Cass. com., 6 mars 2019, n° 17-26.946
COUR DE CASSATION
Arrêt
Cassation
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Rémery
Avocats :
Me Le Prado, SARL Cabinet Briard
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que F... M..., ancien salarié des Chantiers Navals de La Ciotat, devenus la société Chantier du Nord et de la Méditerranée (la société NORMED), est décédé le [...] , en laissant pour lui succéder Mmes S... M..., R... M..., T... M..., P... N... et O... Y... (les consorts M...) ; que les consorts M... ont assigné M. W..., en qualité de liquidateur judiciaire de la société NORMED, en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur et en indemnisation de leurs préjudices, après avoir mis en cause l'Etablissement national des invalides de la Marine (l'ENIM), organisme de sécurité sociale auquel était rattaché le défunt ; que par un jugement du 1er avril 2015, un tribunal des affaires de sécurité sociale a reconnu la faute inexcusable de la société NORMED et alloué des indemnités aux consorts M..., en disant que l'ENIM devrait faire l'avance de ces sommes ; que ce dernier a relevé appel dudit jugement et que la liquidation judiciaire de la société NORMED ayant été clôturée, les consorts M... ont obtenu la désignation de M. W... en qualité de mandataire ad hoc chargé de représenter la société NORMED dans le cadre de la procédure, par une ordonnance du 30 mars 2017 ; que M. L... M... et Mme E... M..., parents de F... M..., sont intervenus volontairement à l'instance d'appel, ainsi que le Fonds d'indemnisation des victimes de l'amiante (le FIVA) qui a indemnisé les consorts M... ; que devant la cour d'appel, le FIVA a demandé la condamnation de l'ENIM à lui payer les indemnisations versées aux consorts M..., en tant que subrogé dans les droits de ces derniers, et l'ENIM a demandé la condamnation de la société NORMED à lui rembourser les sommes dont il devait faire l'avance ;
Sur le moyen unique, pris en ses troisième et quatrième branches :
Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen, qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Mais sur le moyen, pris en sa première branche :
Vu l'article 12 du code de procédure civile ;
Attendu que pour rejeter la demande de condamnation formée par l'ENIM contre la société NORMED, représentée par son administrateur ad hoc, l'arrêt retient que la liquidation judiciaire de cette dernière ayant été clôturée, il ne peut être prononcé de condamnation contre elle ;
Qu'en statuant ainsi, sans préciser sur le fondement de quel texte elle se prononçait, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur le moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article L. 622-32 ancien du code de commerce ou, s'il est applicable en fonction de la date, non précisée, du jugement d'ouverture de la procédure collective, l'article L. 643-11 dudit code, dans sa rédaction issue de la loi du 26 juillet 2005 de sauvegarde des entreprises ;
Attendu que, pour statuer comme il fait, l'arrêt retient que la liquidation judiciaire de la société NORMED ayant été clôturée, il ne peut être prononcé de condamnation contre elle ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'abord, que le principe de non-recouvrement du droit de poursuite individuelle des créanciers après la clôture de la liquidation judiciaire du débiteur n'est applicable qu'au cas de clôture pour insuffisance d'actif, ensuite, que, même dans ce cas, ce principe est assorti d'exceptions prévues par les textes précités, la cour d'appel, qui n'a précisé ni la date de clôture de la liquidation judiciaire de la société NORMED, ni le cas de clôture de cette procédure, a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le dernier grief :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de condamnation formée par l'Etablissement national des invalides de la Marine contre la société Chantier du Nord et de la Méditerranée (la société NORMED) représentée par M. W... en qualité de mandataire ad hoc, l'arrêt rendu le 25 août 2017, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée.