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Décisions

CA Versailles, 13e ch., 8 mars 2007, n° 06/01077

VERSAILLES

Arrêt

Infirmation partielle

PARTIES

Défendeur :

Becheret-Thierry (SCP) (ès qual.), Icade Capri (Sté), Sogeros (SNC), CIC (SA), Crédit du Nord (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Besse

Conseillers :

Mme Andreassier, M. Deblois

Avoués :

SCP Jullien, Lecharny, Rol et Fertier, SCP Bommart Minault, SCP Fievet-Lafon, SCP Lefevre Tardy Hongre-Boyeldieu

Avocats :

Me Monteran, Me Cathely, Me Courtier

TGI Nanterre, 2e ch., du 27 janv. 2006, …

27 janvier 2006

La cour statue sur l'appel nullité formé par la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, Madame Corinne H., Monsieur Léon F. et Monsieur Hervé V. à l'encontre du jugement rendu le 27 janvier 2006 par le Tribunal de grande instance de Nanterre ayant statué sur le recours formé par les appelants à l'encontre de l'ordonnance rendue le 5 juillet 2005 par le juge-commissaire chargé de la liquidation judiciaire de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE.

Une procédure de redressement judiciaire a été prononcée à l'égard de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE par jugement rendu le 30 novembre 1995 par le Tribunal de grande instance de Nanterre. Cette procédure a été convertie en liquidation judiciaire suivant jugement rendu le 28 mars 1996 et arrêt confirmatif rendu le 28 novembre 1996 par la cour d'appel de Versailles.

Le passif antérieur de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE est constitué, au terme de procédures judiciaires prolongées, de trois créances, soit 4.549,54 euros dus à la Recette des impôts, 77.446,84 euros dus au Crédit du Nord, et 681.096, 32 euros dus au CIC.

Monsieur Léon F. était l'unique associé de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, jusqu'au 27 juin 2005, date à laquelle il a vendu 15 parts sociales à Madame Corinne H. et 56 parts sociales à Monsieur Hervé V..

Les trois créances de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE ont changé de titulaires:

- Monsieur Léon F. a payé au Trésor public la somme de 4.549,54 euros le 19 novembre 1999,

- Monsieur Léon F. a acquis la créance du Crédit du Nord le 20 octobre 1999 et a signifié la cession au mandataire liquidateur le 19 novembre 1999,

- Monsieur Hervé V. a acquis la créance du CIC le 27 juin 2005 et a signifié la cession au mandataire liquidateur le 19 juillet 2005.

Lors de l'assemblée générale extraordinaire en date du 28 juin 2005, Monsieur Léon F. et Monsieur Hervé V. ont renoncé à l'exigibilité des sommes avancées par eux pour le compte de la SCI en rachetant les créances du Crédit du Nord et du CIC, jusqu'à l'issue des opérations de liquidation amiable, après cession ferme de l'immeuble propriété de la SCI, et encaissement du prix.

Le 21 février 2005, la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE a saisi le Tribunal de grande instance d'une demande de clôture des opérations de liquidation judiciaire pour extinction du passif exigible.

La SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE est propriétaire d'un immeuble sis à Puteaux.

Le mandataire liquidateur a décidé de procéder à la vente de l'immeuble et a fixé une date limite du dépôt des offres, une première fois au 15 septembre 2004, puis par suite d'aléas procéduraux, une seconde fois au 24 juin 2005.

La SNC SOGEROS a déposé la même offre dans les deux délais. Cette offre comportait l'engagement de se porter acquéreur de l'immeuble sans condition suspensive, de payer comptant le prix de 780.000 euros H.T. net vendeur, et de faire son affaire personnelle de la libération des lieux et de l'éventuelle dépollution du site.

Par ordonnance en date du 5 juillet 2005, le juge-commissaire a ordonné la vente de l'immeuble au profit de la SNC SOGEROS pour le prix de 780.000 euros, dans les termes de l'offre.

La SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, Madame Corinne H., Monsieur Léon F. et Monsieur Hervé V. ont formé le recours prévu par l'article D25 à l'encontre de cette ordonnance.

A l'appui de ce recours les opposants reprochaient notamment au juge-commissaire d'être sorti de ses attributions et d'avoir commis un excès de pouvoir " en ordonnant la cession d'un élément d'actif de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE alors même que cette société n'a plus de passif ".

Par acte notarié en date du 2 août 2005, la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE a consenti une promesse unilatérale de vente de l'immeuble au prix de 2.203.000 euros au bénéfice de la SAS ICADE CAPRI qui l'a acceptée et qui s'est en outre engagée à payer à des tiers la somme de 1.497.000 euros à titre d'indemnité de résiliation de la convention d'occupation.

Statuant sur le recours formé contre l'ordonnance du juge-commissaire, le Tribunal de grande instance de Nanterre, par jugement en date du 27 janvier 2006, a :

- déclaré irrecevables les interventions volontaires de la SCI FARELLE LARGIPIERRE et de la SAS ICADE CAPRI,

- constaté l'existence d'un passif exigible,

- annulé l'ordonnance,

- statuant à nouveau, ordonné la vente de l'immeuble au profit de la SNC SOGEROS pour le prix de 780.000 euros H.T. net vendeur,

- dit que le règlement s'effectuera comptant à la signature des actes,

- dit que la SNC SOGEROS fera son affaire personnelle de l'occupation des locaux ainsi que d'une

étude relative à la pollution du sol,

- rejeté toute autre demande,

- dit que les dépens seront comptés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.

La SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, Madame Corinne H., Monsieur Léon F. et Monsieur Hervé V. (les appelants) ont interjeté appel de ce jugement et demandent à la cour :

Vu les articles 31, 425, 455,495, 797, 798 et 800 du NCPC,

Vu les articles 1989 et 1991 du Code Civil,

Vu les articles L. 621-39, L. 622-16 et L. 623-4 du Code de Commerce,

Vu les articles 2478 et suivants du code civil,

Vu l'article 140 al.3 du décret du 27 décembre 1985.

- Constater que le mandataire de justice n'avait plus qualité pour introduire une demande de réalisation des actifs de la SCI FABRE,

- Constater qu'il n'existait plus de passif exigible dès avant l'ordonnance du juge-commissaire et a fortiori au moment où le tribunal de grande instance de Nanterre a statué et qu'il ne pouvait donc y avoir réalisation d'actif,

- Constater qu'une procédure de clôture de la liquidation judiciaire par extinction du passif est en cours,

- Constater que le juge-commissaire puis le tribunal ne pouvaient ordonner une vente que l'article L. 622-16 ne leur confère pouvoir que d'autoriser,

- Constater que le juge-commissaire puis le tribunal ont excédé leurs pouvoirs,

- Déclarer recevable l'appel nullité,

- En conséquence,

- Prononcer la nullité du jugement du 27 janvier 2006,

Subsidiairement,

- Infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,

- Dire n'y avoir lieu à céder les actifs de la SCI JEAN-CLAUDE LEON FABRE,

- Constater que le prix de cession 780.000 euros de SOGEROS, ne parviendrait pas à désintéresser la créance de Monsieur V.,

- Donner acte à Monsieur Hervé V. de ce qu'il n'entend pas renoncer à son droit de suite et de surenchère,

- Constater que la société ICADE offre l'acquisition définitive pour un montant de 3.807.966 euros H.T,

- Autoriser la cession de l'immeuble du 85 rue Jean Jaurès - 92600 Puteaux à la société ICADE CAPRI dans les termes de la promesse de vente du 2 août 2005 telle que confirmée par la correspondance de Maître Strock du 26 octobre 2006,

En tout état de cause,

- Rejeter toutes demandes, fins et conclusions de la SCP BECHERET THIERRY S. et des sociétés SOGEROS et OGIC,

La SAS ICADE CAPRI demande à la Cour :

- de constater qu'au jour de l'audience du Tribunal de grande instance, et même de l'audience devant le juge-commissaire, la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE n'avait plus de passif exigible,

- d'en déduire que le Tribunal de grande instance, et même le juge-commissaire, ont excédé leurs pouvoirs en ordonnant la cession, en l'absence de passif exigible,

- d'annuler l'ordonnance et le jugement,

- de dire que son offre formulée dans l'acte notarié de promesse de vente du 2 août 2005 est recevable et que le Tribunal de grande instance en avait été saisi par la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE et devait la prendre en considération,

- subsidiairement, d'ordonner la cession de l'immeuble à son profit dans les termes de la promesse de vente du 2 août 2005.

- plus subsidiairement de renvoyer les parties devant le juge-commissaire pour qu'il soit statué sur la réalisation de l'immeuble.

La SAS ICADE CAPRI fait notamment valoir que son offre au prix de 2.203.000 euros, augmenté de 1.497.000 euros au titre de l'indemnité de résiliation des conventions d'occupation est plus avantageuse, que les permis de démolir et de construire sont désormais devenus définitifs depuis le

13 novembre 2006, et que la vente peut intervenir sans délai et sans aléa. La SAS ICADE CAPRI ajoute que la vente à son profit a toutes les chances d'aboutir et ne peut que subir un retard préjudiciable à tous, car les créanciers hypothécaires, ne manqueront pas de surenchérir, sachant qu'elle désire acquérir l'immeuble pour une somme bien plus élevée que celle qui sera versée par la SNC SOGEROS.

La SNC SOGEROS demande à la cour :

- de déclarer les appels irrecevables et mal fondés,

- de déclarer irrecevables et mal fondées les demandes de la SAS ICADE CAPRI,

- de confirmer le jugement,

- subsidiairement d'ordonner la vente de l'immeuble à son profit au prix de 780.000 euros net vendeur,

- en toute hypothèse de condamner solidairement les appelants à lui payer la somme de 20.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

Au soutien de son appel la SNC SOGEROS relève que dans le cadre de la procédure de liquidation judiciaire de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, elle a fait une offre qui a été préférée aux autres, et acceptée dans ses termes définitifs, dès le 23 novembre 2004, et encore par ordonnance en date du 5 juillet 2005, et une troisième fois par le jugement déféré. Elle estime être en droit de voir régularisée la cession de l'immeuble ordonnée de longue date, et de façon parfaitement régulière. Elle fait notamment valoir à ce propos :

- qu'elle a présenté une offre d'achat de l'immeuble dans le délai fixé au 15 septembre 2004,

- que par ordonnance en date du 23 novembre 2004, le juge-commissaire, écartant 4 autres offres jugées moins favorables, a ordonné la cession de l'immeuble à son profit pour le prix de 780.000 euros,

- que par jugement en date du 21 mars 2005, le Tribunal de grande instance a déclaré le recours de Kaufman et Broad irrecevable comme tardif, a déclaré le recours de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE recevable, a annulé l'ordonnance est a rejeté les autres demandes,

- qu'elle a renouvelé son offre dans le délai fixé au 24 juin 2005,

- que par ordonnance en date du 5 juillet 2005, le juge-commissaire a écarté la seule autre offre de la Société OGIC, et a ordonné la cession de l'immeuble à son profit pour le prix de 780.000 euros,

- que cette cession a été confirmée par le jugement déféré

- qu'à supposer que la cour ait à aborder le fond, elle ne pourrait que faire droit à son offre qui est la seule qui a été régulièrement déposée.

La SNC SOGEROS fait également valoir (page 8) :

- que le rachat des dettes n'a fait que transférer le passif à d'autres titulaires, dès lors que ces derniers n'ont pas abandonné leurs créances,

- qu'en outre un passif nouveau s'est créé depuis le jugement d'ouverture, dont le paiement justifie la réalisation de l'actif,

- que ce passif comprend nécessairement les frais de procédure, les frais d'entretien et d'assurance de l'immeuble, les impôts et taxes courus depuis 1996, et toutes autres sommes,

- que si les créanciers abandonnaient leurs créances il en résulterait une dette fiscale,

- qu'il est donc inexact de prétendre qu'il n'existe aucun passif exigible,

- que dans le cadre de la liquidation judiciaire les créanciers ne peuvent renoncer utilement à l'exigibilité de leur créance,

- que la liquidation judiciaire entraîne la dissolution de la société et met un terme aux pouvoirs des organes de la société,

- que le jugement de clôture pour extinction du passif ne redonne pas aux organes de la société dissoute les pouvoirs auxquels le jugement de liquidation a mis fin,

- que seul le mandataire liquidateur a le pouvoir de céder les actifs de la société.

La SCP B.T.S.G., es qualités de mandataire liquidateur, désigné à cette fonction à la suite de Maître CHAVINIER, premier désigné, demande à la cour :

- de déclarer l'appel nullité irrecevable,

- de débouter en tant que de besoin les appelants de leur demande d'annulation de la procédure de cession de l'immeuble,

- subsidiairement de lui donner acte de ce qu'elle s'en rapporte sur la demande d'évocation, étant observé que l'offre de la SNC SOGEROS constitue la seule offre prévoyant le règlement comptant du prix et n'étant subordonnée à aucune condition suspensive.

Les appelants se sont désistés de leur appel nullité vis à vis du CRÉDIT DU NORD et vis à vis du C.I.C. Le désistement a été constaté par ordonnance du Conseiller de la mise en état en date du 02

Mai 2006;

La Société OGIC et la SCI FARREL LARGIPIERRE n'ont pas été intimées;

Le dossier a été communiqué au Ministère Public qui n'a pas conclu.

DISCUSSION

Sur la recevabilité de l'appel nullité pour excès de pouvoir

Considérant que le juge-commissaire a statué dans la limite des pouvoirs que lui attribuent les dispositions de l'article L. 622-16 du Code de commerce en autorisant la cession d'un bien immobilier dépendant d'un débiteur en liquidation judiciaire ; que l'appel de droit commun à l'encontre du jugement statuant sur le recours formé contre l'ordonnance est irrecevable par application des dispositions de l'article L. 623-4 du même code ;

Considérant que les appelants en conviennent, et forment un appel nullité ;

Considérant que la violation d'un principe essentiel de procédure ne suffit pas à permettre un appel nullité ; que l'argumentation des appelants sur cette violation, contestée par les intimés, se trouve sans pertinence, et n'a pas à être examinée ;

Considérant qu'en revanche l'excès de pouvoir reproché au Tribunal de grande instance est susceptible de rendre recevable l'appel nullité et doit être examiné

Sur la recevabilité du moyen

Considérant que les appelants voient l'excès de pouvoir dans le fait que le jugement autorise la cession de l'immeuble, alors que la SCI n'avait plus de passif exigible ;

Considérant que les intimés soutiennent que les appelants ne peuvent invoquer ce moyen pour la première fois devant la cour, et font valoir qu'en première instance il était prétendu que la SCI n'avait plus de passif, ce qui est manifestement faux, deux des appelants se prétendant créanciers ;

Mais considérant qu'un moyen de droit nouveau peut être soulevé en tout état de cause, et pour la première fois en cause d'appel, même en cause d'appel nullité ; qu'en outre ce moyen se trouvait dans les débats devant le Tribunal de grande instance qui a eu connaissance de toutes les pièces établissant que Monsieur Léon F. et Monsieur Hervé V. avaient renoncé à l'exigibilité de leurs créances jusqu'à l'issue des opérations de liquidation amiable, la vente de l'immeuble, et l'encaissement du prix ; que ce moyen est recevable ;

Sur l'exigibilité des créances antérieures

Considérant que les intimés soutiennent que les créances demeurent exigibles et font notamment valoir à ce propos :

- que l'exigibilité d'une créance est dans sa nature, et ne peut se voir modifiée par la volonté du créancier,

- que le report d'exigibilité accordé par Monsieur Léon F. et par Monsieur Hervé V. est sans effet, car il trouve sa motivation dans la vente de l'immeuble à la SAS ICADE CAPRI, et que cette vente est nulle car elle a été passée par la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE représentée par son liquidateur amiable qui n'en a pas le pouvoir ;

Mais considérant que le titulaire d'une créance exigible peut, à tout moment, reporter l'exigibilité de sa créance, dès lors qu'il ne fait pas un usage abusif de ce droit ; qu'aucun abus n'est reproché en l'espèce ;

Considérant en outre qu'il est indiqué que le terme du report d'exigibilité est la vente de l'immeuble, et l'encaissement du prix, mais qu'il n'est pas précisé que cette vente doit intervenir nécessairement au profit de la SAS ICADE CAPRI ; que si la vente à cette dernière ne peut avoir lieu pour une raison quelconque, l'immeuble pourra être vendu à une autre personne, et l'exigibilité des créances sera reportée à l'encaissement du prix ;

Considérant qu'en réalité, et au jour où la cour statue, le terme du report d'exigibilité est la date de la liquidation amiable de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE ; qu'il s'agit d'une date nécessairement postérieure à la clôture de la procédure de liquidation judiciaire de cette société;

Considérant que c'est donc à bon droit que les appelants soutiennent que les créances de Monsieur Léon F. et de Monsieur Hervé V. ne sont pas exigibles et ne peuvent justifier la vente de l'immeuble dans le cadre de la liquidation judiciaire, sauf à commettre un excès de pouvoir ;

Sur l'existence d'un passif exigible et non exigible postérieur au jugement d'ouverture

Considérant qu'il appartient au mandataire liquidateur de veiller au paiement des créanciers antérieurs, mais aussi au paiement des créanciers bénéficiant de l'ordre de priorité de l'article L. 621-32 ;

Considérant que la vente des actifs du débiteur en liquidation judiciaire est destinée à payer le passif antérieur au jugement d'ouverture, mais aussi, et même en priorité, le passif postérieur ; qu'il n'y a donc pas excès de pouvoir pour le juge-commissaire, puis pour le Tribunal de grande instance, à faire vendre l'immeuble si cette vente permet le paiement du passif postérieur;

Considérant que la SNC SOGEROS soutient que depuis le jugement d'ouverture il s'est créé un passif nouveau qui justifie à lui seul la vente de l'immeuble ; qu'elle fait état des frais de procédure, des frais d'entretien et d'assurance de l'immeuble, des impôts et taxes courus depuis 1996 ;

Considérant qu'il convient également de tenir compte du risque de passif à naître de l'occupation des locaux ;

Considérant qu'en l'espèce, alors que la procédure a été ouverte il y a plus de 11 années, le risque de création d'un passif n'est pas dénué de sérieux ;

Considérant d'ailleurs que dans l'acte notarié de promesse unilatérale de vente du 2 août 2005, et dans le protocole de cession de parts sociales en date du 27 juin 2005 (pièce visée sous le numéro 12 du bordereau de communication) ce passif est chiffré à 1.497.000 euros ; qu'en acceptant le bénéfice de la promesse unilatérale de vente, la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE reconnaît la nécessité de vendre l'immeuble pour faire face à ce passif non encore exigible ;

Considérant que la vente de l'immeuble permet d'éliminer ce risque sérieux de passif car dans son offre la SNC SOGEROS prend l'engagement de se porter acquéreur de l'immeuble sans condition suspensive, de payer comptant le prix de 780.000 euros H.T. net vendeur, et de faire son affaire personnelle de la libération des lieux et de l'éventuelle dépollution du site ;

Considérant que dans ces conditions, les appelants ne démontrent pas qu'il n'existait pas de passif postérieur né ou à naître, devant être payé par la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE; qu'il ne démontrent donc pas que le Tribunal de grande instance a commis un excès de pouvoir en ordonnant la vente de l'immeuble dans les conditions de l'article L. 622-16 du Code de commerce, pour faire face au passif susceptible de naître de l'occupation des locaux et des travaux de dépollution ;

Sur l'étendue de la saisine du Tribunal de grande instance

Considérant que les appelants soutiennent que le Tribunal de grande instance a excédé ses pouvoirs en statuant au fond après avoir annulé l'ordonnance du juge-commissaire ;

Mais considérant que le Tribunal de grande instance, saisi d'un recours de l'article D25 à l'encontre d'une ordonnance du juge-commissaire est saisi de l'entier litige et se doit de statuer au fond lorsqu'il a annulé l'ordonnance pour défaut de motivation ; que ce faisant, il n'a commis aucun excès de pouvoir ;

Sur le verbe ordonner

Considérant que les appelants soutiennent que le Tribunal de grande instance a commis un excès de pouvoir en ordonnant la vente de l'immeuble, alors qu'il n'avait, comme le juge-commissaire, que le pouvoir de l'autoriser ;

Mais considérant que, contrairement à ce que prétendent les appelants, le Tribunal de grande instance, en employant improprement le verbe " ordonner " au lieu d'autoriser, n'a pas donné plus de portée à sa décision ; qu'aucun élément du jugement ne laisse penser qu'il a voulu autre chose que donner au mandataire liquidateur l'autorisation de procéder à la vente de l'immeuble dans les termes

des engagements de la SNC SOGEROS ; que le jugement ne peut s'interpréter autrement que comme une décision autorisant la vente de l'immeuble conformément aux dispositions de l'article L622-16 du Code de commerce ; que l'impropriété du verbe employé ne traduit aucun excès de pouvoir ;

Sur l'offre de la SAS ICADE CAPRI

Considérant que les appelants soutiennent que le Tribunal de grande instance a commis un excès de pouvoir en refusant d'examiner l'offre résultant de la promesse de vente du 2 août 2005, passé entre la SAS ICADE CAPRI et la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, représentée par son liquidateur amiable, sous condition suspensive que ce dernier retrouve sa capacité de contracter ;

Considérant qu'il est exact que par acte notarié en date du 2 août 2005, la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE a accordé une promesse unilatérale de vente de l'immeuble que la SAS ICADE CAPRI a accepté avec " la faculté d'acquérir si bon lui semble " et sous condition suspensive de l'obtention des permis de démolir et de reconstruire ; qu'en contrepartie de cette acceptation elle s'est engagée :

- à payer le prix de vente de 2.203.000 euros et à des tiers, la somme de 1.497.000 euros au titre des indemnités de résiliation des conventions d'occupation,

- à prendre en charge les frais de dépollution dans la limite de 50.000 euros plus les frais de sondage,

- à assumer les frais de désamiantage dans la limite de 15.000 euros ;

Mais considérant que l'offre de la SAS ICADE CAPRI n'a pas été formée dans le délai fixé au 24 juin 2005 ; que le Tribunal de grande instance n'avait donc aucune obligation d'examiner cette offre ;

Considérant en outre que l'acceptation du bénéfice d'une promesse de vente ne constitue pas une offre d'achat ; que le Tribunal de grande instance n'était donc pas saisi d'une offre de la part de la SAS ICADE CAPRI ; qu'il ne peut lui être reproché de ne pas avoir tenu compte de la promesse de vente unilatérale de la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE ;

Considérant que le Tribunal de grande instance n'a commis aucun excès de pouvoir en s'abstenant d'examiner la demande de la SAS ICADE CAPRI ;

Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les appelants ne démontrent pas que l'intégralité du passif postérieur au jugement d'ouverture aurait pu être payé sans qu'il soit procédé à la vente de l'immeuble ; qu'en autorisant la vente de l'immeuble selon la seule offre dont il disposait et qui permet la suppression d'une part importante de ce passif, le Tribunal de grande instance n'a commis aucun excès de pouvoir ;

Considérant qu'a fortiori le juge-commissaire n'a commis aucun excès de pouvoir;

Considérant que l'appel nullité formé à l'encontre du jugement sera déclaré irrecevable ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par arrêt CONTRADICTOIRE et en dernier ressort,

Déclare irrecevable l'appel nullité formé par la SCI JEAN CLAUDE LEON FABRE, Madame Corinne H., Monsieur Léon F. et Monsieur Hervé V. à l'encontre du jugement rendu le 27 janvier 2006 par le Tribunal de grande instance de Nanterre,

Condamne in solidum les appelants à payer à la SNC SOGEROS la somme de 3.000 euros sur le fondement de l'article 700 du Nouveau code de procédure civile,

Condamne in solidum les appelants aux dépens d'appel et accorde aux avoués de la cause qui peuvent y prétendre, le droit de recouvrement conforme aux dispositions de l'article 699 du Nouveau code de procédure civile.