Livv
Décisions

CA Bordeaux, 4e ch. com., 7 mars 2023, n° 22/02224

BORDEAUX

Arrêt

Autre

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Franco

Conseillers :

Mme Goumilloux, Mme Masson

Avocats :

Me Galinat, Me Perrin

J. C. Bordeaux, du 27 avr. 2022, n° 22M0…

27 avril 2022

EXPOSE DU LITIGE

L'indivision [B] est constituée entre M. [K] [B], agissant en qualité de mandataire de l'indivision, Mme [R] [B], Mme [Z] [B] épouse [G], Mme [U] [B] épouse [H], M. [F] [B], Mme [L] [B] et Mme [M] [B].

Par arrêt partiellement infirmatif en date du 13 janvier 2020, la cour d'appel de Bordeaux a fixé à la somme de 134 530,32 euros, à titre chirographaire et définitif, la créance des consorts [B] ([R] [B], [Z] [B] épouse [G], [U] [B] épouse [H], [F] [B], [L] [B] et [M] [B]), en qualité de bailleurs, au passif de la liquidation judiciaire de la SA Maison [V] [P], au titre d'un bail commercial.

'L'indivision' [B] a présenté une requête au juge-commissaire aux fins d'obtenir le paiement à titre provisionnel d'une quote-part de sa créance à hauteur de 60 000 euros.

Après avoir relevé que le solde disponible à la procédure était de 2 900 329,28 euros, que le montant du passif chirographaire s'élevait à 24 835 229,49 euros, et qu'il existait des instances en cours, pour lesquelles les frais de procédure privilégiés restaient à parfaire, le juge-commissaire a considéré que le montant des distributions à intervenir au profit des créanciers chirographaires ne pouvait être établi avec certitude, et a rejeté la demande de paiement provisionnel par ordonnance en date du 27 avril 2022.

Appel a été formé à l'encontre de cette ordonnance, selon déclaration en date du 6 mai 2022, formalisée au nom de 'Indivision [B]' (sic).

PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :

Par dernières écritures notifiées par RPVA le 29 juillet 2022, auxquelles la cour se réfère expressément, 'l'indivision [B], composée de M. [K] [B], agissant en qualité de mandataire de l'indivision [B] constituée entre :

Mme [R] [B], Mme [Z] [B] épouse [G], Mme [U] [B] épouse [H], M. [F] [B], Mme [L] [B] et Mme [M] [B]'.

demande à la cour de :

- vu l'article 2285 du code civil,

- vu l'article L. 643-3 du code de commerce,

- à titre principal,

- ordonner le paiement provisionnel d'une somme de 60 000 euros à l'indivision [B],

- à titre subsidiaire,

- ordonner le paiement provisionnel d'une somme de 30 000 euros à l'indivision [B],

- à titre infiniment subsidiaire,

- ordonner le paiement par provision de la somme maximale allouable à l'indivision [B].

Par dernières écritures notifiées par RPVA le 26 octobre 2022, auxquelles la cour se réfère expressément, la société [A], ès qualités de mandataire liquidateur de la société Maison André Beau, demande à la cour de :

- confirmer en toutes ses dispositions l'ordonnance rendue par M. le juge-commissaire à la liquidation judiciaire de la société Maison [V] [P] le 27 avril 2022, ayant rejeté la demande de paiement provisionnel de l'indivision [B].

L'ordonnance de clôture est intervenue le 24 janvier 2023 et le dossier a été fixé à l'audience du 07 février 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, des prétentions et des moyens des parties, il y a lieu de se référer au jugement entrepris et aux conclusions déposées.

Lors de l'audience, et par message électronique en date du 7 février 2023, les parties ont été invitées à fournir leurs observations sous forme de note en délibéré, sur le moyen soulevé d'office par la cour, tiré de la nullité encourue de la déclaration d'appel du 6 mai 2022, pour irrégularité de fond, sur le fondement des articles 117 et 120 alinéa 2 du code de procédure civile, comme formée pour le compte de 'l'indivision [B]', sans autre précision ni mention des personnes physiques appelantes, ni celle d'un mandataire ou d'un administrateur agissant pour le compte des indivisaires.

Par note en délibéré communiquée par message électronique en date du 20 février 2023, le conseil des consorts [B] fait valoir qu'en application de l'article 121 du code de procédure civile, la nullité éventuellement encourue est couverte par la mention du nom de tous les indivisaires [B] sur leurs conclusions d'appelants, notifiées le 29 juillet 2022.

Par note en délibéré communiquée par message électronique en date du 21 février 2023, la SCP [A] es qualité réplique que la déclaration d'appel régularisée par l'« Indivision [B] » est entachée de nullité pour défaut de qualité, et que les conclusions déposées par « L'indivision [B]» au soutien de son appel, faisant mention des personnes physiques composant cette indivision, est insusceptible de couvrir la nullité de la déclaration d'appel dès lors justement que ces conclusions ne constituent pas la réitération d'une déclaration d'appel mais uniquement l'expression de moyens.

MOTIFS DE LA DECISION

Selon les dispositions de l'article 901 du code de procédure civile, la déclaration d'appel est faite par acte, comportant le cas échéant une annexe, contenant, outre les mentions prescrites par les 2° et 3° de l'article 54 et par le cinquième alinéa de l'article 57, et à peine de nullité :

1° La constitution de l'avocat de l'appelant ;

2° L'indication de la décision attaquée ;

3° L'indication de la cour devant laquelle l'appel est porté ;

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l'appel est limité, sauf si l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

Elle est signée par l'avocat constitué. Elle est accompagnée d'une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d'inscription au rôle.

Selon les dispositions de l'article 54- 2° et 3° du code de procédure civile, à peine de nullité, la demande initiale mentionne :

1° L'indication de la juridiction devant laquelle la demande est portée ;

2° L'objet de la demande ;

3° a) Pour les personnes physiques, les nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de chacun des demandeurs ;

b) Pour les personnes morales, leur forme, leur dénomination, leur siège social et l'organe qui les représente légalement.

En l'espèce, la déclaration d'appel en date du 27 avril 2022 a été faite uniquement pour le compte de 'l'Indivision [B]', sans autre mention ou précision des noms et prénoms des personnes physiques appelantes, ni du nom et prénom du mandataire agissant pour le compte des indivisaires.

Il en résulte que cette déclaration d'appel, faite pour le compte d'une indivision (laquelle est dépourvue de la personnalité juridique), est entachée d'une irrégularité de fond au sens de l'article 117 du code de procédure civile, pour cause de défaut de capacité d'ester en justice.

En outre, l'irrégularité d'une procédure d'appel tenant à l'absence de personnalité juridique de l'appelante ne peut être couverte.

Il en découle que la nullité de fond affectant la déclaration d'appel du 27 avril 2022 n'a pu être régularisée par les conclusions notifiées le 29 juillet 2022 pour le compte de 'l'indivision [B], composée de :

M. [K] [B], agissant en qualité de mandataire de l'indivision [B] constituée entre :

Mme [R] [B], Mme [Z] [B] épouse [G], Mme [U] [B] épouse [H], M. [F] [B], Mme [L] [B] et Mme [M] [B].'

Le fait que le conseiller de la mise en état n'ait pas statué sur ce point est indifférent dès lors que la cour dispose du pouvoir de relever d'office cette nullité en application de l'article 120 alinéa 2 du code de procédure civile, et que cette nullité existe toujours eu moment où elle est amenée à statuer.

Il convient en conséquence de prononcer la nullité de la déclaration d'appel.

Echouant en leur recours, les consorts [B] doivent supporter in solidum les dépens d'appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Déclare nulle la déclaration d'appel faite au nom de l'indivision [B], le 6 mai 2022, pour défaut de capacité à ester en justice,

Condamne in solidum M. [K] [B], Mme [R] [B], Mme [Z] [B] épouse [G], Mme [U] [B] épouse [H], M. [F] [B], Mme [L] [B] et Mme [M] [B] aux dépens d'appel.