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Décisions

Cass. 2e civ., 26 octobre 2006, n° 05-19.194

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Loriferne

Rapporteur :

M. Vigneau

Avocat général :

M. Benmakhlouf

Avocats :

SCP Piwnica et Molinié, SCP Thomas-Raquin et Bénabent

Paris, du 23 juin 2005

23 juin 2005

Sur les moyens réunis :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 23 juin 2005), que l'établissement public Voies navigables de France (l'établissement) a délivré treize titres exécutoires à l'encontre de la société Viatel Opérations (la société) pour le recouvrement de redevances d'occupation du domaine public fluvial ; que la société ayant contesté ces titres devant un tribunal administratif, l'établissement a saisi un juge de l'exécution qui l'a autorisé à faire pratiquer des mesures conservatoires ;

que la société a demandé au juge de l'exécution la rétractation de son autorisation et la mainlevée des mesures conservatoires ;

Attendu que la société fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté l'exception d'incompétence du juge de l'exécution, alors, selon le moyen :

1 / que l'article L. 311-12-1 du code de l'organisation judiciaire dispose que "le juge de l'exécution connaît des difficultés relatives aux titres exécutoires et des contestations qui s'élèvent à l'occasion de l'exécution forcée, même si elles portent sur le fond du droit à moins qu'elles n'échappent à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire" et que "dans les mêmes conditions, il autorise les mesures conservatoires et connaît des difficultés à leur mise en oeuvre" ; qu'après avoir constaté que le litige opposant la société à l'établissement relevait de la seule compétence du tribunal administratif, la cour d'appel ne pouvait déclarer le juge de l'exécution compétent pour connaître de la saisie conservatoire demandée par l'établissement dans le cadre de ce litige sans méconnaître les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article L. 311-12-1 du code de l'organisation judiciaire ;

2 / que l'article 6 du décret n° 92-1369 du 29 décembre 1992 dispose que les oppositions aux titres exécutoires formées devant le juge administratif "ont pour effet de suspendre le recouvrement" ; que le prétendu débiteur conserve ainsi la totale disponibilité de son patrimoine ;

qu'en déclarant recevable la demande de mesures conservatoires formées à l'encontre de la société, après avoir relevé que celle-ci avait formé opposition aux titres exécutoires émis par l'établissement, bien que de telles mesures aient pour effet de rendre indisponibles les biens de la société et, ainsi, de priver de toute efficacité la suspension prévue par l'article 6 précité, la cour d'appel a entaché sa décision d'une violation de ce texte ;

Mais attendu que les dispositions des articles 67 de la loi du 9 juillet 1991 et 210 du décret du 31 juillet 1992, relatives aux mesures conservatoires, sont d'application générale et qu'il n'est pas nécessaire que le créancier dispose d'un titre exécutoire, mais qu'il doit seulement justifier d'une créance paraissant fondée en son principe ; qu'il s'ensuit qu'à défaut d'une disposition expresse excluant l'application des articles précités en matière de recouvrement de créance dont le contentieux échappe à la compétence des juridictions de l'ordre judiciaire, la cour d'appel, qui ne s'est pas prononcée sur le fond du droit et n'a pas méconnu l'effet suspensif attaché à l'opposition formée contre les titres exécutoires, a pu statuer comme elle l'a fait ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.