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Décisions

Cass. com., 19 septembre 2018, n° 17-17.600

COUR DE CASSATION

Arrêt

Rejet

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président :

M. Rémery

Avocats :

SCP Bouzidi et Bouhanna, SCP Foussard et Froger

Paris, du 21 févr. 2017

21 février 2017

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 21 février 2017), que par un acte du 28 avril 2008, la société par actions simplifiée LS investissements (la société LSI), présidée par M. Y..., s'est rendue caution envers la direction générale des impôts, représentée par le comptable du service des impôts des entreprises d'Aubervilliers, en garantie du paiement des dettes fiscales de la société Multiples, dont M. Y... était également le président ; que les sommes dues par la société Multiples n'ayant pas été intégralement réglées, l'administration fiscale a émis un avis de mise en recouvrement puis a demandé paiement à la société LSI, qui a contesté son engagement de caution ; que le directeur départemental des finances publiques de la Seine Saint-Denis ayant rejeté cette contestation, la société LSI l'a assigné aux fins de voir prononcer la nullité du cautionnement ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société LSI fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'annulation de l'acte de cautionnement, et celles tendant à être déchargée de son obligation à paiement alors, selon le moyen :

1°/ que la société LSI faisait valoir que l'engagement de caution donné en son nom par son dirigeant social était contraire à son objet social et avait pour unique but, sous couvert de se porter garante des dettes des deux autres sociétés dirigées par M. Y..., l'intérêt personnel de celui-ci ; qu'en retenant que M. Y... est non seulement le dirigeant de la société LSI mais aussi celui de la société Multiple, que l'engagement de caution souscrit par la société LSI a été approuvé par l'assemblée générale extraordinaire des associés le 7 avril 2008, que la société LSI ne démontre pas que la société Multiple, en faisant garantir ses dettes fiscales par l'engagement de caution du 28 avril 2009, aurait agi par interposition de M. Y... aux fins de faire cautionner des engagements de ce dernier sans rechercher si, eu égard aux exigences de l'administration fiscale de voir M. Y... cautionner les dettes de cette société, ce qu'il ne pouvait faire, l'engagement de la société LSI ne l'a pas été dans l'intérêt personnel du dirigeant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 225-43 et L. 227-12 du code de commerce ;

2°/ que la société LSI faisait valoir que l'engagement de caution donné en son nom par son dirigeant social était contraire à son objet social et avait pour unique but, sous couvert de se porter garante des dettes des deux autres sociétés dirigées par M. Y..., l'intérêt personnel de celui-ci ; qu'en retenant que M. Y... est non seulement le dirigeant de la société LSI mais aussi celui de la société Multiple, que l'engagement de caution souscrit par la société LSI a été approuvé par l'assemblée générale extraordinaire des associés le 7 avril 2008, que la société LSI ne démontre pas que la société Multiple, en faisant garantir ses dettes fiscales par l'engagement de caution du 28 avril 2009, aurait agi par interposition de M. Y... aux fins de faire cautionner des engagements de ce dernier, que l'objet social de la société inclut notamment toutes opérations industrielles,
commerciales ou financières, mobilières ou immobilières, pouvant se rattacher directement ou indirectement à son objet social qui est la participation directe ou indirecte à toute activité industrielle, civile ou commerciale, financière, mobilière ou immobilière en France et à l'étranger, sous quelque forme que ce soit et notamment sous forme de prise de participation au capital de toute société créée ou à créer pour en déduire que la société LSI ne démontre pas que la souscription de l'acte de cautionnement est contraire à son objet social, la cour d'appel qui se contente de l'affirmer a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

3°/ que la société LSI faisait valoir que l'engagement de caution donné en son nom par son dirigeant social était contraire à son objet social et avait pour unique but, sous couvert de se porter garante des dettes des deux autres sociétés dirigées par M. Y..., l'intérêt personnel de celui-ci ; qu'en retenant que M. Y... est non seulement le dirigeant de la société LSI mais aussi celui de la société Multiple, que l'engagement de caution souscrit par la société LSI a été approuvé par l'assemblée générale extraordinaire des associés le 7 avril 2008, que la société LSI ne démontre pas que la société Multiple, en faisant garantir ses dettes fiscales par l'engagement de caution du 28 avril 2009, aurait agi par interposition de M. Y... aux fins de faire cautionner des engagements de ce dernier, que l'objet social de la société inclut notamment toutes opérations industrielles, commerciales ou financières, mobilières ou immobilières, pouvant se rattacher directement ou indirectement à son objet social qui est la participation directe ou indirecte à toute activité industrielle, civile ou commerciale, financière, mobilière ou immobilière en France et à l'étranger, sous quelque forme que ce soit et notamment sous forme de prise de participation au capital de toute société créée ou à créer pour en déduire que la société LSI ne démontre pas que la souscription de l'acte de cautionnement est contraire à son objet social, sans rechercher si cet acte de cautionnement d'une société tierce était conforme à l'intérêt social de la société LSI, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

4°/ que la société LSI faisait valoir que l'administration fiscale avait parfaite connaissance de la contrariété à l'objet social en exigeant que soit remis lors de la signature de l'acte le procès-verbal de l'assemblée générale de la société LSI autorisant son président à se porter caution au profit de la société Multiple ; qu'en ne se prononçant pas sur ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

5°/ que la société LSI faisait valoir que la Haute juridiction posait en principe que la sûreté donnée par une société doit pour être valable, non seulement résulter du consentement unanime des associés, mais également être conforme à son intérêt social ; qu'en délaissant ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 227-6, alinéa 2, du code de commerce, la société par actions simplifiée est engagée envers les tiers même par les actes du président qui ne relèvent pas de l'objet social, à moins qu'il ne soit démontré que le tiers savait que l'acte dépassait cet objet ou qu'il ne pouvait l'ignorer compte tenu des circonstances ; que cette preuve ne pouvant résulter du seul fait que l'administration fiscale aurait exigé que soit remis, lors de la signature de l'acte de cautionnement, le procès-verbal de l'assemblée générale de la société LSI autorisant son président à se rendre caution de la société Multiples, la cour d'appel n'avait pas à se prononcer sur des conclusions inopérantes ;

Et attendu, en second lieu, que, serait-elle établie, la contrariété à l'intérêt social ne constitue pas, par elle-même, une cause de nullité des engagements souscrits par le président d'une société par actions simplifiée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Et sur le second moyen :

Attendu que la société LSI fait encore grief à l'arrêt de rejeter ses demandes tendant à être déchargée de son obligation à paiement alors, selon le moyen, qu'elle faisait valoir que la décision d'abandon des poursuites prise par l'administration fiscale a eu pour effet de la décharger de ses engagements à hauteur de la part contributive de la caution en faveur de laquelle le créancier a consenti un abandon de garantie ; qu'en décidant que la décision d'abandonner les poursuites par la direction régionale des finances publiques d'Alsace et du Bas-Rhin à l'encontre du seul M. Y..., ne saurait priver la société LSI de recours contre le débiteur garanti qui est la société Multiple et non M. Y... et ne saurait dès lors la décharger du paiement sollicité par l'administration fiscale, la cour d'appel qui se prononce par des motifs inopérants a violé l'article 2314 du code civil ;

Mais attendu que la sanction prévue par l'article L. 341-4 du code de la consommation, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance du 14 mars 2016, prive le contrat de cautionnement d'effet à l'égard tant du créancier que des cofidéjusseurs ; qu'il s'en déduit que le cofidéjusseur, qui est recherché par le créancier et qui n'est pas fondé, à défaut de transmission d'un droit dont il aurait été privé, à revendiquer le bénéfice de l'article 2314 du code civil, ne peut ultérieurement agir, sur le fondement de l'article 2310 du même code, contre la caution qui a été déchargée en raison de la disproportion manifeste de son engagement ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi.