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Décisions

CA Reims, 8 janvier 2019, n° 18/01441

REIMS

Arrêt

Confirmation

PARTIES

Demandeur :

Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est

Défendeur :

Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne (SA), Banque Kolb (SA), Société Générale (SA), BNP Paribas (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Martin

Conseillers :

Mme Maussire, Mme Mathieu

Avocats :

SCP ACG & Associés, SCP FWF Associés, Me Hubsch, SCP Badre Hyonne Sens Salis Denis Roger, Me Desgrippes, Me Ducasse

T. com. Reims, du 5 juin 2018

5 juin 2018

EXPOSE DU LITIGE :

La société B. exerçait l'activité de fabrication de vins effervescents et avait pour président M. Michel B..

Le 18 janvier 2006, la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est (CRCA) a consenti à la société B. une convention globale de trésorerie pour un montant de 920 000 euros à titre principal.

En garantie, la société B. a affecté 134 000 bouteilles de 75 cl de vins appellation champagne.

Cet engagement de garantie a été inscrit à la recette des douanes le 8 mars 2006.

La Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne (BPALC), la banque Kolb et la BNP Paribas ont également fourni des aides financières et obtenu des engagements de garantie de même nature.

La BPALC détient un billet à ordre depuis le 14 octobre 2005 et la banque Kolb (pour son premier engagement) depuis le 15 décembre 2005.

La Société Générale a pris un gage individualisé avec dépossession portant sur un stock de bouteilles grillagé.

Pour l'ensemble des banques, le total des fonds représentait une somme de 3.563.825 euros garantis par l'affectation de 522 533 bouteilles de champagne.

Par jugement du 2 mars 2010, le tribunal de commerce de Reims a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l'encontre de la société B..

Maître Deltour a été désigné en qualité de mandataire judiciaire et la SELARL Cabooter en qualité d'administrateur judiciaire.

Tous les créanciers titulaires d'engagements de garantie ou d'un gage avec dépossession ont été admis définitivement à titre nanti et privilégié au passif de la société B..

Le 9 décembre 2010, le service des douanes de la recette régionale de Champagne Ardenne a alerté les différents organismes bancaires que le stock de vins détenu était insuffisant pour garantir les quantités données en garantie.

Maître Cabooter a confirmé ce point le 14 janvier 2011.

Par jugement du 25 janvier 2011, le tribunal de commerce de Reims a prononcé la liquidation judiciaire de la société B. et a désigné Maître Deltour en qualité de mandataire liquidateur (celui ci sera remplacé par Maître Riquelme le 29 février 2016).

Par ordonnance du 8 février 2012, M. P., expert, a été désigné par le juge commissaire pour dresser un inventaire détaillé des stocks de la société B..

Dans son rapport du 15 juin 2012, cet expert a constaté que la synthèse des volumes de vins susceptibles d'être revendiqués ou appartenant à des tiers était supérieure au volume des vins répertoriés dans les locaux de la société B..

Le 5 juin 2012, la CRCA a déposé au greffe du tribunal de commerce une requête aux fins de voir prononcer l'attribution judiciaire des 134 000 bouteilles de champagne données en garantie de la convention globale de trésorerie au motif que les biens de la société B. n'étaient toujours pas vendus.

Le 23 septembre 2014, Maître Deltour a déposé une requête aux fins d'autoriser la vente aux enchères publiques des stocks entreposés composant l'actif de la société B..

Le 4 novembre 2014, la BPALC a déposé une requête aux fins d'autoriser l'attribution judiciaire des 95 000 bouteilles données en garantie à son profit.

Le même jour, la banque Kolb a déposé une requête aux fins d'autoriser l'attribution judiciaire des 92 033 bouteilles données en garantie à son profit.

Par ordonnance du 17 décembre 2014, le juge commissaire a ordonné la vente aux enchères publiques des bouteilles visées dans les requêtes ; a dit et jugé que l'attribution judiciaire sera ordonnée au profit des créanciers titulaires des engagements de garantie et admis définitivement au passif avec cette précision qu'elle porte sur le prix de vente des stocks dans l'ordre de leur inscription auprès des services des douanes ; a désigné M. G. en qualité d'expert et la SCP Guizetti Collet en qualité de commissaire-priseur.

Le 25 mars 2015, le stock a été vendu pour un montant total de 1.280.030 euros TTC.

Par ordonnance du 13 janvier 2016, le juge commissaire a constaté que suite aux différentes expertises ordonnées, le stock déclaré par M. B. n'était pas exact, la déclaration faite aux douanes montrant une différence de 120 000 bouteilles et le nombre de bouteilles warrantées dépassant largement le stock et que les différents créanciers détenaient une garantie sur un stock commun ; il a fixé le montant de la somme nette disponible et la répartition des fonds pour chaque banque au prorata de leurs créances respectives.

La CRCA a formé opposition à cette ordonnance le 25 janvier 2016.

Le 26 avril 2016, la BPALC a saisi le juge commissaire d'une requête en rectification d'erreur matérielle contenue dans cette même ordonnance.

Par décision du 13 juillet 2016, le juge commissaire a ordonné la rectification de l'erreur matérielle affectant l'ordonnance frappée d'opposition portant sur le montant de la somme à distribuer entre chacune des banques.

Par requête du 25 juillet 2016, la CRCA a contesté, à titre conservatoire, l'ordonnance rendue le 13 juillet 2016.

Par jugement du 12 octobre 2016, le tribunal a ordonné la jonction des affaires ayant pour objet ces deux oppositions en date des 25 janvier et 25 juillet 2016.

La CRCA a fait valoir en première instance :

- qu'il devait être constaté qu'un jugement avait été rendu le 17 décembre 2014 par le juge commissaire, que cette décision avait autorité de chose jugée, que le juge était dessaisi à cette date et qu'il y avait donc lieu d'annuler les ordonnances rendues les 13 janvier et 13 juillet 2016,

- qu'en tout état de cause, il devait être constaté la primauté du droit d'inscription de la CRCA à la recette des douanes et partant la primauté du droit de rétention de la CRCA sur les garanties prises par les autres banques sur les mêmes bouteilles.

Par jugement du 5 juin 2018, le tribunal de commerce de Reims :

- a reçu la CRCA en ses oppositions aux ordonnances du juge commissaire des 13 janvier et 13 juillet 2016 mais les a déclarées mal fondées,

- a confirmé l'ordonnance rendue le 13 juillet 2016 en ce qu'elle a ordonné la répartition entre toutes les banques créancières,

- a dit que la somme de 265 447,52 euros devait être attribuée à la Société Générale,

- a modifié l'ordonnance rendue par le juge commissaire s'agissant du quatum et des taux de répartition,

- a dit que les organes de la procédure devaient se faire confirmer par la Caisse des Dépôts et Consignations le montant exact des fonds bloqués au bénéfice de la procédure et ce, avant de procéder à la répartition ordonnée par le présent jugement,

- a débouté M. B. de sa demande de répartition à parts égales entre les établissements financiers,

- a dit que le montant disponible à répartir était de 733 907,75 euros,

- a ordonné la répartition de cette somme comme suit :

* 222 836,68 euros pour la CRCA

* 96 885,51 euros pour la banque Kolb

* 147 750,41 euros pour la BPALC

* 48 442,76 euros pour la banque Kolb

* 217 992,40 euros pour la BNP Paribas

- a dit que dès réception de la confirmation du montant exact des fonds bloqués au bénéfice de la procédure, la répartition devait être effectuée selon les pourcentages de 30,3630 % pour la CRCA, 13,2013 % pour la banque Kolb (1er dossier), 20,1320 % pour la BPALC, 6,6007 % pour la banque Kolb (2ème dossier) et 29,7030 % pour la BNP Paribas,

- a condamné la CRCA à payer à la BPALC la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné la CRCA à payer à la banque Kolb la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a condamné la CRCA à payer à la SELARL Amandine Riquelme, ès qualités, la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- a ordonné l'exécution provisoire du jugement,

- a condamné la CRCA aux dépens.

Les juges consulaires ont considéré :

- sur la question de l'autorité de chose jugée de la décision du 17 décembre 2014 revendiquée par la CRCA, que cette décision était une ordonnance prenant des dispositions d'ordre organisationnel, que les difficultés liées à l'insuffisance du stock n'y avaient pas été explicitement abordées, qu'elle était donc par définition de nature gracieuse et qu'il ne s'agissait pas d'un jugement tranchant une contestation sur un litige, de sorte que le juge commissaire n'était pas dessaisi et qu'il pouvait statuer à nouveau après cette décision ; que le produit de la vente aux enchères était de près de 55% inférieur au montant de l'estimation de l'expert, M. P., et qu'il ne couvrait plus que très partiellement les créances des établissements bancaires, de sorte qu'il s'agissait d'une circonstance qui justifiait que la décision gracieuse du 17 décembre 2014 soit rapportée ; que le juge commissaire avait légitimement rendu une ordonnance le 13 janvier 2016 rectifiée le 13 juillet 2016 décidant d'une répartition au marc l'euro au bénéfice de chaque banque créancière, hormis la Société Générale dont les bouteilles étaient individualisées,

- que sur le quantum, il convenait de le modifier pour tenir compte du produit de la vente,

- que sur la répartition, les engagements de garantie de la CRCA, de la banque Kolb et de la BPALC avaient été inscrits le même jour - le 8 mars 2006 - sur le registre des douanes, qu'il n'existait aucune hiérarchie entre des inscriptions réalisées le même jour et qu'il convenait de s'inspirer des dispositions régissant le règlement des créanciers de même rang dans le cadre des procédures collectives, soit au marc le franc (enréalité au marc l'euro) ; que l'ordonnance du 13 juillet 2016 devait donc être confirmée sur ce point mais modifiée s'agissant des taux de répartition.

Par déclaration reçue le 5 juillet 2018, la CRCA a formé appel de cette décision.

Par conclusions du 29 octobre 2018, elle demande à la cour :

Vu les articles 480 du code de procédure civile, 56 et suivants du code du vin, 661 et 662 du code rural ancien, L342-4 du code rural, 2285 et 2425 du code civil,

Vu le décret-loi du 23 octobre 1935 et la notice circulaire relative au warrantage du vin de champagne,

Vu la jurisprudence,

A titre principal, sur l'appel nullité :

- de dire la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est régulière et bien fondée en son appel,

- d'infirmer le jugement du 5/06/2018 rendu par le tribunal de commerce de Reims en ce qu'il n'a pas fait droit à la nullité des ordonnances soulevée par la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est,

Et statuant à nouveau,

- de constater qu'un jugement a été rendu le 17 décembre 2014 dans l'affaire RG n°2012 004256,

En conséquence, de constater le dessaisissement du juge commissaire à la date du 17 décembre 2014,

En conséquence, de dire et juger nulles et de nul effet les ordonnances rendues le 13 janvier 2016 et le 13 juillet 2016,

En conséquence, de dire et juger nul et de nul effet le jugement du tribunal de commerce du 5/06/2018,

A défaut à titre subsidiaire :

- d'infirmer le jugement du 5/06/2018 en tous les chefs du jugement critiqués dans la déclaration d'appel et son annexe,

- de constater la primauté du droit d'inscription de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est à la recette des douanes ; dès lors, de constater la primauté du droit de rétention de la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est sur les garanties prises par les autres banques,

- d'ordonner à Maître Riquelme, ès qualités de liquidateur de la société B., de répartir le prix de vente assorti de la consignation entre les mains de la Caisse des Dépôts et Consignations selon le numéro d'inscription de la garantie de chaque créancier auprès des services des douanes conformément à l'ordonnance définitive du 17 décembre 2014,

- en tout état de cause, de condamner Maître Riquelme, ès qualités de liquidateur de la société B., à verser à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est la somme de 920 000 euros en deniers ou quittances sur le prix de vente des stocks et des fonds détenus à la Caisse des Dépôts,

- en tout état de cause,

* de rejeter les demandes des intimées au titre de l'article 700 du code de procédure civile et des dépens de première instance et d'appel,

* de condamner solidairement les défendeurs à l'opposition à payer à la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, ainsi qu'aux entiers dépens.

Par conclusions du 22 octobre 2018, M. B. demande à la cour :

Vu le décret-loi du 23 octobre 1935 portant facilités nouvelles aux viticulteurs pour le financement de leurs récoltes, et la circulaire du 15 mars 2012,

Vu les articles 56 et suivants du code du vin,

Vu les articles 661 et 662 du code rural ancien,

- de déclarer l'appel de la CRCA recevable mais mal fondé,

En conséquence,

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Reims le 5 juin 2018 dans l'intégralité de ses dispositions, et notamment en ce qu'il a :

Confirmé l'ordonnance rendue par Monsieur le juge commissaire le 13 juillet 2016 en ce qu'elle a ordonné la répartition entre toutes les banques créancières,

Dit et jugé que la somme de 265 447,52 euros sera attribuée à la Société Générale,

Modifié l'ordonnance rendue par Monsieur le juge commissaire le 13 juillet 2016 s'agissant du quantum et des taux de répartition,

Dit et jugé que les organes de la procédure devront se faire confirmer par la Caisse des Dépôts et Consignations le montant exact des fonds bloqués au bénéfice de la procédure, et ce avant de procéder à la répartition ordonnée par le présent jugement,

Débouté Monsieur B. de sa demande de répartition à parts égales entre les établissements financiers,

Dit et jugé que le montant disponible à répartir est de 733.907,75 euros,

Ordonné la répartition de la somme de 733.907,75 euros disponible comme suit :

* 733 907,75 x 30,3630 % soit 222 836,68 euros pour la CRCA

* 733 907,75 x 13,2013 % soit 96 885,51 euros pour la banque Kolb

* 733 907,75 x 20,1320 % soit 147 750,41 euros pour la BPALC

* 733 907,75 x 6,6007 % soit 48 442,76 euros pour la banque Kolb

* 733 907,75 x 29,7030 % soit 217 992,40 euros pour la BNP Paribas

Dit et jugé que, dès réception de la confirmation de la Caisse des Dépôts et Consignations du montant exact des fonds bloqués au bénéfice de la procédure, la répartition de ce montant sera effectuée, par le mandataire, selon les mêmes critères de pourcentages et de bénéficiaires que ci-dessus, soit :

* 30,3630 % pour la CRCA

* 13,2013 % pour la banque Kolb

* 20,1320 % pour la BPALC

* 6,6007 % pour la banque Kolb

* 29,7030 % pour la BNP Paribas

Y ajoutant,

- de dire et juger que la somme consignée auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations est de 280 000 euros,

- d'ordonner la répartition de la somme de 280 000 euros comme suit :

* 280 000 x 30,3630 % soit 85 016,40 euros pour la CRCA

* 280 000 x 13,2013 % soit 36 963,64 euros pour la banque Kolb

* 280 000 x 20,1320 % soit 56 369,60 euros pour la BPALC

* 280 000 x 6,6007 % soit 18 481,96 euros pour la banque Kolb

* 280 000 x 29,7030 % soit 83 168,40 euros pour la BNP Paribas

En tout état de cause,

- de débouter l'ensemble des parties de l'ensemble de leurs prétentions plus amples ou contraires,

- de condamner la CRCA à payer à Monsieur B. la somme de 5 000 euros au titre de l'article 700 du code de procédure civile,

- de la condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel.

Par conclusions du 10 octobre 2018, Maître Riquelme, ès qualités, demande à la cour :

Vu les articles 661 et 662 du code rural ancien,

Vu l'article L 643-8 du code de commerce,

- de confirmer le jugement en l'intégralité de ses dispositions,

Y ajoutant,

- de dire et juger que le montant consigné auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations le 11 février 2011 est de 280 000 euros et d'ordonner la répartition comme suit :

* 280 000 x 30,3630 %, soit 85 016,40 euros pour la CRCA,

* 280 000 x 13,2013 %, soit 36 963,64 euros pour la banque Kolb,

* 280 000 x 20,1320 % soit 56 369,60 euros pour la BPALC,

* 280 000 x 6,6007 %, soit 18 481,96 euros pour la banque Kolb,

* 280 000 x 29,7030 % soit 83 168,40 euros pour la BNP Paribas

A titre subsidiaire,

- de dire et juger que Maître Riquelme, ès qualités, répartira le prix de vente des stocks de vins entreposés dans les locaux de la société selon l'ordre d'inscription des engagements de garantie à l'administration des douanes,

En tout état de cause,

- de condamner la CRCA à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la CRCA aux dépens avec distraction.

Par conclusions du 23 octobre 2018, la BPALC demande à la cour :

Vu les articles 661 et 662 du code rural ancien,

Vu l'article L643-8 du code de commerce,

A titre principal,

- de confirmer le jugement rendu par le tribunal de commerce de Reims le 5 octobre 2018 en l'intégralité de ses dispositions et notamment en ce qu'il a :

Confirmé l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 13 juillet 2016 s'agissant du quantum et des taux de répartition,

Dit et jugé que la somme de 265 447,52 euros sera attribuée à la Société Générale,

Modifié l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 13 juillet 2016 s'agissant du quantum et des taux de répartition,

Débouté Monsieur B. de sa demande de répartition à parts égales entre les établissements financiers,

Dit et jugé que le montant disponible à répartir est de 733 907,75 euros,

Ordonné la répartition de la somme de 733.907,75 euros disponible comme suit :

* 733 907,75 x 30,3630 % soit 222 836,68 euros pour la CRCA

* 733 907,75 x 13,2013 % soit 96 885,51 euros pour la Banque Kolb

* 733 907,75 x 20,1320 % soit 147 750,41 euros pour la BPALC

* 733 907,75 x 6,6007 % soit 48 442,76 euros pour la Banque Kolb

* 733 907,75 x 29,7030 % soit 217 992,40 euros pour la BNP Paribas

Dit et jugé que, dès réception de la confirmation de la Caisse des Dépôts et Consignations du montant exact des fonds bloqués au bénéfice de la procédure, la répartition de ce montant sera effectuée par le mandataire, selon les mêmes critères de pourcentages et de bénéficiaires que ci dessus, soit :

* 30,3630 % pour la CRCA

* 13,2013 % pour la Banque Kolb, 1er dossier

* 20,1320 % pour la BPALC

* 6,6007 % pour la Banque Kolb, 2ème dossier

* 29,7030 % pour la BNP Paribas

Condamné la CRCA à verser à la BPALC la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la CRCA à verser à la Banque Kolb la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Condamné la CRCA à verser à la SELARL Amandine Riquelme prise en la personne de Maître Amandine Riquelme ès qualités la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile,

Rejeté toutes autres demandes, fins et conclusions des parties,

Y ajoutant,

- de dire et juger que le montant consigné auprès de la Caisse des Dépôts et de Consignations le 11 février 2011 est de 280 000 euros,

- d'ordonner la répartition de la somme de 280 000 euros comme suit :

* 280 000 x 30,3630 % soit 85 016,40 euros pour la CRCA

* 28 .000 x-13,2013 % soit 36 963,64 euros pour la Banque Kolb

* 280 000 x 20,1320 % soit 56 369,60 euros pour la BPALC

* 280 000 x 6,6007 % soit 18 481,96 euros pour la Banque Kolb

* 280 000 x 29,7030 % soit 83 168,40 euros pour la BNP Paribas

A titre subsidiaire,

- de dire et juger que Maître Amandine Riquelme, ès qualités de mandataire liquidateur de la société B., répartira le prix de vente des stocks de vins entreposés dans les locaux de la société selon l'ordre d'inscription des engagements de garantie à l'administration des douanes,

En tout état de cause,

- de débouter les parties de l'intégralité de leurs demandes plus amples ou contraires,

- de condamner la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel du Nord Est à verser à la BPALC la somme de 5 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés à hauteur de cour d'appel en application de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la Caisse Régionale du Crédit Agricole Mutuel du Nord Est aux entiers dépens de la présente instance avec distraction.

Par conclusions du 22 octobre 2018, la banque Kolb forme les mêmes demandes que la BPALC.

Par conclusions du 20 octobre 2018, la Société Générale demande à la cour :

- de confirmer le jugement en ce qu'il a dit et jugé que la somme de 265 447,52 euros sera attribuée à la Société Générale,

- de condamner la CRCA à lui payer la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile,

- de condamner la CRCA aux dépens.

Par conclusions du 24 octobre 2018, la BNP Paribas demande à la cour :

Sur le fondement du décret-loi du 23 octobre 1935,

- de dire et juger mal fondé l'appel formé par la CRCA,

- de confirmer le jugement en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

- d'ordonner la répartition de la somme de 280 000 euros consignée auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations selon la proportion déterminée par le tribunal, soit en ce qui concerne BNP Paribas : 280 000 euros x 29,7030 % soit 83 168,40 euros,

- de condamner la CRCA à lui payer la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.

MOTIFS DE LA DECISION :

Sur l'autorité de chose jugée de l'ordonnance rendue par le juge commissaire le 17 décembre 2014 :

La CRCA soutient :

- que l'ordonnance du 13 janvier 2016, rendue de manière non contradictoire, ne pouvait revenir sur l'ordonnance déjà rendue dans cette affaire le 17 décembre 2014 n'ayant fait l'objet d'aucun recours et revêtue de l'autorité de la chose jugée par application de l'article 480 du code de procédure civile, l'ordonnance du 13 juillet 2016 ne le pouvant pas non plus dès lors que la précédente ordonnance était de nature juridictionnelle et non gracieuse et que ce magistrat était dessaisi par la décision rendue,

- qu'il était clair dès avant le prononcé de la décision du 17 décembre 2014 pour l'ensemble des parties que le prix de vente ne suffirait pas à désintéresser toutes les banques (au regard de la fiche d'anomalie des douanes, du rapport de l'administrateur judiciaire et des deux expertises ordonnées) et que, ayant effectué sa déclaration auprès de la recette locale puis ayant obtenu un enregistrement de son warrant antérieurement aux autres banques, elle devait être payée par priorité,

- que même à considérer que l'ordonnance puisse revêtir un caractère gracieux, le constat de l'insuffisance en prix des bouteilles vendues était largement connu avant, de sorte qu'il n'existait aucune circonstance nouvelle justifiant qu'elle soit modifiée, étant précisé que l'ordonnance du 17 décembre 2014 a été rendue en visant l'accord des banques,

- que, de manière inexplicable, personne ne lui ayant rien demandé, la deuxième ordonnance modifie les droits de la CRCA et revient sur l'ordre de répartition alors que cette question avait déjà été tranchée.

La BPALC, la banque Kolb la BNP Paribas et Maître Riquelme, ès qualités, dénient le caractère d'autorité de chose jugée à la décision du juge commissaire rendue le 17 décembre 2014 qui pouvait, en tout état de cause, la modifier pour tenir compte de la circonstance nouvelle de l'insuffisance du stock pour désintéresser l'ensemble des créanciers détenteurs d'un gage.

La Société Générale fait valoir de son côté que n'étant pas partie à la procédure, les dispositions de l'ordonnance du 17 décembre 2014 dont se prévaut la CRCA pour obtenir d'être payée en priorité et se faire attribuer l'intégralité du prix de vente des stocks lui sont inopposables.

La nature des ordonnances rendues par le juge commissaire - gracieuse ou contentieuse - n'a pas été déterminée par la législation spécifique applicable en matière de procédures collectives et il convient de se référer sur ce point, à défaut de texte spécifique, à l'article R 662-1 du code de commerce qui renvoie aux règles du code de procédure civile.

Suivant les dispositions de l'article 480 du code de procédure civile, le jugement qui tranche dans son dispositif tout ou partie du principal a, dès son prononcé, l'autorité de la chose jugée relativement à la contestation qu'il tranche.

Ce texte n'évoque certes que le jugement et pas l'ordonnance que peut également rendre le magistrat.

Néanmoins, la nature intrinsèque de la décision - jugement ou ordonnance - est indifférente et ce d'autant que le juge commissaire, aux termes de l'article R 621-21 du code de commerce, ne statue que par ordonnance et que certaines de ses décisions peuvent néanmoins être revêtues de l'autorité de la chose jugée.

En réalité, il convient de déterminer au cas par cas si le juge commissaire, à l'occasion de la procédure dont il est saisi, a véritablement tranché une contestation, - dès lors, sa décision, de nature contentieuse, est revêtue de l'autorité de la chose jugée -, ou s'il s'est contenté de statuer en matière gracieuse, auquel cas sa décision est dépourvue d'autorité de la chose jugée.

Il ressort de l'article 25 du code de procédure civile que le juge statue en matière gracieuse lorsqu'en l'absence de litige, il est saisi d'une demande dont la loi exige, en raison de la nature de l'affaire ou de la qualité du requérant, qu'elle soit soumise à son contrôle.

Le juge commissaire tient de l'article L 621-9 du code de commerce le devoir de veiller au déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en présence.

En l'espèce, Maître Deltour, ès qualités, a saisi le juge commissaire le 23 septembre 2014 aux fins qu'il soit autorisé à vendre aux enchères publiques les stocks composant l'actif de la société B..

Les trois banques détenant des gages sans dépossession sur les stocks ont également déposé des requêtes aux fins d'autoriser l'attribution judiciaire des bouteilles de champagne données en garantie des prêts accordés.

Il ressort des écritures du mandataire liquidateur que celui-ci avait conclu au rejet de la demande formée par la CRCA aux fins de se voir attribuer judiciairement les 134 000 bouteilles de champagne objet de sa garantie au motif notamment qu'il était impossible de faire droit aux demandes des trois banques en raison de l'insuffisance du stock (pièce n° 12).

Le juge commissaire n'a pas statué sur cette contestation ni abordé les difficultés tenant à l'insuffisance du stock, entendant sans doute, ainsi que le relève à juste titre Maître Riquelme, attendre la vente aux enchères publiques de ce stock pour se prononcer sur la question de la réalisation des gages et du désintéressement des créanciers.

Ce magistrat n'ayant tranché aucun litige, il doit être considéré que l'ordonnance rendue le 17 décembre 2014 n'est pas une décision contentieuse mais gracieuse.

Dès lors, cette décision n'étant pas revêtue de l'autorité de la chose jugée, elle était susceptible d'être rapportée ou modifiée si les circonstances dans lesquelles elle a été rendue avaient elles-mêmes changé.

S'il est exact que les éléments contenus au dossier, notamment les deux expertises réalisées antérieurement à la vente aux enchères par M. P. et M. G. pouvaient logiquement laisser penser que le stock serait insuffisant pour désintéresser l'ensemble des créanciers gagistes, ce n'est que la vente aux enchères publiques de ce stock par Maîtres Guizzetti et Collet, commissaires-priseurs le 25 mars 2015, - événement postérieur à l'ordonnance du 17 décembre 2014 - qui a permis de révéler le fait que le produit de cette vente était de près de 55 % inférieur à l'estimation faite auparavant, due notamment au fait que des vins étaient bouchonnés ou de qualité insuffisante compte tenu des mauvaises conditions de conservation des bouteilles dans un hangar, de sorte qu'il était dès lors avéré que le prix obtenu ne couvrirait de fait que très partiellement les créances détenues par les établissements bancaires.

Cette vente doit, dans ces conditions, être considérée comme une circonstance nouvelle justifiant que l'ordonnance du 17 décembre 2014 soit rapportée et modifiée.

C'est par conséquent à bon droit qu'il a été considéré par les premiers juges que l'ordonnance rendue le 13 janvier 2016 pouvait fixer des modalités de répartition du prix de vente différentes de celles initialement prévues pour tenir compte du montant d'une somme nette disponible à répartir bien inférieure à celle qui avait été prévue.

S'agissant des conditions dans lesquelles l'ordonnance du 13 janvier 2016 a été rendue, il n'est pas envisageable que le juge commissaire se soit auto saisie, comme le soutient l'appelante, même s'il n'est effectivement pas précisé dans cette décision quelle est la partie qui l'a saisi ; il est de bonne logique de considérer que c'est Maître Deltour, alors mandataire liquidateur à la liquidation judiciaire de la société B., qui l'a fait dès qu'il a eu connaissance du produit de la vente.

La CRCA soutient également que l'ordonnance du juge commissaire du 13 janvier 2016 ayant été frappée d'opposition le 25 janvier 2016 et le tribunal de commerce étant saisi de l'entier litige, il n'y avait pas lieu à modifier ladite ordonnance par la voie de la rectification matérielle.

Le juge commissaire, saisi par la BPALC, a rectifié l'ordonnance du 13 janvier 2016 par une seconde décision le 13 juillet 2016 pour tenir compte d'une erreur de calcul commise dans le montant à distribuer entre les différentes banques que les parties s'accordent à considérer comme étant une erreur purement matérielle.

Cette rectification obéit aux conditions fixées par l'article 462 du code de procédure civile qui dispose que les erreurs matérielles qui affectent un jugement, même passé en force de chose jugée, peuvent toujours être réparées par la juridiction qui l'a rendu ou par celle à laquelle il est déféré, selon ce que le dossier révèle ou, à défaut, ce que la raison commande.

La décision du juge commissaire du 13 janvier 2016 a fait l'objet d'un recours obéissant aux règles contenues à l'article R 621-21 alinéa 4 du code de commerce, recours qui n'est juridiquement pas un appel affecté comme tel de l'effet dévolutif prévu par les articles 561 et 562 du code de procédure civile, de sorte que le juge commissaire, même s'il eût été plus opportun qu'il laisse le soin au tribunal de procéder à la rectification, avait la possibilité de rectifier sa précédente décision.

La répartition au marc l'euro des créances admises :

Les établissements bancaires parties au litige ont régulièrement déclaré leurs créances respectives qui ont été admises au passif de la liquidation judiciaire de la société B..

Aux termes de l'article L 643-8 du code de commerce, le montant de l'actif, distraction faite des frais et dépens de la liquidation judiciaire, des subsides accordés au débiteur personne physique ou aux dirigeants ou à leur famille et des sommes payées aux créanciers privilégiés, est réparti entre tous les créanciers au marc le franc de leurs créances admises.

La CRCA soutient :

- que le juge commissaire s'est fondé sur des règles erronées pour motiver son ordonnance et qu'il convenait de juger que c'est l'inscription par l'administration des douanes qui confère au prêteur un privilège mobilier de 1er ordre et qui rend cette garantie effective (elle justifie d'un numéro d'inscription antérieur aux autres), et ce par application de l'article 56 du code du vin repris aux articles 661 et 662 du code rural ancien,

- que toutes les banques ont été mises sur un pied d'égalité alors que leurs garanties n'ont pas été prises en même temps et qu'elles étaient d'accord sur la primauté de l'engagement de la CRCA,

- que le tribunal ne pouvait qu'écarter la garantie des autres banques et considérer les engagements portant sur les mêmes stocks que celui de la CRCA comme inopposables à celle ci.

La BPALC, la banque Kolb, la BNP Paribas et Maître Riquelme, ès qualités, soutiennent que les banques titulaires d'un engagement de garantie étaient toutes fondées, quelle que soit la date d'inscription de ces derniers auprès du service des douanes qui ne donne aucune priorité, à faire valoir leur droit de rétention sur le prix de vente tel qu'il résulte du jugement du tribunal de commerce à la suite de la vente aux enchères publiques du stock.

La Société Générale rappelle de son côté qu'elle est hors concours et qu'elle prime toutes les autres banques dans la mesure où, à la différence de celle ci, elle dispose d'un gage avec dépossession.

L'engagement de garantie portant sur le vin de champagne est un billet à ordre régi par le décret-loi du 23 octobre 1935 portant facilités nouvelles aux viticulteurs pour le financement de leurs récoltes au terme duquel les prêts consentis à des producteurs de vin peuvent faire l'objet d'un engagement de garantie sur récoltes si celles-ci ne sont pas déjà warrantées.

Il s'agit d'une sûreté spécifique en matière viticole appelée également "warrant simplifié".

L'appelante invoque tour à tour la notice circulaire warrantage du vin de champagne du 15 mars 2002, l'article 56 du code du vin et l'article L 342-4 du code rural relatif au warrant agricole pour considérer que c'est l'inscription qui confère au prêteur son privilège.

Il convient de rappeler qu'une circulaire n'a qu'une portée interne à l'administration douanière et qu'elle n'est pas opposable aux tiers.

L'article 56 du code du vin, qui disposait que l'inscription confère au prêteur sur une quantité déterminée de vin un privilège de premier ordre et de même nature que celui d'un porteur de warrant agricole n'est plus en vigueur depuis le 6 septembre 2003, date à laquelle le code du vin a été abrogé.

Les articles 661 et 662 du code rural ancien auxquels fait également référence la CRCA ne reprennent pas dans les mêmes termes l'article 56 abrogé.

Enfin, il ne peut être opéré aucune similitude avec les règles applicables au warrant agricole dans la mesure où ce dernier est un crédit à court terme demandé par un agriculteur pour une récolte future alors que le warrant dit "simplifié" concerne un emprunt souscrit par un viticulteur pour financer son stock après que la récolte de raisin a été effectuée, et ce jusqu'à la vente des bouteilles après transformation du fruit.

Ainsi, à la différence du warrant agricole, le bien donné en gage est un stock de vin en bouteilles et non une récolte à venir.

Au surplus, le warrant agricole est enregistré au greffe du tribunal d'instance sur un registre spécial, ce qui lui confère une certaine publicité, à la différence du warrant dit "simplifié" qui ne fait l'objet d'aucune mesure de publicité auprès des tiers autre que celle de la possibilité de savoir si un stock de vin a été ou non donné en gage.

En raison de leurs règles distinctes, l'engagement de garantie, warrant spécifique aux vins de champagne, ne peut être assimilé au warrant agricole et obéir au même principe de primauté du privilège du fait de son inscription.

Sans aller jusqu'à considérer que l'engagement de garantie portant sur le vin de champagne serait une sûreté occulte à la différence du warrant agricole comme l'a écrit le tribunal, force est de constater :

- que les numéros attribués par la Direction Régionale des Douanes de Picardie à la suite des enregistrements effectués le même jour par la CRCA, la BPALC et la banque Kolb (pour sa première créance), soit le 8 mars 2006, sont le résultat d'une organisation interne de l'agent enregistreur, de sorte qu'il ne peut être octroyé aucune primauté de la CRCA sur les deux autres établissements bancaires, le fait qu'il lui ait été délivré le premier numéro étant le fruit du hasard et non la conséquence d'une règle particulière de primauté , la banque Kolb ou la BPALC ayant pu, tout aussi bien, se voir attribuer ce premier numéro en lieu et place de la CRCA,

- qu'il ne peut davantage être donné priorité à la date de déclaration préalable (la CRCA se prévaut également de l'antériorité de son privilège à ce titre dans la mesure où la déclaration concernant sa garantie a été souscrite le 20 octobre 2005, les déclarations concernant les garanties des autres banques ayant été souscrites postérieurement à cette date) non plus qu'à la date de l'inscription (les inscriptions de la banque Kolb pour sa seconde créance et de la BNP Paribas sont respectivement du 23 novembre 2006 et du 20 novembre 2008) dans la mesure où :

* c'est le déclarant - en l'occurrence la société B. - qui certifie lorsqu'il effectue sa déclaration qu'il existe un stock suffisant pour désintéresser l'établissement bancaire qui lui a prêté les fonds, étant précisé que cette procédure n'est régie que par la seule bonne foi de celui qui déclare puisqu'il n'existe aucun contrôle externe, que ce soit à ce stade ou à celui de l'inscription au service des douanes de l'engagement de garantie -

et ce, alors que l'enquête ayant abouti à la condamnation pénale de M. B. a démontré que celui-ci avait falsifié ses déclarations de stock

* ainsi que le relèvent à juste titre la BPALC et la banque Kolb dans leurs écritures, les gages détenus - hormis celui de la Société Générale - le sont sans dépossession et les garanties consenties par l'emprunteur sont enregistrées au vu de ses propres déclarations non vérifiées, étant observé que le stock qui est laissé en sa possession est susceptible d'évolution et que le service des douanes n'opère qu'un contrôle a posteriori s'il remarque des invraisemblances ou s'il est saisi d'une dénonciation, aucun contrôle n'étant curieusement effectué au moment où il enregistre les inscriptions

- que l'objet et l'essence même de cette sûreté reposent sur l'existence réelle d'un stock suffisant pour désintéresser le ou les créanciers au bénéfice desquels un engagement de garantie a été pris; que s'il se révèle que c'est à la suite de manoeuvres frauduleuses du déclarant que ce stock est en réalité nettement inférieur à celui ayant fondé les engagements successifs des banques, cette insuffisance ne pouvant être reprochée à celles-ci dans la mesure où la loi ne leur impose pas non plus d'opérer des vérifications sur l'état du stock au moment où l'engagement à leur profit est pris, il est à la fois conforme à l'équité et juridiquement fondé que l'inscription des engagements de garantie, qui repose en réalité sur un socle biaisé - un stock sans dépossession volatile et non vérifié lors de l'inscription des engagements de garantie - , ne confère aucun privilège particulier au profit de la CRCA qui aurait pour effet d'écarter totalement les autres créanciers de toute perception d'une partie du prix de vente du stock,

- que dès lors, les établissements de crédit, qui étaient tous fondés à réclamer la partie du stock engagée à leur bénéfice et qui n'ont pas pu obtenir satisfaction du fait du comportement pénalement répréhensible de M. B., doivent obtenir une répartition au marc l'euro en tenant compte du fait que leurs créances ont été régulièrement déclarées et admises au passif de la société B. et en prenant en considération les règles applicables en matière de procédure collective résultant de l'article L 643-8 du code de commerce susvisé.

C'est par conséquent à bon droit que les premiers juges ont confirmé l'ordonnance du juge commissaire du 13 juillet 2016 et opéré une répartition au marc l'euro des créances respectives des banques bénéficiant d'un engagement de garantie sans dépossession, exclusion préalablement opérée de la somme de 265 447, 52 euros - déduction faite de la TVA et des frais de vente) attribuée à la Société Générale, celle-ci ayant priorité du fait du gage avec dépossession qu'elle détient reporté de plein droit sur le prix de vente par application de l'article L 642-20-1 du code de commerce.

La décision sera confirmée quant au montant disponible à répartir et au pourcentage de répartition ventilé entre les créanciers.

Les fonds détenus à la Caisse des Dépôts et Consignations :

Le tribunal a opéré les mêmes critères de répartition s'agissant des sommes consignées à la Caisse des Dépôts et Consignations et il y a lieu de confirmer la décision sur ce point.

Il a en revanche conditionné la répartition effective à la confirmation par cet organisme du montant exact des fonds bloqués au bénéfice de la procédure.

Il est versé aux débats par le mandataire liquidateur (pièce n° 13) le justificatif de virement le 11 février 2011 de la somme de 280 000 euros provenant de la Caisse des Dépôts et Consignations.

Le document produit présente une fiabilité suffisante pour le prendre en compte sans que soit exigée une attestation de la Caisse des Dépôts et Consignations comme l'a sollicité le tribunal.

La décision sera par conséquent infirmée de ce chef et la somme de 280 000 euros sera répartie comme suit :

* 280 000 x 30,3630 % soit 85 016,40 euros pour la CRCA

* 280 000 x-13,2013 % soit 36 963,64 euros pour la Banque Kolb (1ère créance)

* 280 000 x 20,1320 % soit 56 369,60 euros pour la BPALC

* 280 000 x 6,6007 % soit 18 481,96 euros pour la Banque Kolb (2ème créance)

* 280 000 x 29,7030 % soit 83 168,40 euros pour la BNP Paribas

L'article 700 du code de procédure civile :

La décision sera confirmée.

Succombant en son appel, la CRCA sera déboutée de sa demande sur ce fondement.

Aucune considération liée à l'équité ne justifie qu'il soit fait droit à la demande formée par M. B..

L'équité justifie en revanche que la CRCA soit condamnée à payer :

- à Maître Riquelme, ès qualités de mandataire liquidateur de la société B., la somme de 3 000 euros,

- à la BPALC la somme de 3 000 euros,

- à la banque Kolb la somme de 3 000 euros,

- à la Société Générale la somme de 1 500 euros,

- à la BNP Paribas la somme de 1 500 euros.

Les dépens :

La décision sera confirmée.

La CRCA sera condamnée aux dépens de l'instance d'appel avec recouvrement direct au profit de Maître Hubsch, avocat de Maître Riquelme et de la SCP Badré Hyonne Sens Salis Denis Roger, avocat de la BPALC et de la banque Kolb,

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire,

CONFIRME le jugement rendu le 5 juin 2018 par le tribunal de commerce de Reims en toutes ses dispositions à l'exception de celle relative à la nécessité d'obtenir une attestation de la Caisse des Dépôts et Consignations pour répartir les fonds consignés qu'il y a lieu d'infirmer.

Statuant à nouveau sur ce seul point ;

DIT que le montant consigné auprès de la Caisse des Dépôts et Consignations le 11 février 2011 est de 280 00 euros et que cette somme doit être répartie comme suit entre les créanciers :

* 280 000 x 30,3630 % soit 85 016,40 euros pour la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est

* 280 000 x-13,2013 % soit 36 963,64 euros pour la Banque Kolb (1ère créance)

* 280 000 x 20,1320 % soit 56 369,60 euros pour la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne

* 280 000 x 6,6007 % soit 18 481,96 euros pour la Banque Kolb (2ème créance)

* 280 000 x 29,7030 % soit 83 168,40 euros pour la BNP Paribas

CONDAMNE la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est à payer :

- à Maître Riquelme, ès qualités de mandataire liquidateur de la société B., la somme de 3 000 euros,

- à la Banque Populaire Alsace Lorraine Champagne la somme de 3 000 euros,

- à la banque Kolb la somme de 3 000 euros,

- à la Société Générale la somme de 1 500 euros,

- à la BNP Paribas la somme de 1 500 euros,

et ce, sur le fondement de l'article 700 du code de procédure civile.

DÉBOUTE les autres parties de leur demande à ce titre.

CONDAMNE la Caisse Régionale de Crédit Agricole Mutuel du Nord Est aux dépens de l'instance d'appel avec recouvrement direct au profit de Maître Hubsch, avocat de Maître Riquelme et de la SCP Badré Hyonne Sens Salis Denis Roger, avocat de la BPALC et de la banque Kolb.