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Décisions

CRE, cordis, 12 juin 2013, n° 214-38-11

COMMISSION DE RÉGULATION DE L'ÉNERGIE

Arrêt

sur le différend qui oppose la société CATHEDRALE à la société Électricité Réseau Distribution France (ERDF) relatif aux conditions de raccordement d’une installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution d’électricité

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

Mme Liebert-Champagne

Rapporteur :

M. Astier

Avocats :

Me Aaron, Me Guenaire

CRE n° 214-38-11

11 juin 2013

Le comité de règlement des différends et des sanctions,

Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 8 juillet 2011, sous le numéro 214-38-11, présentée par la société CATHEDRALE, société civile immobilière, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nîmes sous le numéro 381 793 306, dont le siège social est situé 2 place de l’horloge, 30 000 NIMES, représentée par son gérant en exercice, Monsieur René BRAMONT, ayant pour avocat la société civile professionnelle CGCB et Associés, 8, place du marché aux fleurs, 34 000 Montpellier.

La société CATHEDRALE a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie du différend qui l’oppose à la société ERDF, sur les conditions de raccordement au réseau public de distribution d’électricité de son projet de centrale photovoltaïque.

Il ressort des pièces du dossier que la société CATHEDRALE développe un projet d’installation photovoltaïque d’une puissance de 110 kW, situé sur le territoire de la commune de NIMES (Gard). La société ERDF est le gestionnaire du réseau public de distribution d’électricité sur le territoire de cette commune.

Le 26 août 2010, la société CATHEDRALE, par l’intermédiaire de la société KILOWALT, a adressé une demande à la société ERDF pour le raccordement de son installation de production d’électricité.

Le 30 septembre 2010, la société ERDF a accusé réception de cette demande et indiqué à la société CATHEDRALE qu’une proposition technique et financière de raccordement lui serait adressée dans un délai de trois mois, soit le 26 novembre 2010 au plus tard. 

Le 3 décembre 2010, la société CATHEDRALE a reçu une proposition technique et financière de la part de la société ERDF.

Le même jour, la société KILOWALT a retourné signé un exemplaire de la proposition technique et financière accompagné d’un chèque d’acompte.

Le 11 janvier 2011, la société ERDF a reçu de la société CATHEDRALE un recours gracieux ainsi qu’une mise en demeure sollicitant la délivrance du contrat de raccordement et la transmission de sa demande de contrat d’obligation d’achat à la société EDF.

Le 12 janvier 2011, la société ERDF a indiqué à la société CATHEDRALE que son recours était en cours de traitement.

Le 28 février 2011, la société ERDF a informé la société KILOWALT que la demande de raccordement de la société CATHEDRALE était concernée par les dispositions du décret du 9 décembre 2010.

Le 8 mars 2011, la société ERDF a retourné à la société CATHEDRALE son chèque d’acompte.

Estimant que les conditions de raccordement au réseau public de distribution des installations de production n’étaient pas satisfaisantes, la société CATHEDRALE a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions d’une demande de règlement du différend qui les oppose à la société ERDF.

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Dans ses observations, la société CATHEDRALE expose que la société ERDF ne pouvait arrêter le traitement de sa demande de raccordement sur le fondement du décret du 9 décembre 2010.

Elle estime que les dispositions de ce décret ne sont pas applicables aux demandes de raccordement dès lors que le raccordement au réseau public d’électricité et l’obligation d’achat sont deux choses distinctes qui n‘ont été regroupées par aucun texte législatif ou réglementaire.

La société CATHEDRALE ajoute que la société ERDF n’était pas compétente pour décider de la suspension de la conclusion d’un contrat d’achat et que seule la société EDF pouvait prendre une telle décision.

Elle fait valoir en outre que la société ERDF avait l’obligation d’écarter le décret du 9 décembre 2010 en raison de son illégalité tenant notamment à son caractère rétroactif et à sa méconnaissance du principe de sécurité juridique et de confiance légitime. 

La société CATHEDRALE soutient également que le retard de la société ERDF dans la délivrance d’une proposition technique et financière de raccordement a eu pour effet d’empêcher la société CATHEDRALE de bénéficier de la dérogation prévue par les dispositions de l’article 3 du décret du 9 décembre 2010.

Elle estime enfin, que l’obligation de transmettre une proposition technique et financière, dans un délai de trois mois, s’imposait à la société ERDF dès lors que ce délai figure dans sa procédure de traitement des demandes de raccordement ainsi que dans la délibération de la CRE du 11 juin 2009.

La société CATHEDRALE demande en conséquence au comité de règlement des différends et des sanctions :

- de constater que la décision d’ERDF de ne pas poursuivre le traitement de sa demande de raccordement est irrégulière ;

- de constater que la société ERDF a mis plus de trois mois pour délivrer une proposition technique et financière en méconnaissance de ses obligations ;

- d’enjoindre à ERDF, en écartant l’application du décret du 9 décembre 2010, de :

  • réintégrer la demande de raccordement de la société dans la file d’attente à la date du 26 aout 2010, date de réception de sa demande complète, sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la date de notification à ERDF de la décision à intervenir ;
  • reprendre l’instruction de sa demande en :

          √ lui délivrant une convention de raccordement et d’exploitation dans un délai de 15 jours et sous astreinte de 500 € par jour de retard à compter de la date de notification à ERDF de la décision à intervenir ;

          √ transmettant sa demande de contrat d’obligation d’achat à EDF AOA sans délai une fois la convention de raccordement et d’exploitation acceptée, afin qu’elle puisse bénéficier d’un contrat d’obligation d’achat d’électricité aux conditions tarifaires en vigueur au jour de la réception de sa demande complète. 

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Vu la décision du 2 septembre 2011 par laquelle le comité de règlement des différends et des sanctions a suspendu son instruction jusqu’à l’intervention de la décision du Conseil d’État sur les requêtes tendant à l’annulation du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010.

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Vu la lettre du directeur général du 2 septembre 2012 par laquelle il est demandé à la société ERDF de présenter ses observations.

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Vu les observations en défense, enregistrées le 27 septembre 2012, présentées par la société Électricité Réseau Distribution France (ERDF), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 444 608 442, dont le siège social est situé 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris La Défense Cedex, représentée par sa Présidente du directoire, Madame Michèle BELLON, et ayant pour avocats, Maître Michel GUÉNAIRE et Maître Sylvain BERGÈS, cabinet Gide Loyrette  Nouel, 26, cours Albert 1er, 75008 Paris.

La société ERDF considère que le comité n’est pas compétent pour statuer sur les demandes de la société CATHEDRALE d’une part, en ce qu’elles ne concernent pas l’accès aux réseaux mais la reconnaissance de la validité d’une demande de contrat d’achat et, d’autre part, en ce qu’elles visent à faire échec à l’application des dispositions du décret n°2010-1510 du 9 décembre 2010. 

Elle ajoute que le comité est incompétent pour assortir ses décisions d’astreintes.

La société ERDF considère qu’elle était tenue d’appliquer le décret du 9 décembre 2010 et, par conséquent, de suspendre l’instruction des dossiers n’ayant pas déjà fait l’objet d’une demande de contrat d’achat, et des dossiers pour lesquels aucune proposition technique et financière n’avait été acceptée à la date du 2 décembre 2010. 

Elle considère que, conformément à la décision du Conseil d’Etat, du 16 novembre 2011, Société Ciel et Terre et autres, le décret du 9 décembre 2010 ne méconnait pas le principe de non-rétroactivité des actes administratifs, et qu’il peut légalement prévoir la suspension de la conclusion des contrats d’achat.

La société ERDF soutient également que la décision du Conseil d’Etat a confirmé que la suspension de l’obligation d’achat prévue par le décret du 9 décembre 2010 est justifiée au regard des objectifs de programmation pluriannuelle, et que ce décret, conforme au droit d’information et de participation du public, respecte le principe de confiance légitime, et que la nécessité d’une nouvelle demande de raccordement à l’issue de la période de suspension est légale.

La société ERDF prétend que le comité n’est pas habilité à constater qu’elle aurait méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement, dès lors qu’aucun différend n’existe concernant la délivrance d’une proposition technique et financière dans un délai donné à compter de la date de qualification de la demande de raccordement. 

Elle estime, en tout état de cause, que le délai avancé par le producteur pour la délivrance d’une proposition technique et financière ne lui est pas opposable dès lors notamment, que la CRE n’était pas compétente pour imposer un délai pour la délivrance d’une proposition technique et financière et que ce délai est sans fondement juridique puisqu’il a été déterminé par une délibération illégale.

La société ERDF demande donc au comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie de :

A titre principal, 

- Déclarer irrecevable la demande de CATHEDRALE ;

- Se déclarer incompétent pour statuer sur ses demandes d’astreintes.

A titre subsidiaire, 

- Constater que la société ERDF devait respecter les dispositions du décret n°2010-1510 du 9 décembre 2010 ;

- Se déclarer incompétent pour constater que la société ERDF a méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement ;

- Constater que le délai pour délivrer une proposition technique et financière n’est pas opposable à la société ERDF ;

- Constater que la société ERDF a été confrontée à une situation exceptionnelle qui explique les difficultés rencontrées par elle dans la gestion des demandes de raccordement.

En conséquence, 

- Rejeter l’ensemble des demandes de la société CATHEDRALE.

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Vu les observations en réplique, enregistrées le 23 octobre 2012, présentées par la société CATHEDRALE

La société CATHEDRALE considère que sa demande de règlement de différend est recevable dès lors qu’il existe un différend entre les deux sociétés concernant cette demande de raccordement.

Elle ajoute que si sa demande de règlement de différend s’inscrit dans un processus global dont la finalité est la conclusion d’un contrat d’achat d’électricité, son mémoire de saisine tend à faire reconnaître une carence dans les conditions d’instruction de sa demande de raccordement et ne peut être confondue avec une éventuelle demande de contrat d’achat gérée par EDF AOA et non ERDF.

Concernant l’incompétence du comité de règlement des différends et des sanctions pour écarter les dispositions du décret du 9 décembre 2010, la société CATHEDRALE rappelle que lors de l’introduction de sa demande de règlement de différend le 8 juillet 2011 le Conseil d’Etat n’avait pas encore statué sur la légalité du décret du 9 décembre 2010, lequel paraissait manifestement illégal et qu’au surplus il appartient au comité de règlement des différends et des sanctions de vérifier que la société ERDF a fait une correcte application dudit décret. 

En outre, la société CATHEDRALE rappelle que, conformément aux dispositions de l’article 38 de la loi du 10 février 2000 codifié par l’ordonnance n° 2011-504 du 9 mai 2011 à l’article L. 134-20 du code de l’énergie, la décision du comité de règlement des différends et des sanctions peut être assortie d’astreintes.

La société CATHEDRALE estime que le décret du 9 décembre 2010 n’est pas applicable aux demandes de raccordement au réseau public d’électricité d’une installation photovoltaïque dès lors que ce texte a pour seul et unique objet de suspendre l’obligation de conclure un contrat d’achat d’électricité produite et non d’obliger la société ERDF à ne pas poursuivre le traitement des demandes de raccordement.

La société CATHEDRALE précise que la société ERDF n’est pas compétente pour décider de la suspension de la conclusion d’un contrat d’achat.

La société CATHEDRALE ajoute que la décision de la société ERDF s’appuie sur le décret du 9 décembre 2010 suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil qui est manifestement illégal pour les raisons suivantes :

- ledit décret est illégal en raison de son caractère rétroactif ;

- en ce qu’il prévoit une suspension de la conclusion des contrats ;

- en tant qu’il n’est pas justifié ;

- en raison du vice de procédure dont il est entaché ;

- du fait de la méconnaissance du principe de sécurité juridique et de confiance légitime ;

- en tant qu’il oblige les candidats à déposer une demande nouvelle à l’issue de la période de suspension des demandes ;

- en tant qu’il méconnait le principe d’égalité entre les porteurs de projet.

Enfin, la société CATHEDRALE considère que la société ERDF n’a pas respecté le délai de trois mois pour lui adresser sa proposition de proposition technique et financière.

A cet égard, la société CATHEDRALE précise que, contrairement à ce qu’affirme la société ERDF, le comité de règlement des différends et des sanctions est compétent pour constater que la société ERDF a méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement.

La société CATHEDRALE considère que l’absence de sanction du dépassement du délai de trois mois pour les installations de production d’une puissance installée supérieure à 3kVA ne dispense pas ERDF de respecter ledit délai et ne fait pas obstacle à l’exercice par le comité de règlement des différends et des sanctions de ses compétences.

La société CATHEDRALE soutient que les conditions pour faire droit à l’exception d’illégalité soulevée par la société ERDF concernant la délibération de la Commission de régulation de l’énergie du 11 juin 2009 ne sont pas remplies en l’espèce. La société CATHEDRALE affirme qu’en tout état de cause, il entrait bien dans les compétences de la Commission de régulation de l’énergie de fixer un délai d’instruction des demandes de raccordement afin de permettre le traitement objectif, transparent et non discriminatoire de ces demandes et des conditions correctes d’accès aux réseaux.

La société CATHEDRALE considère que, quand bien même le respect du délai de trois mois n’est pas assorti de sanction, la société ERDF est tenue de respecter la procédure qu’elle s’est elle-même fixée et qu’en cas de non-respect, il entre dans les compétences du comité de règlement des différends et des sanctions de constater ce manquement.

Enfin, la société CATHEDRALE soutient que les conditions de la force majeure ne sont pas remplies en l’espèce et qu’à supposer la force majeure démontrée, elle ne saurait supporter les conséquences d’évènements qui ne lui sont pas imposables.

Dès lors, la société CATHEDRALE demande au comité de règlement des différends et des sanctions de :

- constater que la décision d’ERDF de ne pas poursuivre le traitement de la demande de raccordement de la SCI CATHEDRALE est irrégulière ;

- constater qu’ERDF a mis plus de trois mois pour adresser une PTF à la SARL KILOWALT mandataire de la SCI CATHEDRALE en méconnaissance de ses obligations et en particulier de sa procédure de traitement des demandes de raccordement ;

- enjoindre à ERDF en écartant l’application du décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010 suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil de :

  • réintégrer la demande de raccordement de la société CATHEDRALE dans la file d’attente à la date du 26 août 2010, date de réception de sa demande complète, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la date de notification à ERDF de la décision à intervenir ;
  • reprendre l’instruction de sa demande en :

          √ lui adressant la convention de raccordement et d’exploitation, dans un délai de quinze jours et sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la date de notification à ERDF de la décision à intervenir ;

          √ transmettant sa demande de contrat d’obligation d’achat à EDF AOA sans délai une fois la convention de raccordement et d’exploitation acceptée, afin qu’elle puisse bénéficier d’un contrat d’obligation d’achat d’électricité aux conditions tarifaires en vigueur au jour de la réception de sa demande complète.

- rejeter l’ensemble des demandes d’ERDF.

Vu les observations en duplique, enregistrées le 27 décembre 2012, présentées par la société ERDF.

La société ERDF estime que le comité n’est pas habilité à constater une méconnaissance de sa procédure de traitement des demandes de raccordement dès lors qu’il n’existe pas de différend à ce sujet. Elle rappelle que le comité ne peut formuler un constat sans que celui-ci n’ait pour objet ou pour effet de régler un différend.

La société ERDF ajoute que le comité n’est pas habilité à constater qu’elle aurait commis une faute et ainsi préempter la question de son éventuelle responsabilité. Elle considère donc que le comité ne peut qualifier de fautif son comportement en reconnaissant le caractère fondé de l’action susceptible d’être engagée par la société devant les juridictions compétentes. 

La société ERDF persiste dans ses précédentes conclusions.

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Vu la note en délibéré produite le 4 juin 2013 par la société CATHEDRALE.

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de l’énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;

Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié, relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l’énergie ;

Vu le décret n° 2010-1510 du 9 décembre 2010, suspendant l’obligation d’achat de l’électricité produite par certaines installations utilisant l’énergie radiative du soleil ;

Vu la décision du 20 février 2009, relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie ;

Vu la décision du 13 juillet 2011 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie, relative à la désignation d’un rapporteur et d’un rapporteur adjoint pour l’instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 214-38-11 ;

Vu la décision du 6 février 2013 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l’énergie, relative à la désignation d’un rapporteur et d’un rapporteur adjoint pour l’instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 214-38-11 ; 

Vu la décision numéro 344972 et autres du 16 novembre 2011 du Conseil d’État, société Ciel et Terres et autres ;

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Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique, qui s’est tenue le 29 mai 2013, du comité de règlement des différends et des sanctions, composé de Madame Monique LIEBERTCHAMPAGNE, président, Madame Sylvie MANDEL, Monsieur Roland PEYLET et Monsieur Christian PERS, membres, en présence de :

Monsieur Jérémie ASTIER rapporteur et Madame Maud BRASSART rapporteur adjoint,

Maître Michel AARON assistant la société CATHEDRALE,

Les représentants de la société ERDF, assistés de Maître Michel GUENAIRE et de Maître Sylvain BERGES.

Après avoir entendu :

- le rapport de Monsieur Jérémie ASTIER, présentant les moyens et les conclusions des parties ;

- les observations de Maître Michel AARON ;

- les observations de Maître Michel GUENAIRE ; 

Aucun report de séance n’ayant été sollicité ;

Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.

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Sur la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions

Aux termes des dispositions de l’article L. 134-19 du code de l’énergie :

« Le comité de règlement des différends et des sanctions peut être saisi en cas de différend : 

1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité ; 

(…)

Ces différends portent sur l'accès auxdits réseaux, ouvrages et installations ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux articles L. 111-91 à L. 111-94, L. 321-11 et L. 321-12, ou des contrats relatifs aux opérations de transport et de stockage géologique de dioxyde de carbone mentionnés à l'article L. 229-49 du code de l'environnement. 

La saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties ».

Il ressort des pièces du dossier que, le 5 août 2010, la société CATHEDRALE a adressé une demande à la société ERDF pour le raccordement de son installation de production d’électricité.

La société CATHEDRALE demande notamment au comité de règlement des différends et des sanctions d’enjoindre à la société ERDF la réintégration de sa demande de raccordement dans la file d’attente à la date du 26 août 2010 et la reprise de l’instruction de sa demande de raccordement.

Ainsi, contrairement à ce que soutient la société ERDF, la demande de la société CATHEDRALE portant sur la réintégration de sa demande dans la file d’attente et sur la reprise de l’instruction de sa demande de raccordement, il existe donc bien un différend lié à l’accès au réseau entre, d’une part, la société CATHEDRALE et, d’autre part, la société ERDF, qui relève de la compétence du  comité de règlement des différends et des sanctions.

Sur la méconnaissance par la société ERDF de sa procédure de traitement des demandes de raccordement

La société CATHEDRALE demande notamment au comité de règlement des différends et des sanctions de constater que la société ERDF a mis plus de trois mois pour lui délivrer une proposition technique et financière et ce en méconnaissance de ses obligations.

L’article 8.2.1 de la procédure de traitement des demandes de raccordement individuel en BT de puissance supérieure à 36 kV et en HTA, au réseau public de distribution géré par ERDF prévoit qu’ « à compter de la date de qualification de la demande de raccordement, le délai de transmission au demandeur de l’offre de raccordement ne dépassera pas le délai défini dans le barème de raccordement pour le type d’installation concernée. Ce délai n’excèdera pas trois mois quel que soit le domaine de tension de raccordement ».

Il ressort des pièces du dossier que la demande de raccordement de la société CATHEDRALE devait être réputée complète à la date du 26 août 2010 dès lors que la société  ERDF n’avait pas demandé à la société CATHEDRALE de compléter son dossier et que cette dernière a reçu une proposition technique et financière le 3 décembre 2010.

Ainsi, la société ERDF n’a pas respecté le délai de trois mois pour l’instruction de la demande de raccordement de la société CATHEDRALE, délai qu’il n’appartient pas au comité de règlement des différends et des sanctions d’écarter en l’absence d’illégalité manifeste.

Dans ces conditions, la société ERDF doit être regardée comme ayant méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement.

Sur l’application du décret du 9 décembre 2010

La société CATHEDRALE demande au comité de règlement des différends et des sanctions d’enjoindre à ERDF, en écartant l’application du décret du 9 décembre 2010, de réintégrer la demande de raccordement de la société dans la file d’attente à la date du 26 aout 2010,  et de reprendre l’instruction de sa demande en lui adressant la convention de raccordement et d’exploitation dans un délai  de quinze jours à compter de la date de notification à la société ERDF de la décision du comité de règlement des différends et des sanctions à intervenir.

L’article 1er du décret du 9 décembre 2010 dispose que l’« obligation de conclure un contrat d’achat de l’électricité produite par les installations mentionnées au 3° de l’article 2 du décret du 6 décembre 2000 susvisé est suspendue pour une durée de trois mois courant à compter de l’entrée en vigueur du présent décret. Aucune nouvelle demande ne peut être déposée durant la période de suspension ».

L’article 3 du même décret du 9 décembre 2010, prévoit que les « dispositions de l’article 1er ne s’appliquent pas aux installations de production d’électricité issue de l’énergie radiative du soleil dont le producteur a notifié au gestionnaire de réseau, avant le 2 décembre 2010, son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement au réseau ».

L’article 5 dudit décret dispose qu’« à l’issue de la période de suspension mentionnée à l’article 1er, les demandes suspendues devront faire l’objet d’une nouvelle demande complète de raccordement au réseau pour bénéficier d’un contrat d’obligation d’achat ».

La légalité dudit décret du 9 décembre 2010 n’a pas été remise en cause par la décision du 16 novembre 2011 du Conseil d’Etat, Ciel et Terre et autres.

Il n’appartient pas au Comité de règlement des différends et des sanctions d’écarter l’application dudit décret, sauf illégalité manifeste.

La société CATHEDRALE n’ayant pas été en mesure de notifier son acceptation de la proposition technique et financière de raccordement avant le 2 décembre 2010, les dispositions de l’article 5 du décret du 9 décembre 2010 lui sont applicables. Il lui appartient, si elle souhaite raccorder son installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution, en vue de bénéficier de l’obligation d’achat, de déposer une nouvelle demande complète de raccordement, conformément à ce même article.

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DÉCIDE : 

Article 1er. – La société ERDF a méconnu sa procédure de traitement des demandes de raccordement.

Article 2. – Le surplus des demandes de la société CATHEDRALE est rejeté.

Article 3. – La présente décision sera notifiée aux sociétés DOMAINE DE GONET et à la société Électricité Réseau Distribution France. Elle sera publiée au Journal Officiel de la République française.