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Décisions

Cass. 2e civ., 4 mars 2021, n° 19-24.859

COUR DE CASSATION

Arrêt

Cassation

Cass. 2e civ. n° 19-24.859

3 mars 2021

1. Il est donné acte à la société Les Hauts de L'Estaque du désistement partiel de son pourvoi en ce qu'il est dirigé contre la société Loximat, la société Allianz Iard, la société Aviva assurances, la société QBE Insurance Europe Limited, la société Etudes eau environnement géologie géotechnique sol structure, la société Bureau Veritas construction, la société Ingerop conseil et ingénierie, la société JMC, la Société de travaux Alpes Méditerranée, la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics.

Faits et procédure

2. Selon l'arrêt attaqué (Aix-En-Provence, 26 septembre 2019) et les productions, la société Erilia a acquis de la société Les Hauts de L'Estaque (la SCI) un programme immobilier en l'état futur d'achèvement ayant fait l'objet d'une réception avec réserves.

3. A la suite de plusieurs sinistres affectant les ouvrages, la société Erilia a fait assigner devant un tribunal de grande instance la SCI en vue de la voir condamner à lever les réserves et réparer les désordres constatés, en même temps que la Société de travaux Alpes Méditerranée (la société STAM), titulaire d'un lot "gros oeuvre".

4. La SCI a appelé en la cause l'ensemble des intervenants à l'opération, notamment les sociétés Ingerop conseil et ingénierie (la société Ingerop) maître d'oeuvre et son assureur, Aviva assurances, et les sociétés Loximat, SMABTP, QBE Insurance Europe Limited, Allianz Iard.

5. Un jugement en date du 4 décembre 2017 a, notamment, débouté la société Erilia de ses demandes à l'encontre de la société STAM, condamné la SCI à lui payer certaines sommes, à reprendre les malfaçons et à procéder à des travaux au titre de l'un des sinistres, condamné la société Allianz Iard à payer à la SCI une somme au titre du coût desdits travaux et débouté cette dernière de sa demande en garantie contre la société STAM. Il a, en outre, condamné les sociétés Ingerop et Loximat à payer chacune une somme à la SCI. Le tribunal a, par ailleurs, condamné la SCI à exécuter des travaux portant sur des bassins de rétention, l'a déboutée de sa demande envers la compagnie Allianz Iard à ce titre, a condamné les sociétés Ingerop et Loximat à payer une somme chacune à la SCI, a débouté la société Erilia de sa demande de dommages-intérêts formée contre la SCI, et a condamné cette dernière à payer à la société Ingerop une somme au titre de factures impayées, et statué sur les dépens et frais irrépétibles.

6. Par actes du 2 janvier 2018, la société STAM a signifié ce jugement à la SCI et à la société Erilia.

7. La SCI a interjeté appel à l'encontre de toutes les sociétés, par déclaration du 5 février 2018 suivie d'une autre le lendemain intimant les mêmes parties.

8. Un conseiller de la mise en état a fait droit aux conclusions de la société STAM visant à déclarer irrecevable l'appel de la SCI, par une ordonnance que cette dernière a déférée à la cour d'appel.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

9. La SCI Les Hauts de L'Estaque fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables l'appel principal interjeté le 5 février 2018 à l'encontre de la SAS Société de travaux Alpes Méditerranée, dite STAM, et de la SA d'HLM Erilia, enregistré sous le n° 18/2037, et, par voie de conséquence, l'appel principal de la SCI Les Hauts de L'Estaque interjeté à l'encontre de ces mêmes parties le 6 février 2018, enregistré sous le n° 18/2036, alors « qu'en l'absence de toute solidarité ou indivisibilité, la signification faite par une partie à une autre n'a d'effet qu'entre elles ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a retenu qu'il n'existait aucune indivisibilité entre les parties ; qu'elle a également constaté qu'il ressortait de la procédure que seule la société STAM avait signifié le jugement du 4 décembre 2017, par un acte remis le 2 janvier 2018 à la SCI Les Hauts de L'Estaque et à la société Erilia ; qu'en retenant que l'appel de la SCI Les Hauts de L'Estaque était irrecevable à l'encontre de la société Erilia pour avoir été présenté plus d'un mois après cette signification du 2 janvier 2018, quand la société Erilia ne pouvait se prévaloir de la signification délivrée par la société STAM à la SCI Les Hauts de L'Estaque, en l'absence de toute indivisibilité ou solidarité entre elles, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles 324 et 529 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 324 et 529 du code de procédure civile :

10. Il résulte de ces textes que c'est seulement dans le cas où le jugement profite solidairement ou indivisiblement à plusieurs parties que chacune peut se prévaloir de la notification faite par l'une d'elles.

11. Pour infirmer partiellement la décision déférée et dire irrecevables l'appel du 5 février 2018 en ce qu'il est dirigé contre la société STAM et la société Erilia, et par voie de conséquence, celui du 6 février intimant ces mêmes parties, l'arrêt, après avoir rappelé le dispositif du jugement au fond frappé d'appel, retient qu'il n'est ni établi ni invoqué d'indivisibilité, que la condamnation prononcée in solidum ne profite qu'à une seule partie, qu'il n'est justifié que de la signification du jugement le 2 janvier 2018 à la SCI à la requête de la société STAM et de celle du même jour à la société Erilia et que le délai d'appel d'un mois expirant, pour la SCI, le 2 février 2018.

12. En statuant ainsi, alors que la société Erilia ne pouvait se prévaloir de la signification délivrée par la société STAM à la SCI Les Hauts de L'Estaque en l'absence de toute indivisibilité ou solidarité entre les sociétés intimées, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables l'appel principal de la société Les Hauts de L'Estaque, interjeté le 5 février 2018 à l'encontre de la société Erilia, et par voie de conséquence, l'appel principal de la société Les Hauts de L'Estaque, interjeté le 6 février 2018 à l'encontre de la société Erilia, l'arrêt rendu le 26 septembre 2019, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne la société Erilia aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Erilia et la condamne à payer à la société Les Hauts de L'Estaque la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, prononcé par le président en son audience publique du quatre mars deux mille vingt et un et signé par lui et Mme Martinel, conseiller doyen, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, conformément aux dispositions des articles 452 et 456 du code de procédure civile.