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Décisions

Cass. crim., 11 janvier 1996, n° 95-81.776

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

Fort-de-France, du 02 fév. 1995

2 février 1995

Sur le moyen unique de cassation proposé pour Patrick Y... et pris de la violation des articles 60 du Code pénal abrogé, 121-7 du Code pénal, 425- 4o de la loi du 24 juillet 1966, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :

" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré Patrick Y... coupable de complicité du délit d'abus de biens sociaux au préjudice de la SARL Berdal Touristique, reproché à Raymond X... ;

" aux motifs que l'existence d'une caisse noire est reconnue par le prévenu ; que les ordres de l'employeur ne peuvent être considérés comme constitutifs d'une contrainte morale ; que Patrick Y... a déclaré, au cours de l'enquête et de l'information, que Raymond X... utilisait, à sa connaissance, une partie des sommes à des fins étrangères au fonctionnement de la société ;

" alors, d'une part, que la comptabilité suppose l'existence d'un fait principal punissable qualifié crime ou délit ; qu'en l'espèce le délit d'abus de biens sociaux reproché à Raymond X... supposait des actes d'usage contraire à l'intérêt social ; que la cour d'appel qui, ayant estimé démontrée l'existence d'une caisse noire, a constaté qu'une partie des fonds ayant transité par cette caisse servait à faire face aux charges d'exploitation de la société (c'est-à-dire étaient utilisés dans l'intérêt social) et qui s'est bornée à présumer que le solde avait " dès lors " été utilisé par M. X... à des fins personnelles, et à déduire cette prétendue utilisation personnelle d'une incapacité du gérant, lequel ne rapportait pas la charge de cette preuve, à démontrer l'utilisation de la totalité des sommes pour financer la trésorerie de la société, n'a pas établi, à l'encontre de l'auteur principal, des faits d'usage à des fins personnelles et dans un but contraire à l'intérêt de la société ; qu'il s'ensuit que, faute d'avoir caractérisé le délit principal d'abus de biens sociaux, la cour d'appel ne pouvait condamner Patrick Y... pour complicité de ce délit ;

" alors, d'autre part, que l'élément intentionnel du délit de complicité doit être apprécié au moment des faits ; qu'en se bornant à énoncer que Patrick Y... avait, au cours de l'enquête et de l'information, émis l'avis que M. X... pouvait avoir utilisé une partie des sommes à des fins étrangères au fonctionnement de la société, sans caractériser, à l'encontre de Patrick Y..., une participation consciente et volontaire, au moment des faits soit en 1985 et 1986, au délit reproché à Raymond X..., la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ;

" alors, enfin, que les faits reprochés à Raymond X... se situent, selon la prévention, " courant 1985 et jusqu'en septembre 1986 ", tandis que les faits de complicité reprochés à Patrick Y... auraient eu lieu, selon la prévention, " courant 1984, 1985 et jusqu'en septembre 1986 " ; qu'en omettant de préciser en quoi Patrick Y... se serait, en 1984, rendu coupable de complicité d'un délit commis en 1985 et 1986, la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale ".

Attendu que les énonciations de l'arrêt attaqué mettent la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que la cour d'appel, par des motifs exempts d'insuffisance et répondant aux chefs péremptoires des conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs, tant matériels qu'intentionnel, la complicité du délit d'abus de biens sociaux dont elle a déclaré le prévenu coupable ;

D'où il suit que le moyen, qui se borne à remettre en question l'appréciation souveraine par les juges du fond des faits et circonstances de la cause ainsi que de la valeur des éléments de preuve contradictoirement débattus devant eux, ne saurait être admis ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE les pourvois.