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Décisions

CA Paris, 16e ch. A, 6 février 2008, n° 06/15555

PARIS

Arrêt

PARTIES

Demandeur :

MMG (SARL)

Défendeur :

COOPERATIVE NATIONALE D'ACHAT DES FRUITIERS DETAILLANTS - CNAFD (SA)

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Avoués :

SCP GAULTIER - KISTNER, SCP BERNABE - CHARDIN - CHEVILLER

Avocats :

Me Laurent HAY, Me Claude BARBIER

Paris, du 29 mars 2006

29 mars 2006

I - EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par acte du 10 juin 1999, la Sa COOPÉRATIVE NATIONALE D'ACHAT DES FRUITIERS DÉTAILLANTS (CNAFD) a consenti à bail à la Sarl MMG un local commercial situé [...], pour une durée de neuf années à compter du 1er juin 1999.

Cette convention, conclue moyennant un loyer mensuel hors charges de 12 000 francs, comporte une clause intitulée indexation ainsi rédigée :

Le loyer sera révisé le 1er juin 2002 sur la base de l'indice INSEE du 3ème trimestre 2001 comparé à l'indice de référence du 3ème trimestre 1998 qui est de 1 058.

Par lettre recommandée avec accusé de réception du 1er juin 2004, l'avocat de la CNAFD notifiait à la Sarl MMG une demande de révision du loyer à la somme annuelle de 26 400 € à compter du jour de cette lettre.

Par un mémoire notifié le 12 mai 2005, suivi d'une assignation du 8 septembre 2005, la CNAFD sollicitait la révision du loyer à la somme de 24 984,93 € à compter du 1er juin 2004.

La Cour statue sur l'appel interjeté le 25 août 2006 par la Sarl MMG et par son administrateur Me Renaud STACKLER dujugement rendu le 29 mars 2006 par le juge des loyers commerciaux du Tribunal de grande instance de Paris qui a :

Fixé à 24.984,93€ en principal par an à compter du 1er juin 2004, le loyer du bail révisé entre la Sa CNAFD et la Sarl MMG,

Condamné la SARL MMG à payer à la SA CNAFD les intérêts au taux légal sur les loyers arriérés depuis le 1er Juin 2004, à compter du prononcé de la présente décision,

Ordonné l'exécution provisoire,

Dit n'y avoir lieu à application de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Condamné chaque partie à supporter la moitié des dépens.

Par jugement rendu le 19 juin 2006, le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire et nommé Me STACKLER en qualité d'administrateur judiciaire et Me BELHASSEN en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement rendu le 15 mars 2007, le même tribunal a arrêté un plan de redressement par voie de cession du fonds de commerce de la société MMG et a maintenu les administrateur et mandataire judiciaires.

Dans leurs dernières conclusions du 25 septembre 2007, la Sarl MMG et Me Renaud STACKLER demandent à la Cour de :

Réformer en toutes ses dispositions le jugement, et statuant à nouveau,

Dire nulle et de nul effet la lettre de proposition de loyer révisé du 1er juin 2004,

Déclarer en conséquence irrecevable et mal fondée la CNAFD en toutes ses demandes, fins et écritures,

L'en débouter,

Condamner la CNAFD au paiement d'une somme de 1 000 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile et en tous les dépens de première instance et d'appel dont le recouvrement sera poursuivi par la SCP GAULTIER KISTNER

Dans ses dernières conclusions du 8 janvier 2007, la Sa CNAFD demande à la Cour de :

Confirmer le jugement en toutes ses dispositions, y ajoutant,

Condamner la société MMG à lui payer une somme de 1500 € sur le fondement de l'article 700 du nouveau code de procédure civile,

Débouter la société MMG de toutes ses demandes, fins et conclusions,

La condamner aux entiers dépens de première instance et d'appel dont le montant sera recouvré par la Scp BERNABE CHARDIN CHEVILLER, avoué.

Dans ses dernières conclusions du 29 octobre 2007, Me BELHASSEN, es qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la Sarl MMG, demande à la Cour de :

Donner acte à Maitre BELHASSEN ès qualité de ce qu'elle s'en rapporte à justice sur la demande de fixation du loyer révisé,

Infirmer la décision entreprise du chef des condamnations en paiement prononcées à l'encontre de la société MMG,

Condamner tout succombant aux entiers dépens dont le montant pour ceux la concernant pourront être recouvrés par 1a SCP PETIT LESENECHAL, Avoué.

II - MOTIFS DE L'ARRÊT

Considérant que pour soutenir que la lettre de proposition du loyer révisé au 1er juin 2004 serait nulle, la Sarl MMG fait d'abord valoir qu'une première révision triennale étant intervenue au 1er juin 2002, celle formée le 1er juin 2004, qui ne pouvait intervenir avant le délai de trois ans expirant le 1er juin 2005, serait prématurée ;

Mais considérant que s'il n'est pas contesté que le loyer a été réévalué au 1er juin 2002, il est aussi acquis que son montant a été celui de l'indexation contractuelle ;

Que si le locataire allègue que ce montant aurait été retenu à la suite d'une demande en révision du bailleur dont celui-ci se serait ensuite ravisé, il ne produit aucune pièce à l'appui de cette prétention, notamment pas la demande en révision invoquée ;

Qu'il sera dès lors dit que la réévaluation du loyer au 1er juin 2002 a été la conséquence du jeu de la clause d'échelle mobile contractuelle et non celle d'une demande de révision dans les formes de l'article L 145-38 du code de commerce ;

Que le bail ayant eu effet au 1er juin 1999, il convient de constater que la demande de révision du 1er juin 2004, qui a été formée trois ans, au moins, après la date d'entrée en jouissance du locataire, n'est pas prématurée ;

Considérant que la Sarl MMG soutient, ensuite, que la lettre de proposition du loyer révisé au 1er juin 2004 serait nulle en ce qu'elle émanerait d'un avocat et non du bailleur ou d'un administrateur de biens ;

Que, cependant, la CNFAD indiquant avoir conféré à son conseil un mandat comportant celui d'adresser une demande de révision à la société locataire, ce moyen est aussi infondé ;

Considérant, enfin, que la Sarl MMG soutient que la lettre du 1er juin 2004, qui fait état d'une 'proposition' de loyer, est nulle comme ne pouvant être considérée comme formant une demande ;

Mais considérant que ce courrier, qui 'notifie par la présente une demande de révision de loyer (...)' et 'propose de porter le nouveau loyer à la somme annuelle de 26 400 €' constitue très exactement une demande de révision au sens de l'article L 145-37 du code de commerce, le terme 'propose' étant justifié comme amorçant la possibilité d'une discussion et d'un accord avant la phase strictement judiciaire ;

*

Considérant que c'est dès lors très exactement en se référant aux indices du coût de la construction publiés par l'Insee lors de la signature du bail et lors de la demande en révision, que le premier juge a déterminé un loyer révisé à compter du 1er juin 2004 à la somme de 24 984,93 € ;

Que le jugement sera dès lors confirmé en toutes ses dispositions, sauf, compte tenu de l'ouverture de la procédure de redressement judiciaire, en ce qu'il a condamné le locataire au paiement d'intérêts ;

Que la sarl MMG qui succombe supportera les dépens d'appel ;

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant en dernier ressort,

En présence de Me Renaud STACKLER administrateur judiciaire et de Me BELHASSEN, es qualité de mandataire judiciaire au redressement judiciaire de la Sarl MMG, désignés par jugement, en date du 19 juin 2006, du tribunal de commerce de Paris,

I Confirme le jugement en toutes ses dispositions, sauf en ce qu'il a condamné la SARL MMG à payer à la SA CNAFD les intérêts au taux légal sur les loyers arriérés depuis le 1er Juin 2004, à compter du prononcé du jugement,

II Réformant de ce seul chef, déboute la Sa CNAFD de cette demande ;

III Condamne la Sarl MMG aux entiers dépens d'appel dont le montant sera recouvré par les Scp BERNABE CHARDIN CHEVILLER et PETIT LESENECHAL, avoués ;

IV Déboute les parties de leurs autres demandes.