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Décisions

Cass. soc., 12 décembre 1990, n° 87-40.596

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Cochard

Rapporteur :

M. Laurent-Atthalin

Avocat général :

M. Chauvy

Avocats :

SCP Desaché et Gatineau, Me Choucroy

Bordeaux, du 17 déc. 1986

17 décembre 1986

Sur le premier moyen :

Attendu selon l'arrêt attaqué que M. Ribeyron entré au service de la société H. de Condé en 1946 et promu directeur commercial, a été nommé en 1964 président-directeur général de la Société des cafés Marsan qui avait repris le fonds de commerce des établissements H. de Condé ; qu'en 1973 M. Ribeyron a démissionné de ses fonctions de président-directeur général et a été nommé directeur général adjoint chargé de la direction commerciale et technique ; qu'en 1976 il a été nommé administrateur et président-directeur général ; qu'en 1981 le fonds de commerce de la Société des cafés Marsan ayant été repris par les établissements Leporq, M. Ribeyron a, en 1982, démissionné de ses fonctions de mandataire et a été nommé directeur commercial ; qu'ayant été licencié en 1983, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un complément d'indemnité de licenciement calculée en tenant compte de son ancienneté globale ;

Attendu que M. Ribeyron fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande alors, selon le moyen, d'une part, que le cumul des fonctions salariées et d'un mandat social, notamment celui de président-directeur général est possible lorsque les fonctions salariées, correspondant à un emploi effectif, sont exercées dans un état de subordination à l'égard de la société ; qu'en déduisant l'impossibilité du lien de subordination des pouvoirs qui étaient donnés à M. Ribeyron en sa qualité de président-directeur général sans rechercher concrètement comme il le lui était demandé si son obligation de rendre compte de son activité au conseil d'administration, en l'absence d'une quelconque position majoritaire au sein des différentes sociétés, ne caractérisait pas l'état de subordination exigé, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1134 du Code civil, et alors, d'autre part, que lorsque l'intéressé était, avant sa nomination à un mandat social, lié à la société par un contrat de travail et qu'il a continué par la suite à recevoir son salaire, c'est à la société qu'il incombe d'établir qu'à partir de sa nomination, ses activités n'ont été que celles d'un mandataire ; que la cour d'appel qui constatait l'existence de bulletins de salaire délivrés avant comme pendant et après la disparition de M. Ribeyron aux fonctions de mandataire social et qui constatait la progression régulière de cette rémunération a inversé la charge de la preuve en déduisant de cette rétribution unique la preuve de l'absence de cumul du mandat et du contrat de travail dont il appartenait à la société de rapporter la preuve ; qu'elle a violé ce faisant les articles 1134 et 1315 du Code civil ;

Mais attendu qu'ayant relevé que le conseil d'administration avait délégué à M. Ribeyron son président tous les pouvoirs nécessaires pour assurer la direction générale de la société avec notamment les pouvoirs de nommer et révoquer tous directeurs, la cour d'appel a pu décider sans inverser la charge de la preuve que M. Ribeyron n'avait plus été uni à la société par un lien de subordination ; que le moyen n'est pas fondé ;

Mais sur le second moyen :

Vu les articles 1134 du Code civil et L. 121-1 du Code du travail ;

Attendu que pour débouter M. Ribeyron de sa demande, la cour d'appel a retenu que son contrat de travail avait été absorbé par le mandat social, que les parties n'avaient jamais convenu de la survivance du contrat de travail, et qu'en 1982 M. Ribeyron n'avait fait aucune réserve lors de la conclusion d'un nouveau contrat de travail à de nouvelles conditions par rapport au contrat initial ;

Qu'en statuant ainsi alors que le contrat de travail se trouvait, en l'absence de convention contraire, suspendu pendant le temps d'exercice du mandat, peu important qu'il ait été modifié dans l'un de ses éléments substantiels lors de la cessation du mandat, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, l'arrêt rendu le 17 décembre 1986, entre les parties, par la cour d'appel de Bordeaux ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Agen.