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Décisions

Cass. com., 6 mars 1979, n° 77-11.909

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Vienne

Rapporteur :

M. Mallet

Avocat général :

M. Robin

Avocats :

Me de Ségogne, Me Calon

Paris, ch. 3, du 25 janv. 1977

25 janvier 1977

Attendu qu'en application des articles 327 et 330 du nouveau Code de procédure civile, les interventions volontaires ne sont admises devant la Cour de cassation que si elles sont formées à titre accessoire, c'est-à-dire à l'appui des prétentions d'une partie, et elles ne sont recevables que si leur auteur a intérêt, pour la conservation de ses droits, à soutenir cette partie ;

Attendu que seul le troisième moyen de l'intervention du Directeur Général des Impôts appuie les prétentions énoncées dans le pourvoi du syndic : que l'intervention des deux Receveurs-percepteurs n'appuie que les prétentions énoncées dans le pourvoi des sociétés sous-traitantes.

Attendu que, pour la conservation de leurs droits, le Directeur Général des Impôts et les Receveurs-Percepteurs ont intérêt à soutenir respectivement le syndic et les sociétés sous-traitantes ;

Déclare admissible et recevable en son troisième moyen l'intervention du Directeur Général des Impôts au soutien du syndic ; déclare admissible et recevable l'intervention des Receveurs-Percepteurs au soutien des sociétés sous-traitantes ;

Sur la fin de non-recevoir soulevée par la défense concernant la première branche du moyen unique du pourvoi n. 77-11.909 des sociétés sous-traitantes :

Attendu que ces sociétés reprochent à la Cour d'appel d'avoir déclaré le syndic irrecevable en son opposition au versement aux créanciers nantis des sommes dues par les maîtres d'ouvrage à l'Entreprise Coutant ;

Mais attendu que ces sociétés n'ont pas qualité pour assurer la défense des droits et intérêts du syndic dès lors que celui-ci, défendeur au pourvoi, fait défaut ; que le moyen unique du pourvoi n. 77-11.909 est ainsi irrecevable en sa première branche ;

Sur le moyen unique du pourvoi n. 77-11.907 du syndic :

Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir décidé que le privilège des banques, créancières nanties, primait celui des frais de justice alors, selon le pourvoi et l'intervention du Directeur Général des Impôts, d'une part, que l'article 83, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967 n'est pas visé par les articles 2101 et 2104 du Code civil qui fixent l'ordre des privilèges et mettent au premier rang le privilège des frais de justice à la seule exception du super-privilège des salariés qui peut s'exercer en premier en cas de règlement judiciaire ou de liquidation des biens, et alors, d'autre part, que les frais engagés par le syndic à l'occasion du déroulement de la procédure collective profitent, au moins pour partie, aux créanciers bénéficiaires d'un nantissement sur marchés de travaux publics ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni des conclusions du syndic ni de l'arrêt déféré que le syndic ait critiqué les motifs du jugement entrepris et les chefs des conclusions des autres parties à l'instance relevant que, selon l'article 83, alinéa 3, susvisé, le privilège du créancier gagiste prime toute autre créance privilégiée ou non, ou qu'il ait mis en oeuvre les moyens aujourd'hui présentés ; que le syndic a, au contraire, soutenu, dans ses écritures, que le créancier bénéficiaire d'un nantissement sur marché de travaux publics possédait un droit de rétention de sorte que les dispositions précitées étaient applicables à ce créancier ; que le moyen est ainsi nouveau et que, mélangé de fait et de droit, il est irrecevable ;

Sur le moyen unique du pourvoi n. 77-11.909 des sociétés sous-traitantes pris en ses deuxième et troisième branches :

Attendu qu'il est fait grief à la Cour d'appel d'avoir retenu que le privilège des banques créancières nanties sur marchés de travaux publics, devait primer celui des sous-traitants, à la fois parce que les sous-traitants ne justifiaient pas de leur agrément exprès donné par l'autorité compétente et de l'inscription de cet agrément prévus à l'article 194 du Code des marchés publics, à défaut de publication du décret devant déterminer les conditions de l'agrément et les règles concernant l'établissement du registre des agréments, de sorte que la primauté, instaurée à l'article 193 du même Code, de leur privilège sur celui des créanciers nantis ne pouvait être revendiquée, et parce que, dans les cas où l'entrepreneur de travaux publics se trouve, comme en l'espèce, en liquidation des biens, l'article 83, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967 donne un privilège du créancier gagiste, qui possède un droit de rétention, primauté sur tout autre créance, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en l'absence de dispositions réglementaires organisant l'ouverture du registre des agréments prévu à l'article 194 du Code des marchés publics, un sous-traitant ne peut se voir opposer son défaut d'inscription sur ce registre, et alors, d'autre part, que le créancier nanti sur marché, non titulaire du droit de rétention, ne peut invoquer les dispositions de l'article 83, alinéa 3, de la loi du 13 juillet 1967 ;

Mais attendu, en premier lieu, que la Cour d'appel a retenu à juste titre que les dispositions des articles 193 et 194 précités étaient indivisibles et que, si l'agrément que doit donner, selon l'article 194, l'autorité compétente n'avait été, pour une raison quelconque, ni obtenu, ni publié, l'article 193, accordant, sous réserve de l'obtention et de la publication de l'agrément, primauté au privilège du sous-traitant sur celui du créancier nanti, ne pouvait être invoqué ;

Attendu, en second lieu, qu'en cas de conflit entre privilèges spéciaux mobiliers, les privilèges fondés sur la notion de gage, tel celui du titulaire d'un nantissement sur marché de travaux publics, l'emportent sur ceux accordés au créancier qui a fait entrer un bien ou une valeur dans le patrimoine de son débiteur, tel, comme en l'espèce, le privilège conféré au fournisseur ou sous-traitant d'un entrepreneur de travaux publics ;

Que, par ces motifs, dont le second de pur droit, est substitué à celui visé par la troisième branche du moyen, l'arrêt se trouve légalement justifié du chef critiqué ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses deux dernières branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois.