CRE, cordis, 30 septembre 2011, n° 193-38-11
COMMISSION DE RÉGULATION DE L'ÉNERGIE
Arrêt
sur le différend qui oppose Madame Caroline ALIOTTI à la société Électricité Réseau Distribution France (ERDF) relatif aux conditions de raccordement d'une installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution d'électricité
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président :
M. Racine
Rapporteur :
M. Laffaille
Avocats :
Me Meddeb, Me Gandet
Le comité de règlement des différends et des sanctions,
Vu la demande de règlement de différend, enregistrée le 10 mai 2011, sous le numéro 193-38-11, présentée par Madame Caroline ALIOTTI, auditrice conseil, de nationalité française, demeurant 5, rue Pergolèse, 75116 Paris, ayant pour avocat, Maître Stéphanie GANDET, cabinet Green Law, 84, boulevard du Général Leclerc, 59100 Roubaix.
Madame Caroline ALIOTTI a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie du différend qui l'oppose à la société Électricité Réseau Distribution France (ciaprès désignée « ERDF sur les conditions de raccordement au réseau public de distribution d'électricité d'un projet de centrale photovoltaïque situé sur la commune de Cavaillon (84).
Madame Caroline ALIOTTI soutient avoir acceptée l'offre de raccordement fait par la société ERDF le 1 er décembre 2010 et que le refus d'instruction de la demande raccordement a conduit à un refus de raccordement.
Elle considère que la société ERDF n'a pas respecté sa documentation technique de référence en ne transmettant pas dans un délai de trois mois, l'offre de raccordement demandée le 30 août 2010.
Madame Caroline ALIOTTI ajoute qu'elle a notifié son acceptation de l'offre de raccordement le 1 er décembre 20101 en se déplaçant dans les locaux de la société ERDF le 1 er décembre 2010, et qu'elle a versé deux chèques d'acompte correspondant à 33 % du coût des travaux de raccordement.
Elle indique, enfin, que la société ERDF est infondée à considérer sa demande de raccordement comme étant « bloquée », et qu'elle ne peut lui refuser de rédiger la convention de raccordement.
Madame Caroline ALIOTTI demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie :
- de constater que la société ERDF a méconnu ses obligations contractuelles et réglementaires, tout comme sa propre documentation technique de référence en refusant l'accès au réseau à Madame Caroline ALIOITI •
- de constater, avec toutes conséquences de droit, que Madame Caroline ALIOTTI a accepté l'offre de raccordement au réseau le 1 er décembre 2010
- d'ordonner à la société ERDF de confirmer officiellement à Madame Caroline ALIOTTI l'acceptation de l'offre de raccordement n o 2010005544 à la date du 1 er décembre 2010.
*
Vu les observations en défense, enregistrées le 7 juin 201 1, présentées par la société Électricité Réseau
Distribution France (ERDF), société anonyme, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre sous le numéro B 444 608 442, dont le siège social est situé 102, terrasse Boieldieu, 92085 Paris La Défense Cedex, représentée par son Secrétaire Général, Monsieur François ABKIN, et ayant pour avocat, Maître Mounir MEDDEB, 8, rue du Mont Thabor, 75001 Paris.
La société ERDF estime que la saisine de Madame Caroline ALIOTTI doit être déclarée irrecevable en ce que ses demandes visent au bénéfice des conditions tarifaires prévues par l'arrêté du 12 janvier 2010. La société ERDF ajoute ainsi que la demande de raccordement et l'installation à raccorder ne soulèvent aucune contestation du point de vue de l'accès au réseau.
Elle soutient, également, que cette demande de règlement de différend doit faire l'objet d'un traitement similaire aux saisines concernées par la décision du 29 avril 2011, par laquelle le comité de règlement des différends et des sanctions a suspendu l'instruction d'une série de demandes de règlement de différend, dans la mesure où la solution de cette demande dépend de l'appréciation de la légalité du décret du 9 décembre 2010.
La société ERDF indique qu'elle a respecté les dispositions de sa procédure de traitement des demandes de raccordement et les dispositions réglementaires en vigueur. Elle estime que la demande de regroupement de Madame Caroline ALIOTTI, intervenue le 29 octobre 2010, constituait une modification de sa demande initiale et, par suite, une nouvelle demande de raccordement en application de l'article 10.1.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement. Elle ajoute que, suite à cette demande, le projet de Madame Caroline ALIOTTI a subi des modifications entre le 6 et le 7 décembre 2010, la proposition technique et financière a été validée le 7 décembre 2010, et que, dès lors, Madame Caroline ALIOTTI ne peut se prévaloir de la date du 1er décembre 2010 pour la transmission de l'offre de raccordement.
Elle estime que l'offre de raccordement n'a pu être signée et acceptée le 1 er décembre 2010 pour plusieurs raisons :- le document signé par Madame Caroline ALIOTTI ne constitue pas une offre de raccordement au sens de l'article 8.2 de la procédure de traitement des demandes de raccordement de la société ERDF, mais un devis,
- l'acceptation de l'offre de raccordement suppose le versement de l'acompte dont le montant exact est uniquement indiqué dans la proposition technique et financière et repris dans le devis, le montant de l'acompte versé par Madame Caroline ALIOTTI ne correspond pas au montant indiqué dans le devis, soit 5.772,4 € TTC.
La société ERDF considère avoir tenu compte des dispositions du décret du 9 décembre 2010 en n'envoyant pas de proposition technique et financière à Madame Caroline ALIOTTI dès l'entrée en vigueur du décret du 9 décembre 2010.
La société ERDF demande au comité de règlement des différends et des sanctions :
- à titre principal, de déclarer la saisine de Madame Caroline ALIOTTI irrecevable ;
- à titre subsidiaire, de rejeter les demandes de Madame Caroline ALIOTTI comme non fondée.
La société ERDF demande, en conséquence, au comité de règlement des différends et des sanctions de rejeter l'ensemble des demandes de Madame Caroline ALIOITI.
*
Vu les observations en réplique, enregistrées le 21 juin 2011, présentées par Madame Caroline ALIOTTI
Madame Caroline ALIOITI soutient que le différend constitue bien un litige lié à l'accès aux réseaux au sens de l'article 38 de la loi no 2000-108 du 10 février 2000 (aujourd'hui les articles L. 134-19 et suivants du code de l'énergie) et qu'en aucun cas il n'est demandé au comité de règlement des différends et des sanctions de se prononcer sur le bénéfice de l'obligation d'achat.
Elle soutient que sa demande de raccordement est demeurée identique tout au long de la procédure :
- la demande de regroupement avait pour seul objet la mutualisation des travaux de raccordement pour trois projets d'installations de production dont celui de Madame Caroline ALIOTTI ;
- le point de livraison est demeuré identique tout au long de l'instruction ;
- la société ERDF n'a jamais considéré cette demande de regroupement comme une modification.
Madame Caroline ALIOTTI conteste l'affirmation de la société ERDF selon laquelle le devis ne peut avoir été imprimé et signé par elle le 1er décembre 2010 en ce que la société ERDF s'attache à des éléments de ses systèmes informatiques internes dénués de fiabilité et qu'elle en tire des conclusions contradictoires.
Elle estime, donc, que l'ensemble des informations générales de même que les informations spécifiques à l'installation de production de Madame Caroline ALIOTTI étaient connues d'elles le 1er décembre 2010 et ont fait l'objet d'une acceptation le 1er décembre 2010
Madame Caroline ALIOITI persiste, donc, dans ses précédentes conclusions et précise sa dernière demande :
- d'ordonner à la société ERDF de confirmer officiellement à Madame Caroline ALIOTTI l'acceptation de la proposition technique et financière n° 2010005544 à la date du 1er décembre 2010.
Vu les observations en duplique, enregistrées le 30 juin 2011, présentées par la société ERDF.
La société ERDF indique que les parents de Madame Caroline ALIOTTI sont les exploitants agricoles qui développent le projet d'installation photovoltaïque et ont, seuls, la qualité d'utilisateur du réseau. Elle ajoute que le litige en l'espèce, concerne l'application des dispositions du décret du 9 décembre 2010 et non un refus de raccordement. Elle estime, en conséquence, que Madame Caroline ALIOTTI n'a pas qualité pour agir devant le comité de règlement des différends et des sanctions car les critères matériels et organiques ne sont pas réunis.
Elle soutient que la modification de la demande de raccordement, en admettant qu'elle n'ait pas eu pour conséquence de modifier le contenu de l'offre de raccordement, il était nécessaire pour la société ERDF d'instruire cette demande avant de décoder si elle était de nature à rendre nécessaire une modification de l'offre de raccordement.
La société ERDF estime que les accusations à son encontre d'intervention sur ses systèmes informatiques ne reposent sur aucun fait tangible et ne font que supputer que le dossier de Madame Caroline ALIOTTI a fait l'objet d'une manipulation.
Elle considère que Madame Caroline ALIOTTI ne fait état d'aucun document daté de manière objective et incontestable du 1 er décembre 2010 et qu'elle aurait accepté à cette même date, contrairement à ce qu'indique la requérante, et qu'elle ne disposait pas de l'ensemble des éléments devant figurer dans l'offre de raccordement ainsi que le démontre l'examen comparé de l'offre de raccordement et le devis.
La société ERDF persiste, donc, dans ses précédentes conclusions.
*
Vu les observations en triplique, enregistrées le 22 juillet 2011, présentées par Madame Caroline ALIOITI
Madame Caroline ALIOTTI soutient que contrairement à ce qu'indique la société ERDF, elle est bien un utilisateur du réseau public de distribution dans la mesure où elle est le demandeur du raccordement.
Elle indique que la demande de regroupement des trois projets en un seul point de livraison a été intégré dans l'offre de raccordement acceptée le 1er décembre 2010 et ne constitue pas une demande de modification de la demande de raccordement contrairement à ce que soutient la société ERDF.
Madame Caroline ALIOTTI précise que si tel n'était pas le cas, certains coûts, comme la fourniture de transformateur, les frais administratifs et mises en chantier, n'auraient pas été divisés par trois sur l'offre de raccordement acceptée le 1er décembre 2010.
Elle ajoute que l'absence de demande par la société ERDF de transmission d'un nouveau formulaire ou de nouvelles fiches de collecte, comme la non facturation d'une telle opération, ainsi que l'absence de nouvelle date de qualification ou de mise à jour de l'offre prouvent de sa demande de regroupement ne constitue pas une modification de sa demande de raccordement.
Madame Caroline ALIOTTI ajoute qu'il ressort de multiples pièces du dossier signées par la société ERDF elle-même que l'offre de raccordement existait et a bien été signée le 1 er décembre 2010. Elle ajoute, en outre, que le constat d'huissier ne permet en aucune façon de démontrer que l'offre de raccordement n'a pu être générée le 1 er décembre 2010.
Madame Caroline ALIOTTI persiste, donc, dans ses précédentes conclusions.
*
Vu la mesure d'instruction du 29 juillet 2011 par laquelle le rapporteur, chargé de l'instruction du dossier, a invité la société ERDF à communiquer une copie du courrier d'accompagnement du devis de travaux enregistré sous le numéro D325/070765/001002 qui a été adressé à Madame Caroline ALIOTTI, le 7 décembre 2010 à 16 heures et 17 minutes, tel que mentionné dans la copie d'écran annexé au procès verbal de constats de l'huissier de justice.
Vu la lettre, enregistrée le 5 août 2011, par laquelle la société ERDF a communiqué le courrier d'accompagnement, en date du 4 août 201 1, de la proposition technique et financière et du devis pour le raccordement de l'installation de production photovoltaïque. La société ERDF indique que ce courrier n'a pas été adressé à Madame Caroline ALIOTTI, ni aucun autre courrier relatif à ce devis.
*
Vu les observations complémentaires, enregistrées le 2 septembre 2011, présentées par Madame Caroline ALIOTTI.
Madame Caroline ALIOITI soutient que le traitement informatique des demandes de raccordement ne prouve pas que le devis accepté par elle n'ait pas pu exister le 1er décembre 2010.
Elle indique qu'elle a accepté l'offre de raccordement le 1 er décembre 2010 dans les locaux de la société ERDF, versé l'acompte correspondant et envoyé l'entier dossier signé par lettre recommandée le 1er décembre 2010 à la société ERDF, le cachet de la poste faisant foi.
*
Vu la mesure d'instruction du 6 septembre 2011 par laquelle le rapporteur a invité la société ERDF à expliquer comment Madame Caroline ALIOTTI a pu donner son accord sur un devis en date du 1 er décembre 2010 et passé commande « après avoir pris connaissance et accepté la Proposition Technique et Financière (PTF Référence ERDF : 2010005544) », alors que la proposition technique et financière est datée du 7 décembre 2010.
Vu la lettre, enregistrée le 12 septembre 2011, par laquelle la société ERDF a indiqué que l'attestation, certes datée du 1 er décembre 2010, date du règlement de 1.000 euros effectué par Madame Caroline ALIOTTI, a été établie postérieurement à la date du 1 er décembre 2010.
La société ERDF soutient que Madame Caroline ALIOTTI est revenue une seconde fois au service TPR de la société ERDF, très probablement te 6 décembre 2010, et a pu, d'une part, obtenir une copie du devis et non de la proposition technique et financière afin de faire apposer le tampon « payé le 1 er décembre 2010 » et, d'autre part, faire établir les attestations à la date du règlement des montants de 1.000 euros et de 5.000 euros.
*
Vu les nouvelles observations complémentaires, enregistrées le 19 septembre 2011, présentées par Madame Caroline ALIOITI.
Madame Caroline ALIOTTI soutient que les multiples pièces signées par la société ERDF établissent qu'au 1er décembre 2010, l'offre de raccordement portant le numéro D325/070765 existait et a été acceptée par Madame Caroline ALIOTTI à cette date.
*
* *
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 134-19 et suivants ;
Vu le décret n° 2000-894 du 11 septembre 2000 modifié, relatif aux procédures applicables devant la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 20 février 2009, relative au règlement intérieur du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie ;
Vu la décision du 10 mai 2011 du président du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la désignation d'un rapporteur et d'un rapporteur adjoint pour l'instruction de la demande de règlement de différend enregistrée sous le numéro 193-38-11 ;
Vu la décision du 8 juillet 2011 du comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie, relative à la prorogation du délai d'instruction de la demande de règlement de différend introduite par Madame Caroline ALIOTTI.
*
Les parties ayant été régulièrement convoquées à la séance publique du comité de règlement des différends et des sanctions, qui s'est tenue le 26 septembre 2011, en présence de :
Monsieur Pierre-François RACINE, président du comité de règlement des différends et des sanctions, Madame Dominique GUIRIMAND, Madame Sylvie MANDEL et Monsieur Roland PEYLET, membres du comité de règlement des différends et des sanctions,
Monsieur Olivier BEATRIX, directeur juridique et représentant le directeur général empêché,
Monsieur Didier LAFFAILLE, rapporteur et Monsieur Thibaut DELAROCQUE, rapporteur adjoint,
Maître Stéphanie GANDET, représentant Madame Caroline ALIOTTI,
Les représentants de la société ERDF, assistés de Maître Mounir MEDDEB.
Après avoir entendu :
- le rapport de Monsieur Didier LAFFAILLE, présentant les moyens et les conclusions des parties ;
- les observations de Maître Stéphanie GANDET pour Madame Caroline ALIOTTI ; Madame Caroline ALIOTTI persiste dans ses moyens et conclusions ;
- les observations de Maître Mounir MEDDEB et de Monsieur Laurent BERTIER pour la société ERDF ; la société ERDF persiste dans ses moyens et conclusions ;
Aucun report de séance n'ayant été sollicité,
Le comité de règlement des différends et des sanctions en ayant délibéré les 26 et 30 septembre 201 1, après que les parties, le rapporteur, le rapporteur adjoint, le public et les agents des services se sont retirés.
*
Les faits :
Il ressort des pièces du dossier que Madame Caroline ALIOTTI développe un projet de centrale photovoltaïque intégrée au bâti, pour une puissance de production installée de 248,948 kWc, sur le territoire de la commune de Cavaillon (Vaucluse). La société Électricité Réseau Distribution France (ERDF) est le gestionnaire du réseau public de distribution d'électricité sur le territoire de cette commune.
Le 31 août 2010, Madame Caroline ALIOTTI a déposé une demande d'offre de raccordement auprès de la société ERDF.
Le 1er septembre 2010, la société ERDF a indiqué à Madame Caroline ALIOTTI qu'il avait été constaté, en présence d'un huissier de justice, que son dossier était incomplet, car la tension de sortie assignée des onduleurs, qui était mentionnée dans les fiches de collecte de renseignements pour une offre de raccordement, était incompatible avec celle du réseau.
Le même jour, Madame Caroline ALIOTTI a indiqué à la société ERDF que son dossier, remis en main propre le 31 août 2010, était complet, puisque la fiche technique des onduleurs, jointe au dossier, mentionnait que la tension de sortie assignée des onduleurs était compatible avec celle du réseau, à savoir 400/230 V, et que la tension de 180 V indiquée dans la fiche de collecte de renseignements correspondait à la tension de sortie minimale des onduleurs.
Le 14 octobre 2010, la société ERDF a accusé réception de la demande de proposition technique et financière de Madame Caroline ALIOTTI en date du 1 er septembre 2010.
Le 29 octobre 2010, Madame Caroline ALIOTTI a demandé à la société ERDF de regrouper sa demande de raccordement pour son projet d'installation de production photovoltaïque avec les demandes de raccordement d'installations de production photovoltaïque de Monsieur Francis DURAND et de la société DURAND AM.
Le 25 novembre 2010, la société ERDF a accusé réception de la demande de regroupement des trois projets de centrale photovoltaïque.
Le 1er décembre 2010, Madame Caroline ALIOTTI a rappelé à la société ERDF qu'elle avait déposé une demande de raccordement en date du 1 er septembre 2010, qu'elle n'avait pas reçu de proposition technique et financière et que le délai de trois mois était dépassé. Un chèque pour un premier acompte de 1.000 euros était joint à ce courrier.
Le même jour, Madame Caroline ALIOTTI a déposé à l'agence de la société ERDF à Avignon Grand Delta un second acompte de 5.000 euros.
La société ERDF a établi deux attestations, datées du 1 er décembre 2010, pour le règlement des sommes de 1 .OOO euros et 5.000 euros représentant les acomptes correspondant au devis numéro D325/070765.
Madame Caroline ALIOTTI a signé, avec la mention manuscrite « Fait à Cavaillon, le 1 er décembre 2010 », le devis de travaux n o D325/070765/001002 sur lequel figure, à côté de la signature de la société ERDF, un tampon portant la mention « payé le 1er décembre 2010 ».
Le 13 décembre 2010, puis le 18 janvier 2011, la société ERDF a indiqué à Madame Caroline ALIOTTI que son projet de raccordement était « bloqué ».
Estimant que les conditions de raccordement au réseau public de distribution de son installation de production n'étaient pas satisfaisantes, Madame Caroline ALIOTTI a saisi le comité de règlement des différends et des sanctions de la Commission de régulation de l'énergie d'une demande de règlement du différend qui l'oppose à la société ERDF.
*
Sur la compétence du comité de règlement des différends et des sanctions
La société ERDF soutient que le comité de règlement des différends et des sanctions n'est pas compétent pour connaître de la demande présentée par Madame Caroline ALIOTTI dès lors qu'elle concerne, en réalité, les conditions requises pour bénéficier du tarif d'achat de l'électricité produite par son installation de production.
Aux termes des articles L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie, « en cas de différend : 1° Entre les gestionnaires et les utilisateurs des réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité [... ] sur l'accès auxdits réseaux [...] ou à leur utilisation, notamment en cas de refus d'accès ou de désaccord sur la conclusion, l'interprétation ou l'exécution des contrats mentionnés aux article L. 111-91 à L. 111-94, L. 32111 et L. 321-12 [...], la saisine du comité est à l'initiative de l'une ou l'autre des parties [... ] La décision du comité, qui peut être assortie d'astreintes, est motivée et précise les conditions d'ordre technique et financier de règlement du différend [...] ».
Il ressort des pièces du dossier que la saisine de Madame Caroline ALIOTTI concerne les modalités de raccordement d'une installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution.
Dans ces conditions, le comité de règlement des différends et des sanctions est compétent pour en connaître en vertu des dispositions des articles L. 134-19 et L. 134-20 du code de l'énergie.
Sur la recevabilité de la demande de Madame Caroline ALIOTTI
La société ERDF soutient, également, que Madame Caroline ALIOTTI n'est pas utilisateur du réseau et n'aurait, donc, pas qualité pour saisir le comité de règlement des différends et des sanctions.
Cependant, il ressort des pièces du dossier que la société ERDF a toujours considéré Madame Caroline ALIOTTI comme utilisateur du réseau et n'a apporté dans ses écritures devant le comité de règlement des différends et des sanctions aucun élément établissant que Madame Caroline ALIOTTI, quand bien même elle ne serait pas exploitant agricole, n'aurait pas la qualité d'utilisateur de réseau au titre du projet de centrale photovoltaïque qui a fait l'objet de la demande de raccordement en date du 31 août 2010.
Par conséquent, la fin de non-recevoir ne peut qu'être écartée.
Sur l'acceptation de l'offre de raccordement par Madame Caroline ALIOTTI, le 1er décembre 2010
Madame Caroline ALIOTTI demande au comité de règlement des différends et des sanctions, d'une part, de constater, avec toutes conséquences de droit, qu'elle a accepté l'offre de raccordement de son installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution, le 1er décembre 2010, et, d'autre part, d'ordonner à la société ERDF de lui confirmer officiellement l'acceptation de l'offre de raccordement n° 2010005544, à la date du 1er décembre 2010.
Madame Caroline ALIOITI fait valoir qu'elle a accepté l'offre de raccordement le 1 er décembre 2010
La société ERDF, quant à elle, soutient que le devis n'a été créé que le 6 décembre 2010 et, qu'en tout état de cause, la proposition technique et financière n'a été validée que le 7 décembre 2010 et n'a jamais été envoyée à Madame Caroline ALIOTTI.
Il ressort des pièces du dossier, que Madame Caroline ALIOTTI a signé, avec la mention manuscrite « Fait à Cavaillon, le 1er décembre 2010 », un devis de travaux n° D325/070765/001002 sur lequel figure, à côté de la signature de la société ERDF, un tampon portant la mention « payé le 1er décembre 2010 » et a versé deux chèques d'acompte pour un montant total de 6.000 euros faisant l'objet de deux attestations signées par la société ERDF le 1er décembre 2010.
La procédure de traitement des demandes de raccordement individuel en BT de puissance supérieure à 36 kVA et en HTA, au réseau public de distribution géré par ERDF, qui fait partie de la documentation technique de référence de la société ERDF, prévoit en son article 8.3.4 que l'« accord sur l'offre de raccordement est matérialisé par la réception d'un exemplaire original, daté et signé, de l'offre de raccordement, sans modification ni réserve, accompagné du règlement de l'acompte ou de l'ordre de service signé correspondant ». Cette procédure prévoit, également, en son article 4.5 que l'offre de raccordement correspond à la « Proposition Technique et Financière (PTF) relative au raccordement d'une installation de production ».
Il en résulte nécessairement que la matérialisation de l'accord intervient à la date de réception de l'ensemble de ces documents par la société ERDF.
Or, à la date du 1er décembre 2010 aucune proposition technique et financière n'avait été notifiée par la société ERDF à Madame Caroline ALIOTTI, qui ne pouvait, donc, pas la retourner, le même jour, signée à la société ERDF.
Dans ces conditions et sans qu'il soit besoin de se fonder sur l'article 3 du décret du 9 décembre 2010 susvisé, la demande de Madame Caroline ALIOTTI tendant à ce que le comité de règlement des différends et des sanctions constate qu'elle a accepté l'offre de raccordement de son installation de production photovoltaïque au réseau public de distribution, le 1er décembre 2010, et ordonne à la société ERDF de lui confirmer officiellement l'acceptation de l'offre de raccordement, à la date du 1er décembre 2010, ne peut être que rejetée.
Sur la méconnaissance par la société ERDF de ses obligations contractuelles et réglementaires, et de sa documentation technique de référence
Madame Caroline ALIOTTI demande au comité de règlement des différends et des sanctions de constater que la société ERDF a méconnu ses obligations contractuelles et réglementaires, tout comme sa propre documentation technique de référence.
La procédure de traitement des demandes de raccordement susvisée, qui fait partie de la documentation technique de référence de la société ERDF, prévoit en son article 8.2.1 qu'à « compter de la date de qualification de la demande de raccordement, le délai de transmission au demandeur de l'offre de raccordement ne dépassera pas le délai défini dans le barème de raccordement pour le type d'installation concernée. Ce délai n'excédera pas trois mois quel que soit le domaine de tension de raccordement ».
Il ressort des pièces du dossier que la proposition technique et financière n'a pas été notifiée, dans le délai de trois mois, par la société ERDF à Madame Caroline ALIOTTI, ce qui constitue une méconnaissance par la société ERDF de sa documentation technique de référence qui prévoit sa transmission dans un délai qui « n'excédera pas trois mois ».
Madame Caroline ALIOTTI est, donc, fondée à invoquer la méconnaissance par la société ERDF de ses obligations et de sa documentation technique de référence.
* *
DÉCIDE :
Article 1er.- L'exception d'incompétence et la fin de non-recevoir soulevées par la société Électricité Réseau Distribution France sont rejetées.
Article 2.- La société Électricité Réseau Distribution France a méconnu sa documentation technique de référence.
Article 3.- Le surplus des demandes de Madame Caroline ALIOTTI est rejeté.
Article 4.- La présente décision sera notifiée à Madame Caroline ALIOTTI et à la société Électricité Réseau Distribution France. Elle sera publiée au Journal officiel de la République française.