CA Toulouse, 3e ch., 30 juin 2022, n° 21/04135
TOULOUSE
Arrêt
Confirmation
PARTIES
Demandeur :
LPBH (Selarl)
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Beneix-Bacher
Conseillers :
M. Vet, M. Maffre
Avocats :
Me Neckebroeck, Me Lecomte
Par traité du 2 novembre 2016 à effet au 1er juillet 2016, a été opérée la fusion par absorption de la SCP [W]-[V], titulaire d'un office d'huissier de justice à Moissac au sein de la Selarl [K]-[C], titulaire d'un office d'huissier de justice à [Localité 3], devenue ainsi la Selarl LPBH ([K]-[C]-[W]-[V]).
Par lettre recommandée du 13 décembre 2017, M.[W] a notifié à ses associées son retrait de la Selarl LPBH conformément aux statuts.
Par ordonnance de référé du 21 février 2019, il a été fait droit à sa demande d'expertise aux fins de fixer le prix de ses parts sociales à la date la plus proche de la perte de sa qualité d'associé. Le rapport de l'expert n'a pas été déposé.
Par ordonnance de référé du même jour, une expertise a été ordonnée aux fins de vérifier notamment la sincérité des comptes de la SCP [W]-[V] et, après vérification, de déterminer si une soulte aurait dû être versée et de rechercher des anomalies dans les comptes de la Selarl LPBH. L'expert a déposé son rapport le 20 janvier 2021.
Suite au dépôt de son rapport par l'expert, Mmes [C] et [K] ont fait assigner la Selarl LPBH, Mme [V] et M. [W] devant le tribunal judiciaire de Narbonne le 9 février 2021 aux fins :
' d'entendre déclarer nulle et dans tous les cas entendre prononcer la nullité de l'assemblée générale mixte du 29 avril 2015 de la Selarl [K]/[C],
' en tant que de besoin, entendre déclarer nulle et dans tous les cas entendre prononcer la nullité de l'assemblée mixte du 29 avril 2015 de la SCP [W]/[V] ainsi que celle extraordinaire de la Selarl [K]/[C] du 27 mars 2017 ayant en outre ratifié la fusion,
' entendre prononcer la nullité du traité de fusion signé le 2 novembre 2016,
' entendre prononcer la nullité de la fusion intervenue entre la Selarl [K]/[C] et la SCP [W]/[V], avec toutes conséquences de droit,
Ainsi,
' s'entendre condamner Mme [H] [V] et M. [Y] [W] à verser chacun à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] la somme de 45'738,58 € au titre de la soulte identifiée par M. L'expert,
' s'entendre condamner M. [Y] [W] à verser à la Selarl LPBH la somme de 10'868 €, au titre de l'abandon de son compte courant d'associé,
' s'entendre condamner Mme [H] [V] à verser à la Selarl LPBH la somme de 22'234 € au titre de l'abandon de son compte courant d'associé,
Subsidiairement
' s'entendre condamner Mme [H] [V] et M. [Y] [W] à verser chacun à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] la somme de 22'264,20 € au titre de la soulte identifiée par M. L'expert,
' s'entendre condamner in solidum Mme [H] [V] et M. [Y] [W] à verser à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] chacune la somme de 150'000 €, en réparation des préjudices personnels qu'elles ont subis de fait de leurs agissements,
' entendre prendre acte du caractère provisoire de cette dernière évaluation dont le montant définitif sera réservé,
En toute hypothèse,
' s'entendre condamner in solidum Mme [H] [V] et M. [Y] [W] aux dépens et à verser à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
Le 7 avril 2021, le tribunal judiciaire de Narbonne, estimant qu'une résolution amiable du litige était possible a ordonné une mesure de médiation.
Par requête du 25 mars 2021, la Selarl LPBH a sollicité qu'une saisie-conservatoire soit pratiquée sur les comptes bancaires de M.[W] en garantie de la somme de 22'234 € au titre du remboursement de son compte courant d'associé.
Par ordonnance du 2 avril 2021, la saisie-conservatoire sur les comptes de M.[W] auprès de la caisse des dépôts et consignations et de la Barclays Banque devenue Milleis a été autorisée à hauteur de 22'234 €.
Le 18 mai 2021, la Selarl LPBH a fait pratiquer sur les comptes détenus par M.[W] une saisie-conservatoire qui s'est révélée fructueuse.
Par acte du 14 juin 2021, M.[W] a fait assigner la Selarl LPBH devant le juge de l'exécution du tribunal judiciaire de Montauban en contestation de la saisie.
Par jugement du 14 septembre 2021, le juge de l'exécution de Montauban a :
' dit caduque la saisie-conservatoire du 18 mai 2021,
' ordonné sa mainlevée,
' condamné Selarl LPBH à payer à M.[W] 1000 € en application de l'article 700 du code de procédure civile,
' débouté M.[W] de ses autres demandes,
' condamné la Selarl LPBH aux dépens,
' rappelé que le jugement est exécutoire de plein droit.
Par déclaration du 4 octobre 2021, la Selarl LPBH a formé appel de la décision en ce qu'elle a dit caduque la saisie-conservatoire du 18 mai 2021, ordonné sa mainievée, condamné la Selarl LPBH à payer à [Y] [W] la somme de 1.000 € en application de l'article 700,1° du code de procédure civiie, condamné la Selarl LPBH aux dépens.
Par acte du 7 octobre 2021, la Selarl LPBH a fait assigné M.[W] en référé devant le premier président de la cour d'appel de Toulouse sur le fondement de l'article R 121-22 du code des procédures civiles d'exécution. Elle a été déboutée de ses demandes par ordonnance du 15 décembre 2021.
Par dernières conclusions du 3 février 2022, la Selarl LPBH demande à la cour de:
' infirmer le jugement entrepris,
Se faisant :
' débouter M. [Y] [W] de toutes ses demandes, fins, conclusions et prétentions,
' confirmer l'ordonnance du 2 avril 2021 et les mesures conservatoires pratiquées conformément à ladite ordonnance,
' condamner M. [Y] [W] à verser à la Selarl LPBH une somme de 5000 € à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,
Sur l'appel incident :
' débouter M. [Y] [W] de l'ensemble de ses demandes, fins, conclusions et prétentions
En toute hypothèse:
' condamner M.[W] à verser à la Selarl LPBH la somme de 3000 € au titre de l'article 700 du Code de procédure civile et aux entiers dépens,
' condamner M.[W] aux dépens dont distraction au profit de Maître Thomas Neckebroeck.
Par dernières conclusions du 3 janvier 2022, M. [Y] [W] demande à la cour de :
Sur appel incident de [Y] [W] :
Au principal
Vu l'article L 511-1 du CPCE
' réformer la décision du 14 septembre 2021 ce qu'elle a débouté M.[W] de sa demande de rétractation de l'ordonnance du 2 avril 2021,
Et statuant à nouveau :
' rétracter l'ordonnance du 2 avril 2021 et,
' ordonner la mainlevée pure et simple des saisis conservatoires pratiqués le 18 mai 2021 au préjudice de M.[W],
' préciser que les frais bancaires appliqués à l'occasion de ces saisies seront remboursés par la Selarl LPBH à M.[W],
Subsidiairement :
Vu les articles L 511-4 et R 511-7 du CPCE,
' confirmer la décision entreprise en ce qu'elle a dit caduque la saisie-conservatoire du 18 mai 2021,
La réformant pour le surplus :
' préciser que les frais bancaires appliqués à l'occasion de ces saisies seront remboursés par la Selarl LPBH à M.[W],
En toute hypothèse,
' condamner la Selarl LPBH à payer à M.[W] une indemnité de 2000 € pour procédures abusives de saisie,
' condamner la Selarl LPBH à payer à M.[W] une indemnité de 3.000 € en application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile et les entiers dépens.
La clôture de l'instruction est intervenue le 9 mai 2022.
La cour, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des demandes et moyens des parties, fera expressément référence au jugement entrepris ainsi qu'aux dernières conclusions déposées.
MOTIFS :
Sur la saisie-conservatoire :
Afin de respecter le cadre procédural de la saisie-conservatoire, il convient d'examiner en premier lieu la demande de rétractation de l'ordonnance du 2 avril 2021 présentée par M.[W] sur appel incident.
M. [W] fait valoir qu'à l'occasion des opérations de fusion, il n'a pas été convenu que les associés de la SCP [W]-[V] fassent abandon pur et simple de leurs comptes courants. Mais que : « les comptes courants des deux associés de l'étude de [Localité 4] seront à zéro à la date du 30 juin 2016. ». Si Mmes [K] et [C] interprètent cette disposition comme signifiant qu'ils devaient faire abandon de leur compte-courant il considère que cette disposition signifiait qu'il devait se rembourser les comptes courants de telle sorte que ceux-ci soient à zéro à la date du 30 juin. Ainsi, la créance alléguée n'est pas caractérisée en son principe. Enfin, interrogé sur ce point, l'expert a confirmé que les sommes litigieuses ne sauraient être dues par M.[W] à la structure.
Il souligne qu'il est toujours propriétaire du quart du capital de la Selarl LPHB dont il ne peut se dessaisir sans que ses associées en soit averties puisque la société doit procéder au rachat de ces titres, il existe donc un actif susceptible de garantir l'éventuelle créance de ses adversaires. En effet, la relative modicité de la créance supposée établie au regard de la valeur d'une structure exploitant une étude d'huissier ne justifie pas que l'on puisse considérer une impossibilité totale de sa part à honorer le règlement de sa dette quand bien même elle existerait.
La Selarl LPBH réplique qu'alors qu'il était à l'initiative de la fusion avec Mme [V], M.[W] a obtenu sa nomination comme mandataire de justice en mai 2016, c'est-à-dire alors qu'il discutait de la fusion des deux études sans les informer de son projet de quitter la profession d'huissier et ne peut donc prétendre que son départ serait lié à la mésentente entre les associés.
Elle rappelle qu'il résulte des investigations de l'expert que les comptes de la SCP [W]- [V] tels qu'ils ont été présentés dans le cadre de la fusion n'étaient ni réguliers, ni sincères et que le consentement de Mmes [C] et [K] a ainsi été vicié alors que M.[W] obtenait par ces manœuvres une indemnisation survalorisée de ses parts sociales. La Selarl LPBH fait valoir que le message adressé par M.[W] le 23 juillet 2018 par lequel il transmet les documents dont il avoue qu'ils avaient été demandés à plusieurs reprises démontre que ces pièces n'avaient pas été envoyées avant la fusion.
Elle rappelle que l'expert a conclu que les comptes de référence de la SCP [W]- [V] au 31 décembre 2015 et au 30 juin 2016 n'étaient pas sincères et qu'il considère que l'ampleur des corrections qu'il a dû apporter conduit à s'interroger sur la réalité du consentement de Mmes [C] et [K].
Elle relève que selon l'expert les comptes auraient dû comptabiliser des créances irrécouvrables pour un montant de 62'564,53 € ce qui aurait diminué le résultat de l'exercice et qu'il a aussi découvert que des avoirs avaient été émis en mars 2016 pour 27'030 € représentant 10 % du chiffre d'affaires correspondant probablement dans leur quasi-totalité à des factures émises en 2015. Or, seuls les gérants de la société sont habilités à traiter les créances irrécouvrables c'est-à-dire M. [W] et Mme [V]. De plus, l'expert a constaté que M. [W] et Mme [V] n'ont pas respecté la déclaration figurant au traité de fusion selon laquelle ils n'avaient pas, au cours de l'année 2016, réalisé d'investissement significatif ou modifié leur méthode de gestion, d'activité, de rémunération ou politique de distribution des dividendes qu'en effet, l'expert a révélé un changement de la politique de rémunération des associés. Elle rappelle que l'expert a conclu que la soulte devant revenir à chaque associé de l'ancienne Selarl [K]-[C] était de 45'738,58 €.
Elle considère que M.[W] avait pris l'engagement de remettre à zéro son compte courant d'associé au 30 juin 2016 et que si l'expert a refusé d'interpréter juridiquement cette expression, en tant que technicien il a fait part dans son rapport de son point de vue technique selon lequel, la volonté des parties en signant l'accord du 27 octobre 2016 était d'augmenter le montant de l'actif net au 30 juin 2016 de la SCP [W]-[V], de le rapprocher de celui du 31 décembre 2015 et de rendre l'opération plus égalitaire. Il rejoint en cela l'appréciation de Maître [I] rédacteur de l'acte qui considérait que la remise à zéro des comptes courants ne signifiait pas leur remboursement mais leur abandon. Elle relève d'ailleurs dans son assignation introductive d'instance, que Mme [V] reconnaissait que la fusion était destinée à créer une nouvelle société constituée sur un principe fondamental d'égalité parfaite des associés tant concernant leur participation en capital que dans la gestion de la société. Or, pour parvenir à cet objectif d'égalité l'expression « remise à zéro » ne pouvait pas être comprise autrement que par un abandon par les associés.
Elle fait enfin valoir que la valeur des parts de M.[W] au sein de la Selarl LPHB n'a pas encore été déterminée de sorte que rien n'établit que sa créance à ce titre lui permettrait de faire face à sa dette ce qui démontre l'existence d'une menace dans le recouvrement de sa créance.
Elle souligne que M.[W] n'a pas hésité à se faire verser directement par la compagnie AG2R et l'URSSAF le trop versé de cotisations qu'elle avait avancé pour son compte.
L'article L 511-1 du code des procédures civiles d'exécution dispose : «Toute personne dont la créance paraît fondée en son principe peut solliciter du juge l'autorisation de pratiquer une mesure conservatoire sur les biens de son débiteur, sans commandement préalable, si elle justifie de circonstances susceptibles d'en menacer le recouvrement.
La mesure conservatoire prend la forme d'une saisie conservatoire ou d'une sûreté judiciaire. ».
L'article R 512-1 du code des procédures civiles d'exécution précise qu'il incombe au créancier de prouver que les deux conditions cumulatives sont remplies.
Si l'une ou l'autre de ces conditions cumulatives fait défaut, la saisie-conservatoire ne saurait être autorisée.
Il n'appartient pas au juge de l'exécution de statuer sur la réalité de la créance ou d'en fixer le montant, mais de se prononcer sur le caractère vraisemblable d'un principe de créance.
En l'espèce, par acte de fusion-absorption signé le 2 novembre 2016, la Selarl d'huissier [K]-[C] a absorbé la SCP [W]- [V]. Ce contrat prévoyait que la réalisation de la fusion et l'augmentation de capital de la société absorbante étaient soumises à la réalisation de la condition suspensive que les comptes arrêtés au
31 décembre 2015 par les deux sociétés ne révèlent pas une différence de valeur réelle entre les deux sociétés supérieures à 50'000 €.
Mmes [C] et [K] ont obtenu par ordonnance du 21 février 2019 le prononcé d'une expertise avec mission donnée à l'expert de :
' vérifier la sincérité des comptes de la SCP [W]/[V] à l'occasion de la fusion avec la Selarl [K] [C],
' dire si les évaluations d'actif et de passif des sociétés sont correctes et si elles ont été correctement appliquées,
' dire après correction des évaluations si le rapport d'échange de titres et la rémunération des apports est correcte et à défaut proposer des corrections, déterminer si une soulte devait être versée et si oui de combien et par qui,
' vérifier s'il existe des anomalies dans les comptes de la Selarl LPBH et dans l'affirmative proposer des solutions pour les régulariser,
' déterminer le montant des comptes courants de chacun des associés au jour de l'ordonnance à intervenir en vérifiant notamment s'il a été tenu compte d'une remise à zéro au 30 juin 2016 concernant les comptes courants de Maître [W] et [V],
' déterminer si les deux SCP qui devaient fusionner ont réalisé des investissements significatifs en 2016 et si les associés durant cette année ont modifié sensiblement leur méthode de gestion ou leur niveau d'activité, rémunération ou leur politique de distribution de dividendes et déterminer ainsi si les résultats escomptés de leurs gestions en 2016 n'ont pas été sensiblement modifiées par rapport à ceux enregistrés les années précédentes,
' déterminer les raisons de la perte de chiffre d'affaires de la SCP [W]/ [V] constatée sur la situation au 30 juin 2016 et dire si le niveau d'activité résultant de cette baisse est maintenue à ce jour et en déterminer les causes dans ce cas.
Suite au dépôt de son rapport par l'expert, Mmes [C] et [K] ont fait assigner la Selarl LPBH, Mme [V] et M. [W] devant le tribunal judiciaire de Narbonne aux fins :
' d'entendre déclarer nulle et dans tous les cas entendre prononcer la nullité de l'assemblée générale mixte du 29 avril 2015 de la Selarl [K]/[C],
' en tant que de besoin, entendre déclarer nulle et dans tous les cas entendre prononcer la nullité de l'assemblée mixte du 29 avril 2015 de la SCP [W]/[V] ainsi que celle extraordinaire de la Selarl [K]/[C] du 27 mars 2017 ayant en outre ratifié la fusion,
' entendre prononcer la nullité du traité de fusion signé le 2 novembre 2016,
' entendre prononcer la nullité de la fusion intervenue entre la Selarl [K]/[C] et la SCP [W]/[V], avec toutes conséquences de droit,
' s'entendre condamner Mme [H] [V] et M. [Y] [W] à verser chacun à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] la somme de 45'738,58 € au titre de la soulte identifiée par M. L'expert,
' s'entendre condamner M. [Y] [W] à verser à la Selarl LPBH la somme de 10'868 €, au titre de l'abandon de son compte courant d'associé,
' s'entendre condamner Mme [H] [V] à verser à la Selarl LPBH la somme de 22'234 € au titre de l'abandon de son compte courant d'associé,
Subsidiairement
' s'entendre condamner Mme [H] [V] et M. [Y] [W] à verser chacun Mme [S] [C] et Mme [U] [K] la somme de 22'264,20 € au titre de la soulte identifiée par M. L'expert,
' s'entendre condamner in solidum Mme [H] [V] et M. [Y] [W] à verser à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] chacune la somme de 150'000 €, en réparation des préjudices personnels qu'elles ont subis de fait de leurs agissements,
' entendre prendre acte du caractère provisoire de cette dernière évaluation dont le montant définitif sera réservé,
En toute hypothèse,
' s'entendre condamner in solidum Mme [H] [V] et M. [Y] [W] aux dépens et à verser à Mme [S] [C] et Mme [U] [K] la somme de 10'000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile.
L'expert a retenu que les comptes annuels de la SCP [W]- [V] présentaient au 30 juin 2016 un problème de régularité et qu'il était difficile de considérer que les comptes annuels de la SCP [W]- [V] au 31 décembre 2015 puissent être sincères et réguliers. Parallèlement il relevait un risque faible d'anomalie significative sur les comptes de la Selarl [K]- [C].
Il évaluait qu'après correction au 31 décembre 2015, la Selarl [K]- [C] présentait un actif net de 480'090 € alors que la SCP [W]- [V] présentait un actif net de 297'243 €, différence de nature à permettre le jeu de la condition suspensive.
Les parties sont opposées quant à l'interprétation de l'accord du 27 octobre 2016 selon lequel « les comptes courants des deux associés de l'étude de [Localité 4] seront à zéro à la date du 30 juin » et l'expert a relevé avec justesse qu'en qualité de technicien il ne lui appartenait pas de donner une interprétation juridique de cet accord. Cependant, il confirmait que les principes comptables français ne permettent pas de comptabiliser un abandon de compte courant d'associé sans disposer de documents juridiques en bonne et due forme et que si la volonté des parties en signant l'accord du 27 octobre 2016 était d'augmenter le montant de l'actif net de la SCP [W]-[V] et de rendre l'opération plus égalitaire, la remise à zéro des comptes ne signifiait pas leur remboursement mais leur abandon.
Au regard des conclusions de l'expert et même si le juge de l'exécution n'a pas à statuer sur le fond du litige, il apparaît que la créance de la société apparaît fondée dans son principe.
La Selarl LPBH soutient que le recouvrement de sa créance est menacé.
M. [W] évoque exclusivement la valeur de ses parts au sein de la Selarl LPBH alors que cette valeur n'a pas été fixée par l'expert commis et qu'il n'est donc pas établi que le montant qui lui reviendra à ce titre lui permettra de faire face à sa dette fut-elle peu élevée compte tenu des demandes importantes formulées contre lui devant le tribunal judiciaire de Narbonne et alors qu'il n'invoque pas des ressources ou un capital dont la valeur non critiquable assureraient la possibilité de recouvrement de l'éventuelle créance de son adversaire. Dès lors, l'existence de menaces dans le recouvrement de la créance potentielle de la Selarl LPBH est caractérisée.
La Selarl LPBH fait valoir que si elle n'a pas introduit elle-même l'instance au fond pendante devant le tribunal judiciaire de Narbonne selon assignation du 9 février 2021, elle est partie à cette instance dans laquelle il a été demandé la condamnation de M.[W] à lui verser 10'868 € et considère qu'elle a ainsi accompli les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire.
M.[W] réplique que la Selarl LPBH n'a engagé aucune procédure au fond à son encontre dans le délai d'un mois ni présenté aucune demande dans le cadre de l'instance engagée par Mmes [C] et [K] .
En application des article L 511- 4 et R 511-7 du code des procédures civiles d'exécution à peine de caducité de la mesure conservatoire, le créancier doit, dans le mois qui suit l'exécution de la mesure, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire, s'il n'en possède pas.
De plus, aux termes des dispositions de l'article R 512-1 du même code, si les conditions prévues aux articles R 511-1 à R 511-8 ne sont pas réunies, le juge peut ordonner la mainlevée de la mesure à tout moment, les parties entendues ou appelées et il incombe au créancier de prouver que les conditions requises sont réunies.
Or, en l'espèce, la Selarl LPBH ne conteste pas n'avoir engagé aucune procédure aux fins d'obtention d'un titre exécutoire.
De plus, si elle a constitué avocat dans le cadre de l'instance au fond engagée le 9 février 2021, celui-ci n'a déposé aucune conclusion sollicitant la condamnation de M.[W] en paiement de sommes. Ainsi, seule l'assignation délivrée le 9 février 2021 par Mmes [C] et Mme [K] sollicite cette condamnation à lui verser la somme de «10'868 €».
Or, nul ne plaide par procureur et cette demande, présentée par un tiers ne peut être considérée comme valant introduction d'une procédure ou accomplissement des formalités nécessaires à l'obtention d'un titre exécutoire.
En conséquence, il convient de constater la caducité de la mesure conservatoire par confirmation du jugement déféré.
Sur les demandes de dommages-intérêts les remboursements de frais :
Au regard de la solution du litige, la demande de dommages-intérêts de Selarl LPBH pour procédure abusive doit être rejetée.
M.[W] fait valoir que les mesures conservatoires ont été réalisées dans un seul but vexatoire.
L'engagement d'une action en justice et sa poursuite en appel constituent un droit dont l'exercice ne dégénère en abus qu'en cas de démonstration d'une faute non caractérisée en l'espèce au regard du lourd contentieux opposant les parties au fond et toujours en cours.
La demande de dommages-intérêts présentée par M.[W] doit en conséquence être rejetée.
S'agissant de la demande de remboursement de frais, M.[W] ne produit aucune pièce établissant que des frais lui ont été facturés par sa banque il convient en conséquence de rejeter sa demande à ce titre par confirmation du jugement déféré.
Sur les demandes annexes :
Il convient de confirmer la condamnation de la Selarl LPBH aux dépens de première instance et de la condamner aux dépens l'appel.
L'équité commande d'infirmer le jugement déféré en ce qu'il a condamné M.[W] à verser 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de rejeter l'ensemble des demandes présentées à ce titre en cause d'appel,
PAR CES MOTIFS :
La cour,
Statuant dans les limites de sa saisine :
Confirme le jugement déféré sauf en ce qu'il a condamné la Selarl LPBH à verser à M. [Y] [W] 1000 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile,
Rejette les demandes de dommages-intérêts,
Rejette les demandes présentées par les parties au titre de l'article 700 du code de procédure civile en première instance et en cause d'appel,
Condamne la Selarl LPBH aux dépens.