SoundExchange au conseil de monsieur B., que ce dernier n'est pas affilié à cet organisme ;

Que cette société de perception lui écrivait en effet, selon une traduction non contestée : « En vue de recevoir des royalties de nos services, vous devez en premier lieu être enregistré dans nos services. Il n'y a aucun compte dans notre système au nom de votre client C. B. . Si votre client souhaite s'affilier et réclamer des redevances pour les groupes Gipsy Kings et C. and the Gypsies », il peut le faire en ligne. (') Après un délai de 30 jours ouvrés et l'ouverture d'un compte pour monsieur C. B., il sera éligible à recevoir des royalties de nos services» ;

Que monsieur B. qui ne justifie pas davantage de son affiliation à la suite de la réception de ce message doit être considéré comme irrecevable en ses demandes telles qu'il les formule, comme jugé par le tribunal ;

VI - Sur la demande de dommages-intérêts formée par monsieur B. à l'encontre de la Selafa MJA, ès-qualités de liquidateur de la société PEM

Considérant qu'il convient de relever à titre liminaire que si monsieur B. dirige sa demande indemnitaire à l'encontre de la Selafa MJA dans le dispositif de ses dernières conclusions, comme repris ci-dessus, il conclut son argumentation tendant à voir juger que « Maître F. a « bradé » le back catalogue des Gipsy Kings » (page 43/71) en énonçant dans le corps de ses écritures (page 45/71) : « Maître L., ès-qualité de liquidateur judiciaire de la société PEM sera condamné à verser à monsieur B. la somme de 20.000 euros en réparation des fautes commises » ;

Qu'en réplique au moyen d'irrecevabilité que lui oppose la Selafa MJA qui s'en tient, conformément aux dispositions de l'article 954 du code de procédure civile , aux termes du dispositif et qui objecte que ni Maître F. ni Maître L. ne sont attraits dans la cause, il fait valoir qu'il s'agit d'une faute de Maître F. dans l'exercice de ses fonctions qui engage la responsabilité de la Selafa MJA ; qu'il reproche par ailleurs au tribunal, statuant sur la validité de la cession intervenue le 31 mars 2010, d'avoir rejeté le moyen qu'il invoquait pour la contester, à savoir le vil du prix de la cession, en jugeant qu'il n'était pas habilité à représenter l'intérêt collectif des créanciers ;

Que pour se prévaloir d'une faute du mandataire de la Selafa MJA dans l'exercice de ses fonctions, monsieur B. qui ne fonde son action en droit que sur l'article L 621-22 du code de commerce dans sa rédaction antérieure à la loi du 26 juillet 2005, aux termes duquel le mandataire judiciaire est tenu au respect des obligations légales et conventionnelles incombant au chef d'entreprise, caractérise la faute qu'il entend voir sanctionner en soutenant que ce mandataire a « tenté de vendre les enregistrements à un tiers sans l'accord des artistes-interprètes, ce qui est fautif, (et) a également lésé les intérêts des créanciers pris en leur ensemble, alors que sa mission consiste au contraire à protéger les intérêts de ce dernier » ; que, dans le dispositif de ses dernières conclusions, il demande à la cour de juger que la Selafa MJA « aurait dû émettre des réserves à l'acte de cession du 31 mars 2010 ou, à tout le moins, solliciter l'autorisation des artistes faute de clause de cession de droits et à défaut de clause autorisant le transfert des droits dans le contrat du 1er décembre 1986 » ;

Qu'il développe ce moyen pour soutenir que le contrat du 1er décembre 1986 n'emporte pas cession définitive des droits des artistes-interprètes sur les enregistrements au profit de la société PEM et caractérise le préjudice en résultant, qu'il évalue à 20.000 euros, en faisant valoir qu'il a perdu une chance d'acquérir un catalogue d'enregistrements et de vidéogrammes dont il est l'un des interprètes et que, par ailleurs, si celui-ci avait été cédé à un tiers non pas à un prix dérisoire mais pour une juste contrepartie, il aurait été désintéressé de sa créance, ce qui n'est pas le cas ;

Mais considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de l'absence de cession de droits est sans pertinence en sorte que les griefs s'y rapportant ne peuvent être retenus, de même que le préjudice résultant de la perte de chance d'acquérir le catalogue dès lors que monsieur B. qui avait déclaré sa créance au passif de la société ne peut valablement laisser entendre qu'il n'était pas informé de la procédure collective en cours ayant vocation à permettre la réalisation des actifs de la société pour désintéresser les créanciers, comme le fait valoir la Selafa MJA ;

Que, par ailleurs, outre le fait que rien ne permet d'emporter la conviction de la cour sur le caractère dérisoire du prix de cession du back catalogue des Gipsy Kings en cause, comme énoncé précédemment, la Selafa MJA fait justement valoir que cette cession a été autorisée par le juge-commissaire et que monsieur B. n'a pas cru devoir former opposition à l'ordonnance rendue le 26 mars 2009 ;

Qu'il doit, par conséquent, être débouté de sa demande indemnitaire ainsi qu'en a jugé le tribunal ;

VII - Sur la demande de communication des comptes de droits d'auteur pour les revenus générés sur le territoire américain et perçus depuis le 1er janvier 2000 que forme la société Offstage à l'encontre des consorts R. et B. ainsi que de monsieur B.

Considérant qu'au soutien ce cette demande, justifiée par la production de ses pièces 33 et 34, la société Offstage rappelle qu'en application du contrat signé par les membre du groupe Gipsy Kings, y compris monsieur B., avec la société Alive Enterprises, aux droits de laquelle est venue la société PIE Ltd par contrat du 22 novembre 1993 puis elle-même, société Offstage, la subrogeant dans son droit de créance, une commission de 15 % est due sur tous les revenus générés dans le Territoire par l'activité du groupe artistique et fait valoir qu'ils comprennent leurs droits d'auteur ;

Qu'elle expose qu'elle a récemment découvert qu'aucune lettre de direction n'avait été mise en place, notamment lors du rachat du catalogue par Sony Music ATV du catalogue éditorial de la société PEM en 2000, et qu'elle n'a pas été payée de son droit à commission sur les revenus éditoraux américains, saisissant à cette fin un conseil aux Etats-Unis ;

Qu'elle s'estime par conséquent fondée en sa demande de communication de relevés au titre de l'exploitation des oeuvres musicales reproduites sur les albums produits par PEM, en ce incluses les sommes perçues à l'occasion du rachat de son catalogue éditorial, et qu'est à son sens sans pertinence la fin de non-recevoir tirée de la prescription dès lors qu'il était expressément convenu d'une commission qui devait être payée y compris postérieurement à la date de « terminaison » dudit contrat ;

Mais considérant qu'outre le fait que cette demande porte sur les droits d'auteur dont seraient titulaires les consorts R. et B. ainsi que monsieur B. alors que l'objet du litige porte sur leurs droits voisins d'artistes-interprètes, de nature différente, il convient de considérer qu'elle n'est pas étayée par des éléments suffisamment sérieux pour qu'il puisse y être fait droit, qu'il s'agisse de la détermination des oeuvres concernées sur lesquelles les membres du groupe disposeraient de droits d'auteur qu'il appartenait à la société Offstage de spécifier afin de préciser sa demande en justice ou qu'il s'agisse du contrat de rachat du catalogue éditorial dont elle fait simplement état et qu'elle était pourtant à même de se procurer ou de chercher à le faire, les consorts R. et B. faisant à cet égard justement état du « caractère flou » de cette demande ;

Qu'il suit qu'elle en sera déboutée ;

VIII - Sur les demandes indemnitaires formées à titre reconventionnel par la Selafa MJA et par la société Offstage pour procédure abusive

Considérant que, formant appel incident et invoquant les articles 32-1 du code de procédure civile et 1382 du code civil , la Selafa MJA sollicite la condamnation de monsieur B., d'une part, les consorts R. et B. pris dans leur ensemble, d'autre part, à lui payer, le premier tout comme les seconds, une somme indemnitaire de 40.000 euros venant sanctionner un abus de procédure ; que, pour sa part, la société Offstage, sur le même fondement et au même titre, poursuit la condamnation du premier, tout comme des seconds, au versement de la somme de 20.000 euros ;

Que la Selafa MJA se prévaut du caractère « inacceptable » de l'attitude procédurale de monsieur B. qui, avec mauvaise foi et déloyauté procédurale ou, à tout le moins avec une légèreté blâmable et une « évidente inanité », persiste à maintenir des demandes infondées en contraignant les créanciers de la procédure collective à subir, ainsi qu'elle les explicite, ses errements procéduraux ; que pour ce qui est des consorts R. et B., elle estime qu'ils sont, tardivement et de conserve avec monsieur B., intervenus à l'instance dans le dessein de présenter des moyens parfaitement erronés et confus avec la plus grande déloyauté procédurale, évoquant des communications incomplètes de pièces ou la fluctuation, l'excroissance ou encore l'incohérence de leurs demandes, et fait valoir que ce comportement a nécessairement été préjudiciable aux créanciers de la société PEM ;

Que, de son côté, la société Offstage illustre le caractère abusif de l'action de monsieur B. en incriminant une mise en cause personnelle injustifiée, marquée par un revirement procédural, tout comme l'animosité envers monsieur I. ressortant de ses écritures, des prétentions sans rapport avec le désintérêt manifesté antérieurement pour le catalogue en cause et sans incidence sur une exploitation qui perdure, des allégations mensongères sur le paiement de ses redevances ou encore la multiplication des procédures et de demandes infondées, tous éléments de nature à démontrer, à son sens, la déloyauté qu'elle dénonce ; que, s'agissant des consorts R. et B., elle leur reproche une accumulation de demandes manifestement infondées ou sans fondement tangible et souvent sans considération des engagements contractuels souscrits, ceci dans un contexte traduisant lui-même un abus, ainsi que des communications de pièces incomplètes ou biffées, tous éléments lui causant un indéniable préjudice ;

Mais considérant qu'en dépit de la solution donnée au présent litige et d'un parcours procédural qui s'est complexifié, il y a lieu de considérer que monsieur B. a pu, sans faute, user de son droit d'ester en justice, comme les consorts R. et B. ont pu intervenir volontairement pour se prévaloir de droits dont ils ont pu se croire investis et présenter des revendications qu'ils ont cru légitimes, de la même façon qu'ils ont pu user des voies de recours qui leur étaient offertes ;

Que l'abus ne peut donc être retenu et que le jugement qui en dispose ainsi sera, par voie de conséquence, confirmé ;

IX ' Sur les demandes au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens

Considérant que l'équité commande de condamner monsieur Jalhoul B. à verser à la Selafa MJA une somme complémentaire de 20.000 euros et une même somme complémentaire de 20.000 euros à la société Offstage Ltd, ceci sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Qu'elle conduit, par ailleurs et sur le même fondement, à condamner solidairement les consorts R. et B. à verser à la Selafa MJA une somme complémentaire de 20.000 euros et une même somme complémentaire de 20.000 euros à la société Offstage Ltd ;

Que monsieur B. et les consorts R. et B. qui succombent seront déboutés de ce dernier chef de prétentions et condamnés aux dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

Déclare irrecevable comme nouvelle en cause d'appel la demande de monsieur Jalhoul B. dit C. formée au titre de la contrefaçon à l'encontre de la société Offstage Inc. ;

Confirme le jugement sauf en ce qu'il a déclaré les intervenants volontaires recevables en leur action en contrefaçon en tant que dirigée l'encontre de la Selafa MJA, ès-qualité, et, y ajoutant ;

Déclare monsieur Tonnino Antoine B., monsieur Maurice Diego B. et monsieur Jacques Paco B., monsieur Nicolas R., monsieur Paul R., monsieur André R., monsieur Pachaï R. et monsieur François Canut R. irrecevables à agir en contrefaçon à l'encontre de Selafa Mandataires Judiciaires Associés (MJA) représentée par Maître Frédérique L., ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Productions et Editions Claude M. ;

Déboute monsieur Tonnino Antoine B., monsieur Maurice Diego B. et monsieur Jacques Paco B., monsieur Nicolas R., monsieur Paul R., monsieur André R., monsieur Pachaï R. et monsieur François Canut R. ainsi que monsieur Jalhoul B. de leur demande fondée sur l'enrichissement sans cause ainsi que du surplus de leurs prétentions ;

Déboute la société Offstage Inc. de sa demande de communication de pièces relatives aux droits d'auteur qu'elle invoque ;

Déclare monsieur B. irrecevable en ses demandes relatives aux sommes versées par la société de perception SoundExchange, faute d'affiliation, et le déboute du surplus de ses prétentions ;

Condamne monsieur Jalhoul B. dit C. à verser à la Selafa Mandataires Judiciaires Associés (MJA) représentée par Maître Frédérique L., ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Productions et Editions Claude M., une somme complémentaire de 20.000 euros et une même somme complémentaire de 20.000 euros à la société de droit américain Offstage Inc., ceci sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne solidairement monsieur Tonnino Antoine B., monsieur Maurice Diego B. et monsieur Jacques Paco B., monsieur Nicolas R., monsieur Paul R., monsieur André R., monsieur Pachaï R. et monsieur François Canut R. à verser à la Selafa Mandataires Judiciaires Associés (MJA) représentée par Maître Frédérique L., ès-qualités de mandataire judiciaire liquidateur de la société Productions et Editions Claude M., une somme complémentaire de 20.000 euros et une même somme complémentaire de 20.000 euros à la société de droit américain Offstage Inc., ceci sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile ;

Condamne monsieur Jalhoul B. dit C., monsieur Tonnino Antoine B., monsieur Maurice Diego B. et monsieur Jacques Paco B., monsieur Nicolas R., monsieur Paul R., monsieur André R., monsieur Pachaï R. et monsieur François Canut R. aux dépens d'appel avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile.